p.18 L 11123 - 01 - A - 120,00 DA - DZ N° 123 - Janvier 2011 - 120 DA Economie L’Etat pour la redynamisation du secteur public Finance La guerre des monnaies gangrène le monde p.32 Gérald Lacaze, président du Directoire de Société Générale Algérie : Il faut une concertation entre tous les opérateurs et l’Etat afin de préserver l’économie Edito 2011, l'année de tous les espoirs L 'année 2010 en Algérie s'est terminée pleine d'évènements. Des évènements qui ont, à coup sûr, marqué le vécu des Algériens. Si la participation de notre équipe nationale de football au Mondial de l'Afrique du Sud constitue, à elle seule, l'évènement qui a rendu une grande joie aux Algériens, le quotidien de la quasi-totalité de ces derniers est profondément affecté par des hauts des bas. Sur le plan social, même si un changement palpable n'est pas vraiment senti, il n'en demeure pas moins que le gouvernement tente, contre vents et marrées, d'améliorer leur vécu. Une armada de textes de lois ont été promulgués à cet effet. Echantillon : la mise en application des crédits à taux bonifiés au profit des fonctionnaires dont les salaires sont relativement moyens. Une décision dont l'engouement commence à se faire sentir sur la sphère réelle, est prise pour éradiquer la crise de logement. L'année 2010 a été, elle également, celle de la confirmation de la nouvelle politique économique du pays, avec ces deux lois de finances (LF2010 et la LFC2010). Des lois dont le point commun est le retour en force de l'Etat dans la gestion des affaires économiques du pays. Toutefois, le revers de la médaille réside, en autres, dans certains projets non encore achevés, à l'instar du métro d'Alger et du tramway. Prévue à présent pour le début de l'année en cours, la réception de ces fameux projets, tant attendus, emboîtera le pas, espérons-le, à d'autres en 2011. En effet, l'année 2011 aura, inéluctablement, son lot d'évènements. Sur le plan macro et micro-économique, de nouvelles mesures incitatives ont été prises pour le compte de cette année. En clair, le gouvernement compte, au finish, redynamiser, en amont et en aval, l'économie algérienne et, partant, le tissu industriel. Le cadre juridique et législatif est déjà mis sur orbite. A charge pour les responsables des secteurs et d'entreprises concernés de le mettre en application et dans les délais fixés par l'Etat. D'autant que les espoirs de tout le peuple algérien de voir son économie prospérer sont énormes. Souhaitons, tout de même, tout le bonheur et la paix à l'Algérie M. K. Editorial : L'année 2010 en Algérie s'est terminée pleine d'évènements. Aussi l'année 2011 aura, inéluctablement, son lot d'évènements. Sur le plan macro et micro-économique, de nouvelles mesures incitatives ont été prises pour le compte de cette année. En clair, le gouvernement compte, au finish, redynamiser, en amont et en aval, l'économie algérienne et, partant, le tissu industriel. P. 3 P. 26 Sommaire 122 6 2010, une année charnière riche en événements économiques 8 Les différents événements économiques au fil de l'année 2010 16 La politique générale du gouvernement : Les vérités de Ouyahia 18 L'Etat veut redynamiser le secteur public 20 Les opérateurs économiques hantés par la "non-coopération" des banques 22 Economie maghrébine intégrée : Un impératif 23 Coopération économique : Les pays maghrébins optent pour le bilatéral 24 Algérie, finance 2010 : Déficit sensible, malgré la bonne santé financière 26 “ Interview de M. Gérald Lacaze, Président du Directoire de la Société Générale Algérie Notre objectif est d'avoir 150 agences en 2015 Les Nouvelles Revues Algériennes R.C. : 99B 0008985 I.S.S.N.: 1.111.1054 Rédaction / Administration Lot. Ben Achour Abdelkader Villa n° 27 Chéraga - ALGER Tél. : 213 (0) 21 37.29.63 213 (0) 21 36.38.73 Fax. : 213 (0) 21 37.58.58 Site web : www.actuel-dz.com e-mail : [email protected] [email protected] Directeur de la publication : Mohamed KESSACI Directeur / Gérant : Lakhdar KESSACI Rédaction : Abdelhafid MEFTAHI Mustapha EL HACHEMI Fayçal ABDELAZIZ Nadim NOUR Hayet OUZAYED A. ZAKIA Amar INGRACHEN Salim Hamza Direction technique et P.A.O : Djamel ATMANI Salim RABIAI Correction : Omar HADJ BOUZID M. HALLOUCHE Abonnements & Publicité : Abdelhafid MEFTAHI Monia TOBBAL Mahmoud TRIA Kahina DEBOUZ Larbi TEMIM “ Régie Publicitaire : Les Nouvelles Revues Algériennes et ANEP Régie presse 1, Rue Pasteur - Alger Dépôt Légal : Janvier 2011 les manuscrits, photographies, illustrations ou tout autre document adressés ou remis à la rédaction ne sont pas rendus et ne peuvent faire l’objet d’aucune réclamation. Meilleurs Voeux 31 L'absence d'une banque maghrébine reflète l'état actuel de l'UMA 49 Le contrôle européen ICS et son impact sur les exportations : L'Algérie à la traîne 32 La guerre des monnaies, ou la nouvelle crise économique mondiale 50 Entretien avec M. Lotfi Halfaoui à propos de l'ICS : "Notre pays ne s'est pas préparé car il n'a pas la culture de veille" 36 Les entreprises algériennes se normalisent 52 Algérie-Union européenne : Rééquilibrer les échanges, un défi à relever 55 Jeux : Enigmes, Quiz monétaire et Sudoku 56 Les aides financières promises à l'Afrique non encore concrétisées : Le jeu trouble du Vieux Continent 58 Foires et salons : Programme des manifestations économiques 2011 en Algérie 40 Chômage : Les universitaires diplômés sont les plus touchés 44 Urbanisme : Cap sur le développement du secteur de l'immobilier 46 Promotion de la production nationale : Un préalable pour la réduction de la facture des importations Economie Les spécialistes en la matière soutiennent que l'Etat, qui veut revenir en force dans la gestion des affaires des entreprises publiques, a un seul objectif : redynamiser et développer plusieurs secteurs d'activité et bâtir une économie solide basée sur une productivité en créant de la richesse et de l’emploi Après l'ouverture et les privatisations tous azimuts L'Etat veut redynamiser Par Mina B. L es pouvoirs publics parlent d'un changement radical dans la politique économique en faveur des entreprises publiques. Le gouvernement, après avoir opté pour une ouverture sans limite, traduite par des privatisations tous azimuts, a pris tout le monde à contre-pied depuis au moins deux ans. En effet, le gouvernement qui s’est rendu compte de l'échec d'une partie de cette fameuse privatisation, dont les dommages collatéraux se sont fait sentir notamment au niveau des travailleurs, a décidé de soutenir bec et ongles les entités économiques publiques. Il est vrai que la conjoncture à travers le monde verse depuis 2008 dans un patriotisme économique sans précédent, même au niveau des pays réputés ultralibéraux tels que les USA. Mais l'Algérie ne veut vraisemblablement plus perdre son tissu industriel. Donc, la politique prônée par le gouvernement visant à soutenir les entreprises publiques commence à se concrétiser sur le terrain. Pour ce faire, l'exécutif n'a pas lésiné sur les moyens pour peu que les choses reprennent. En effet, en sus des enveloppes colossales destinées à redynamiser certains secteurs, le gouvernement a même réaménagé certains textes de lois pour permettre aux entreprises publiques de se remettre sur les rails. Les plus récentes déclarations dans ce sens émanent du ministre des Travaux publics, M. Amar Ghoul, qui a fourni un peu plus de détails sur cette question. S'exprimant lors d'une rencontre à Alger, le ministre a fait savoir que le gouvernement avait décidé d'injecter un budget de 120 milliards de dinars dans l'objectif de soutenir les entreprises du secteur et les encourager à investir. L’ACTUEL / Janvier 2011 - 18 Economie Plus de 50 entreprises concernées En sus de cette somme colossale, le gouvernement a déterminé le nombre d'entreprises qui seront touchées par les mesures de soutien. En effet, le nombre sera de 51 entreprises publiques économiques relevant, notamment, de la SGP Sintra qui bénéficieront de cet investissement. Comment ? Le gouvernement compte non seulement injecter de l'argent mais également il veut opter dans l'assainissement. En clair, près de la moitié des 50 milliards de dinars sera destinée à l'assainissement financier des entreprises publiques et l'effacement de leurs dettes fiscales et parafiscales. L'autre partie du budget touchera les programmes d'investissement, les équipements, la formation et le recyclage du personnel de ces entités économiques. le secteur public Le message du gouvernement Ce qui s'apparente à une bouffée d'oxygène permettrait, à coup sur, à ces entreprises d'améliorer leur production. N'en restant pas là, les pouvoirs publics comptent redorer le blason de certaines entreprises à l'image de Saidal et le fleuron de l'industrie nationale, en l'occurrence l'Entreprise nationale des véhicules industriels (SNVI). D'autres secteurs sont également en ligne de mire du gouvernement. On peut citer notamment la restructuration du secteur du ciment, de la pétrochimie et de la sidérurgie. Il faut dire que le gouvernement a dégagé des sommes importantes pour le secteur public et beaucoup a été fait. Dans ce sens, on peut dire qu'il est même privilégié en termes d'investissement et d'octroi de marchés publics via la promulgation du code des marchés publics. Des décisions ou mesures qui s'inscrivent en droite ligne des dernières lois de finances, les LFC 2009 et 2010. Cette dernière a, à titre d'exemple, institué l'obligation pour les soumissionnaires étrangers aux appels d'offres internationaux d'investir dans le cadre d'un partenariat. L'Etat a également institué le droit de procéder à la reprise des actifs publics cédés dans le cadre de ces opérations, au cas où le repreneur ne s'acquitterait pas de ses obligations, notamment de paiement. Parmi les mesures phares concernant le secteur public, citons l'octroi de la garantie de l'Etat aux crédits bancaires alloués pour la modernisation des entreprises publiques stratégiques et la prise en charge par l'Etat des intérêts sur ces crédits pendant les périodes de différés de paiement. L’ACTUEL / Janvier 2011 - 19 Les spécialistes soutiennent à ce propos que l'Etat, qui veut revenir en force dans la gestion des affaires des entreprises, a un seul objectif : redynamiser et développer plusieurs secteurs d'activité, et bâtir une économie solide basée sur une productivité et créer de la richesse et de l'emploi. D'autant plus que nos seules ressources financières proviennent dangereusement du pétrole. Une matière première dont la durabilité commence à diminuer. Car, à travers le monde, on pense d'ores et déjà à l'après-pétrole. Et l'Algérie ne doit pas faire exception Interview de M.Gérald Lacaze, Président du Directoire de la Société Générale Algérie "Notre objectif est d'avoir 150 agences en 2015" Dans cet entretien exclusif accordé à L'ACTUEL, Gérald Lacaze, Président du Directoire de la Société Générale Algérie, a fait savoir que cette banque privée possède 54 agences complètement opérationnelles, 9 en attente d'agrément Comex, 19 en attente d'agrément pour ouvrir leurs portes et 5 en travaux. Par ailleurs, M. Lacaze a indiqué que la priorité pour SGA est d'offrir à la clientèle une qualité de services toujours meilleure. S'agissant des mesures prises par le gouvernement dans le cadre du patriotisme économique, M. Lacaze affirme qu'il s'agit de mesures mûrement réfléchies. En tant qu'opérateur économique algérien, SGA doit s'y adapter au mieux de l'économie algérienne Entretien réalisé par Salim Hamza Entretien L'Actuel : M. Lacaze, pouvez-vous nous présenter un bilan chiffré des dernières réalisations de la Société Générale Algérie. Et quels sont vos bénéfices ces deux dernières années ? M. Lacaze : Nos chiffres sont publiés tous les ans, et si l'on se reporte à l'exercice 2008, celui-ci a extériorisé un bénéfice net de 1,430 milliard DZD ; quant à 2009, le montant s'était élevé à 2,591 milliards DZD. Nous espérons pouvoir extérioriser un chiffre au-dessus des 3 milliards DZD pour 2010, mais pour être plus direct, l'ambition de SGA ne consiste pas uniquement à augmenter ses bénéfices tous les ans. Bien sûr, l'actionnaire souhaite voir un vrai retour sur les fonds qu'il a investis, tout comme les Autorités préfèrent voir les établissements algériens se développer et créer de la valeur pour le pays. Donc notre stratégie, au-delà du résultat annuel, porte essentiellement sur la qualité de nos opérations et la satisfaction de notre clientèle. Qu'en est-il du développement de votre réseau à l'échelle nationale ? Notre réseau a connu un développement timide dans les premières années de notre existence, puisqu'à fin 2006 il comptait 24 agences réparties essentiellement à Alger et dans quelques grandes willayas du nord. Mais dès 2007 nous avons établi un plan ambitieux de croissance avec la volonté de parvenir à un nombre d'agences approchant les 150 pour 2015 ; plan ambitieux mais pas extraordinaire si je regarde ce que nos consœurs marocaine et tunisienne affichent aujourd'hui (327 pour la SGMA et 113 pour l'UIB). Dans vos récentes déclarations, vous avez indiqué que Société Générale Algérie n'a pas de date fixe pour l'ouverture de certaines agences ? Pourquoi ? Quel est le nombre de vos agences déjà opérationnelles au niveau national, et combien comptezvous atteindre prochainement ? Aujourd'hui, notre plan de développement est freiné car nous portons des charges de plus en plus importantes (loyers, gardiennage, entretien, amortissement, etc...) sur un certain nombre d'agences pour lesquelles nous n'avons aucune visibilité quant aux dates d'ouverture à la clientèle. De ce fait, notre plan de développement a été stoppé au cours du dernier trimestre 2009. Aujourd'hui, notre réseau se compose de 63 agences dont malheureusement 9 sont en attente pour opérer des comptes et transactions en devises au profit de la clientèle. Donc, concrètement nous avons 54 agences complètement opérationnelles, 9 en attente d'agrément Comex, 19 en attente d'agrément pour ouvrir leurs portes et 5 en travaux. Après, nous avons dû arrêter notre expansion Quelles sont vos branches de prédilection ; et peut-on savoir qui sont vos principaux clients ? Pour ce qui est du nom de nos principaux clients, il va de soi que nous ne pouvons pas les nommer pour une question de déontologie. Mais SGA est fière d'être le partenaire des principales sociétés privées algériennes, qu'elles soient à capitaux nationaux, internationaux ou mixtes ; et cela dans tous les principaux secteurs d'activité de l'économie. Nos clients opèrent aussi bien dans le BTPH, l'industrie agroalimentaire, pharmaceutique, les transports, l'énergie, le grand commerce, la distribution, les mines, etc... Nous n'avons pas de secteurs de prédilection dans la mesure où nous sommes une banque universelle au service de L’ACTUEL / Janvier 2011 - 27 tous les pans de l'économie nationale, mais nous accordons la priorité aux secteurs productifs. Le gouvernement algérien n'a cessé, depuis quelque temps, d'appeler les différentes banques à redéployer leurs activités en direction des PME et du crédit immobilier. Qu'en est-il de votre banque ? Nous sommes bien entendu à l'écoute des orientations prônées par le gouvernement et c'est bien pour cela que nous avions lancé un grand programme d'extension de notre réseau d'agences afin d'être au plus près de notre clientèle, particulièrement des PME qui sont loin d'être toutes installées dans les quatre ou cinq plus grandes villes du pays. Quoiqu'il en soit, nous travaillons aujourd'hui avec plus de 5.000 entreprises algériennes, et ce chiffre continue de croître même si notre réseau ne connaît pas le développement que nous souhaiterions. Le métier de banquier est un métier d'intermédiation et si nous collectons des ressources c'est essentiellement dans le but de les placer dans le cadre de financements sécurisés auprès de notre clientèle, et en premier lieu des PME, aussi bien pour répondre à leurs besoins dans le cadre du financement de leurs investissements à moyen et long termes que dans le cadre de leurs besoins de trésorerie. Ainsi, notre réseau comprend deux agences dédiées aux grandes entreprises internationales et aux grandes entreprises nationales. Par ailleurs nous avons créé plusieurs centres d'affaires essentiellement dédiées aux PME. Aussi, nous sommes partenaires de plus de 17.000 professionnels, et là il faut entendre aussi bien les opérateurs "profession libérale" (médecins, pharmaciens, avocats, experts, etc..) que les opérateurs "commerçants, artisans, gérants de Très Petites Entreprises". Entretien “ Nous espérons pouvoir extérioriser un chiffre au-dessus des 3 milliards DZD pour 2010. L'ambition de SGA ne consiste pas uniquement à augmenter ses bénéfices tous les ans. Notre stratégie porte essentiellement sur la qualité de nos opérations et la satisfaction de notre clientèle Enfin, plus de 24.000 clients particuliers sont servis par nos 63 agences et nous avons développé pour eux une gamme de produits d'épargne comme une gamme de crédits immobiliers ou de crédits à l'habitat, y compris les crédits à taux bonifiés encouragés par le gouvernement. Depuis l'annonce en grande pompe par le gouvernement de l'instauration d'un crédit à taux bonifié destiné aux personnes ayant des salaires moyens, une mesure prise pour éradiquer la crise de logement, pouvez-vous nous dire le nombre de crédits octroyés dans ce segment d'activité ? Comme je viens de l'indiquer Société Générale Algérie a développé l'outil informatique nécessaire pour gérer les crédits immobiliers à taux bonifiés. Cet outil doit gérer la part "client" et la part "bonification". Nous ne nous sommes pas précipités sur la mise en place du produit, préférant être certains des modalités d'intervention “ et des modalités de gestion avant de le proposer à notre clientèle. Une dizaine de dossiers sont en phase de test et une centaine en phase d'études. Dès la fin de la phase "pilote", nous industrialiserons sur tout le réseau l'offre crédit logement à taux bonifiés et nous escomptons pour 2011 plusieurs centaines de dossiers décaissés. Les banques de la place ont également dû s'adapter à ces nouvelles mesures qui commencent à porter leurs fruits. Pour notre part, nous coopérons avec les promoteurs et les agences immobilières. Certaines ont des produits à offrir en phase quasi achevée. Nous retenons tous les produits qui nous semblent raisonnables et sérieux et nous vérifions les rapports qualité/prix pour mieux conseiller nos clients. Sur certains projets nous avons même une permanence sur site pour réaliser des simulations. Certains estiment que les crédits octroyés par les banques dans ce sillage ne sont guère suffisants, d'autant que les prix fixés par les promoteurs immobiliers dépassent des seuils inimaginables. Donc, pour eux, il s'agit de la poudre aux yeux. A votre avis où se trouve la faille ? Société Générale Algérie est-elle pénalisée par la suppression du crédit à la consommation ? Je ne pense pas qu'il s'agisse de poudre aux yeux. Le gouvernement a le souci de favoriser l'accès au logement des citoyens et en priorité ceux ayant des revenus modestes. Les objectifs ont été posés et les procédures d'accompagnement progressivement mises en place. Nous ne sommes pas plus pénalisés que les autres établissements de la place. Nous avons pris acte de la décision des Autorités et nous nous sommes attelés à suivre les préconisations, à savoir développer les crédits immobiliers, les crédits à l'habitat, le LSP pour les prêts sociaux ; L’ACTUEL / Janvier 2011 - 28 Entretien donc les crédits à taux bonifiés mais aussi une offre monétique plus large et le Direct Banking illustré par le lancement récent du SMS-banking (Messagi et Messagi Pro) qui permet à notre clientèle de particuliers comme des professionnels d'obtenir régulièrement la position de leurs comptes comme les dernières opérations passées directement sur leur téléphone cellulaire, mais aussi le succès toujours croissant de notre centre d'appels, Sogeline. Quel commentaire faites-vous sur la décision du gouvernement de lever l'interdiction faite aux entreprises et organismes publics de travailler avec les banques privées ? Ces banques privées, notamment SGA, étaient-elles pénalisées par ladite décision ? Pour ma part, je ne sais pas de quelle décision récente il est question. Sinon, une décision du Chef du Gouvernement datée du 8 août 2004 avait en effet amené les entreprises publiques à n'opérer qu'avec des banques du secteur public, suite au scandale financier qui avait secoué la place. Cette note a été rapportée par le Chef du Gouvernement le 30 septembre 2007. Donc, depuis plus de trois ans, aucune instruction n'interdit aux entreprises et organismes publics de travailler avec les banques privées. De fait, nous sommes fiers d'avoir pour clients certains des organismes les plus prestigieux de l'Etat ; d'autres, et je pense notamment à deux grandes entreprises publiques, ne travaillent pas directement avec nous. Je respecte bien entendu leur choix commercial car naturellement chaque entité est libre de choisir ses partenaires financiers. Par contre, ce qui me frustre, c'est cette approche de ne pas nous considérer sur un pied d’égalité qu'une banque publique car cela pénalise certains de nos clients, algériens ou étrangers, qui ne peuvent postuler à certains marchés du fait que leur soumission à des appels d'offres est refusée lorsque les cautions de soumission sont émises par un établissement comme le nôtre, c'est-à-dire une banque algérienne soumise à la réglementation algérienne et sous la supervision de la Banque d'Algérie mais à capitaux privés. Autant je comprends le droit pour chaque établissement de choisir ses banques, autant je ne comprends pas le droit pour ces mêmes établissements de sélectionner les banques algériennes de leurs propres clients. Plusieurs parties ont critiqué les dernières mesures prises par l'Etat algérien dans le cadre de LFC 2009. Des mesures entrant dans le cadre du patriotisme économique ou le retour en force de l'Etat après une ouverture sans limite sur le commerce extérieur. Quelle appréciation faites-vous sur ces mesures ? Personnellement je n'ai pas à commenter les mesures prises par l'Etat, et encore moins à les critiquer. Je suis certain qu'elles ont été mûrement réfléchies, donc en tant qu'opérateur économique algérien nous devons nous y adapter au mieux de l'économie nationale. Cela est parfois délicat, notamment quand sont remises en cause des orientations planifiées de longue date, mais nous devons nous y adapter et faire preuve de patriotisme économique. Le commerce extérieur est à double sens : l'Algérie importe en effet un grand nombre de produits et matières premières mais heureusement elle exporte, au moins en montant, un volume encore plus important ; à preuve les réserves de change dont dispose le pays. Maintenant, le problème est bien connu : nos exportations reposent essentiellement sur le pétrole et le gaz et nos imporL’ACTUEL / Janvier 2011 - 29 tations d'Europe, d'Asie ou d'Amérique concernent tous les segments d'activité, y compris d'ailleurs l'industrie pétrolière. Le gouvernement a donc pour priorité d'encourager la production nationale et, si possible, les exportations de biens fabriqués en Algérie, ce qui est des plus logiques. La seule chose que je souhaite dans le cadre de cette politique c'est toujours plus de concertation entre les opérateurs économiques algériens et l'Etat, afin que les intérêts de notre économie soient préservés au mieux. Quel est, à votre avis, le classement de SGA au sein du marché bancaire algérien ? Un classement est toujours délicat à élaborer si nous ne nous référons pas à un critère précis. Incontestablement, nous nous situons derrière la plupart des banques publiques qui du fait de leur ancienneté, de leur réseau et de leur base de clientèle historique, se situent devant nous. Ensuite, si nous prenons pour critère l'étendue du réseau, le nombre de clients, les encours de crédit, je pense que nous nous classons au premier rang des banques privées. Mais ce qui compte le plus pour moi, c'est la satisfaction de notre clientèle. Donc, je ne cherche pas forcément que Société Générale Algérie soit classée première mais plutôt à ce que nous soyons perçus par la clientèle comme une banque offrant des prestations de qualité. Là est notre challenge, et je m'attache tous les jours à ce que nous progressions sans cesse à ce niveau. Le classement viendra de lui-même dans ces conditions. Entretien Dans votre plan de développement, êtes-vous positionné sur une politique commerciale agressive où êtes-vous plutôt dans une situation confortable qui ne nécessite pas a priori cette démarche ? Et pourquoi ? Nous avons la chance de faire partie d'un grand groupe international, présent dans plus de 80 pays. Dans plus de 40 pays nous disposons d'une banque de réseau à vocation universelle, comme en Algérie. En chiffres, et sans prendre en compte le réseau France, cela veut dire plus de 62.000 collaborateurs, plus de 3.800 agences, plus de 13 millions de clients, plus de 65 milliards d'euros de dépôts et presque autant d'engagements. Donc, oui, nous avons une politique commerciale agressive, je veux dire par là, oui nous ambitionnons de croître en Algérie tant en termes de réseau que de clientèle, de produits ou services et encore et surtout en termes de qualité. Nos 1.340 collaborateurs ont cet objectif, et aussi bien notre centre de formation que l'assistance du groupe ont vocation à améliorer la qualité de nos prestations et la qualité de notre offre produits et services. Pouvez-vous nous donner un aperçu sur le marché bancaire algérien ? Notre marché est en pleine évolution, et en même temps en adaptation continue à l'économie nationale et internationale. Ce matin-même, j'ai assisté à la présentation des résultats de l'entrée en Bourse de la société Alliance Assurance (lors de la présentation du bilan officiel de l'entrée en Bourse de la compagnie Alliance Assurance, tenue le 28 décembre dernier ndlr). Cette opération a connu un franc succès et en appelle d'autres dans les mois qui viennent. C'est une très bonne chose pour la Bourse d'Alger et au-delà pour le marché financier national. Il n'y a pas de raison pour que nous ne soyons pas rapidement au niveau des marchés voisins. C'est du moins ce que je souhaite et SGA est fière de participer à cette évolution. A ce propos, la modernisation du système bancaire algérien, un processus entamé depuis 2002 a, certes, enregistré des avancées mais celui-ci est loin d'être réellement performant. Pouvez-vous nous dire, en tant que premier responsable d'une banque privée et/ou spécialiste bancaire, pourquoi le secteur bancaire algérien est-il loin d'être performant ? La réponse à votre question n'est pas des plus faciles. Nous ne pouvons pas ignorer les années terribles qu'a connues le pays et, incontestablement, elles ont constitué un frein au développement de l'économie nationale. Sous la présidence de Monsieur Bouteflika un nouveau souffle a été donné, et quel souffle ! Mais l'Algérie n'est pas isolée de l'économie mondiale même si elle a su se protéger, en grande partie, des effets nocifs de la crise financière internationale. Je ne crois pas au "big bang" pour révolutionner l'économie nationale et son adaptation ne pourra être que progressive. Ainsi, je côtoie chaque jour des opérateurs qui ont des projets de développement pour leurs entreprises, et comme le marché algérien est vaste de par sa géographie, ses richesses, sa population, etc..., tous les ingrédients sont là pour un développement harmonieux et enrichissant pour le pays. Les exportations hors hydrocarbures sont encore limitées mais elles progressent, et là aussi je côtoie L’ACTUEL / Janvier 2011 - 30 régulièrement des investisseurs et des entrepreneurs qui s'ouvrent à l'économie extérieure. Croyez-moi, le potentiel de développement économique de l'Algérie est important et je suis certain que nous saurons tirer notre épingle du jeu. Le secteur bancaire algérien n'est peut-être pas l'un des plus développés mais il progresse régulièrement, que ce soit au niveau des banques publiques comme des banques privées, et il saura répondre aux besoins de la Nation. A court terme, quels sont vos priorités et les points à développer ? A court terme, comme à moyen terme d'ailleurs, la priorité pour un établissement comme le nôtre est d'offrir à notre clientèle une qualité de service toujours meilleure. Là réside et résidera notre succès et par voie de conséquence notre développement au service de l'économie nationale. Donc, priorité à la satisfaction de nos clients tant en termes de qualité de service que d'offre produits. En parallèle, continuer de donner à nos collaborateurs la satisfaction de travailler dans de bonnes conditions pour un groupe international au service de l'économie algérienne et, ainsi donner raison à notre actionnaire qui a cru, dès la fin des années 90, au développement du pays et a souhaité en être un acteur Finance Le taux de change entre monnaies risque de causer des conflits entre Etats La guerre des monnaies, ou la nouvelle crise financière mondiale La "guerre des monnaies" engendrée par les tensions sur les taux de change du dollar et du yuan et les incertitudes sur l'avenir de l'euro ont illustré, en 2010, le fossé grandissant entre des économies développées en crise et des pays émergents, champions de la croissance. Eclairage Par Mina Boualem A près la crise financière puis économique, le monde de la finance est encore frappé par un autre virus : le taux de change. Un problème ou conflit créé, pas par les crédits à la consommation ou crédits toxiques, mais par les Etats eux-mêmes… L'enjeu est tellement énorme que les spécialistes en finance parlent d'ores et déjà d'une "guerre de monnaies". De la Chine aux Etats-Unis en passant par l'Europe, la Corée du Sud ou le Japon, chaque gouvernement y va de sa petite phrase pour critiquer l'action du voisin. Le motif ? Plusieurs pays veulent doper leurs exportations avec une monnaie faible. En cette période de reprise économique molle, les ménages et les entreprises se désendettent, ce qui pèse sur la consommation intérieure. Chaque Etat veut donc doper ses exportations. "Avoir une monnaie faible est alors un atout car leurs produits coûtent moins cher", expliquent les économistes. Les banques centrales ou les institutions monétaires de chaque pays, afin d'affaiblir leur monnaie ont, dans ce cas de figure, deux solutions : diminuer leur taux directeur ou faire tourner la planche à billets. Par souci d'inflation, la deuxième option est écartée. Après le Japon qui a dégainé le premier en baissant le taux directeur de sa monnaie, le Brésil a aussi pris des mesures pour limiter la hausse du real. La Chine, de son côté, décide de continuer à refuser de réévaluer son yuan, les Etats-Unis ne semblent pas pressés de combattre la chute du L’ACTUEL / Janvier 2011 - 32 dollar. La boucle est presque bouclée et la première victime n'est autre que l'Union européenne. Pourquoi ? Face à la faiblesse des autres devises, l'euro grimpe à toute vitesse. Se voyant le grand perdant, l'UE a, à maintes reprises, demandé aux Chinois d'agir en faveur de la réévaluation du yuan, sans toutefois parvenir à avoir une réponse positive. Finance Les couteaux croisés des pays développés Certains responsables internationaux, à l'image du ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, soutiennent que "nous vivons aujourd'hui une guerre des monnaies internationale, une dépréciation des monnaies généralisée". L'expression allait fleurir. Elle donnait un nom accrocheur à des différends larvés entre les dirigeants des plus grandes économies de la planète, celles qui exportent beaucoup (la Chine, l'Allemagne, le Japon) et celles qui aimeraient le faire plus (Etats-Unis, pays de la zone euro). Face à cet état de fait, la décision la plus importante de l'année écoulée, en l'occurrence de celle de la Banque centrale chinoise de laisser flotter plus librement le yuan, peu avant un sommet du G20 à Toronto, a eu des effets mitigés. Elle n'a pas calmé les parlementaires américains en guerre ouverte contre Pékin. "Seule une législation forte fera changer les Chinois et arrêtera le flux d'emplois et de richesses qui fuient l'Amérique", ne cessent de répéter les responsables américains qui cherchent, selon les experts indépendants, à faire adopter une loi de rétorsion commerciale. Ces propos renseignent à quel degré les Américains veulent à tout prix faire plier les Chinois selon leur propre logique . Et pour cause, la Chine, du haut de ses 10% de croissance, s'agace contre les "pressions étrangères". Sa politique est "cohérente et responsable" pour reprendre les expressions de certains experts étrangers, cités par des agences spécialisées. Une hausse rapide du yuan "conduirait beaucoup d'entreprises chinoises à la faillite, mettant des gens au chômage (...) et créant des troubles sociaux", précisent-ils. Et d'ajouter qu'en près de six mois, la monnaie chinoise ne s'est appréciée que de 2,5% face au dollar. Le cri d'impuissance du FMI Face à cet état de fait, le président du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, s'est contenté de dire qu'il prend "très au sérieux la menace". Pour la même source, cette guerre des monnaies risque de mettre à mal une reprise économique déjà fragile. L'institution que préside le français DSK juge toujours la monnaie chinoise "nettement sous-évaluée". Et le dollar ayant lui-même baissé face à presque toutes les autres monnaies, le yuan s'est déprécié face à l'euro (4%) et au yen (de plus de 5%). S'il y a bien "guerre des monnaies", Européens et Japonais se considèrent comme des victimes. Du côté européen, les pays en pleine récession comme la Grèce ou l'Irlande souffrent d'avoir la même monnaie que l'Allemagne, en pleine expansion. Pour ce qui est du japon, en intervenant la fin de l'année dernière pour arrêter l'ascension du yen, s'est attiré des critiques qui épargnent d'autres pays plus interventionnistes. Une guerre monétique sans précédant Les experts exerçant pour des cabinets internationaux estiment, de prime abord, que cela fait près de 40 ans que le monde voit cohabiter des monnaies dont le cours flotte au gré des marchés, et d'autres pilotées par les banques centrales. Cependant, ce système de l'étalon-dollar paraît toucher ses limites. On peut citer, dans ce sens, les propos de l'économiste français Patrick Artus qui a expliqué dans son livre "La liquidité incontrôlable" qu'il poussait tous les pays à créer des quantités démesurées de monnaie. Les Etats-Unis, écrit-il, jouissent du privilège d'émettre "sans complexe" une monnaie pour laquelle la demande semble intarissable. Face à eux, les banques centrales doivent contrer la hausse de leur monnaie en achetant ces dollars, réinvestis en réserves, principalement des titres de dette du Trésor américain. La Chine émet donc des yuans, le Brésil des reals, la Corée des wons... Ce système L’ACTUEL / Janvier 2011 - 33 paraît si intenable que les Etats-Unis eux-mêmes le remettent en cause. Devant l'entêtement des uns et les plaintes des autres, ce qui s'apparente à une véritable guerre risque également de marquer l'année 2011. Sauf revirement spectaculaire de la situation. Affaire à suivre Agriculture Sécurité alimentaire : L'autre défi du gouvernement Par Hayet Ouzayed Les pouvoirs publics ont élaboré un Plan national d'appui aux industries agro-alimentaires (PNDIAA) qui sera mis en œuvre prochainement et s'étalera jusqu'à 2014. Les grands axes de ce plan portent essentiellement sur l'intégration de la production nationale, la substitution aux importations et la promotion des exportations L e défi est aujourd'hui de taille pour les pouvoirs publics : comment parvenir à nourrir les quelque 35 millions d'Algériens, mais surtout comment réduire la recette alimentaire couverte exclusivement par la rente pétrolière. A l'image de ses voisins maghrébins, l'Algérie a pour objectif de résoudre le problème de l'insécurité alimentaire en assurant un volume suffisant d'aliments pour une population sans cesse croissante. La production "naturelle" ne suffit pas à elle seule, encore moins les stocks. Donc c'est parvenir à la suffisance alimentaire et plus loin à la sécurité, par notamment le développement de l'industrie agroalimentaire. Il convient de rappeler sur ce point que l'Algérie bénéficie d'une conjoncture économique très favorable depuis 2003, grâce à la manne pétrolière. Chose qui pourra jouer en faveur de la mise en œuvre des différents programmes lancés dans le secteur à l'image du Programme national de développement agricole (PNDA). La valorisation de l'activité productive de cette filière industrielle est, de l'avis des experts, une alternative aux différentes stratégies entreprises dans ce cadre et qui ont surtout fait preuve de leur incapacité à assurer une suffisance alimentaire pour l'Algérie. Le secteur agroalimentaire demeure encore le parent pauvre de l'agriculture L’ACTUEL / Décembre 2010 - 52 nationale compte tenu des multiples entraves relevées par les opérateurs dans ce domaine. L'importance de valoriser, voire d'édifier une réelle activité agroalimentaire dans le cadre de la sécurité alimentaire est soulignée de la part des hauts responsables du pays. Citons le ministre de l'Industrie, de la PME et de la Promotion des investissements, M. Mohamed Benmeradi, qui a souligné la nécessité de réduire la dépendance de l'Algérie vis-à-vis des importations de produits agroalimentaires. Le ministre a, lors d'une réunion avec les présidents des directoires de trois sociétés de gestion des participations (SGP) du secteur de l'industrie agro-alimentaire, rappelé "la nécessité pour ces types d'industries, aujourd'hui très extraverties, de réduire la dépendance vis-à-vis des importations et de lancer toute action de nature à favoriser le développement de l'amont agricole". Cela pour dire le grand intérêt porté par les autorités concernées pour développer ladite activité. Notons que dans la pratique les choses sont plus compliquées puisque les opérateurs peinent souvent en essayant de garder le cap. Une enquête d'opinion effectuée récemment par l'Office national des statistiques (ONS) auprès des chefs d'entreprise rapporte que près de 14% des chefs d'entreprise jugent "mauvais" l'état de la trésorerie des entreprises en raison, essentiellement, de l'allongement des délais de recouvrement et aux charges trop élevées. Ainsi, précise-t-on, 25% des concernés par l'enquête ont recouru à des crédits bancaires et 11% ont eu des difficultés à les contracter. L'activité de l'industrie agroalimentaire a progressé au cours du second semestre 2010, précise la même source. Agriculture Une industrie face à de multiples entraves Il convient de préciser également que plus de 28% du potentiel de production ont enregistré des ruptures de stocks, induisant des arrêts de travail de plus de 30 jours pour plus de 44% des entreprises touchées par l'enquête. Cela va sans compter les pannes d'électricité qui ont causé des arrêts de travail inférieurs à 6 jours pour 88% des industriels concernés par l'enquête. Sur un autre volet, 80% des chefs d'entreprise questionnés estiment la satisfaction des commandes de matières premières égale aux besoins exprimés alors que 18% l'estiment inférieure. Cette enquête qui traite, notons-le, du type et du rythme de l'activité industrielle et non pas sur la production, révèle que les capacités de production sont utilisées à plus de 75% par 62% des entreprises de cette filière. Aussi, développer l'industrie agroalimentaire relève grandement de la qualification de la main-d'œuvre. 21% des entreprises touchées par cette enquête affirment avoir trouvé des difficultés à recruter des cadres et des agents de maîtrise et 28% jugent le niveau du personnel "insuffisant". L'urgence de fonder une industrie de l'agroalimentaire semble encore plus importante si on prenait en compte la hausse effrénée des cours des prix alimentaires dans les bourses internationales. Des hausses qui poussent certains spécialistes à s'interroger sur les capacités des marchés internationaux à assurer les approvisionnements nécessaires en nourriture à des prix abordables. En Algérie, les exportations de produits agroalimentaires restent marginales alors que le Maroc, avec plus de 2 milliards de dollars, réalise plus de 20% de ses exportations dans ce secteur. Ces exportations ne représentent que 0,15% des exportations totales et 6,1% des exportations hors hydrocarbures. Elles ne couvrent par conséquent que 1,5% des importations de biens alimentaires. Par ailleurs, au niveau gouvernemental, développer et augmenter la production agroalimentaire est au cœur des différentes politiques mises en œuvre. Les pouvoirs publics ont élaboré un Plan national d'appui aux industries agroalimentaires (PNDIAA) qui sera mis en œuvre prochainement et s'étalera jusqu'à 2014. Les grands axes de ce plan portent essentiellement sur l'intégration de la production nationale, la substitution aux importations et la promotion des exportations. Le but principal de ce plan est d'accroître de 10 points la contribution des industries agroalimentaires (IAA) dans le PIB industriel en la faisant passer de 50% en 2009 à 60% en 2014. En 2003, le secteur agricole a participé à hauteur de 11,1% au PIB. Ce plan vise également à densifier le tissu industriel dans les IAA à travers la création de 500 entreprises au sein d'agropoles entre 2010 et 2014 et la création de 100.000 emplois jusqu'à 2014. En Algérie, les exportations de produits agroalimentaires restent marginales alors que le Maroc, avec plus de 2 milliards de dollars, réalise plus de 20% de ses exportations dans ce secteur Ce plan vient consolider le programme élaboré en 2000 et qui vise particulièrement à reconstruire le territoire agricole de l'Algérie afin d'améliorer la compétitivité de l'agriculture, accroître les productions et les rendements, protéger les écosystèmes et poursuivre la mise en valeur des terres à vocation agricole L’ACTUEL / Décembre 2010 - 53 Société Chômage, le revers de l'économie algérienne S elon l'Office national des statistiques (ONS), l'année 2009 s'est terminée avec un bilan très positif, le taux de chômage ayant, estime-t-on, considérablement baissé durant les dernières années. En effet, après avoir atteint un total de 1.169.000 personnes sur une population active de 10.315.000 en décembre 2008, la population en chômage ou en quête d'emploi est de moins en moins nombreuse. Cependant, malgré cette légère baisse, il n'en demeure pas moins que ce taux reste l'un des plus élevés des pays méditerranéens. Cette question, importante et sensible à plus d'un titre, interpelle aussi bien le gouvernement que les opérateurs économiques privés qui, eux, peuvent jouer un rôle monumental dans la prise en charge, en termes d'emploi, des diplômés des universités, notamment ceux ayant suivi des formations dans des filières techniques et scientifiques ou celles liées aux domaines de la gestion et de l'économie comme cela se passe dans les pays émergents. Des analystes connus pour la rigueur de leurs opinion n'ont d'ailleurs pas manqué d'attirer l'attention des autorités publiques par rapport à cette question, qui peut peser de tout son poids à travers, en particulier, la coopération entre le secteur économique et l'université dans le cadre du système LMD. Cela a eu un certain effet, mais les résultats demeurent toujours insuffisants. L'optimisme du gouvernement algérien, traduit par les chiffres de l'ONS, quant à la question du chômage, est peu réaliste compte tenu de la morosité du paysage économique et de sa dépendance quasi-totale du secteur des hydrocarbures Tout récemment, les responsables de l'ONS ont communiqué les résultats préliminaires d'une enquête nationale effectuée auprès des ménages sur la base des critères du Bureau international du travail (BIT). Selon cet organisme, la population active du moment (âgée de plus de 15 ans et en mesure d'exercer une activité) est estimée à 10.544.000 personnes. De plus, l'ONS a noté que les deux-tiers de la population occupée totale sont des salariés soit permanents (33,1%), soit non permanents et apprentis (32,5%) alors que 29,2% de la main-d'œuvre totale sont constitués d'employeurs et d'indépendants, et 5% sont des aides familiaux. Cependant, à bien triturer ces chiffres, on se rend compte que même si à première vue il paraissent apaisants, il est bien vrai qu'il traduisent une incohérence certaine ; d'où d'ailleurs le scepticisme de nombre d'analystes. L’ACTUEL / Décembre 2010 - 56 Société En effet, en plus du fait qu'ils soient peu "crédibles", ces chiffres démontrent clairement que le nombre de travailleurs permanents est presque le même que celui des travailleurs non permanents, ce qui est loin d'être un simple problème compte tenu de l'instabilité professionnelle que cela cause et de la vulnérabilité sociale qui peut en résulter. Selon l'expert Abderahmanne Mebtoul, dans des propos repris par Infosoir, "les taux annoncés au début de l'année en cours par l'ONS concernant le chômage et le travail dans notre pays sont loin d'être réels". Selon lui, en fait, "l'Etat ne dispose d'aucune politique salariale pouvant assurer une baisse réelle du taux de chômage et les chiffres avancés sur le chômage sont liés aux chiffres de croissance économique du pays". Et Abderahmanne Mebtoul est loin d'être le seul à contester ces chiffres. Beaucoup d'autres, des économistes pour la plupart, joignent leurs avis au sien y compris certains organismes internationaux à l'image de the Oxford Business Group qui estime que le "taux de chômage en Algérie avoisine les 30%". la République, qui consacre 42,6 milliards de dinars à la création d'ici la fin 2010 de 60.000 emplois dans la Fonction publique, 13 milliards de dinars à 144.000 postes via le secteur de la solidarité nationale, et 24 milliards de dinars destinés à celui du travail pour 432.000 emplois. On peut signaler, cependant, que l'évolution des principaux indicateurs du marché de l'emploi ces derniers temps s'est également caractérisée, ce qu'il ne faut pas voiler, par une augmentation de la population occupée qui est passée de 6 millions en 1999 à plus de 9 millions, soit une augmentation moyenne annuelle de 5,6%. Par ailleurs, la loi de finances 2010 engage des mesures sociales, économiques et financières pour lutter contre le chômage et la création de nouveaux emplois avec, comme cheval de bataille, l'encouragement des investissements productifs générateurs d'emploi. Elle prévoit de réduire le taux de chômage à 9% avant la fin 2014. Dans ce sens, le FMI ne rechigne pas et, tout en affichant sa volonté de voir l'Etat algérien faire plus d'efforts, prévoit un net recul du taux de chômage en Algérie pouvant atteindre les 9%. Dans cette optique intervient également la loi de finances complémentaire pour l'exercice en cours, signée récemment par le président de Cet optimisme paraît, néanmoins, peu réaliste compte tenu de la morosité du paysage économique algérien et de sa dépendance quasitotale du secteur des hydrocarbures, à moins que l'on déroge cette fois-ci à la règle et que, pour la dernière fois, les opérateurs économiques algériens, publics et privés, apprennent à travailler dans le cadre d'un partenariat équilibré et que le gouvernement comprenne qu'il est temps de diversifier l'économie algérienne et d'associer les cercles universitaires à la décision I. A. L’ACTUEL / Décembre 2010 - 57