Royaume du Maroc Le chef du gouvernement Nations Unies Études de cas sur les disparités dans l’accès aux soins au Maroc Synthèse des principaux résultats Institut National d’Administration Sanitaire Equipe de recherche Une équipe pluridisciplinaire composée d’anthropologues, de spécialistes de santé publique, d’un pharmacien et d’une économiste. • Pr Mohamed AMINE, médecin de santé publique, Professeur agrégé, Faculté de Médecine et de Pharmacie - Université CADI AYYAD, Marrakech • Pr Vincent De BROUWERE, médecin de santé publique, Professeur à l’Institut de Médecine Tropicale (IMT), Anvers • Pr Marc-Éric GRUÉNAIS, anthropologue, coordinateur de l’étude, Directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le Développement (IRD) et enseignant-chercheur à l’Institut National D’administration Sanitaire (INAS), Bordeaux et Rabat • Élise GUILLERMET, anthropologue, Ingénieur de recherche, Institut de recherche pour le Développement (IRD), Marseille • Samira GUENNIF, économiste, Maître de conférences à l’Université Paris 13 • Dr Hafid HACHRI, médecin de santé publique, Enseignant-chercheur à l’Institut National D’administration Sanitaire (INAS), Rabat • Dr Mohamed Wadie ZERHOUNI, pharmacien Inspecteur, Direction des Hôpitaux et des Soins Ambulatoires (DHSA) - Ministère de la Santé, Rabat Plan • • • • Objectifs du projet Approche méthodologique Déterminants de l’accès aux soins Principaux résultats: – Contextes et systèmes de santé locaux – L’accès aux soins vu par la population • Enquête qualitative • Enquête quantitative – Pratiques de la médecine générale – Prix, disponibilité et accès aux médicaments Objectifs du projet Documenter les difficultés et les inégalités d’accès aux biens et services de santé à partir de trois thématiques: – l’accès aux structures de soins – l’accès aux prestataires de soins (l’exemple du médecin généraliste) – l’accès aux médicaments. Approche méthodologique • Études de cas, qualitatives et quantitative, illustratives des difficultés d’accès aux soins • Niveaux d’études: national, provincial et local: – National: positionnement des acteurs des services centraux – Provincial: perception des représentants des administrations – Local: perception des bénéficiaires (populations et soignants) Approche méthodologique • Sites d’études: des situations contrastées – La Préfecture de Salé (milieu urbain) – La Province d’Azilal (zone montagneuse) – La province de Figuig (zone aride faiblement peuplée, éloignée des grands centres de décision) • Recueil de données de décembre 2010 à mai 2011 Accès aux soins: Une notion complexe Dimensions liées à la structure et l’organisation des services : Dimensions liées aux professionnels de santé : • Accessibilité géographique • Coût des prestations • Plateau technique •Comportement •Disponibilité Disponibilité médicaments •Qualité relationnelle • Accessibilité des services • Compétences • Qualité du service •Confidentialité Dimensions liées aux patients : • Caractéristiques socio démographiques, économiques et culturelles • Couverture médicosociale • Perception de la santé et de la gravité du risque Utilisation du secteur de soins Recours traditionnels 7 Secteur public Secteur privé Contextes et systèmes de santé locaux 1. Principaux problèmes de santé perçus par les acteurs de santé et les autorités locales: pathologies liées à l’environnement (maladies respiratoires, hydriques, dermatologiques) et les maladies chroniques (diabète, ‘maladies mentales’) 2. Contraintes liés à l’environnement et à l’offre de soins: l’accessibilité géographique, la présence et la disponibilité des personnels de santé (au niveau périphérique et de première référence) 3. Conditions de travail des soignants. L’utilisation des équipements disponibles, l’organisation des locaux, l’hygiène, la sécurité et l’accueil posent problème. 4. Des dispositifs pour améliorer l’accessibilité financière (mutuelle, gratuité, RAMED), parfois méconnus et qui se heurtent à une généralisation délicate. 5. Des initiatives pour rapprocher les soins de la population (équipe mobile, ‘caravanes’ médicales), des interventions ponctuelles, qui demandent à être évaluées Problèmes d’accès vus par la population: Étude qualitative auprès de 127 personnes interrogées sur leurs itinéraires Décider de recourir à un prestataire De nombreux facteurs vont influer la décision : • Facilité d’accès aux structures de soins : éloignement, moyen de transport, qualité des infrastructures routières, couverture par réseau de téléphonie mobile • Gravité ressentie du problème de santé (pronostic fonctionnel, chronicité) rapportée aux autres contraintes de la cellule domestique • Statut de la personne : autonomie financière et décisionnelle du patient au sein de la famille • Coûts directs et indirects des soins : coût du transport, de l’hébergement, de l’alimentation, dépenses de soins (examens de laboratoire, médicaments) Dans les structures de soins: des prestataires des structures publiques peu accessibles • Mauvais accueil (temps d’attente, inconfort des structures, rudesse des personnels, examen superficiel, difficulté d’orientation, etc.) • Une prise en charge qui dépend de ses connaissances dans la structure et/ou de cadeau à destination de soignants • Non disponibilité ou absentéisme des médecins • La population souhaite un médecin qui écoute, rassure, explique et qui parle la langue du patient. • Alternative 1 : le médecin privé, accessible toute la journée, utilisant des équipements (radiologie, échographe) • Alternative 2 : le pharmacien d’officine, présent partout, disponible et expérimenté, dispensateur de conseils et parfois facilitant les examens de laboratoire Résultats enquête quantitative sur l’accès aux soins: 1200 questionnaires Comportement des enquêtés face à la maladie Régions Salé Azilal Figuig Nomades Total Consultation chez un médecin 309 (70,9%) 202 (72,9%) 204 (71,8%) 28 (56,0%) 715 (71,7%) Médecin de santé publique 179 (41,3%) 94 (34,1%) 166 (65,1%) 19 (41,3%) 439 (45,5%) Médecin privé 188 (43,3%) 118 (42,6%) 99 (42,5%) 14 (32,6%) 405 (42,9%) Médecin de santé Consultation publique & chez un Médecin pharmacien privé 58 79 (32,6%) (18,2%) 10 19 (10,6%) (6,9%) 61 53 (46,9%) (23,9%) 5 10 (3,3%) (22,7%) 129 151 (32,1%) (16,2%) Les personnes enquêtées consultent presque à part égale les médecins privés et les médecins du secteur public, et souvent les deux Difficultés de paiements des frais pour des soins Régions Nombre de % répondants répondants déclarant des difficultés Salé 261 59,9 Azilal 137 49,5 Figuig 203 72,2 Total 601 60,5 Les difficultés de paiement touchent plus de la moitié des familles et presque les trois-quarts à Figuig Renonciation aux soins La renonciation aux soins concerne essentiellement l’accès à la consultation médicale privé et au spécialiste. La barrière financière est la principale raison de cette renonciation Appréciation de la difficulté d’accès aux structures de soins Difficile Peu facile facile Très facile Salé 251(52,7) 119(25) 91(19,1) 15(3,2) Azilal 225(62,8) 88(24,6) 41(11,5) 4(1,1) Figuig 236(64,8) 101(27,7) 16(4,4) 11(3) Total 712(59,4) 308(25,7) 148(12,4) 30(2,5) L’accès aux structures est ressenti comme peu facile à difficile chez plus de 80% avec une proportion dépassant 90% à Figuig Satisfaction globale des répondants par rapport à la qualité des soins Insatisfait Peu satisfait Satisfait Très satisfait Salé 165(35,1) 159(33,8) 123(26,2) Azilal 207(58,3) 115(32,4) 31(8,7) 2(0,6) Figuig 221(60,9) 102(28,1) 33(9,1) 7(1,9) Total 376(31,6) 187(15,7) 32(2,7) 593(49,9) 23(4,9) 80% de la population interrogée se déclare peu ou non satisfaite de la qualité des soins. A Figuig, cette proportion atteint 89% Accès aux médecins généralistes (MG) L’identité professionnelle des MG • Démographie médicale des généralistes en lente évolution (en comparaison avec autres pays arabes et Europe) • Répartition territoriale très inégale des MG • Absence d’identité professionnelle du MG: – MG par défaut (échec des études, raisons sociales ou financières) – Le MG: un « spécialiste raté » – Pas de définition claire et partagée d’un profil du MG (faculté de médecine et Ministère de la santé) – Les jeunes médecins ne sont pas favorables au choix de la MG – Quelques médecins, y compris en milieu rural, finissent par être satisfaits de pratiquer la médecine générale La formation médicale de base • Une bonne formation médicale de base mais pas pour une médecine générale de première ligne: – Absence de formation spécifique pour la MG, en particulier absence de stages spécifiques dans les ESSB et le milieu rural. – Formation orientée vers la clinique et le diagnostic à partir d’un plateau technique disponible dans les CHU, mais dont le MG ne disposera jamais dans sa pratique. Les conditions de travail et la pratique de la MG • Problème de logement, de scolarisation des enfants, de l’infrastructure de base: réseau routier/eau/ électricité/ internet • Les MG se plaignent de l’isolement, la solitude, l’absence de supervision et de coaching • Les structures de soins publiques sont souséquipées ou avec un équipement non fonctionnel, ou avec un équipement disponible mais pour lequel les personnels n’ont pas été formés Les conditions de travail et la pratique de la MG • La qualité des soins laisse à désirer : – importance ressentie de la charge de travail – consultation trop courte et non interactive dans le secteur public • La pratique de la MG est peu valorisée, notamment par la population, particulièrement pour les MG du secteur public (MG libéral est mieux apprécié) Accès au Médicament Samira GUENNIF & Mohamed Wadie ZERHOUNI Cadre d'analyse de l'accessibilité aux médicaments Au niveau central Ministère de la Santé : DMP, DHSA, DA • Plus de 5000 spécialités commercialisées, dont plus de 50% de génériques. • budget d’achat des médicaments dans le secteur public multiplié par 5 entre 2005 et 2010 • Affectation de pharmaciens dans les structures périphériques • Définition des besoins par les CS PEC meilleure des maladies chroniques • Économie d’échelle grâce à des achats groupés par appels d’offre • Procédures de fixation des prix des médicaments en cours de discussion Au niveau central Professionnels du secteur pharmaceutique : • Le faible pouvoir d’achat de la population et une couverture médicale insuffisante expliqueraient les limites d’accès aux médicaments. • Des réformes sont en discussion sur les marges et les prix ; ont s'interroge sur l'effet de ces réformes • Grossistes et responsables d’officines déploient des ressources considérables pour assurer la disponibilité des médicaments sur tout le territoire, y compris dans les zones les plus éloignées. Au niveau périphérique : une bonne disponibilité des médicaments Secteur public : – Une bonne disponibilité des médicaments de programmes de santé (mère enfant, diabète et HTA) dans les CS ce qui permet une prise en charge satisfaisante des maladies chroniques – Des manques en antibiotiques et anti-inflammatoires, que les patients achètent dans le secteur privé – La disponibilité des médicaments varie d’un site à un autre selon l’éloignement des CS du chef lieu du site, de l’existence des moyens de transport pour livrer les produits et des ruptures de stock dans les pharmacies provinciales Secteur privé: – La disponibilité est satisfaisante même dans les villages où l’on trouve fréquemment une officine. Selon la population L’achat des médicaments est la première difficulté rencontrée énoncée par la population à Azilal et Figuig, la seconde à Salé (après la consultation médicale). De multiples barrières sont évoquées quant à l’accès aux médicaments : la disponibilité dans le secteur public, le coût dans les officines, les pratiques discriminantes de personnels soignants dans les centres de santé. En guise de conclusion • L’étude a mis en évidence des situations extrêmes (non représentatives), illustratives des difficultés rencontrées. • Une multitude d’acteurs, confrontés à des enjeux très divers et qui touchent aussi bien aux politiques publiques nationales (médicaments) qu’à des situations très spécifiques (par exemple, le mode de vie des « nomades ») • Chaque type d’acteur adopte des attitudes au plus près de ses intérêts, et la très grande segmentation des actions que l’étude a mis en évidence invite à une coordination accrue de l’action collective et publique.