Les abolitions françaises de l`esclavage

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CONFÉRENCE DU FORUM DES SAVOIRS
“Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.”
Voltaire
LES ABOLITIONS DE
L’ESCLAVAGE EN FRANCE
CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
La proclamation de l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises : un tableau allégorique peint
sur commande par François-Auguste Biard en 1848 (Musée de Versailles).
Association ALDÉRAN Toulouse
pour la promotion de la Philosophie
MAISON DE LA PHILOSOPHIE
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conférence N°1000-146
LES ABOLITIONS FRANÇAISES DE L’ESCLAVAGE
Histoire et spécificités des abolitions françaises, de 1789 à 1848
conférence d’Éric Lowen donnée le 03/12/2004
à la Maison de la philosophie à Toulouse
Tout comme l’histoire de l’esclavage, l’histoire de l’abolition est pleine de préjugés simplicites
et d’images réductrices. Retour sur les conditions des abolitions de l’esclavage en France,
avec notamment le rôle essentiel des esclaves eux-mêmes.
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LES ABOLITIONS DE L’ESCLAVAGE EN FRANCE
Histoire et spécificité des abolitions françaises, de 1789 à 1848
PLAN DE LA CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
I
LA NAISSANCE DU MOUVEMENT ABOLITIONNISTE
1 - La “normalité” de l’esclavage
2 - Les frémissements du 17ème siècle
3 - Les Lumières s’engagent timidement, mais s’engagent
4 - La vague abolitionniste du 19ème
II
LA PREMIÈRE ABOLITION : 1789 - 1802
1 - La première abolition commence avec la révolution de 1789
2 - La question esclavagiste, une sous-partie de la question coloniale
3 - Des avancées difficiles et lentes, souvent grâce aux agitations des colonies (dès août 1790)
4 - Le 28 septembre 1791 : la constituante abolit l’esclavage en France mais pas dans les colonies
5 - L’égalité politique des hommes de couleur libres : 28 mars 1792
6 - Sous la pression des esclaves, Sonthonax abolit l'esclavage à Saint-Domingue le 29 août 1793
7 - Le 4 février 1794 : décret du 16 pluviôse an II abolissant l'esclavage
8 - Dans les faits, des résultats mitigés sauf à Haïti
9 - 1802 : Bonaparte "rétablit l'ordre" colonial et l’esclavage
10 - Par les armes et le feu face à la résistance héroïque des anciens esclaves
11 - La résistance victorieuse d’Haïti : la liberté ou la France !
12 - La restauration monarchique garde l’esclavage rétabli par Napoléon
III
LA DEUXIÈME ABOLITION, L’ABOLITION DÉFINITIVE : 1848
1 - Le début de la révolution industrielle et la concurrence du sucre betteravier
2 - La naissance d’une contestation internationale de l’esclavage (les mouvements anglais)
3 - L’interdiction de la traite en 1807 en Angleterre et par le Congrès de Vienne en 1815
4 - La première grande abolition : celle de l’Angleterre en 1833 par un mouvement autonome
5 - La crainte de la “contagion anglaise” de l’émancipation
6 - L’action de Victor Schœlcher et la création du mouvement abolitionniste français
7 - Le coût budgétaire de l’abolition fait hésiter les Chambres de la monarchie de Juillet
8 - La monarchie de juillet prend quelques mesures pour “humaniser” l’esclavage
9 - La révolution de 1848 fait naître un nouvel espoir
10 - Les brèves hésitations d’Arago, Ministre de la marine et des colonies, devant la plantocratie
11 - Le 4 mars 1848 : “Nulle terre française ne peut plus porter d'esclaves”
12 - Pendant que les esclaves des colonies arrachent par eux-mêmes leur liberté
IV
ABOLITION OU ABOLITIONS ?
1 - L’abolition, le résultat de 4 abolitions
2 - Au 19ème siècle, une évolution sociale qui condamne l’esclavage à terme
3 - L’évolution des mentalités, fruit des Lumières
4 - La perte de crédit des arguments économiques des esclavagistes au 19ème siècle
5 - La montée d’un réel mouvement abolitionniste métropolitain
6 - Les résistances et rébellions croissantes des esclaves
7 - Les rivalités des grandes puissances européennes entre-elles, l’esclavage est un enjeux
V
CONCLUSION
1 - La réduction à la seule abolition politique dans la “conscience historique officielle”
2 - Après l’abolition de l’esclavage officiel, le début de la lutte contre le second esclavage
ORA ET LABORA
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Document 1 : Un des pionniers de l’abolition de l’esclavage, Bartolomé de Las Casas.
Sa Majesté doit, par ordre divin, faire libérer tous les Indiens réduits en esclavage par les
Espagnols. Et les évêques doivent y veiller avec le plus grand soin et la plus grande
diligence. D'une manière sainte et sage, les religieux convinrent de ne pas donner
l'absolution à un Espagnol possesseur d'esclaves indiens tant qu'il ne les aurait
présentés au tribunal de la Real Audiencia, conformément aux lois nouvelles, encore qu'il
valût mieux faire les choses, s'ils en étaient absolument décidés, sans qu'on les conduisît
devant le tribunal, en raison des manœuvres auxquelles pouvait se prêter la procédure.
Bartolomé de Las Casas (1474 - 1566)
Tratado
Document 2 : En dehors de quelques rares exceptions, les idées générales - y compris celles venant des
élites intellectuelles, trouvent l’esclavage chose normale et juste. Ce fut aussi pendant 18 siècles la position
des églises chrétiennes.
De condamner cet état [l’esclavage], ce serait entrer dans les sentiments que M. Jurieu
[pasteur protestant abolitionniste] lui-même appelle outrés, c’est-à-dire dans les
sentiments de ceux qui trouvent toute guerre injuste : ce serait non seulement condamner
le droit des gens, où la servitude est admise, comme il paraît par toutes les lois, mais ce
serait condamner le Saint-Esprit qui ordonne aux esclaves, par la bouche de Saint Paul,
de demeurer en leur état et n’oblige point les maîtres à les affranchir.
Bossuet (1627 - 1704)
Document 3 : Au 18ème siècle commence à apparaître dans les écrits des philosophes des Lumières une
contestation de l’esclavage, puis une véritable dimension abolitionniste.
Si j'avais eu à soutenir le droit que nous avons eu de rendre les Nègres esclaves, voici ce
que je dirais.
Les peuples d'Europe ayant exterminé ceux de l'Amérique, ils ont dû mettre en esclavage
ceux de l'Afrique, pour s'en servir à défricher tant de terres.
Le sucre serait trop cher, si l'on ne faisait travailler la plante qui le produit par les
esclaves.
Ceux dont il s'agit sont noirs des pieds jusqu'à la tête ; et ils ont le nez si écrasé qu'il est
presque impossible de les plaindre.
On ne peut se mettre dans l'idée que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme,
surtout une âme bonne, dans un corps tout noir.
Il est naturel de penser que c'est la couleur qui constitue l'essence de l'humanité, que les
peuples d'Asie, qui font des eunuques, privent toujours les Noirs du rapport qu'ils ont
avec nous d'une façon plus marquée.
On peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux, qui, chez les Égyptiens, les
meilleurs philosophes du monde, étaient d'une si grande conséquence, qu'ils faisaient
mourir tous les hommes roux qui leur tombaient entre les mains.
Une preuve que les Nègres n'ont pas le sens commun, c'est qu'ils font plus de cas d'un
collier de verre que de l'or, qui, chez des nations policées, est d'une si grande
conséquence.
Il est impossible que nous supposions que ces gens là soient des hommes ; parce que, si
nous les supposions des hommes, on commencerait à croire que nous ne sommes pas
nous mêmes chrétiens.
De petits esprits exagèrent trop l'injustice que l'on aux Africains.
Car, si elle était telle qu'ils le disent, ne serait-il pas venu dans la tête des princes
d'Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d'en faire une générale en
faveur de la miséricorde et de la pitié ?
Montesquieu (1689 - 1755)
De l'esprit des lois, XV, 5, 1748
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Document 4 : À la critique esclavagiste s’adjoint aussi une critique du colonialisme des pays européens.
Tu n'es pas esclave : tu souffrirais plutôt la mort que de l'être, et tu veux nous asservir !
Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté ou mourir ? Celui dont tu
veux t'emparer comme de la brute, le Tahitien, est ton frère. Vous êtes deux enfants de la
nature; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu; nous sommes-nous jetés
sur ta personne ? avons-nous pillé ton vaisseau ? t'avons-nous saisi et exposé aux
flèches de nos ennemis ? t'avons-nous associé dans nos champs au travail de nos
animaux ? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse-nous nos mœurs; elles sont
plus sages et plus honnêtes que les tiennes, nous ne voulons point troquer ce que tu
appelles notre ignorance, contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et
bon, nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris, parce que nous n'avons pas
su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi
manger, lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos
cabanes, qu'y manque-t-il, à ton avis ? Poursuis jusqu'où tu voudras tout ce que tu
appelles commodités de la vie; mais permets à des êtres sensés de s'arrêter, lorsqu'ils
n'auraient à obtenir, de la continuité de leurs pénibles efforts, que des biens imaginaires.
Si tu nous persuades de franchir l'étroite limite du besoin, quand finirons-nous de
travailler ? Quand jouirons-nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles
et journalières la moindre qu'il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au
repos. Va dans ta contrée t'agiter, te tourmenter tant que tu voudras; laisse-nous reposer:
ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques. Regarde ces
hommes vois comme ils sont droits, sains et robustes. Regarde ces femmes vois comme
elles sont droites, saines, fraîches et belles.
Denis Diderot (1713 - 1784)
Supplément au voyage de Bougainville
discours d’adieu qu’un vieux tahitien aurait adressé à Bougainville lors de son départ de Tahiti
Document 5 : Lors de la révolution française, un petit parti abolitionniste existe avec la Société des amis
des noirs fondée en 1788. Ce magnifique texte de Condorcet en atteste.
Quoique je ne sois pas de la même couleur que vous, je vous ai toujours regardé comme
mes frères. La nature vous a formés pour avoir le même esprit, la même raison, les
mêmes vertus que les Blancs. Je ne parle ici que de ceux d'Europe ; car pour les Blanc
des colonies, je ne vous fais pas l'injure de les comparer à vous ; je sais combien de fois
votre fidélité, votre probité, votre courage ont fait rougir vos maîtres. Si on allait chercher
un homme dans les îles de l'Amérique, ce ne serait point parmi les gens de chaire
blanche qu'on le trouverait.
Votre suffrage ne procure point de places dans les colonies; votre protection ne fait point
obtenir de pensions ; vous n'avez pas de quoi soudoyer les avocats : il n'est donc pas
étonnant que vos maîtres trouvent plus de gens qui se déshonorent en défendant leur
cause, que vous n'en avez trouvés qui se soient honorés en défendant la votre. Il y a
même des pays où ceux qui voudraient écrire en votre faveur n'en auraient point la
liberté.
Tous ceux qui se sont enrichis dans les îles aux dépens de vos travaux et de vos
souffrances, ont, à leur retour, le droit de vous insulter dans des libelles calomnieux ;
mais il n'est point permis de leur répondre. Telle est l'idée que vos maîtres ont de la bonté
et de leurs droits ; telle est la conscience qu'ils ont de leur humanité à votre égard. Mais
cette injustice n'a pas été pour moi qu'une raison de plus pour prendre, dans un pays
libre, la défense de la liberté des hommes. Je sais que vous ne connaîtrez jamais cet
ouvrage, et la douceur d'être béni par vous me sera toujours refusée. Mais j'aurai satisfait
mon cœur déchiré par le spectacle de vos maux, soulevé par l'insolence absurde des
sophismes de vos tyrans. Je n'emploierai point l'éloquence, mais la raison ; je parlerai,
non des intérêts du commerce, mais des lois de la justice.
Vos tyrans me reprocheront de ne dire que des choses communes, et de n'avoir que des
idées chimériques : en effet, rien n'est plus commun que les maximes de l'humanité et la
justice; rien n'est plus chimérique que de proposer aux hommes d'y conformer leur
conduite.
Condorcet (1743 - 1794)
Épître dédicatoire aux Nègres esclaves, mes amis
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Document 6 : À Saint-Domingue (Haïti), Toussaint Louverture fut le personnage emblématique de la force
noire, qui permit de préserver la liberté acquise lors de la première abolition, et en 1804, d’arracher
l’indépendance d’Haïti contre les armées napoléoniennes.
Document 7 : Lors du rétablissement de l’esclavage en Guadeloupe, le chef de l’expédition du affronter la
résistance héroïque et désespérée des soldats noirs. À cette occasion, juste avant de quitter basse-terre, le
colonel noir Delgrès publia une proclamation célèbre le 10 mai 1802.
C'est dans les plus beaux jours d’un siècle à jamais célèbre pour le triomphe des
Lumières et de la philosophie, qu'une classe d'infortunés qu’on veut anéantir se voit
obligée d'élever sa voix vers la postérité (…) il existe des hommes qui ne veulent voir
d'hommes noirs où tirant leur origine de cette couleur, que dans les fers de l'esclavage
(…) La résistance à l'oppression est un droit naturel. La divinité même ne peut être
offensée que nous défendions notre cause (…), et toi postérité, accorde une larme à nos
malheurs et nous mourrons satisfaits.
Louis Delgrès (1766 - 1802)
10 mai 1802
"À l'univers entier le dernier cri de l'innocence et du désespoir"
Document 8 : En février 1808, une procession à Wootton Basset (Wiltshire, Angleterre) célèbre l'interdiction
de la traite négrière atlantique votée par le Parlement l'année précédente. L'Angleterre, après avoir contrôlé
ce commerce pendant deux siècles, prend la tête des mouvements abolitionnistes.
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Document 9 : Dans le sillage ouvert par les anglais, commence à apparaître en France un front
abolitionniste bien plus large que celui de la Révolution française. Les premiers débats politiques
commencent à avoir lieu à partir des années 1820.
La continuation de la traite est la conséquence funeste de l'imperfection de nos lois. En
prohibant la traite sans la réprimer, elles la rendent cent fois plus cruelle (...).
La traite est la cause ou le prétexte des outrages nombreux qu'éprouve sans cesse le
pavillon français. Je n'examine point si les Anglais la répriment par égoïsme ou par
philanthropie; et si je devais m'expliquer à cet égard, je conviendrais volontiers que je
n'attribue guère de philanthropie à un ministère qui s'oppose froidement à la délivrance
des Grecs qu'on massacre, et qui repousse des îles Ioniennes de malheureux blessés,
coupables à ses yeux d'avoir combattu pour leur patrie. Mais sans approfondir les motifs,
les faits me suffisent.
La traite sert d'apologie à cette surveillance arrogante que les Anglais exercent sur nos
vaisseaux; tantôt les accusant de piraterie, tantôt leur supposant des intelligences avec
les négociants de leurs colonies, ils les arrêtent, les saisissent, les traînent dans leurs
ports pour les juger. N'êtes-vous pas impatients, Messieurs, de soustraire notre pavillon à
cette inquisition humiliante ? Faites des lois fortes, faites-les exécuter fortement, et ne
souffrez plus que des Français s'exposent pour un gain criminel, à être jugés par des
étrangers (...).
Messieurs, nous ne voulons ni le malheur ni le désordre dans les colonies. Nous
déplorons les calamités qui les ont frappées ; mais pour écarter les malheurs, pour
prévenir les désordres, pour ne pas voir les calamités se renouveler, faites cesser la
traite. Si ce n'est par humanité, que ce soit par prudence ; si ce n'est par prudence, que
ce soit par dignité. La traite peuple vos colonies d'ennemis qui seront un jour terribles :
voyez Saint-Domingue. La traite soumet vos vaisseaux à l'insolence de l'étranger: lisez
les registres de l'amirauté anglaise. La traite flétrit aux yeux de l'Europe et ceux qui la font
et ceux qui la tolèrent : rappelez-vous les résolutions des gouvernements unis par la
Sainte-Alliance. N'invoquerait-on cette Sainte-Alliance que contre l'indépendance des
peuples, et retrancherait-on de ses décrets ce qui est favorable à l'humanité ?
Benjamin Constant (1767 - 1830)
Discours à la Chambre des députés, le 5 avril 1822
Document 10 : En 1834 est créée la Société française pour l’abolition de l’esclavage.
D'où vient que la France, à qui un ministre, M. Necker, avait, dès 1789, fait entendre des
vœux si expressifs en faveur des Noirs, est restée si longtemps simple spectatrice des
efforts faits en Angleterre pour leur émancipation ? Pourquoi, depuis près de vingt ans
qu'elle a recouvré des colonies, a-t-elle borné ses efforts à l'abolition tardive de la traite et
à l'amélioration du sort des hommes de couleur, sans rien faire pour préparer de
meilleures destinées aux malheureux dont la servitude y est encore le triste et funeste
héritage ? Sans doute, c'était un souvenir décourageant que celui des désastres de Saint
Dominguez, où tant d'imprudences et d'erreurs nées des rivalités des castes libres
avaient appelé les Noirs aux armes, et que les décrets de liberté sortis tout à coup des
orages de la révolution française vinssent lancer sur ce sol brûlant de nouveaux ferments
de haine et de discorde ; peut-être aussi s'était il rencontré dans l'époque, et les autres
stipulations des traités en exécution desquels la législature a fait cesser la traite, quelque
chose qui avait blessé les susceptibilités nationales ; mais de toutes les causes d'une
inertie si regrettable, à coup sûr la plus puissante fut le manque d'une société spéciale
composée d'hommes qui, faisant de l'affranchissement progressif des esclaves le but
exclusif et constant de leurs travaux, eussent mis à profit toutes les occasions d'éclairer
la conscience publique, et d'obtenir du pouvoir des améliorations dont ils eussent
démontré l'urgence et la possibilité. Telle est la raison qui nous détermine aujourd'hui à
fonder une société pour l'abolition de l'esclavage. Jamais les circonstances ne furent plus
opportunes ; car il ne s'agit plus seulement d'accomplir une œuvre d'humanité, mais
aussi une œuvre de prudence.
Signé : Président, le duc de Broglie, pair de France
Paris, le 15 décembre 1834
Prospectus de la Société pour l'abolition de l'esclavage, le 15/12/1834
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Document 11 : Chronologie des événements en France et dans les autres pays autour des questions de
l’abolition.
26 août 1789 : Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.
8 mars 1790 : Droit des Colonies à proposer des lois internes.
Août 1790 : Soulèvement des Libres de couleur de Port-au-Prince.
15 mai 1791 : Octroi de droits politiques des gens de couleur nés de parents libres.
22 août 1791 : Insurrection générale à Haïti, dans la nuit du 22 au 23 août.
24 septembre 1791 : La Constituante se déclare incompétente sur la question du statut
des personnes dans les colonies.
28 septembre 1791 : La Constituante abolit l'esclavage en France.
28 mars 1792 : Par un décret royal du 4 avril, les hommes de couleur et les nègres libres
doivent jouir de l'égalité politique.
19 septembre 1792 : Arrivée du commissaire civil Sonthonax à Saint-Domingue.
29 août 1793 : Sonthonax abolit l'esclavage à Saint-Domingue.
Octobre 1793 : Les colonies se constituent en départements français.
Février 1794 : Décret du 16 pluviôse an II abolissant l'esclavage.
Mai 1797 : Toussaint s’oppose au Directoire et devient le chef militaire de la colonie.
Mai 1801 : Toussaint Louverture dote l’Etat de Saint-Domingue d’une constitution.
29 mai 1801 : Arrivée de Lacrosse en Guadeloupe.
21 octobre 1801 : Lacrosse est chassé de Guadeloupe par le chef de brigade Magloire
Pélage et se réfugie à la Dominique après des mesures racistes illégales.
5 mai 1802 : Arrivée de l'expédition Richepance en Guadeloupe, rejointe par Lacrosse.
10 mai 1802 : Proclamation du colonel noir Delgrès, invitant ses soldats à préférer la mort
à l’esclavage.
20 mai 1802 : La loi du 30 floréal an X maintenant l'esclavage dam les colonies rendues
à la France par le traité d'Amiens. Aucune mention d'un rétablissement en Guyane, en
Guadeloupe et à Saint-Domingue.
28 mai 1802 : Guadeloupe: sacrifice de Delgrès.
7 juin 1802 : Saint-Domingue: arrestation de Toussaint Louverture.
16 juillet 1802 : Un Guadeloupéen blanc mentionne dans une lettre la "vente de six noirs”
de 12 à 20 ans.
17 juillet 1802 : Arrêté Richepance du 28 messidor an X, proclamant le retour aux “vrais
principes”. Le mot “esclavage” n'apparaît pas.
18 novembre 1803 : Bataille décisive de Vertières à Haïti, les armées françaises sont
mises en déroutes par les soldats de Dessalines, successeur de Toussaint Louverture.
1er janvier 1804 : Proclamation de l’indépendance d’Haïti.
1807 : Le parlement anglais abolit la Traite.
1815 : Le Congrès de Vienne abolit la traite.
1823 : Abolition au Chili.
1824 : Abolition en Amérique centrale.
1829 : Abolition au Mexique.
1831 : Abolition en Bolivie.
1833 : Abolition anglaise.
1833 : Schœlcher, Abolition immédiate de l'esclavage.
1845 : En France, lois Mackau.
10 avril 1848 : Agitation en Martinique ; arrivée du décret Schœlcher du 4 mars.
27 avril 1848 : Décret d'abolition de l'esclavage.
22-23 mai 1848 : Insurrections en Martinique et en Guadeloupe.
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24-27 mai 1848 : Abolition en Martinique puis en Guadeloupe.
3 -5 juin 1848 : Arrivée du décret du 27 avril en Martinique puis en Guadeloupe.
18 octobre 1848: Arrivée du décret du 27 avril à la Réunion.
20 décembre 1848 : Abolition à la Réunion.
1851 : H. Beecher-Stowe, La Case de I 'Oncle Tom.
1854 : Abolition au Vénézuela.
1863 : Abolition hollandaise.
1865 : Abolition fédérale aux États-Unis.
1873 : Abolition à Puerto-Rico.
1880 : Abolition à Cuba.
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- Les cours et conférences sans nom d’auteurs sont d’Éric Lowen -
Revue de philosophie “ALDÉRAN”
- N°12 : Victor Schœcher, l’homme de l’abolition française
- N°11 : Dossier Spécial “L’esclavage, un crime contre l’humanité”
Conférences sur l’histoire de l’esclavage
- Histoire de l’esclavage, de l’antiquité à l’esclavage colonial
- Les révoltes d’esclaves à travers l’histoire
- Spartacus et les grandes révoltes serviles de l’antiquité
- La révolution de Saint-Domingue et Toussaint Louverture
- Victor Schœlcher, l’homme de l’abolition française de l’esclavage
1000-136
1000-143
1000-092
1000-122
1000-133
Conférences sur cette période historique
- L’Encyclopédie et l’aventure des Lumières (1751-2001)
- La révolution française de 1789
- Les révolutions sud-américaines et Simon Bolivar
- La révolution de 1848, histoire de la deuxième République
- Victor Hugo, mystique de la liberté et du progrès
1000-074
1000-102
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- Liberté, j’écris ton nom... éloge de la liberté
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Quelques livres et revues sur l’esclavage
- Haïti : la république des esclaves; Marcel Dorigny, L'Histoire, N°283, janvier 2004
- Abolitionnistes de l’esclavage et réformateurs des colonies 1820-1851; analyse et documents, Nelly
Schmidt, Éditions Karthala, 2000
- Bernard Vincent, Amistad, les mutins de la liberté, Éd. de l 'Archipel, 1998
- L’abolition de l’esclavage de 1848, une lecture de Victor Schœlcher, Fabienne Fédérini, L'Harmattan, 1998
- Esclaves et citoyens : les Noirs à la Guadeloupe au XIXème siècle dans les processus de résistance et
d'intégration (1802-1910), Josette Faloppe, Soc. Hist. Guad., Basse-Terre, 1992
- Delgrès : la Guadeloupe en 1802, Jacques Adélaïde-Merlande, Khartala, 1986
- De l’esclavage à la liberté, histoire des afro-américains, John Hope Franklin, Éditions caribéennes, 1984
- Esclaves et planteurs, Michel Fabre, Julliard, 1970
- L’esclavage, Maurice Lengellé, PUF, 1967
- De l’esclavage des noirs et de la législation coloniale, Victor Schœlcher, Paulin, 1833
Association ALDÉRAN © - Conférence 1000-146 : “Les abolitions de lʼesclavage en France“ - 21/09/2004 - page 11
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