Pour une sauvegarde des langues en danger au Sénégal

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Abdoulaye Pouye
Pour une sauvegarde
des langues en danger au Sénégal
Description synchronique du saafi-saafi
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A ma fille Fatou Pouye
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Remerciements
La réalisation de cet ouvrage a été possible grâce à la collaboration de :
– M. Momar Cissé dont les conseils et les remarques nous ont été d’un grand
apport dans l’orientation et la réalisation de cette étude. Nous sommes conscients
de notre dette de reconnaissance à son égard. Qu’il trouve donc ici l’expression de
notre profonde gratitude ;
– M. Chérif Mbodj, directeur du CLAD, d’avoir guidé nos premiers pas dans
la recherche linguistique, et d’avoir mis à notre disposition la thèse qu’il a lui-même
faite sur le saafi-saafi. Cette thèse non seulement nous a éclairé sur certaines
questions, mais aussi a constitué une matière à discuter dans l’élaboration de cet
ouvrage ;
– Edilivre d’avoir bien voulu publier notre manuscrit. Nous remercions très
sincèrement toute l’équipe éditoriale de la diligence et de la pragmatique avec
lesquelles elle a mené cette édition ;
– Nos frères et amis MM. Abdoulaye Pouye, Mbaye Diouf, Alioune Pouye et
madame Mariama Ndione dont leur soutien a été d’une valeur inestimable dans la
collecte et la vérification de nos données ;
– Toutes les personnes qui, de quelque façon que ce soit, nous ont accompagné
dans la réalisation de cette œuvre.
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Préface
Comme la grande majorité des pays africains, le Sénégal est un pays multilingue
où cohabitent, certes avec des fortunes diverses, mais de manière harmonieuse, plus
d’une trentaine de langues africaines. Celles-ci, vecteurs de communication
quotidienne pour des communautés linguistiques nationales données, se répartissent
entre le groupe Ouest-Atlantique, le groupe Mandé et le groupe Afro-asiatique.
Les langues de ce patrimoine linguistique sénégalais n’ont pas le même
dynamisme : certaines sont en turgescence, d’autres en creux. Monsieur Abdoulaye
POUYE a choisi, dans le présent ouvrage qui suscite un intérêt soutenu du début à
la fin, de s’intéresser au saafi-saafi, une langue qui appartient à la deuxième
catégorie. Ce faisant, en bon linguiste soucieux du devenir des langues du monde,
M. POUYE s’est lancé à une importante œuvre de sauvegarde d’une langue en
grande perte de vitalité. Et en cela, il mérite toute notre considération.
La description, remarquablement structurée en chapitres, est menée de fort belle
manière. L’introduction, après une remarque liminaire sur l’état de description du
saafi-saafi, présente la population et la langue saafi.
Le chapitre 1, intitulé Cadre théorique et conceptuel, est consacré à des éléments
indispensables d’un travail scientifique : la problématique, le contexte de la
recherche, les questions de recherche, les objectifs, les hypothèses, la revue critique
des travaux sur le saafi-saafi, la méthodologie.
Le chapitre 2 fait une description phonologique du saafi-saafi, ce, à travers une
étude et de phonologie paradigmatique et de phonologie syntagmatique. La partie
phonologie paradigmatique a permis d’identifier, de définir, de classer les phonèmes
consonantiques et les phonèmes vocaliques du saafi-saafi. La partie syntagmatique a
déterminé la distribution, la combinaison des phonèmes, les unités accentuelles, les
syllabes, l’accent et les signes démarcatifs de la langue décrite. Les résultats des
différentes analyses menées sont récapitulés sous forme de tableaux convenables et
pertinents : tableaux phonologiques des consonnes et des voyelles, tableaux de la
fréquence des phonèmes, tableau des neutralisations et archiphonèmes, tableaux des
distributions des phonèmes et des séquences.
Le chapitre 3 est consacré à la lexicologie des bases. M. POUYE y procède à
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l’identification des différentes structures morphologiques des bases. De façon
logique et bien menée, il identifie et décrit les bases simples et leurs différentes
structures syllabiques, puis les bases complexes et leurs procédés de formation
(dérivation, composition, réduplication). Les différentes bases et leurs structures
syllabiques sont récapitulées, de façon réussie, sous forme de tableau leur donnant
ainsi une meilleure visibilité.
Le chapitre 4 a décrit le système nominal à travers l’étude du nom, des pronoms
personnels et non personnels, des possessifs déterminants et des possessifs
substituts, des numéraux. L’auteur y a fait preuve de clairvoyance et de pertinence
en distinguant les différents emplois des unités lexicales décrites.
Le chapitre 5 qui s’est intéressé au système verbal, a présenté, de façon assez
bien agencée, la structure et la typologie du verbe, les voix et les valences du verbe,
les marques amalgamées du temps et la négation dans les différentes modes.
Le chapitre 6 consacré à la phrase a procédé, dans un premier temps, à l’analyse
des constituants et de la structure de base de la phrase simple (sujet-prédicat-objet),
et dans un second temps à l’analyse des différents procédés de construction des
phrases complexes (coordination et subordination d’une part, et la communication,
la permutation, la réduction, l’expansion, les transformations d’autre part). Cette
étude de la phrase s’est terminée par la description de la topicalisation simple, de
l’enchaînement des topiques, de la relation entre topicalisation et voix passive et
réfléchie, de la focalisation du sujet, du verbe, de l’objet, du circonstant, et enfin de
la relation entre focalisation et voix active et voix passive en saafi-saafi.
L’étude présente quatre annexes que nous trouvons intéressants du fait qu’elles
constituent un corpus utile pour l’appréciation des analyses effectuées dans l’ouvrage.
Comme on le constate, cette œuvre, fruit d’une longue et patiente préparation,
présente une description linguistique assez complète du saafi-saafi. Il y a une
logique dans la progression de cette description et une cohérence entre les intitulés
des chapitres et leurs contenus. Les analyses faites sont justes et pertinentes. On
peut dire de même des résultats des différentes descriptions et analyses qui sont
méthodiquement posés.
Bref, le travail de Monsieur Abdoulaye POUYE est une contribution appréciable
à la description de la langue saafi-saafi et, au-delà, à l’œuvre de réhabilitation des
langues nationales du Sénégal. Il démontre aussi que l’auteur a toutes les qualités d’un
bon chercheur en sciences du langage, et plus particulièrement en linguistique. Nous
lui souhaitons bon vent.
Momar CISSE
Professeur titulaire des universités
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Abréviations
ADJ. : Adjectif
ADV. : Adverbe
ASS. : Associatif
B. : Base
BATT. : Battement
BEN. : Bénéfactif
C. : Consonne
CENTF. / CENTP. : centrifuge / centripète
CL. : Classificateur
CONST. : Constrictive
MED. : Médiane
MTA. : Marque de temps et d’aspect
MV. : Modalité verbale
NEG. : Négation
N. : Nom
NC. : Nasale suivie de consonne
O. : Objet
PASS. : Passif
PL. : Passé lointain
POSS. : Possessif
PP. : Passé proche
P. P. : Participe passé
PR. : Passé du récit
PR.C. : Présent conditionnel
PR.P. : Présent progressif
PRON. : Pronom
INJ. : Injonctif
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INTERJ. : Interjection
INTR. : Intransitive
DEM. : Démonstratif
DEP. : Dépréciatif
DER. : Dérivatif
DET. : Déterminant
EX. : Exemple
FOC. : Focalisation
FUT. : Futur
GLOTT. : Glottalisée
PREF. : Préfixe
PREP. : Préposition
PRES : Présentatif
PROH. : Prohibitif
PROJ. : Projection
REC. : Réciprocité
RED. : Redoublement
REF. : Réfléchi
S. : Sujet
Tr. : Transitive
V. : Verbe
VA. : Voix active
VP. : Voix passive
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Symboles employés
[ ] : Transcription phonétique.
≠ : Limites du morphème.
~ : Une variante.
+ : Une addition entre deux ou plusieurs termes.
– : Ce signe sépare les deux termes d’un mot composé ; il occupe également la
position de l’élément postposé ou antéposé employé.
… : Morphème discontinu.
→ : Donne.
Cf. : Confère.
* : Forme non attestée.
S1 : Suffixe simple
S2 : Suffixe combiné
S0 : L’énonciateur
S0’ : L’allocutaire
T’ : Repère non déictique situé dans le passé.
T’’ : Repère non déictique situé dans le futur.
T0 : Lieu et temps de l’énonciation.
T0’ : Lieu et temps du procès qui coïncident avec le repère T0.
T1 : Lieu et temps du procès situés avant T0.
T2 : Lieu et temps du procès situés après T0.
X : Circonstant de lieu ou de temps
∑ : ce symbole regroupe les termes d’une formule.
1s et 1p : Première personne du singulier et première personne du pluriel
2s et 2p : Deuxième personne du singulier et deuxième personne du pluriel
3s et 3p : Troisième personne du singulier et troisième personne du pluriel
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Introduction
0.1 Remarque liminaire
Le saafi-saafi reste, à l’état actuel, une langue peu décrite. Les seuls travaux qui
lui sont consacrés sont des recherches universitaires et portent essentiellement sur
la phonologie et la morphologie : Ch. Mbodj (1984), M. L. Dia (1997), A. Pouye
(2007 ; 2008), ce qui est d’ailleurs une démarche conséquente, parce qu’avant
d’entreprendre une étude syntaxique, « il faut que la phonologie et la structure de
la langue aient été établies au préalable…1 ». En fait, Il s’agit donc aujourd’hui, pour
nous, de poursuivre ces recherches dans une perspective plus large où nous
donnerons lieu à une description globale du saafi-saafi qui réunira phonologie,
morphologie, syntaxe et énonciation. L’étude que nous nous proposons de faire ici
sera composée de six chapitres, d’une bibliographie constituée essentiellement
d’ouvrages généraux, d’ouvrages spécifiques et de travaux universitaires, et d’une
partie annexe où seront indiqués un extrait du questionnaire utilisé, les données
obtenues à partir de ce questionnaire, un texte de conte en langue saafi et un extrait
du lexique.
0.2 Population et langue saafi
Les saafi sont plus connus au Sénégal sous le nom de sérère-saafeen. Ils
comptent environ 25000 âmes sur 60000 âmes pour l’ensemble du groupe cangin2.
Ils peuvent aujourd’hui être estimés à plus de 46000 âmes3.
S. Robert (1991 : 13).
Les sous-ethnies sérères, Saafi, Ndut, Noon, Léhar et Palor occupant la partie sud de Thiès. Ce
vocable cangin a été employé par Pichl (1966) pour appeler non seulement les parlers de ces peuples
mais aussi et surtout établir une distinction entre les langues de ces cinq groupes ethniques et le sérère
parlé au Sine et au Saloum que nous appellerons tout simplement ici sous le terme sérère-sine.
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Cette estimation est basée sur le taux d’accroissement annuel affecté à la région de Thiès ; selon
l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (A.N.S.D), dans son étude sur la « situation
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D’après la tradition orale la plus admise dans cette communauté saafi, ce
peuple trouve son origine au Tékrur4. Les saafi et les sérères-sine auraient appartenu
à une même communauté saafi qui y aurait cohabité pendant des siècles avec les
jola, les peul, les mandingue, etc. La raison principale de sa division en saafi et en
seh5 viendrait de l’introduction de l’islam par les almoravides au Tékrur. Les saafi
migrent vers le sud et s’installent définitivement au sud de Thiès ; les seh migrent
vers le sud-est et occupent progressivement le sine et le saloume. Chacune de ces
deux communautés (saafi et seh) va, sous sa propre bannière, se créer une culture,
une langue et une nouvelle histoire.
Ainsi la communauté saafi aurait connu une autre division en son sein qui
donnerait naissance aux communautés palor, ndut, léhar et noon.
Cette hypothèse est fortement soutenue à travers les appellations que les saafi
donnent à ces différents groupes ethniques et linguistiques précités et que nous
pouvons observer à travers ce tableau.
Saafi
Appellations par les saafi
Appellations au Sénégal
Saafi-noon
Noon
Saafi-ndut
Ndut
Saafi-waro
Palor
Saafi-léhar
Léhar
Saafi-seh
Sérère-sine
Ce double apparentement ethnique et linguistique que témoignent ces
appellations aurait trouvé son origine dans le proto-saafi6.
Les saafi habitent dans un espace géographique appelé saafeen7 et parlent le
saafi-safi.
– L’espace compte environ un effectif de trente villages et partagé entre les régions
de Dakar et de Thiès conformément au découpage administratif des années 1970. Il est
économique et sociale du Sénégal en 2010 » publiée en Décembre 2011, ce taux est de 2,4 % de 1988 à
2000.
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Tékrur est l’actuel Fouta qui est situé adminitrativement aujourd’hui dans la région de Podor.
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Ce terme désigne les sérère-sine.
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Pour reprendre Senghor qui a parlé à propos du proto-sérère. Dans la préface de l’ouvrage « La
civilisaion sereer (cosaan) » d’Henri Gravrand, Senghor pense que « les peuples du groupe ‘sénégaloguinéen’ avaient commencé par parler la même langue, le proto-sérère. Il est probable que c’est au
cours de leur premier exode, ou immédiatement après, qu’ils avaient commencé, chacun pour soi, à
en faire dériver des dialectes, qui devaient devenir des langues différentes, mais manifestement
apparentées, que nous parlons aujourd’hui.
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Les termes Saafi, saafi-saafi, saafeen sont les appellations que ce peuple donne respectivement à leur
identité ethnique, à leur langue et à leur terroir. Ces appellations sont toutes fondues dans le vocale
saafeen utilisé par les autres pour désigner et l’ethnie, et la langue, et le terroir.
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compris entre une grande base qui va de Diass à Popengine et se prolonge sur l’axe
Popengine-Diobass. Sa petite base située à un kilomètre de Diamniadio couvre l’axe
Dougar-Sébikhotane. Il est difficile de circonscrire les saafi dans un même espace
géographique, du fait de la présence de quelques foyers linguistiques non saafi dans sa
zone de prédilection, et d’une forte communauté saafi dans le pays Palor8.
– La langue appartient à la grande famille Niger-Congo9 du groupe Ouestatlantique. Elle a été pendant longtemps soit confondue avec le sérère-sine, soit
considérée à tort comme un dialecte de cette langue. C’est en 1966, que W. J. Pichl,
dans un article10, fait une remarque sur le complexe ethnique et linguistique sérère
et distingue bien le saafi-saafi du sérère-sine.
Le saafi-saafi présente des variations qui se réalisent sensiblement dans les
zones de Diobass, de Sindia, de Sébikhotane, de Diass et de Boukhou ; ces variations
sont le plus souvent phonologiques (ex. miɗa~meɗa « sel ») ; les quelques
différences relevées au lexique (ex. ɓoo~ɗif « nous) sont pratiquement connues par
les locuteurs. Ce qui permet donc une parfaite intercompréhension.
Carte du Groupe Cangin
Cf. P. D’alton (1983 : 9)
Nous nous reférons ici à la classification de Greenberg. Cette appartenance du saafi-saafi à ce groupe
de langues est purement analogique puisque seul le noon, parmi toutes les langues cangin, a été cité
dans cette étude.
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« The cangin group : a language groupe in northern Senegal » ; dans cet article, Pichl fait une remarque
sur l’hétérogénéité du groupe ethnique et linguistique sérère et propose les appellations sérer (pour la
branche majoritaire sérère) et cangin (pour les langues saafi-saafi, noon, ndut, léhar et palor).
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0.3 Présentation du sujet et de son domaine
0.3.1 Justification du choix du sujet
Le saafi-saafi est une langue peu étudiée ; et les seuls travaux qui lui sont
consacrés se limitent fondamentalement à la phonologie et à la morphologie. Compte
tenu de l’état actuel des travaux sur cette langue, nous avons jugé nécessaire d’initier
un projet réalisable en trois phases dont la première consistait à étudier la phonétique,
la phonologie et la morphologie des bases ; la deuxième permettrait de faire une
esquisse d’investigation en syntaxe et en énonciation, et la troisième et dernière phase
s’engagera à faire une description complète du saafi-saafi. Cette description que nous
nous proposons ici se tourne résolument vers des préoccupations d’ordre morphosyntaxique voire énonciatif. Elle aura l’intérêt de conjuguer non seulement des
domaines différents (phonologie, morphologie, morpho-syntaxe) mais aussi de
convoquer des démarches qui sont à la fois distinctes et complémentaires consistant
à analyser les faits tant du point de vue syntaxique que du point de vue énonciatif. La
syntaxe, à notre avis, ne donne que des explications attachées aux faits de langue ; en
revanche, l’énonciation, en dehors des considérations syntaxiques, s’intéresse plus
aux contextes d’existence des faits de langue et moins aux faits eux-mêmes et à leur
fonction. Cette étude sera donc une gymnastique à la croisée du discours et de la
syntaxe (approche syntaxico-énonciative).
0.3.2 Justification du choix de la langue
La principale raison qui nous a poussé à mener des recherches sur le saafi-saafi
émane de l’état actuel des travaux sur cette langue. Le saafi-saafi présente une
bibliographie très sommaire, et les seuls travaux qui lui sont consacrés portent
essentiellement sur la phonologie et la morphologie. Ce travail aura donc un intérêt
tout particulier ; parce qu’il permettra d’abord de passer en revue les études déjà
faites sur ces domaines ; et de s’investir ensuite dans la syntaxe et dans l’énonciation
afin de donner lieu à une description beaucoup plus complète et beaucoup plus
exhaustive sur cette langue. Au-delà de ce que cette étude pourra apporter en termes
de contribution à la compréhension des mécanismes de fonctionnement du saafisaafi, on constatera sans doute un apport précieux quant à la connaissance du
patrimoine culturel (avec la collecte de textes saafi), ainsi que le support
pédagogique qu’elle constituera au service de l’apprentissage de cette langue.
0.4 Présentation du travail
Cette étude s’inscrit effectivement dans une perspective synchronique qui se
propose de décrire l’état actuel de cette langue au lieu de tenter d’expliquer les
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différentes étapes de son évolution. Elle se donne donc pour objectif de contribuer
à la description du saafi-saafi et de fournir en même temps une documentation et
une matière à comparaison pour les recherches orientées particulièrement vers les
langues cangin. Ainsi, la description proposée ici se fera à travers six chapitres
consacrés à la phonologie, à la morphologie, aux structures syntaxiques et
énonciatives.
Le chapitre 1 nous permettra de cadrer nos théories et nos concepts. Il
comportera essentiellement quatre sections. La section 1.1 posera la problématique
où il sera question d’élucider non seulement le contexte de la recherche, c’est-à-dire
montrer les raisons qui nous ont poussé à entreprendre ce travail de recherche sur
la langue saafi ; mais aussi de poser dès à présent toutes les questions de recherche
auxquelles nous tenterons de répondre à travers les différents chapitres de ce travail.
La section 1.2 sera la partie où nous nous fixerons les objectifs à atteindre au terme
de cette étude ; ces objectifs seront formulés en termes d’hypothèses de recherche.
La section 1.3 va porter sur la méthodologie que nous avons adoptée. Nous
montrerons ici comment nous avons collecté nos données et comment nous les
avons traitées et analysées. La section 1.4 fera une revue critique sur les travaux
universitaires précédents. Cette revue critique portera sur les travaux de Ch. Mbodj
(1984) et de M. Dia (1997).
Le chapitre 2 sera consacré à la phonologie du saafi-saafi ; nous y étudierons
la phonologie paradigmatique et la phonologie syntagmatique. C’est ainsi que
l’étude des phonèmes sera faite selon les rapports qu’ils entretiennent entre-eux tant
dans leur exclusion mutuelle que dans leur combinaison. En phonologie
paradigmatique, par la méthode de la commutation, nous identifierons les
phonèmes et les variantes de phonèmes ; ces phonèmes seront par la suite définis
puis classés. Il s’agira aussi, dans cette partie, de rechercher le système de corrélation
de ces phonèmes, ainsi que les cas de neutralisation relevés dans les oppositions
entre certains phonèmes. En phonologie syntagmatique, les phonèmes seront
étudiés dans leur distribution dans le monème et dans les différentes combinaisons
qu’ils peuvent en avoir ; l’étude de l’unité accentuelle nous permettra d’examiner et
la syllabe et l’accent. Nous terminerons cette partie par relever les signes dont on se
sert parfois pour connaître le début ou la fin d’une unité accentuelle ou d’une
syllabe.
Dans ce travail, nous nous sommes particulièrement inspiré de la méthode
d’investigation qu’André Martinet a appliquée dans son ouvrage « la description
phonologique avec application au parler franco-provençal d’hauteville (Savoie)»11.
Le chapitre 3 s’intéressera à la lexicologie des bases ; l’analyse lexicologique
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2
Voir les références à la bibliographie.
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que l’on fera sur les bases du saafi-saafi consistera d’abord à identifier les différentes
structures morphologiques des bases simples, puis les catégoriser et, enfin étudier
les procédés de dérivation, de composition et de réduplication intervenant dans la
formation des unités significatives, c’est-à-dire un procédé qui permettra, à partir
d’une base simple, de créer une base complexe qui peut être soit dérivée, soit
composée, soit rédupliquée. Il sera aussi intéressant d’examiner les changements
formels qu’occasionnent parfois ces processus de lexicalisation.
Le chapitre 4 va être consacré à la description du système nominal du saafisaafi ; il comportera essentiellement quatre grandes sections qui porteront
recpectivement sur le nom, sur les pronoms, sur les possessifs et sur les numéraux.
Cette étude nous permettra de voir sans doute les éléments fondamentaux autour
desquels est bâti donc ce système.
Ce travail se proposera de traiter dans une section les pronoms personnels et
les pronoms non personnels, dans une autre encore les possessifs (les déterminants
possessifs et les pronoms possessifs). Les pronoms personnels et non personnels
sont les substituts du nom ; alors que les possessifs sont toujours rattachés au nom
ou à l’indice pronominal. En adéquation avec cette réalité linguistique, il convient
mieux de traiter ces notions séparément et de les désigner sous les appellations
respectives de pronoms et de possessifs.
Le chapitre 5 abordera le système verbal en l’inscrivant dans une perspective
syntaxico-énonciative : l’analyse syntaxique combinée d’explications puisées du
discours permettra de fournir plus d’informations sur les faits de langue.
Ce chapitre sera consacré à l’étude du verbe, du temps-aspect, des modes et de la
négation. Dans la première section, il s’agira de montrer la structure et la typologie
du verbe, les voix et les valences qu’il est susceptible d’avoir dans la phrase. Nous
étudierons dans une même section le temps et l’aspect ; les morphèmes utilisés pour
exprimer ces deux notions sont pratiquement indissociables ; c’est pourquoi il
conviendra dans cette étude de parler de marques de temps-aspect (MTA), et non
marques de temps ou marques d’aspect. Néanmoins, il sera évidemment possible de
les dissocier en les analysant sous deux angles différents : le temps va reposer sur une
opposition chronologique entre le déictique et le non déictique ; l’aspect va s’analyser
à la façon dont le temps déictique sera conçu. Cette conception peut reposer
fondamentalement sur l’accomplissement ou le non accomplissement de ce temps.
On donnera dans une section une étude réservée aux modes ; ici, on examinera
successivement l’assertion, le présentatif et l’injonctif. L’examen des modes nous
permettra de comprendre les possibilités de conjugaison entre temps et mode. Nous
terminerons ce chapitre par l’étude de la négation ; on notera pour chaque mode une
valeur de négation spécifique : la négation de l’assertion, la négation du présentatif, la
négation de l’injonctif.
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Le chapitre 6 portera sur l’étude de la phrase ; il comportera essentiellement
quatre grandes sections. Les sections (6.2) et (6.3) s’intéresseront à l’analyse de la
phrase simple et de la phrase complexe. La phrase simple sera analysée par rapport
à ses différents constituants, mais aussi par rapport à sa structure de base, structure
génératrice de l’ensemble des constructions phrastiques. L’analyse de la phrase
complexe se fera par l’étude des procédés par lesquels on construit une phrase
complexe à partir d’une phrase simple. Les procédés qui interviennent dans la
construction de la phrase complexe sont la coordination et la subordination. La
section (6.5) sera consacrée aux procédures syntaxiques telles que la commutation,
la permutation, la réduction, l’expansion et les transformations. La section (6.6) fera
une étude sur la topicalisation et la focalisation ; cette partie permettra de
comprendre les divers procédés que le saafi-saafi utilise pour briser la structure
canonique qui est dans l’ordre sujet-verbe-objet (SVO).
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