Journée d`études doctorants à l`Université d`Angers – 12 novembre

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Journée d’études doctorants à l’Université d’Angers – 12 novembre 2014
1914
Un siècle s’est écoulé depuis 1914. La transmission de la mémoire a gardé étonnamment proches de
nous les événements de cette année et de celles qui l’ont suivie. Pourtant 100 années – ou quatre
générations – ont passé. Il est toujours symbolique de s’intéresser aux comptes ronds, mais c’est
aussi l’occasion de prendre la mesure de la distance. Si la guerre que l’on a nommée « Première
Guerre Mondiale », ou « Grande Guerre » est évidemment l’événement qui isole 1914 de la
chronologie, ou plutôt la période 1914-1918, nous avons souhaité par cette journée d’études
replacer cette année dans une continuité : la soulager d’une part du poids exclusif d’année de la
déclaration de guerre, et la considérer dans une évolution tant historique qu’artistique, littéraire,
géographique, économique ou culturelle.
A première vue, 1914 est une année contrastée : ancrée dans une période rétrospectivement jugée
comme heureuse, et nommée a posteriori la « Belle Epoque », 1914 en signe également la fin. La
richesse culturelle de la période antérieure semble produire un contraste fort avec l’âpreté des
années qui la suivent. Mais nous avons voulu prendre du recul sur ces reconstructions
chronologiques qui sont pour l’essentiel élaborées après la guerre et s’inscrivent surtout dans un
contexte français.
Comment parler de 1914 sans faire la part du lion à la déclaration de guerre, à la genèse des tensions
diplomatiques qui affectent l’Europe centrale et les puissants empires coloniaux d’alors ? Comment
parler de 1914, aussi, sans tomber dans la caricature d’une année qui serait la fin d’une époque, le
tournant de la modernité, l’avènement d’un monde nouveau ? L’approche que nous avons choisie se
veut factuelle, critique et interdisciplinaire. A travers cette journée, nous souhaitons poser un regard
critique sur des témoignages de natures diverses.
Et pour témoigner de la complexité d’une période, même restreinte à une seule année, il s’agit
d’envisager des points de vue aussi diversifiés que possible. La condition sociale est une première
approche : à travers le prisme des femmes, des enfants, de la famille, des mondes du travail, on
révèle une première image de la société dans ses acteurs les plus nombreux. Mais l’époque est aussi
au rayonnement culturel et intellectuel, à la tribune journalistique, au militantisme, et plus encore
avec la préparation de la guerre. La littérature fournit ainsi de nombreux exemples d’artistes,
engagés ou non, en France et dans d’autres pays, belligérants ou non. Les thèmes du pacifisme et de
l’antimilitarisme pourront être abordés, tout comme ceux du patriotisme ou de la conscience
nationale. A la littérature de propagande, qui met en œuvre un "bourrage de crâne" nationaliste que
dénoncera Julien Benda dans La trahison des clercs, s'oppose en effet une palette de textes qui
déclinent différentes postures face à la guerre. Dès 1914, Romain Rolland est l'un des premiers à
jouer le rôle du dissident en publiant Au-dessus de la mêlée, pour battre en brèche le conformisme
belliciste. L'union sacrée des écrivains reste donc relative, et les interprétations de la guerre se
révèlent très vite multiples, que l'on pense aux lectures mystiques de nombreux écrivains catholiques
comme Léon Bloy ou à l'exaltation de la puissance régénératrice de la guerre par les futuristes, qui
considèrent la guerre comme le paradigme de la modernité. Qu'ils soient au feu ou à l'Arrière, tous
les grands écrivains de l'époque apportent leur témoignage, leur vision de cet événement inouï, du
médecin des tranchées Georges Duhamel, qui publiera Vie des martyrs 1914-1916, à Proust dans Le
Temps Retrouvé, d'Henri Barbusse ou Roland Dorgelès au normalien Maurice Genevoix qui écrira
Ceux de 14. La notion de témoignage mérite toutefois d'être interrogée, comme l'a montré Jean
Norton Cru dans son ouvrage de référence, Témoins, en proposant une classification des récits en
fonction de leur plus ou moins grande fiabilité, du degré de réécriture qu'ils opèrent. Les textes écrits
après la guerre, mais qui consacrent plusieurs chapitres à 1914, trouveront également toute leur
place dans cette journée, par exemple Les Cloches de Bâle d'Aragon ou 14 de Jean Echenoz.
A travers ces questions, on peut envisager le rapport qu’entretient la société française de 1914 à son
passé, par exemple les pertes territoriales consécutives à la guerre de 1870. Ces mêmes pertes
engendrent une réflexion sur la « nationalité » au sens propre, et sur celle des frontières. Sur le
thème du nationalisme, le passé récent des Français de 1914, c’est aussi l’affaire Dreyfus et les effets
qu’elle produit sur l’ensemble du corps social. Si le jeu politique est travaillé par les tensions
diplomatiques – et les nationalismes le prouvent – la plupart des questions soulevées ci-dessus
peuvent l’être dans une perspective transnationale. Nous souhaitons aussi que ces témoignages-là
puissent s’exprimer. Et finalement, par un jeu de miroirs, s’interroger sur cette perception qu’ont les
Français – comme tous les Européens entrainés dans le conflit, voire les peuples du monde – de leur
passé, invite aussi à s’interroger sur la façon d’étudier et d’enseigner 1914 jusqu’à nos jours. Le degré
d’implication de chacun dans la guerre, la façon dont chaque peuple s’est senti directement
concerné ou non par le conflit, les conséquences que celui-ci a pu avoir, suscitent des interprétations
différentes de cet événement. Comment par exemple un pays neutre comme la Suisse perçoit-il et
reçoit-il le conflit ? Comment la neutralité peut-elle se construire et se justifier ? Quelles tensions
cette neutralité a-t-elle pu nourrir dans la société suisse ? Qu’en est-il aussi des colonies des nations
engagées au front? Leur participation modifie-t-elle la perception que la métropole en a ? Comment
construire le récit de leur engagement dans un monde post-colonial, une fois leur indépendance
acquise ? Comment analyser et présenter leur participation au conflit ? Autant de questions qui
permettent d’aborder la guerre par le côté, par ceux qui ne sont pas engagés, par ceux qui le sont en
vertu d’une autorité lointaine, par ceux aussi qui font entendre une autre voix au sein même des
Etats belligérants.
Cette journée d’études sera aussi l’occasion pour les participants de présenter au public une affiche
qui sera exposée dans le hall de la Maison des Sciences Humaines. Il est ainsi demandé à chaque
participant de préparer un document au format A2, présentant leur communication par quelques
mots-clés et plusieurs illustrations, en suivant la maquette jointe à cet appel. Toutes les affiches
seront ensuite imprimées par le comité d’organisation. Un modèle illustré est également à la libre
disposition des participants par simple demande à l’adresse suivante : [email protected]
Les propositions de communication (résumé de 250-300 mots pour une communication de 20
minutes) sont à envoyer au plus tard le
20 septembre 2014
Elles sont à adresser par courriel à l’adresse [email protected]
NB : seuls les doctorant-e-s sont invité-e-s à communiquer
Comité scientifique
Mme Chadia Arab, chargée de recherche – ESO-Angers UMR CNRS 6590
Mme Carole Auroy, professeure en littérature française du XXème siècle à l’Université d’Angers – EA
CERIEC
M. Yves Denéchère, professeur en histoire contemporaine à l’Université d’Angers – CERHIO-Angers
UMR CNRS 6258
Mme Olga Galatanu, professeure émérite en sciences du langage à l’Université de Nantes
Comité d’organisation
Anaïs Boulard, doctorante en littérature comparée (EA CERIEC)
Benjamin Buisson, doctorant en histoire contemporaine (UMR CERHIO)
Géraldine Dolléans, doctorante en littérature française (EA CERIEC)
Antoine Godet, doctorant en histoire contemporaine (UMR CERHIO)
Floris Taton, doctorante en histoire contemporaine (UMR CERHIO)
Maria-Lucia Toma, doctorante en littérature du XXème siècle (EA CERIEC)
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