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Séquence 7 – HG00
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Un État bien plus centralisé que durant l’Ancien Régime, et qui a tou-
jours dû composer avec des intermédiaires et des pouvoirs locaux
faute d’outils modernes pour contrôler le plus vaste royaume d’Europe
occidentale.
La crise des années 1930, la défaite de juin 1940, l’écroulement de la
République sous les coups de ses adversaires de toujours et de « no-
tables fâchés avec la démocratie » (J. P. Azéma), l’établissement par ces
derniers d’un État « fort » débarrassé de son idéologie républicaine et de
sa pratique démocratique ont dopé le questionnement sur la réforme de
l’État et de sa place dans la société.
Si la IV° République a hérité du parlementarisme absolu de la III° Ré-
publique par idéal républicain et réaction à la dictature pétainiste, elle
n’en initie pas moins un dirigisme économique et social qui aboutit à la
démocratie sociale la plus avancée de l’histoire, qualifiée — avec exa-
gération — d’« Union soviétique réussie » (J.M. Domenach) qui fait de
la France une originalité dans le monde des démocraties occidentales.
La république gaullienne couronne cette tendance au renforcement de
l’État en 1958, et la transforme au plan institutionnel cette fois-ci. Sans
remettre en cause l’État de droit, elle réalise la synthèse entre monarchie
ancienne et république, en initiant un exécutif fort, processus finalisé
avec l’élection du président de la République au suffrage universel direct
(1962) et un parlementarisme encadré et limité. Cependant cette créa-
tion a connu un destin en partie contraire à l’esprit de son créateur. La
prépondérance du Premier ministre en période de cohabitation a donné
à la V° République des accents de parlementarisme à l’Anglaise. Le ré-
gime, sous l’effet conjugué d’une élection présidentielle orpheline de
la figure tutélaire de de Gaulle et de la bipolarisation de la vie politique
droite/gauche, a remis en cause la neutralité de l’Administration et poli-
tisé la haute fonction publique, qui fournit d’ailleurs l’essentiel du per-
sonnel politique.
Une lente construction historique a engendré un rapport complexe
entre l’État et les Français. Alors que les Anglo-saxons ont conquis en
Angleterre puis aux États-Unis, leurs droits et leurs libertés, aux XVII°
et XVIII° siècles, contre une monarchie jugée inique, d’où une défiance
face à un appareil d’État toujours soupçonné de vouloir empiéter sur
les libertés individuelles. On peut constater les actuelles résistances
au projet de sécurité sociale voulu par B. Obama. L’État a générale-
ment été célébré comme « ayant fait la France » puis comme garant
de l’équité, le défenseur des droits et libertés. Les serviteurs de l’État
ont, par exemple, toujours bénéficié d’un prestige supérieur à celui des
classes marchandes.
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