Le ventre de l`Atlantique », Fouta Dioumé, Éditions Livre de

« Le ventre de l'Atlantique », Fouta Dioumé,
Éditions Livre de Poche, Paris, 2003
« Au clair de lune, à la fin des matchs diffusés à la télé, l'homme de
Barbés trônait au milieu de son auditoire admiratif et déroulait sa bobine,
l'une de ses épouses passant à intervalles réguliers pour servir le thé.
- Alors, tonton, c'était comment là-bas, à Paris ? lançait un des jeunes.
C'était la phrase rituelle, le verbe innocent dont Dieu avait besoin pour
recréer le monde sous le ciel étoilé de Niodor :
- Alors C était comme tu ne pourras jamais l'imaginer. Comme à la télé,
mais en mieux, car tu vois tout pour de vrai. Si je te raconte réellement
comment c'était, tu ne vas pas me croire. Pourtant, c'était magnifique, et le
mot est faible. Même le Japonais viennent photographier tous les coins de
la capitale, on dit que c'est la plus belle du monde. J'ai atterri à Paris à
minuit; on aurait dit que le bon dieu avait donné à ces gens-là des
milliards d'étoiles rouges, bleues et jaunes pour s'éclairer; la ville brillait
de partout. »
chapitre V, page 83.
« A Niodor, les récits de l'homme de Barbès suivaient le sillage de
l'imaginaire. Comme ses camarades , Madické était déterminé et me
croyait capable de l'aider à réaliser son rêve. Une seule pensée inondait
son cerveau : partir ; loin; survoler la terre noire pour atterrir sur cette
terre blanche qui brille de mille feux. Partir, sans se retourner. On ne se
retourne pas quand on marche sur la corde du rêve. Aller voir cette herbe
qu'on dit tellement plus verte là où s'arrêtent les dernières gouttes de
l'atlantique, là-bas, là où les mairies paient des ramasseurs de crottes de
chiens, là où même ceux qui ne travaillent pas perçoivent un salaire. Partir
donc, là où les fœtus ont déjà des comptes bancaires à leur nom,et les
bébés des plans de carrière. Et maudits étaient ceux qui s'avisaient de
contrecarrer la volonté des jeunes insulaires.
Chapitre IX., 165.
« Le ventre de l'Atlantique », Fouta Dioumé,
Éditions Livre de Poche, Paris, 2003
« Au clair de lune, à la fin des matchs diffusés à la télé, l'homme de
Barbés trônait au milieu de son auditoire admiratif et déroulait sa bobine,
l'une de ses épouses passant à intervalles réguliers pour servir le thé.
- Alors, tonton, c'était comment là-bas, à Paris ? lançait un des jeunes.
C'était la phrase rituelle, le verbe innocent dont Dieu avait besoin pour
recréer le monde sous le ciel étoilé de Niodor :
- Alors C était comme tu ne pourras jamais l'imaginer. Comme à la télé,
mais en mieux, car tu vois tout pour de vrai. Si je te raconte réellement
comment c'était, tu ne vas pas me croire. Pourtant, c'était magnifique, et le
mot est faible. Même le Japonais viennent photographier tous les coins de
la capitale, on dit que c'est la plus belle du monde. J'ai atterri à Paris à
minuit; on aurait dit que le bon dieu avait donné à ces gens-là des
milliards d'étoiles rouges, bleues et jaunes pour s'éclairer; la ville brillait
de partout. »
chapitre V, page 83.
« A Niodor, les récits de l'homme de Barbès suivaient le sillage de
l'imaginaire. Comme ses camarades , Madické était déterminé et me
croyait capable de l'aider à réaliser son rêve. Une seule pensée inondait
son cerveau : partir ; loin; survoler la terre noire pour atterrir sur cette
terre blanche qui brille de mille feux. Partir, sans se retourner. On ne se
retourne pas quand on marche sur la corde du rêve. Aller voir cette herbe
qu'on dit tellement plus verte là où s'arrêtent les dernières gouttes de
l'atlantique, là-bas, là où les mairies paient des ramasseurs de crottes de
chiens, là où même ceux qui ne travaillent pas perçoivent un salaire. Partir
donc, là où les fœtus ont déjà des comptes bancaires à leur nom,et les
bébés des plans de carrière. Et maudits étaient ceux qui s'avisaient de
contrecarrer la volonté des jeunes insulaires.
Chapitre IX., 165.
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