Revue Les limites de la génétique : quelle place pour le DPI

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mt médecine de la reproduction 2007 ; 9 (6) : 414-8
Les limites de la génétique :
quelle place pour le DPI ?
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Genetic limits: which place for preimplantation genetic diagnosis?
Samir Hamamah
Tal Anahory
Frank Pellestor
Vanessa Loup
Lionel Reyftman
Hervé Dechaud
Bernard Hedon
Centre d’AMP/DPI, Département de
Médecine et Biologie de la Reproduction,
Inserm U847, Hôpital Arnaud de Villeneuve,
34295 Montpellier
<[email protected]>
Résumé. Le DPI implique une fécondation in vitro dans le but d’obtenir plusieurs embryons
afin d’effectuer une analyse génique ou chromosomique. En France, il est destiné aux couples
fertiles ou infertiles susceptibles de transmettre une maladie orpheline considérée comme
grave et incurable. Une cohorte suffisante d’embryons assure la présence d’au moins un
embryon sain, ce qui suppose une grande attention sur la fonction ovarienne et les modalités
de la stimulation. La technique de l’injection intacytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) est
aujourd’hui la technique de choix pour un DPI. La biopsie embryonnaire se fait en général à
J3 de la culture embryonnaire, dans le dessein d’obtenir un embryon entre 6 à 8 cellules pour
un diagnostic par PCR ou FISH au mieux sur 2 blastomères d’un même embryon. Selon les
équipes de référence, la mise au point nécessite entre 6 et 9 mois. La politique de transfert doit
rester la même qu’en assistance médicale à la procréation pour éviter à ces couples des
grossesses multiples. Le succès de la tentative repose sur le nombre d’ovocytes, le nombre
d’embryons à biopsier et donc le nombre d’embryons sains obtenus.
Mots clés : diagnostic préimplantatoire, maladie génétique, fécondation in vitro, embryon,
injection intacytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI)
Abstract. The preimplantation genetic diagnosis (PGD) necessitates an in vitro fertilization
(IVF) aiming at obtaining several embryos for genetic or chromosomal analysis. In France, it is
restricted to fertile or subfertile couples at risk of transmitting a severe and non treatable
disease. The embryo number must be sufficient enough to yield at least one unaffected
embryo. This requires careful attention to the ovarian function and to the ovarian stimulation
modalities. The intracytoplasmic sperm injection (ICSI) technique should nowadays be
preferred for PGD. Embryo biopsy is usually performed at day 3 on embryos (6-8) cells, with
the aim to aspirate one or two cells for a diagnosis by PCR or FISH, preferentially using 2
blastomeres from a single embryo. According to each center, setting up this technique may
take from 6 to 9 months. The transfer policy should remain the same as in standard IVF to avoid
multiple pregancy. The success of the attempt lies on the oocyte number, the number of
embryos to biopsy and thus, the resulting number of unaffected embryos.
Key words: preimplantation genetic diagnosis, genetic disease, IVF, embryo, ICSI
L
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Les couples concernés par le DPI
ont une histoire difficile avec de nombreuses interruptions médicales de
grossesse suite à l’analyse de trophoblaste ou amniocentèse dans le cadre
du diagnostic anténatal et/ou un ou
plusieurs enfants gravement atteints
ou décédés. D’où l’intérêt de DPI qui
permet non seulement d’éviter une interruption médicale de grossesse,
mais également d’avoir un enfant indemne de l’affection.
La prise en charge d’un couple en
vue d’un DPI se plie aux règles habituelles des couples infertiles mais elle est
soumise à quelques contraintes et limites d’ordre technique.
mt médecine de la reproduction, vol. 9, n° 6, novembre-décembre 2007
doi: 10.1684/mte.2008.0122
Tirés à part : S. Hamamah
e diagnostic génétique préimplantatoire (DPI) consiste à étudier le
contenu génétique d’embryons humains. Il est le résultat de la pratique
de la fécondation in vitro avec microinjection et du développement des
techniques de cytogénétique moléculaire et de biologie moléculaire. Il permet une analyse génétique sur une ou
deux cellules prélevées sur un embryon et de ne transférer in utero que
du ou des embryons sains pour la maladie recherchée ou porteurs sains.
Cette approche concerne les couples
ayant un risque connu de transmettre
une maladie grave et incurable.
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La performance de la fécondation in vitro par injection
intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) est primordiale à double titre : elle permettra la naissance d’un
enfant sain dans une famille le plus souvent déjà blessée
par une parentalité douloureuse et elle s’adresse à des
couples fertiles qui ont déjà obtenu des grossesses spontanément. Ces couples sont transposés dans un univers qui
leur est inconnu et qu’ils n’imaginaient pas aussi complexe et incertain. Le screening des patients doit être sérié
afin d’éviter de les entraîner dans des procédures compliquées qui n’aboutiraient pas de façon prévisible.
Le choix des techniques de laboratoire et les stratégies
de transfert sont importants pour la qualité du DPI et
l’amélioration des chances de grossesse tout en diminuant
les contraintes du biologiste responsable du diagnostic
définitif.
Principe et législation du DPI
Le DPI implique une fécondation in vitro dans le but
d’obtenir plusieurs embryons pour analyse génique ou
chromosomique. Il est destiné aux couples fertiles, infertiles ou porteurs de maladies orphelines :
– couples fertiles, c’est-à-dire refusant ou ne supportant plus les interruptions médicales de grossesse en cas de
fœtus atteint (myopathie de Duchêne, mucoviscidose,
maladie de Steinert, etc.) ;
– couples infertiles, par exemple en cas d’agénésie
vésiculo-déférentielle bilatérale ou ayant une maladie
chromosomique ou génique d’une particulière gravité
(mucoviscidose, translocation robertsonienne, etc.) ;
– maladies orphelines : chorée de Hunttington, thalassémie A, etc.
Lorsque les embryons ont atteint le stade de 6 à 8
cellules (J3), une ou 2 cellules totipotentes sont prélevées
par micro-manipulation. Le diagnostic moléculaire s’effectue sur une ou 2 cellules, utilisant les techniques d’hybridation in situ fluorescente (FISH) pour la détection
d’anomalie chromosomique et la détection du sexe des
embryons en utilisant la PCR pour les anomalies géniques.
Les embryons non porteurs de la maladie génétique
sont donc candidats, les embryons non atteints éventuellement transmetteurs de l’anomalie génétique sont candidats pour la réimplantation dans l’utérus maternel.
Les couples peuvent demander un DPI avant toute
conception ou après la naissance d’un enfant atteint.
En France, la loi du 29 juillet 1994 (décret 94-654)
relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du
corps humain, à l’assistance médicale à la procréation
(AMP) et au diagnostic prénatal, ainsi que les décrets
95-558 du mai 1995 définissent les conditions dans lesquelles peut se pratiquer le DPI. Le décret du 24 mars
1998 établit les conditions du diagnostic biologique effectué à partir de cellules prélevées sur l’embryon obtenu par
fécondation in vitro.
Le DPI n’est autorisé que pour la recherche d’affections graves et incurables. Un médecin du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (Art.162-16) doit attester
de la fiabilité de l’indication.
En Angleterre, comme en Espagne, le DPI est soumis à
une autorisation préalable d’un comité tel que le HFEA en
Angleterre qui statue sur l’ensemble des recherches pratiquées sur l’embryon humain. La législation est permissive
et non spécifique au DPI dans la mesure où dans ces deux
pays, la recherche sur l’embryon est autorisée. En effet,
dans ces deux pays, on utilise le terme de « pré-embryon »
jusqu’au 14e jour du développement. Quant à la Belgique
et aux Pays-Bas, ces pays n’ont pas de législation spécifique au DPI. En Italie, depuis juillet 2004, le DPI est devenu
interdit comme en Allemagne.
Histoire du DPI
Depuis les premières tentatives de biopsie embryonnaire et d’obtention de grossesse [1], le diagnostic de
l’aneuploïdie et du sexe par hybridation in situ fluorescente (FISH) a connu une évolution remarquable. La première application du DPI était de permettre de dépister
dans le cadre des maladies liées à l’X, les sujets susceptibles d’être atteints. En effet, des sondes et des amorces
spécifiques ont été utilisées pour sélectionner les embryons après biopsie de blastomère [2, 3].
Bien qu’il soit difficile de connaître le nombre exact
des centres pratiquant le DPI dans le monde, on compte
aujourd’hui environ une cinquantaine de centres de DPI
répartis sur une vingtaine de pays. Plus de 1 200 cycles de
DPI ont été réalisés (701 cycles ont été effectués pour des
anomalies chromosomiques et 458 pour des maladies
génétiques) pour 770 patientes conduisant à 231 grossesses (20 % après DPI) et 166 naissances. Ce fut en 1997. Fin
1997, on estime à plus de 1500 le nombre d’enfants nés
via le DPI et pour une maladie génétique d’une particulière gravité [4,5]. En France, plus de 200 enfants sont nés
grâce au DPI.
Deux types de DPI doivent être distingués :
– le DPI pour patients présentant un haut risque de
produire des embryons anormaux (porteurs d’une maladie
monogénique ou d’une aberration chromosomique) ;
– et le DPI pour dépistage d’aneuploïdie dans lequel
l’intégrité d’un certain nombre de chromosomes-clés est
vérifiée. Ce dernier dépistage est aujourd’hui interdit en
France.
Stratégie d’inclusion en ICSI
en vue d’un DPI
L’ICSI qui généralement permet l’obtention de plusieurs embryons permet aux couples à risque de transmet-
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tre une maladie génétique, d’établir le statut génétique de
leurs embryons et de ne transférer que les embryons sains
ou porteurs sains.
Une cohorte suffisante d’embryons assure la présence
d’au moins un embryon sain. Cette nécessité d’obtenir
plusieurs embryons est due :
– à l’influence de la pathologie sur le nombre d’embryons non atteints et donc transférables ;
– à la perte de matériel entre la ponction et le transfert ;
– à l’influence du nombre d’embryons transférés sur le
taux de grossesses.
Vandervost et al. [5] ont très bien montré une corrélation entre la pathologie héréditaire et le nombre d’embryons non atteints. De même le nombre d’ovocytes est
significativement lié aux taux de grossesses avec un taux
croissant de grossesses en fonction du nombre d’embryons transférés chez ces mêmes couples, élément que
l’on connaît bien en AMP.
L’équipe du Pr Liebears [5] montre que moins de 50 %
d’ovocytes obtenus donneront des embryons biopsiables.
Ainsi, les patientes seront sélectionnées sur des critères
classiques avec une extrême vigilance. Vandervost et al.
[5] proposent l’annulation des cycles contenant moins de
6 follicules espérés ; entre 6 et 8, l’annulation doit être
discutée avec le couple.
L’âge de la patiente est un facteur prédictif majeur de
bonne réponse aux stimulations de l’ovulation. Les dosages hormonaux au 3e jour du cycle seront donc un bon
corollaire à l’âge pour prendre une décision.
S’il est difficile de refuser d’emblée d’inclure une patiente en assistance médicale à la procréation (AMP) en
raison de son âge élevé (40-42 ans), cela l’est d’autant plus
dans le cadre d’un DPI où les patientes sont a priori
fertiles. Ainsi, un bilan mettant en évidence une patiente
qui répondrait peu ou pas à une stimulation d’ovulation en
vue d’un DPI doit amener à rediscuter l’indication et
éventuellement à l’intégrer dans un protocole.
L’imagerie permet d’objectiver la qualité de la cavité
utérine et donc l’accueil de l’embryon, ce d’autant qu’il existe
des antécédents de curetage ou de fausse couche tardive.
Le spermogramme est à demander même si l’ICSI est la
technique de choix pour un DPI. Il permet d’éviter les
mauvaises surprises le jour de la ponction (oligo-asthénoteratozoospermie [OATS] sévère, azoospermie) et si besoin
de rechercher des anomalies génétiques ou autres devant
des pathologies découvertes à ce moment-là (caryotype
parental, anticorps antispermatozoïdes, infection, etc.).
Choix de la stimulation ovarienne
L’existence de trois centres de DPI en France conduit
les patients à consulter loin de chez eux. Les centres
d’AMP locaux font relais et permettent le déplacement des
patientes juste pour le jour de la ponction ovocytaire. Il est
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souvent plus facile pour le centre qui effectue le DPI de
prescrire le traitement de la stimulation et que le monitorage soit effectué par le centre relais. Ceci permet de fixer
ensemble les dates de début de traitement, de suivre les
monitorages sur des traitements connus et ainsi de pouvoir
annuler à distance avant de déplacer les patients.
L’échec de stimulation ou l’annulation du traitement
est alors sous la responsabilité du centre de DPI, ce qui
facilite la relation triangulaire patient, centre relais et
centre DPI.
Modalité et déroulement d’un DPI
Choix de l’ICSI
La technique de l’ICSI est aujourd’hui la technique de
choix pour un DPI. La PCR en particulier sur une ou deux
cellules nécessite minutie et vigilance. Il s’agit d’éviter
toute contamination par de l’ADN extérieur : en particulier celui de l’opérateur, l’ADN volatile des PCR antérieures mais aussi les cellules du cumulus ou d’autres spermatozoïdes qui peuvent venir contaminer le prélèvement de
blastomère si l’embryon a été fécondé en FIV classique.
A ces critères se rajoute également la diminution du
risque d’échec de fécondation. Car, il existe un petit
avantage de l’ICSI par rapport à la FIV classique.
Déroulement et réalisation d’une ICSI
en vue du DPI
L’injection d’un spermatozoïde dans l’ovocyte se fait à
l’aide de micromanipulateur et d’un microscope inversé. Le
microscope inversé doit être équipé d’un système optique
(Hofmann) permettant d’observer les ovocytes sans qu’ils
soient fixés et colorés. Le microscope est également équipé
d’objectifs et d’oculaires permettant un grossissement de
100 à 400 fois et d’un système de micromanipulateur et
d’injecteur permettant la manipulation des cellules observées. Pour réaliser l’injection, il faut deux micropipettes :
une de contention (holding), destinée à maintenir l’ovocyte
pendant l’injection dont le diamètre interne est de 20 lm, et
une d’injection dont le diamètre interne est de 5-7 lm,
destinée à prélever le spermatozoïde, à l’immobiliser, puis à
l’injecter dans le cytoplasme de l’ovocyte.
Préparation des ovocytes
Les ovocytes recueillis sont mis en milieu de culture.
Les cellules du cumulus sont dissociées après incubation
des ovocytes durant 1 minute dans un milieu de culture
contenant de l’hyaluronidase (2 % 30 secondes). Les cellules du cumulus sont retirées par aspiration-refoulement
des ovocytes dans une micropipette en verre dont le
diamètre est de 200 lm. Les ovocytes ensuite sont abondamment rincés dans du milieu de culture.
L’observation au microscope permet alors de noter le
stade de maturité ovocytaire. Seuls les ovocytes matures
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(métaphase II) ayant mis leur 1re globule polaire seront
micro-injectés.
Préparation des spermatozoïdes
Les spermatozoïdes sont sélectionnés sur un gradient
de densité (PureSperm) de deux fractions. Les spermatozoïdes sont ensuite lavés et le culot obtenu est resuspendu
dans un milieu de culture. Quelle que soit l’origine du
sperme (éjaculat, épididymaire, ou testiculaire), une préparation du sperme doit être faite. Ensuite, les spermatozoïdes sont incubés dans l’incubateur à CO2 jusqu’au
moment de l’injection.
Une fois les deux micropipettes (contention et injection) placées sur le micromanipulateur, des microgouttes
de spermatozoïdes préparés sont posées dans des microgouttes visqueuses contenant de polyvinyle pyrrolidone
(PVP), et l’ensemble de ces microgouttes sont placées dans
une boîte de Petri. Ceci a pour but d’isoler et de sélectionner quelques spermatozoïdes migrés à la périphérie de la
microgoutte de PVP.
Une fois le spermatozoïde choisi, il est immobilisé, et
ensuite aspiré dans la micropipette d’injection pour qu’il
soit injecté dans l’ovocyte. Chaque ovocyte est déposé
dans une microgoutte de milieu de culture autour des
microgouttes contenant des spermatozoïdes.
La boite de Petri contenant des microgouttes est recouverte d’huile de paraffine légère, et posée ensuite sur la
platine chauffante du microscope inversé.
Au moment de l’injection, l’ovocyte est maintenu par
une micropipette de contention et placée dans le champ
optique du microscope. La micropipette d’injection
contenant le spermatozoïde est ensuite doucement introduite dans le cytoplasme de l’ovocyte. Les ovocytes microinjectés sont remis en milieu de culture à 37° sous 5 %
de CO2. La fécondation est observée 18 à 22 heures
post-microinjection par l’apparition des deux pronuclei.
Déroulement d’une biopsie
embryonnaire (J3) en vue d’un DPI
La biopsie embryonnaire se fait en général à J3 de la
culture embryonnaire dans le but d’obtenir un embryon
entre 6 à 8 cellules pour un diagnostic par PCR ou FISH au
mieux sur 2 blastomères d’un même embryon.
Avant le début de la biopsie des embryons
L’examen des embryons est réalisé en présence du
biologiste responsable du diagnostic. La décision du nombre d’embryons à biopsier ainsi que le nombre de blastomères à prélever par embryon sera prise en commun.
Pendant la biopsie des embryons
La biopsie embryonnaire à J3 nécessite de créer une
perforation dans la zone pellucide par l’utilisation du
laser.
Après la perforation de la zone pellucide, un ou deux
blastomères sont ainsi aspirés par la micropipette d’aspiration.
Le ou les blastomères isolés seront mis à la disposition
du biologiste responsable du diagnostic.
L’embryon biopsié sera immédiatement remis en culture. Il est important de visualiser le noyau du blastomère
sélectionné en présence des biologistes responsables de
l’analyse génétique. Une photographie du blastomère
biopsié sera prise. La biopsie embryonnaire sera répétée
autant de fois qu’il y a d’embryons biopsiables. Ces précautions ont été suggérées par les centres de référence
effectuant le DPI depuis une dizaine d’années.
La viabilité de l’embryon biopsié et du blastomère est
notée. Elle dépend fondamentalement de la difficulté et de
la précision du geste demandant une extrême reproductibilité. Selon les équipes de référence, la mise au point
nécessite entre 6 et 9 mois. Elle s’effectue sur des embryons donnés à la recherche par des couples dont le
projet parental est accompli ou sur des embryons obtenus
après FIV ou ICSI et jugés de qualité insuffisante pour une
congélation après transfert.
Le transfert embryonnaire
Grifo et al. [6] rapportent les résultats d’une dizaine
d’années soit plus de DPI.
Entre 1995 et 2005, 304 cycles du DPI ont été réalisés
chez 190 couples ; 181 (60 %) pour maladies monogéniques et 123 (40 %) pour avortement spontané et translocation. Dans les maladies monogéniques, 87 % (soit 158
sur 181 cycles) se sont soldés par un transfert embryonnaire. Le taux d’implantation a été de 24 % avec un taux
de grossesse clinique de 35 %. Vingt-trois des cycles DPI
pour maladies génétiques n’ont pas abouti à un transfert.
Gianaroli et al. [7] ont effectué chez 86 patientes
présentant un mauvais pronostic (échecs répétés d’implantation, indication de caryotype pour âge maternel,
translocation) 116 cycles d’ICSI. Deux groupes ont été
individualisés : groupe I qui a bénéficié d’un transfert à J3
en fin d’après-midi avec une analyse par FISH des chromosomes XY, 13, 16, 18 et 21 et groupe II dont les
embryons ont été transférés à J4 le matin avec une analyse
par FISH des chromosomes précédents plus le 14, 15 et
22. Leurs conclusions sont similaires à l’équipe de Grifo
avec un commentaire supplémentaire développant le bénéfice en termes de sélection d’embryons sains et viables
à J4 sans contrainte de temps pour le biologiste responsable du diagnostic comme pour la patiente. D’autres groupes effectuent le transfert entre J5 et J6. Leurs résultats
montrent l’absence de dommage de la biopsie embryonnaire sur le développement embryonnaire jusqu’au stade
blastocyste.
La politique de transfert doit rester la même qu’en AMP
pour éviter à ces couples des grossesses multiples. Les
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grossesses multiples chez ces patientes présentent les mêmes risques que chez les autres avec la certitude actuellement d’un diagnostic génétique anténatal pour confirmer
le DPI. L’amniocentèse n’est pas sans risque supplémentaire pour ces grossesses.
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La congélation embryonnaire
La congélation des embryons sains surnuméraires n’a
toujours pas donné de résultats satisfaisants. Dans le
monde, après cryoconservation, une grossesse a été rapportée en 2001 après transfert d’embryons sains biopsiés.
Cependant, on peut réaliser un DPI sur des embryons
congelés-décongelés. Cette approche a permis l’obtention
de quelques naissances.
Aujourd’hui, la congélation peut être conseillée aux
couples avec toute la prudence nécessaire quant aux
chances de réussite.
Indications du DPI pratiqué en 2007
dans le monde
Les indications du DPI sont nées des progrès techniques de la FIV, de ceux de la cytogénétique et de la
biologie moléculaire.
Cette liste n’est pas exhaustive :
– les maladies génétiques liées au chromosome X : il
en existe plus de 300 parmi lesquelles les plus fréquentes
sont les dystrophies musculaires, l’hémophilie, le syndrome de l’X fragile ;
– les couples affectés de maladies monogéniques récessives dans lesquelles les deux membres sont porteurs
sains de l’anomalie comme dans la dystrophie myoonique, la mucoviscidose, la thalassémie, la drépanocytose,
la maladie de Tay Sachs.
– les couples affectés d’anomalies structurales chromosomiques (translocation, inversion) ou numériques
(dans certains cas dits de « mosaïques », l’anomalie ne
porte pas sur toute les cellules.
Plus de 1 500 enfants sont nés à ce jour après DPI ce
qui est peu et démontre les difficultés de cette technique
particulièrement lourde.
Effets du nombre d’ovocytes injectés
et du nombre d’embryons biopsiables
Récemment, l’équipe belge de Vandervorst et al [5] a
montré que le taux de grossesses est corrélé au nombre
d’ovocytes injectés et donc au nombre d’embryons biopsiables. L’étude porte sur 47 couples soit 84 cycles de DPI.
Au total, 1 140 ovocytes ont été récupérés soit en
moyenne de 13,6/ponction (2 à 43). Ils ont comparé le
418
Tableau 1. D’après [8]
Nb d’ovocytes
Nb de cycles de DPI
Nb d’ovocytes
Nb de cycles avec embryon
Nb d’embryons biopsiés
Nb de cycles avec embryons
transférés
Nb d’embryons transférés
Taux d’implantation
Taux de grossesse/cycle
Groupe I
<9
22
124 (moyen : 5,6)
18
2,23 ± 1,57
14
Groupe II
>9
62
1 020 (moyen : 16,5)
59
7±4
54
0,77 ± 0,69
20 %
9 % (2/22)
1,94 ± 1,05
13 %
20,9 % (13/62)
taux de grossesses selon le nombre d’ovocytes récupérés :
groupe I, le nombre d’ovocytes est égal à 9 et groupe II, le
nombre d’ovocytes est aussi égal à 9 (tableau 1).
Également, dans cette étude, les auteurs ont trouvé une
corrélation positive entre le nombre d’ovocytes récupérés
et le nombre d’embryons biopsiés ainsi que le nombre
d’embryons génétiquement sains.
En conclusion, bien que le nombre d’ovocytes ne soit
pas le seul critère sur lequel le succès de la tentative
repose, il reflète la qualité de la stimulation ovarienne et
donc la qualité de l’endomètre et donc il influence le taux
d’implantation. A cela s’ajoutent le nombre d’embryons à
biopsier et donc le nombre d’embryons sains obtenus.
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