Revue mt médecine de la reproduction 2007 ; 9 (6) : 414-8 Les limites de la génétique : quelle place pour le DPI ? Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Genetic limits: which place for preimplantation genetic diagnosis? Samir Hamamah Tal Anahory Frank Pellestor Vanessa Loup Lionel Reyftman Hervé Dechaud Bernard Hedon Centre d’AMP/DPI, Département de Médecine et Biologie de la Reproduction, Inserm U847, Hôpital Arnaud de Villeneuve, 34295 Montpellier <[email protected]> Résumé. Le DPI implique une fécondation in vitro dans le but d’obtenir plusieurs embryons afin d’effectuer une analyse génique ou chromosomique. En France, il est destiné aux couples fertiles ou infertiles susceptibles de transmettre une maladie orpheline considérée comme grave et incurable. Une cohorte suffisante d’embryons assure la présence d’au moins un embryon sain, ce qui suppose une grande attention sur la fonction ovarienne et les modalités de la stimulation. La technique de l’injection intacytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) est aujourd’hui la technique de choix pour un DPI. La biopsie embryonnaire se fait en général à J3 de la culture embryonnaire, dans le dessein d’obtenir un embryon entre 6 à 8 cellules pour un diagnostic par PCR ou FISH au mieux sur 2 blastomères d’un même embryon. Selon les équipes de référence, la mise au point nécessite entre 6 et 9 mois. La politique de transfert doit rester la même qu’en assistance médicale à la procréation pour éviter à ces couples des grossesses multiples. Le succès de la tentative repose sur le nombre d’ovocytes, le nombre d’embryons à biopsier et donc le nombre d’embryons sains obtenus. Mots clés : diagnostic préimplantatoire, maladie génétique, fécondation in vitro, embryon, injection intacytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) Abstract. The preimplantation genetic diagnosis (PGD) necessitates an in vitro fertilization (IVF) aiming at obtaining several embryos for genetic or chromosomal analysis. In France, it is restricted to fertile or subfertile couples at risk of transmitting a severe and non treatable disease. The embryo number must be sufficient enough to yield at least one unaffected embryo. This requires careful attention to the ovarian function and to the ovarian stimulation modalities. The intracytoplasmic sperm injection (ICSI) technique should nowadays be preferred for PGD. Embryo biopsy is usually performed at day 3 on embryos (6-8) cells, with the aim to aspirate one or two cells for a diagnosis by PCR or FISH, preferentially using 2 blastomeres from a single embryo. According to each center, setting up this technique may take from 6 to 9 months. The transfer policy should remain the same as in standard IVF to avoid multiple pregancy. The success of the attempt lies on the oocyte number, the number of embryos to biopsy and thus, the resulting number of unaffected embryos. Key words: preimplantation genetic diagnosis, genetic disease, IVF, embryo, ICSI L 414 Les couples concernés par le DPI ont une histoire difficile avec de nombreuses interruptions médicales de grossesse suite à l’analyse de trophoblaste ou amniocentèse dans le cadre du diagnostic anténatal et/ou un ou plusieurs enfants gravement atteints ou décédés. D’où l’intérêt de DPI qui permet non seulement d’éviter une interruption médicale de grossesse, mais également d’avoir un enfant indemne de l’affection. La prise en charge d’un couple en vue d’un DPI se plie aux règles habituelles des couples infertiles mais elle est soumise à quelques contraintes et limites d’ordre technique. mt médecine de la reproduction, vol. 9, n° 6, novembre-décembre 2007 doi: 10.1684/mte.2008.0122 Tirés à part : S. Hamamah e diagnostic génétique préimplantatoire (DPI) consiste à étudier le contenu génétique d’embryons humains. Il est le résultat de la pratique de la fécondation in vitro avec microinjection et du développement des techniques de cytogénétique moléculaire et de biologie moléculaire. Il permet une analyse génétique sur une ou deux cellules prélevées sur un embryon et de ne transférer in utero que du ou des embryons sains pour la maladie recherchée ou porteurs sains. Cette approche concerne les couples ayant un risque connu de transmettre une maladie grave et incurable. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. La performance de la fécondation in vitro par injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) est primordiale à double titre : elle permettra la naissance d’un enfant sain dans une famille le plus souvent déjà blessée par une parentalité douloureuse et elle s’adresse à des couples fertiles qui ont déjà obtenu des grossesses spontanément. Ces couples sont transposés dans un univers qui leur est inconnu et qu’ils n’imaginaient pas aussi complexe et incertain. Le screening des patients doit être sérié afin d’éviter de les entraîner dans des procédures compliquées qui n’aboutiraient pas de façon prévisible. Le choix des techniques de laboratoire et les stratégies de transfert sont importants pour la qualité du DPI et l’amélioration des chances de grossesse tout en diminuant les contraintes du biologiste responsable du diagnostic définitif. Principe et législation du DPI Le DPI implique une fécondation in vitro dans le but d’obtenir plusieurs embryons pour analyse génique ou chromosomique. Il est destiné aux couples fertiles, infertiles ou porteurs de maladies orphelines : – couples fertiles, c’est-à-dire refusant ou ne supportant plus les interruptions médicales de grossesse en cas de fœtus atteint (myopathie de Duchêne, mucoviscidose, maladie de Steinert, etc.) ; – couples infertiles, par exemple en cas d’agénésie vésiculo-déférentielle bilatérale ou ayant une maladie chromosomique ou génique d’une particulière gravité (mucoviscidose, translocation robertsonienne, etc.) ; – maladies orphelines : chorée de Hunttington, thalassémie A, etc. Lorsque les embryons ont atteint le stade de 6 à 8 cellules (J3), une ou 2 cellules totipotentes sont prélevées par micro-manipulation. Le diagnostic moléculaire s’effectue sur une ou 2 cellules, utilisant les techniques d’hybridation in situ fluorescente (FISH) pour la détection d’anomalie chromosomique et la détection du sexe des embryons en utilisant la PCR pour les anomalies géniques. Les embryons non porteurs de la maladie génétique sont donc candidats, les embryons non atteints éventuellement transmetteurs de l’anomalie génétique sont candidats pour la réimplantation dans l’utérus maternel. Les couples peuvent demander un DPI avant toute conception ou après la naissance d’un enfant atteint. En France, la loi du 29 juillet 1994 (décret 94-654) relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation (AMP) et au diagnostic prénatal, ainsi que les décrets 95-558 du mai 1995 définissent les conditions dans lesquelles peut se pratiquer le DPI. Le décret du 24 mars 1998 établit les conditions du diagnostic biologique effectué à partir de cellules prélevées sur l’embryon obtenu par fécondation in vitro. Le DPI n’est autorisé que pour la recherche d’affections graves et incurables. Un médecin du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (Art.162-16) doit attester de la fiabilité de l’indication. En Angleterre, comme en Espagne, le DPI est soumis à une autorisation préalable d’un comité tel que le HFEA en Angleterre qui statue sur l’ensemble des recherches pratiquées sur l’embryon humain. La législation est permissive et non spécifique au DPI dans la mesure où dans ces deux pays, la recherche sur l’embryon est autorisée. En effet, dans ces deux pays, on utilise le terme de « pré-embryon » jusqu’au 14e jour du développement. Quant à la Belgique et aux Pays-Bas, ces pays n’ont pas de législation spécifique au DPI. En Italie, depuis juillet 2004, le DPI est devenu interdit comme en Allemagne. Histoire du DPI Depuis les premières tentatives de biopsie embryonnaire et d’obtention de grossesse [1], le diagnostic de l’aneuploïdie et du sexe par hybridation in situ fluorescente (FISH) a connu une évolution remarquable. La première application du DPI était de permettre de dépister dans le cadre des maladies liées à l’X, les sujets susceptibles d’être atteints. En effet, des sondes et des amorces spécifiques ont été utilisées pour sélectionner les embryons après biopsie de blastomère [2, 3]. Bien qu’il soit difficile de connaître le nombre exact des centres pratiquant le DPI dans le monde, on compte aujourd’hui environ une cinquantaine de centres de DPI répartis sur une vingtaine de pays. Plus de 1 200 cycles de DPI ont été réalisés (701 cycles ont été effectués pour des anomalies chromosomiques et 458 pour des maladies génétiques) pour 770 patientes conduisant à 231 grossesses (20 % après DPI) et 166 naissances. Ce fut en 1997. Fin 1997, on estime à plus de 1500 le nombre d’enfants nés via le DPI et pour une maladie génétique d’une particulière gravité [4,5]. En France, plus de 200 enfants sont nés grâce au DPI. Deux types de DPI doivent être distingués : – le DPI pour patients présentant un haut risque de produire des embryons anormaux (porteurs d’une maladie monogénique ou d’une aberration chromosomique) ; – et le DPI pour dépistage d’aneuploïdie dans lequel l’intégrité d’un certain nombre de chromosomes-clés est vérifiée. Ce dernier dépistage est aujourd’hui interdit en France. Stratégie d’inclusion en ICSI en vue d’un DPI L’ICSI qui généralement permet l’obtention de plusieurs embryons permet aux couples à risque de transmet- mt médecine de la reproduction, vol. 9, n° 6, novembre-décembre 2007 415 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Revue tre une maladie génétique, d’établir le statut génétique de leurs embryons et de ne transférer que les embryons sains ou porteurs sains. Une cohorte suffisante d’embryons assure la présence d’au moins un embryon sain. Cette nécessité d’obtenir plusieurs embryons est due : – à l’influence de la pathologie sur le nombre d’embryons non atteints et donc transférables ; – à la perte de matériel entre la ponction et le transfert ; – à l’influence du nombre d’embryons transférés sur le taux de grossesses. Vandervost et al. [5] ont très bien montré une corrélation entre la pathologie héréditaire et le nombre d’embryons non atteints. De même le nombre d’ovocytes est significativement lié aux taux de grossesses avec un taux croissant de grossesses en fonction du nombre d’embryons transférés chez ces mêmes couples, élément que l’on connaît bien en AMP. L’équipe du Pr Liebears [5] montre que moins de 50 % d’ovocytes obtenus donneront des embryons biopsiables. Ainsi, les patientes seront sélectionnées sur des critères classiques avec une extrême vigilance. Vandervost et al. [5] proposent l’annulation des cycles contenant moins de 6 follicules espérés ; entre 6 et 8, l’annulation doit être discutée avec le couple. L’âge de la patiente est un facteur prédictif majeur de bonne réponse aux stimulations de l’ovulation. Les dosages hormonaux au 3e jour du cycle seront donc un bon corollaire à l’âge pour prendre une décision. S’il est difficile de refuser d’emblée d’inclure une patiente en assistance médicale à la procréation (AMP) en raison de son âge élevé (40-42 ans), cela l’est d’autant plus dans le cadre d’un DPI où les patientes sont a priori fertiles. Ainsi, un bilan mettant en évidence une patiente qui répondrait peu ou pas à une stimulation d’ovulation en vue d’un DPI doit amener à rediscuter l’indication et éventuellement à l’intégrer dans un protocole. L’imagerie permet d’objectiver la qualité de la cavité utérine et donc l’accueil de l’embryon, ce d’autant qu’il existe des antécédents de curetage ou de fausse couche tardive. Le spermogramme est à demander même si l’ICSI est la technique de choix pour un DPI. Il permet d’éviter les mauvaises surprises le jour de la ponction (oligo-asthénoteratozoospermie [OATS] sévère, azoospermie) et si besoin de rechercher des anomalies génétiques ou autres devant des pathologies découvertes à ce moment-là (caryotype parental, anticorps antispermatozoïdes, infection, etc.). Choix de la stimulation ovarienne L’existence de trois centres de DPI en France conduit les patients à consulter loin de chez eux. Les centres d’AMP locaux font relais et permettent le déplacement des patientes juste pour le jour de la ponction ovocytaire. Il est 416 souvent plus facile pour le centre qui effectue le DPI de prescrire le traitement de la stimulation et que le monitorage soit effectué par le centre relais. Ceci permet de fixer ensemble les dates de début de traitement, de suivre les monitorages sur des traitements connus et ainsi de pouvoir annuler à distance avant de déplacer les patients. L’échec de stimulation ou l’annulation du traitement est alors sous la responsabilité du centre de DPI, ce qui facilite la relation triangulaire patient, centre relais et centre DPI. Modalité et déroulement d’un DPI Choix de l’ICSI La technique de l’ICSI est aujourd’hui la technique de choix pour un DPI. La PCR en particulier sur une ou deux cellules nécessite minutie et vigilance. Il s’agit d’éviter toute contamination par de l’ADN extérieur : en particulier celui de l’opérateur, l’ADN volatile des PCR antérieures mais aussi les cellules du cumulus ou d’autres spermatozoïdes qui peuvent venir contaminer le prélèvement de blastomère si l’embryon a été fécondé en FIV classique. A ces critères se rajoute également la diminution du risque d’échec de fécondation. Car, il existe un petit avantage de l’ICSI par rapport à la FIV classique. Déroulement et réalisation d’une ICSI en vue du DPI L’injection d’un spermatozoïde dans l’ovocyte se fait à l’aide de micromanipulateur et d’un microscope inversé. Le microscope inversé doit être équipé d’un système optique (Hofmann) permettant d’observer les ovocytes sans qu’ils soient fixés et colorés. Le microscope est également équipé d’objectifs et d’oculaires permettant un grossissement de 100 à 400 fois et d’un système de micromanipulateur et d’injecteur permettant la manipulation des cellules observées. Pour réaliser l’injection, il faut deux micropipettes : une de contention (holding), destinée à maintenir l’ovocyte pendant l’injection dont le diamètre interne est de 20 lm, et une d’injection dont le diamètre interne est de 5-7 lm, destinée à prélever le spermatozoïde, à l’immobiliser, puis à l’injecter dans le cytoplasme de l’ovocyte. Préparation des ovocytes Les ovocytes recueillis sont mis en milieu de culture. Les cellules du cumulus sont dissociées après incubation des ovocytes durant 1 minute dans un milieu de culture contenant de l’hyaluronidase (2 % 30 secondes). Les cellules du cumulus sont retirées par aspiration-refoulement des ovocytes dans une micropipette en verre dont le diamètre est de 200 lm. Les ovocytes ensuite sont abondamment rincés dans du milieu de culture. L’observation au microscope permet alors de noter le stade de maturité ovocytaire. Seuls les ovocytes matures mt médecine de la reproduction, vol. 9, n° 6, novembre-décembre 2007 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. (métaphase II) ayant mis leur 1re globule polaire seront micro-injectés. Préparation des spermatozoïdes Les spermatozoïdes sont sélectionnés sur un gradient de densité (PureSperm) de deux fractions. Les spermatozoïdes sont ensuite lavés et le culot obtenu est resuspendu dans un milieu de culture. Quelle que soit l’origine du sperme (éjaculat, épididymaire, ou testiculaire), une préparation du sperme doit être faite. Ensuite, les spermatozoïdes sont incubés dans l’incubateur à CO2 jusqu’au moment de l’injection. Une fois les deux micropipettes (contention et injection) placées sur le micromanipulateur, des microgouttes de spermatozoïdes préparés sont posées dans des microgouttes visqueuses contenant de polyvinyle pyrrolidone (PVP), et l’ensemble de ces microgouttes sont placées dans une boîte de Petri. Ceci a pour but d’isoler et de sélectionner quelques spermatozoïdes migrés à la périphérie de la microgoutte de PVP. Une fois le spermatozoïde choisi, il est immobilisé, et ensuite aspiré dans la micropipette d’injection pour qu’il soit injecté dans l’ovocyte. Chaque ovocyte est déposé dans une microgoutte de milieu de culture autour des microgouttes contenant des spermatozoïdes. La boite de Petri contenant des microgouttes est recouverte d’huile de paraffine légère, et posée ensuite sur la platine chauffante du microscope inversé. Au moment de l’injection, l’ovocyte est maintenu par une micropipette de contention et placée dans le champ optique du microscope. La micropipette d’injection contenant le spermatozoïde est ensuite doucement introduite dans le cytoplasme de l’ovocyte. Les ovocytes microinjectés sont remis en milieu de culture à 37° sous 5 % de CO2. La fécondation est observée 18 à 22 heures post-microinjection par l’apparition des deux pronuclei. Déroulement d’une biopsie embryonnaire (J3) en vue d’un DPI La biopsie embryonnaire se fait en général à J3 de la culture embryonnaire dans le but d’obtenir un embryon entre 6 à 8 cellules pour un diagnostic par PCR ou FISH au mieux sur 2 blastomères d’un même embryon. Avant le début de la biopsie des embryons L’examen des embryons est réalisé en présence du biologiste responsable du diagnostic. La décision du nombre d’embryons à biopsier ainsi que le nombre de blastomères à prélever par embryon sera prise en commun. Pendant la biopsie des embryons La biopsie embryonnaire à J3 nécessite de créer une perforation dans la zone pellucide par l’utilisation du laser. Après la perforation de la zone pellucide, un ou deux blastomères sont ainsi aspirés par la micropipette d’aspiration. Le ou les blastomères isolés seront mis à la disposition du biologiste responsable du diagnostic. L’embryon biopsié sera immédiatement remis en culture. Il est important de visualiser le noyau du blastomère sélectionné en présence des biologistes responsables de l’analyse génétique. Une photographie du blastomère biopsié sera prise. La biopsie embryonnaire sera répétée autant de fois qu’il y a d’embryons biopsiables. Ces précautions ont été suggérées par les centres de référence effectuant le DPI depuis une dizaine d’années. La viabilité de l’embryon biopsié et du blastomère est notée. Elle dépend fondamentalement de la difficulté et de la précision du geste demandant une extrême reproductibilité. Selon les équipes de référence, la mise au point nécessite entre 6 et 9 mois. Elle s’effectue sur des embryons donnés à la recherche par des couples dont le projet parental est accompli ou sur des embryons obtenus après FIV ou ICSI et jugés de qualité insuffisante pour une congélation après transfert. Le transfert embryonnaire Grifo et al. [6] rapportent les résultats d’une dizaine d’années soit plus de DPI. Entre 1995 et 2005, 304 cycles du DPI ont été réalisés chez 190 couples ; 181 (60 %) pour maladies monogéniques et 123 (40 %) pour avortement spontané et translocation. Dans les maladies monogéniques, 87 % (soit 158 sur 181 cycles) se sont soldés par un transfert embryonnaire. Le taux d’implantation a été de 24 % avec un taux de grossesse clinique de 35 %. Vingt-trois des cycles DPI pour maladies génétiques n’ont pas abouti à un transfert. Gianaroli et al. [7] ont effectué chez 86 patientes présentant un mauvais pronostic (échecs répétés d’implantation, indication de caryotype pour âge maternel, translocation) 116 cycles d’ICSI. Deux groupes ont été individualisés : groupe I qui a bénéficié d’un transfert à J3 en fin d’après-midi avec une analyse par FISH des chromosomes XY, 13, 16, 18 et 21 et groupe II dont les embryons ont été transférés à J4 le matin avec une analyse par FISH des chromosomes précédents plus le 14, 15 et 22. Leurs conclusions sont similaires à l’équipe de Grifo avec un commentaire supplémentaire développant le bénéfice en termes de sélection d’embryons sains et viables à J4 sans contrainte de temps pour le biologiste responsable du diagnostic comme pour la patiente. D’autres groupes effectuent le transfert entre J5 et J6. Leurs résultats montrent l’absence de dommage de la biopsie embryonnaire sur le développement embryonnaire jusqu’au stade blastocyste. La politique de transfert doit rester la même qu’en AMP pour éviter à ces couples des grossesses multiples. Les mt médecine de la reproduction, vol. 9, n° 6, novembre-décembre 2007 417 Revue grossesses multiples chez ces patientes présentent les mêmes risques que chez les autres avec la certitude actuellement d’un diagnostic génétique anténatal pour confirmer le DPI. L’amniocentèse n’est pas sans risque supplémentaire pour ces grossesses. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. La congélation embryonnaire La congélation des embryons sains surnuméraires n’a toujours pas donné de résultats satisfaisants. Dans le monde, après cryoconservation, une grossesse a été rapportée en 2001 après transfert d’embryons sains biopsiés. Cependant, on peut réaliser un DPI sur des embryons congelés-décongelés. Cette approche a permis l’obtention de quelques naissances. Aujourd’hui, la congélation peut être conseillée aux couples avec toute la prudence nécessaire quant aux chances de réussite. Indications du DPI pratiqué en 2007 dans le monde Les indications du DPI sont nées des progrès techniques de la FIV, de ceux de la cytogénétique et de la biologie moléculaire. Cette liste n’est pas exhaustive : – les maladies génétiques liées au chromosome X : il en existe plus de 300 parmi lesquelles les plus fréquentes sont les dystrophies musculaires, l’hémophilie, le syndrome de l’X fragile ; – les couples affectés de maladies monogéniques récessives dans lesquelles les deux membres sont porteurs sains de l’anomalie comme dans la dystrophie myoonique, la mucoviscidose, la thalassémie, la drépanocytose, la maladie de Tay Sachs. – les couples affectés d’anomalies structurales chromosomiques (translocation, inversion) ou numériques (dans certains cas dits de « mosaïques », l’anomalie ne porte pas sur toute les cellules. Plus de 1 500 enfants sont nés à ce jour après DPI ce qui est peu et démontre les difficultés de cette technique particulièrement lourde. Effets du nombre d’ovocytes injectés et du nombre d’embryons biopsiables Récemment, l’équipe belge de Vandervorst et al [5] a montré que le taux de grossesses est corrélé au nombre d’ovocytes injectés et donc au nombre d’embryons biopsiables. L’étude porte sur 47 couples soit 84 cycles de DPI. Au total, 1 140 ovocytes ont été récupérés soit en moyenne de 13,6/ponction (2 à 43). Ils ont comparé le 418 Tableau 1. D’après [8] Nb d’ovocytes Nb de cycles de DPI Nb d’ovocytes Nb de cycles avec embryon Nb d’embryons biopsiés Nb de cycles avec embryons transférés Nb d’embryons transférés Taux d’implantation Taux de grossesse/cycle Groupe I <9 22 124 (moyen : 5,6) 18 2,23 ± 1,57 14 Groupe II >9 62 1 020 (moyen : 16,5) 59 7±4 54 0,77 ± 0,69 20 % 9 % (2/22) 1,94 ± 1,05 13 % 20,9 % (13/62) taux de grossesses selon le nombre d’ovocytes récupérés : groupe I, le nombre d’ovocytes est égal à 9 et groupe II, le nombre d’ovocytes est aussi égal à 9 (tableau 1). Également, dans cette étude, les auteurs ont trouvé une corrélation positive entre le nombre d’ovocytes récupérés et le nombre d’embryons biopsiés ainsi que le nombre d’embryons génétiquement sains. En conclusion, bien que le nombre d’ovocytes ne soit pas le seul critère sur lequel le succès de la tentative repose, il reflète la qualité de la stimulation ovarienne et donc la qualité de l’endomètre et donc il influence le taux d’implantation. A cela s’ajoutent le nombre d’embryons à biopsier et donc le nombre d’embryons sains obtenus. Références 1. Handyside AK, Kontogiani EH, Hardy K, Winston RM. Pregnancies fom biopsied human pré-implantation embryos sexed by Y specific DNA amplification. Nature 1990 ; 344 : 768-70. 2. Handyside AK, Pattison JK, Penketh RJA, Winston RML, Tuddenham EGD. Biopsy of human pré-implantation embryo and sexing by DNA amplification. Lancet 1989 ; II : 347-9. 3. Penketh RJ, Delhanty JD, Vanden Barghe A, et al. Rapid sexing of human embryos by non-radiactive in situ hybridization : potential for preimplantation diagnosis of X-linked disorders. Prenatal Diagn 1989 ; 9 : 489-500. 4. International Working Group on Preimplantation Genetics. Preimplantation genetic diagnogis — experience of three thousand clinical cycles. 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