Deuxième partie : Etude d'un document (4 points)
Le document est un tableau stsatistique à double entrée comparant les différents taux
d'équipement et abonnements des ménages, en fonction de leur catégorie socioprofessionnelle
(CSP) d'appartenance.
Le tableau est issu de l'enquête "Budget de famille" (INSEE, 2006) ; il présente, en lignes, les taux
d'équipements et abonnements et, en colonnes, les CSP.
Le regroupement des ménages par CSP suppose la construction de catégories plus ou moins
homogènes du point de vue de la profession, du statut professionnel (salarié/indépendant), du
secteur d'activité, du niveau de qualification. A partir de leur vie professionnelle, l'INSEE regroupe
les individus au sein d'une même CSP et leur suppose des styles de vie plus ou moins communs.
Les taux d'équipement (proportion des ménages d'une CSP équipés en un style de bien par rapport
au total des ménages de la CSP), ainsi que les taux d'abonnements à divers services culturels ou
sportifs, sont ici les indicateurs qualitatifs de ces supposés modes de vie.
L'entrée dans la consommation de masse, au cours des "trente glorieuses", a permis une
relative harmonisation des taux d'équipement concernant certains biens emblématiques. Ainsi
aujourd'hui (en 2006), le téléviseur est loin d'être un objet de luxe puisqu'on en retrouve dans 95 %
des foyers enquêtés, avec de très faibles amplitudes entre CSP (de 92,5% des CPIS à 97,2% des
agriculteurs exploitants). De même l'accès à l'automobile individuelle fut un signe matériel de la
"moyennisation", telle que décrite par Henri Mendras dans "La seconde Révolution française (1965
– 1984)" (1988). Au début du XXIème siècle, les effets d'une telle évolution se faisant encore sentir
dans la structure sociale, plus des trois quarts des ménages français se trouvent équipés en
automobile (de 74,9% des retraités à 98,1% des agtriculteurs exploitants).
Si l'on considère les taux d'équipement suscités comme significatifs des modes de vie des ménages,
on peut effectivement noter à cet égard une certaine convergence entre les CSP.
Toutefois, il convient de nuancer l'idée d'une telle convergence en faisant deux
observations :
D'une part, des inégalités persistent concernant l'accès aux biens. Que ce soit pour des raisons
d'usage et de maîtrise technologique (les CPIS sont environ 8 fois plus nombreux à posséder un
micro-ordinateur portable que les retraités). Ou encore, suivant une discrimination strictement
économique (le rapport CPIS/employés, concernant la possession d'une 2ème automobile, est
supérieur à 1,5).
D'autre part, les inégalités sont notables entre CSP concernant l'accès à l'information et à la culture.
A titre d'exemple, constatons que les CPIS bénéficient 8 fois plus que les agriculteurs exploitants et
les retraités d'abonnements Internet haut débit. En outre, ces mêmes CPIS sont 4 à 5 fois plus
abonnés au théâtre ou au cinéma que des catégories telles que les agriculteurs, les ouvriers, les
retraités.
De telles inégalités peuvent s'expliquer par la géographie ou les infrastrutures. Les CPIS vivant
davantage dans les centre villes que les ouvriers (en périphérie) et les agriculteurs (en milieu rural),
ils accèdent plus facilement au marché ou à la politique culturelle. Il en va de même pour les
connexions Internet haut débit qui desservent en priorité les lieux les plus densément peuplés, pour
des raisons d'économie d'échelle.
Au delà de ces explications d'ordre matériel, la théorie du "capital culturel" de Pierre Bourdieu peut
nous aider à mieux appréhender le fondement de telles divergences. Mieux formés, mieux informés,
les CPIS orienteraient davantage leurs pratiques culturelles vers des activités considérées comme
plus "légitimes". Derrière des choix totalement libres en apparence, se joueraient d'après Bourdieu,
des mécanismes subtils de maintien et de reproduction des inégalités culturelles, d'une génération
sur l'autre. Ce qui nous conduirait à nuancer, voire à contester, l'hypothèse d'une convergence des
modes de vie entre CSP.