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Jésus paie le tribut
Etude de Matthieu 17.24-27
7 août 2016
Introduction
Il y a un texte dans les évangiles dont je n'ai jamais entendu parler au culte. Je crois deviner
pourquoi : il nous parle du paiement d'un impôt. Les prédicateurs qui abordent un tel sujet ne se
rendent pas très populaires. Mais aujourd'hui, je me sens d'humeur à donner dans la "provoc". Je
vais donc vous lire ce texte, en entier, et je vais même vous en parler après cette lecture.
Texte biblique (Bible du Semeur)
Matthieu 17
24 Lorsqu’ils arrivèrent à Capernaüm, ceux qui percevaient les deux drachmes s’adressèrent à
Pierre, et lui dirent : Votre maître ne paie-t-il pas les deux drachmes ?
25 Oui, dit-il. Et quand il fut entré dans la maison, Jésus le prévint, et dit : Que t’en semble,
Simon ? Les rois de la terre, de qui perçoivent-ils des tributs ou des impôts ? De leurs fils, ou des
étrangers ?
26 Il lui dit : des étrangers. Et Jésus lui répondit : les fils en sont donc exempts.
27 Mais, pour ne pas les scandaliser, va à la mer, jette l’hameçon, et tire le premier poisson qui
viendra ; ouvre-lui la bouche, et tu trouveras un statère. Prends-le, et donne-le-leur pour moi et
pour toi.
Les deux drachmes
Pour que ce texte devienne compréhensible, il faut d'abord éclaircir la question des deux
drachmes. Elles remontent à une disposition qu'on trouve en Exode 30.11-16
11 L’Eternel parla encore à Moïse en ces termes :
12 Lorsque tu recenseras les Israélites, chacun d’eux donnera à l’Eternel une rançon pour sa vie au
moment où il sera recensé ; ainsi ce dénombrement ne leur attirera aucun malheur.
13 Chacun de ceux qui seront recensés versera selon la moitié de l’unité de poids en vigueur au
sanctuaire une pièce de près de six grammes d’argent, cette pièce sera une offrande pour l’Eternel.
14 Toute personne de vingt ans et au-dessus comptée lors de ce recensement donnera cette
offrande pour l’Eternel.
15 Les riches ne paieront pas plus et les pauvres pas moins que cette pièce d’argent, pour acquitter
l’offrande due à l’Eternel, en rançon pour votre vie.
16 Tu percevras des Israélites l’argent de cette rançon et tu le destineras à l’entretien de la tente
de la Rencontre. Il rappellera à l’Eternel que la rançon pour leur vie a été versée.
Les deux drachmes correspondent à cette pièce de 6 g d'argent. Nous ne savons pas à quelle
fréquence les Israélites procédaient à un recensement. Mais chaque fois que cela se produisait tous
les adultes de plus de 20 ans devaient verser une rançon pour leur vie. De cette façon, ils ne
pouvaient pas oublier qu'ils avaient besoin d'être rachetés. Bien sûr, il ne s'agissait que de l'ombre
des choses à venir (Colossiens 2.17). Déjà le psaume 49 constate que le rachat d'une âme est cher
et que personne ne peut payer à Dieu le prix de son rachat. Pierre écrit dans sa première lettre que
"ce n’est pas par des choses périssables, par de l’argent ou de l’or, que vous avez été rachetés de la
vaine manière de vivre que vous aviez héritée de vos pères, mais par le sang précieux de Christ,
comme d’un agneau sans défaut et sans tache" (1 Pierre 1.18-19).
Cette rançon versée par les Israélites était donc symbolique et annonçait le véritable rachat que
Jésus a opéré pour nous. De même que les sacrifices d'animaux annonçaient le seul sacrifice
efficace : celui de Jésus, "car il est impossible que le sang des taureaux et des boucs ôte les péchés"
comme le dit Hébreux 10.4.
Il n'en était pas moins obligatoire pour chaque individu de payer une rançon pour sa vie à chaque
recensement. Le montant de la rançon était le même pour tous, riches ou pauvres, car tous ont la
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même valeur aux yeux de Dieu. Le riche ne vaut pas plus que le pauvre et le pauvre ne vaut pas
moins que le riche. Pour que tous puissent payer cette rançon, son montant était modeste, de
l'ordre d'une centaine d'euros. A noter que cette rançon ne doit pas être confondue avec la dîme.
Il s'agit donc d'une offrande spirituelle, pour le rachat de sa vie, mais en même temps elle a une
utilité matérielle : elle sert à l’entretien de la tente de la Rencontre et plus tard du Temple. Il fallait
des moyens pour assurer cet entretien. Par la suite, cette offrande est devenue annuelle. Il y est
fait allusion en 2 Chroniques 24 et en Néhémie 10. On constate en lisant ces textes que l'aspect
spirituel de cette offrande s'est estompé au profit de l'aspect matériel qui au départ n'était que
secondaire. A l'époque de Jésus elle était toujours annuelle. Elle pouvait être déposée dans le tronc
que le roi Joas avait fait placer à l'entrée du Temple, ou bien remise à des collecteurs comme nous
le voyons dans le récit de Matthieu.
En quoi cela nous concerne-t-il ? Nous n'avons plus à payer de rançon, puisque nous avons déjà é
rachetés à un grand prix, par la mort du Fils de Dieu sur la croix. Mais du coup, nous avons une
immense dette de reconnaissance à son égard. Bien sûr, nous pouvons exprimer cette
reconnaissance dans nos prières. Mais si elle ne s'exprime pas autrement que par des paroles, il est
permis de douter de l'authenticité de cette reconnaissance. Le psaume 116.12 pose cette question:
"Comment rendrai-je à l’Eternel Tous ses bienfaits envers moi ?" L'apôtre Paul apporte la réponse à
cette question en 2 Corinthiens 5.15, en écrivant : "Jésus est mort pour tous afin que ceux qui
vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort à leur place et ressuscité pour
eux." Notre reconnaissance doit s'exprimer par le don de nous-mêmes. L'argent que nous donnons
en offrande, le temps que nous consacrons à l'œuvre de Dieu, tout ce que nous mettons à la
disposition du Seigneur sont autant de signes concrets de notre reconnaissance et du fait que nous
vivons pour celui qui est mort à notre place. Nos offrandes en argent, en temps, en capacités, etc.
sont donc avant tout des offrandes spirituelles.
Et en même temps, comme à l'époque de Moïse, ces offrandes sont utilisées de façon pratique
pour honorer le Seigneur en entretenant les locaux de l'église, en assurant le culte, en couvrant les
besoins de l'évangélisation, de l'action sociale, etc. Rien de tout cela ne se fait tout seul et
gratuitement, et ce sont nos offrandes qui y pourvoient. C'est la volonté de Dieu qu'il en soit ainsi.
Mais ne laissons pas cet aspect pratique nous faire oublier l'essentiel : nos offrandes de toute
nature sont l'expression tangible de notre reconnaissance et de notre consécration au Seigneur.
La collecte de la rançon
Mais revenons à Pierre. "Ceux qui percevaient les deux drachmes s’adressèrent à Pierre, et lui
dirent : Votre maître ne paie-t-il pas les deux drachmes ? Oui, dit-il."
Ces collecteurs s'acquittent simplement de leur mission.
Pourquoi se sont-ils adressés à Pierre et non pas à Jésus lui-même ? Plusieurs raisons ont été
évoquées, mais aucune n'est certaine, puisque le texte ne le dit pas.
Pourquoi posent-ils la question sous une forme négative : votre maitre ne paie-t-il pas ? Etait-ce
une volonté de l'éprouver, ou simplement parce qu'ils étaient en retard dans ce paiement du fait
de leurs déplacements, ou parce que les maîtres s'en dispensaient eux-mêmes ? Nous n'avons pas
davantage la réponse à cette question.
Une troisième chose que nous ne savons pas non plus, c'est la raison pour laquelle Pierre a
répondu oui sans hésiter, surtout à la lumière de la conversation entre Jésus et Pierre qui va suivre.
Mais qu'importe ? Le fait d'ignorer ces choses est sans importance.
Que t’en semble, Simon ?
Ce qui nous intéresse, par contre, c'est le dialogue entre Jésus et Pierre. Le plus souvent, Jésus
prend la parole en réponse à une sollicitation. Cette fois, il prend les devants et pose une question
à Pierre. Que t’en semble, Simon ? Les rois de la terre, de qui perçoivent-ils des tributs ou des
impôts ? De leurs fils, ou des étrangers ?
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Pierre répond très justement à cette question purement pédagogique : "des étrangers". A cette
époque, en effet, et même jusqu'à une époque récente, les rois imposaient leurs sujets pour
assurer leur train de vie, et ils étaient eux-mêmes exemptés de tout impôt. Ce privilège s'étendait à
toute leur famille. Il était impensable de faire payer des impôts aux membres de la famille royale.
Jésus conclut de cette pratique admise par tous que les fils sont donc exempts de l'impôt.
Effectivement, Jésus en était exempt à plusieurs titres :
- Cet impôt était dû à Dieu, et Jésus, en tant que Fils de Dieu n'était donc pas imposable.
- Cet impôt était à la base une rançon pour la vie. Mais la vie de Jésus étant parfaite, il n'avait
aucun besoin de la racheter.
- Cet impôt servait à l'entretien du Temple. Mais Jésus était lui-même le véritable Temple. Le
Temple était le lieu de la rencontre entre Dieu et les siens, et c'est en Jésus que cette rencontre
a véritablement eu lieu.
Jésus avait donc trois bonnes raisons pour ne pas payer cet impôt.
Mais Jésus ne dit pas : le Fils en est exempt. Il dit : les fils en sont exempts. Il associe Pierre, mais
aussi tous les croyants à ce privilège. Les conditions d'exemption d'impôt qui s'appliquent à Jésus,
s'appliquent aussi secondairement à nous.
- En Jean 1.12-13, il est écrit : "A tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a
donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de
la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu."
Nous sommes donc nous-mêmes devenus des enfants de Dieu.
- Contrairement à Jésus, nous avons une rançon à verser pour notre vie, parce que nous
sommes pécheurs. Mais Jésus a payé cette rançon pour nous, et nous n'avons plus à la verser
nous-mêmes.
- Notre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en nous (1 Corinthiens 6.19). Nous sommes
aussi nous-mêmes, d'une certaine façon, le véritable temple, ce qui n'est pas le cas des locaux
que nous utilisons.
Personne n'est donc en droit d'exiger de nous le versement d'une offrande due à l’Eternel, en
rançon pour notre vie. Nous ne sommes plus sous la loi, mais sous la grâce. La vie éternelle en
Jésus-Christ notre Seigneur est pour nous un don gratuit (Romains 6.23).
Ceux qui ne croient pas en Jésus-Christ sont étrangers à cette grâce, et ils sont donc toujours
redevables de leur rançon. Mais comme le dit le Psaume 49.6-8 : "Ils ont confiance en leurs biens et
se vantent de leur grande richesse, mais ils ne peuvent se racheter l’un l’autre ni donner à Dieu le
prix de leur rançon. Le rachat de leur âme est cher et n’aura jamais lieu."
Cependant, ce que je disais il y a quelques minutes reste vrai : notre église a toujours besoin d'un
budget pour accomplir sa mission de façon à honorer le Seigneur, et c'est à nous qui sommes ici de
pourvoir à ce budget. Mais surtout, nous avons à l'égard du Seigneur une immense dette de
reconnaissance, et la véritable expression de cette reconnaissance, c'est le don de nous-même et
des biens et facultés que le Seigneur nous a confiés.
Ne pas scandaliser
Intéressons-nous maintenant au dernier verset, où Jésus dit à Pierre : "Mais, pour ne pas les
scandaliser, va à la mer, jette l’hameçon, et tire le premier poisson qui viendra ; ouvre-lui la
bouche, et tu trouveras un statère. Prends-le, et donne-le-leur pour moi et pour toi". Un statère
valait quatre drachmes, la valeur de l'offrande pour deux personnes.
Juste un détail en passant : à Capernaüm, Jésus logeait chez Pierre. Les autres apôtres avaient dû
rejoindre leurs familles respectives. C'est certainement la raison pour laquelle Jésus ne parle pas
d'eux dans ce verset, mais seulement de Pierre.
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Mais revenons à l'essentiel. Deux éléments sont à considérer : la motivation et le moyen.
La motivation, d'abord. Jésus décide de payer le tribut pour ne pas scandaliser les collecteurs, et
ses concitoyens d'une manière générale. C'est un principe que nous devons retenir. Jésus ne faisait
aucun compromis sur la vérité, même s'il fallait pour cela affronter publiquement les autorités.
Mais à partir du moment où aucun élément essentiel de la vérité n'est en jeu, Jésus nous
encourage par son exemple à renoncer volontairement et humblement à nos droits pour ne
scandaliser personne. Le verbe scandaliser, à cette époque, ne signifiait pas "choquer", mais "faire
tomber" ou "amener à pécher". Si nous n'y prenons pas garde, nous pourrions prononcer des
paroles ou adopter une attitude manquant d'humilité et d'abnégation. En faisant cela, nous
pourrions facilement décevoir nos interlocuteurs ou les encourager à prendre les chrétiens en
grippe et les éloigner ainsi de l'évangile.
Paul écrit en 1 Corinthiens 8.9 : "Prenez garde que votre liberté ne devienne une pierre
d’achoppement pour les faibles". Une pierre sur laquelle on trébuche et qui fait tomber.
Et en 1 Corinthiens 10.33, Paul nous exhorte ainsi : "Faites comme moi: je m’efforce en tout de
plaire à tous, recherchant non mon avantage mais celui du plus grand nombre afin qu’ils soient
sauvés." Retenons donc l'exemple de l'attitude de Jésus.
Venons-en maintenant au moyen utilisé par Jésus. C'est en souvenir de ce récit qu'on trouve
maintenant de l'excellent St Pierre sur l'étal de nos poissonniers, malheureusement sans la pièce
d'argent dans leur bouche.
Ce miracle est insolite, pour trois raisons :
- Il ne s'agit pas de soulager la souffrance d'autrui par une guérison ou de délivrance, ni d'un
acte d'autorité de Jésus face à des éléments menaçants. Ici, Jésus accomplit un miracle pour lui-
même, pour s'acquitter de son impôt.
- Ce miracle ne semblait pas s'imposer. La somme nécessaire était modeste, et il y avait
d'autres moyens plus ordinaires pour se procurer l'argent nécessaire.
- Il ne nous est pas dit que Pierre est allé, qu'il a péché un poisson et trouvé la pièce. C'est le
seul miracle de Jésus qui n'est pas explicite.
Pour ces raisons, plusieurs commentateurs ont affirmé que les paroles de Jésus n'étaient qu'une
façon imagée de parler et qu'il n'y a pas vraiment eu de miracle.
Mais puisque le texte ne livre aucun élément contraire, il est juste de croire que tout s'est passé
comme Jésus l'a dit, et que Pierre a effectivement trouvé le montant exact de l'impôt dans la
bouche du premier poisson péché ce jour-là.
Nous pouvons constater que Dieu n'est jamais à court lorsqu'il s'agit de pourvoir au nécessaire. Ce
récit nous rappelle que tout ce que nous pouvons offrir nous vient de Dieu.
Jésus montre qu'il s'est fait Serviteur en s'acquittant de l'impôt, et, par la manière dont il le fait, il
montre en même temps qu'il est le Seigneur. Cet événement révèle à la fois son humilité et sa
divinité.
Conclusion
Je suis convaincu que nous sommes à notre tour invités à montrer aux autres une image faite à la
fois de grandeur et d'humilité, à l'exemple de Jésus. D'ailleurs, la vraie grandeur rend humble. La
véritable humilité donne de la grandeur. Bien sûr, la grandeur dont je parle n'est pas vraiment la
nôtre, mais celle du Seigneur qui se révèle en nous et au travers de nous.
Nous sommes invités à renoncer à nous-mêmes pour nous faire les serviteurs des autres. Mais nous
sommes invités aussi, au travers de notre écoute de Dieu, de notre foi et de notre obéissance, à
monter au monde combien notre Dieu est grand.
Et comme dans ce texte, l'humilité et la grandeur se manifestent aussi à propos des offrandes de
toute nature que nous apportons au Seigneur.
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