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SOMMAIRE
I. La présence culturelle française en Nouvelle-Zélande : une réalité
linguistique et artistique renforcée par la politique de l’ambassade de
France en Nouvelle-Zélande................................................................11
A La présence linguistique française en Nouvelle-Zélande : un point fort de la France
aux antipodes....................................................................................................................12
B La coopération culturelle et scientifique franco-néo-zélandaise en Nouvelle-Zélande :
une présence riche et variée rendue possible par un intérêt néo-zélandais..........................31
II. Des liens historiques à un éloignement géographique et un attrait
pour la France : facteurs explicatifs de la présence culturelle française
en Nouvelle-Zélande............................................................................47
A La jeunesse de l’histoire européenne néo-zélandaise : un facteur explicatif fort de
l’empreinte de la France sur Aotearoa...........................................................................48
B Une présence culturelle française justifiée par un intérêt diplomatique de la France dans
le Pacifique Sud et maintenue par un attrait des Néo-Zélandais pour la France et les
Français............................................................................................................................68
Conclusion ...........................................................................................97
ANNEXES.........................................................................................107
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« La France est moins éloignée de la Nouvelle-Zélande, que la Nouvelle-Zélande de la
France »
Cette image est celle de Catherine Hannagan, conseillère pour la langue française auprès de
ILANZ, International Language Aoteraroa New Zealand. Elle souhaitait par cette remarque
nous faire comprendre que la France attire davantage les Néo-Zélandais que la Nouvelle-
Zélande, les Français. En effet, cette dernière est un pays encore inconnu pour de nombreux
Français, même si certaines associations peuvent être faites, dans l’esprit de nos compatriotes,
avec l’équipe nationale de rugby « les All Blacks », ou encore avec la trilogie
cinématographique du « Seigneur des Anneaux » tournée en Nouvelle-Zélande. En revanche
peu de ressortissants de l’Hexagone connaissent les réalités politiques, culturelles ou
géographiques du pays, notamment parce que l’Australie attire davantage l’attention des
Européens et que les deux villes principales du pays ne se trouvent pas à moins de 22.000
kilomètres de Paris, et à plus de dix heures de décalage horaire.
Peu de Français peuvent dire que la Nouvelle-Zélande est constituée principalement de deux
îles, séparées par le Détroit de Cook, et d’une multitude de petites îles inhabitées, qui
s’entendent sur 1 600 Kilomètres. Il s’agit d’un territoire isolé puisque ses plus proches
voisins, Fidji, l’Australie et la Nouvelle-Calédonie sont à plus de deux mille kilomètres, ce
qui lui donne l’image d’être à la lisière du monde, isolée au milieu du plus grand des océans,
qui plus est tardivement découverte par les Européens et faiblement peuplée puisqu’elle
possède l’une des plus faibles densités de population au monde. Les termes d’ « isolement »
et de « marginalité » s’appliquent très justement à la Nouvelle-Zélande selon sa spécialiste
Francine Tolron car elle était jusqu’au neuvième siècle, une terre « sauvage et primitive, un
écrin végétal soumis à la seule loi de la nature »1. La nature demeure par ailleurs associée à la
Nouvelle-Zélande puisque l’image d’Épinal de ce pays est celle de pâturages foisonnants de
moutons
Elle fut colonisée successivement par des peuples de marins venus d’autres îles : les Maoris
dans un premier temps, peuple ayant débarqué de Polynésie en canots, puis les Anglais au
1 Tolron Francine, La Nouvelle-Zélande, du duel au duo? , Toulouse, Presse universitaire du Mirail, 2000, p 12
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dix-neuvième siècle qui lui donnèrent son appellation actuelle. Aujourd’hui elle est également
désignée par ses habitants par l’expression maorie « Aotearoa » qui signifie « le pays du long
nuage blanc ».
La Nouvelle-Zélande est un petit pays, par sa superficie mais surtout par sa faible population :
sur les 269 000 kilomètres carrés du territoire, vivaient au dernier recensement en date 4, 177
millions d’habitants; c’est-à-dire que dans un État deux fois moins vaste que la France,
demeuraient à peu près quinze fois moins d’habitants. La majorité des o-Zélandais vivent
dans les trois principales villes du pays : Auckland qui comportait au dernier recensement
404 658 habitants, Christchurch dont la population atteignait 323 000 âmes et Wellington
vivaient 179 466 personnes. Les Néo-Zélandais se nomment eux-mêmes les Kiwis, en
hommage à l’oiseau, aujourd’hui symbole du pays. Le choix s’est porté sur cet animal car il
est réputé combatif quand il est acculé, petit, discret et unique, tout comme se décrivent eux-
mêmes les Néo-Zélandais, et aurait survécu où d’autres espèces auraient disparu. Il a été
choisi comme symbole car il affirme l’unicité du pays, en étant un oiseau dont les origines
remontent aux temps préhistoriques, bien avant le peuplement humain.
La Nouvelle-Zélande était autrefois, avant l’arrivée des deux peuples colonisateurs, vide de
toute population, mais il y a aujourd’hui, chaque année, sur cette terre isolée, une arrivée de
vingt-cinq mille personnes : principalement des ressortissants des Îles du Pacifique, Tonga et
Samoa, et d’Asie. Mais le pays reste assez homogène « ethniquement parlant », beaucoup
plus que son voisin australien : 74% des habitants du pays sont d’origine européenne, venus
majoritairement d’Angleterre, d’Irlande et d’Écosse. Pourtant malgré cette homogénéité, la
culture néo-zélandaise s’est nourrie de multiples influences externes et internes qui, selon
Francine Tolron, en font actuellement un pays en pleine mutation, résolu à défendre sa
spécificité.
Les influences internes sont celles des deux peuples fondateurs de la Nouvelle-Zélande, les
Maoris et les Pakehas, c’est-à-dire les descendants des colons britanniques du dix-neuvième
siècle, qui contestent aujourd’hui le concept de biculturalisme que de nombreux chercheurs
appliquent à la Nouvelle-Zélande. En effet, certains Pakehas; dont le nom vient du maori
« personne blanche » ou « étranger »; souhaitent que la Nouvelle-Zélande soit considérée
comme un pays aux racines et à la culture anglaises. Ce groupe est néanmoins de plus en plus
minoritaire au pays du long nuage blanc, contrairement à l’Australie chaque année
davantage de personnes revendiquent une identité anglaise « pure souche » et n’avoir que
des ancêtres anglais, qui plus est arrivés dans les premiers temps de la colonie australienne,
est une véritable fierté.
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Le multiculturalisme d’Aotearoa est également rejeté par les radicaux maoris qui voient dans
ce concept une manière de cacher l’importance de la culture « indigène » et pour qui la
Nouvelle-Zélande est un pays du Pacifique. Ces leaders de la cause maorie, ne se complaisent
pas dans la position de deuxième force politique du pays et avancent des idées racistes : il y
aurait, selon eux, trop d’Îliens et d’Asiatiques en Nouvelle-Zélande.
Il existe aussi bien chez les Maoris que chez les Pakehas, un « attachement jaloux et exclusif à
leur pays qui les pousse à tenir à distance tous ceux qui risqueraient d’empiéter sur leur
territoire »2 notamment les Asiatiques, perçus comme trop étrangers à la culture du pays. Ce
rejet est ancré dans l’histoire de la Nouvelle-Zélande puisque dès les premières années de la
colonisation européenne, un comité anti-chinois avait vu le jour dans l’Île du Sud. Comme
conséquence de ce rejet il y aurait en Nouvelle-Zélande plusieurs communautés qui ne se
fréquenteraient pas : les Îliens par exemple ont tendance à reconstituer de petites
communautés très soudées, sous la houlette de congrégations religieuses qui conservent des
contacts avec leurs villages d’origine. Nombreux sont les jeunes Tongiens et Samoans qui se
réclament de leur identité insulaire. Les Maoris défendant eux aussi une identité propre, nous
pouvons s lors nous demander quelle place peut-il rester pour les cultures extérieures
lorsque chaque communauté défend fièrement sa culture au détriment de celles des autres.
Ce phénomène de mise en avant identitaire existe également chez les Pakehas : depuis
quelques années, ils défendent une culture qu’ils ont nommée « kiwiana ; alors que quelques
décennies auparavant ils avaient honte de ce qu’ils étaient, et notamment de leur accent
considéré comme campagnard face à l’anglais d’Oxford. Le « Newzild » est aujourd’hui
fièrement parlé par les Néo-Zélandais qui le revendiquent comme une des composantes de
leur identité culturelle. Cette fierté récente met fin à ce que l’historien australien, Arthur
Philipps avait appelé le « cultural fringe », c’est-à-dire le complexe d’infériorité ressenti par
les Kiwis qui pensaient alors que leur histoire et leur culture n’étaient pas dignes d’intérêt, et
qui admiraient l’Angleterre, ou encore la réussite australienne. Or l’attachement à l’Angleterre
est aujourd’hui beaucoup plus ténu qu’il ne le fut dans les premières décennies de l’histoire
européenne du pays.
En effet, les Néo-Zélandais ne se considèrent plus aujourd’hui comme Anglais, même si
l’influence britannique a fortement marqué le pays. Les attaches avec le Vieux Continent se
distendent au fil des générations : les jeunes avouent de nos jours éprouver un intérêt pour
2 Tolron Francine, ibid, p 173
5
l’Angleterre mais non plus en tant que « mère patrie » alors que les générations les plus
anciennes, souffraient, selon Francine Tolron, d’une mentali de dépendance à l’égard de
celle-ci, la définissant par le terme de « home ». Les Kiwis sont néanmoins aujourd’hui
encore très attachés à leur chef d’État, Elizabeth II et à la monarchie qui est entourée d’une
véritable aura mystique : un cri de protestation s’est élevé au niveau national lorsque des
Maoris ont commis des gestes considérés comme offensants envers la reine d’Angleterre lors
des lébrations officielles en 1990. La Nouvelle-Zélande ne connaît pas non plus de
mouvement républicain à proprement parler, puisque, selon un sondage de 1998, seuls 28%
de la population était favorable au républicanisme. Sur ce point, les Néo-Zélandais se
différencient fortement des Français qui portent fièrement les valeurs républicaines.
Bien avant de s’éloigner culturellement de l’Angleterre, la Nouvelle-Zélande s’était détachée
politiquement du royaume puisqu’elle prit le statut de dominion dès 1907. En 1931, elle
acquit son autonomie mais sa législature resta subordonnée au Parlement britannique jusqu’à
l’adoption, en 1947, du statut de Westminster qui permit au pays d’acquérir sa souveraineté.
Dès 1945, la Nouvelle-Zélande chercha à s’imposer sur la scène internationale en tant qu’État
indépendant, en ne passant plus par la Grande-Bretagne pour gocier avec d’autres
puissances. Les liens économiques se distendirent dans les années 1970 entre les deux Nations
lorsque la Grande-Bretagne se tourna vers l’Europe et qu’en réaction, la Nouvelle-Zélande
recentra son économie sur l’Asie et le Pacifique.
Des années de présence britannique ont marqué culturellement Aotearoa mais les Anglais ont-
ils réussi à transmettre pour autant leur méfiance à l’égard des Français ainsi qu’une certaine
francophobie? Comme nous allons le voir par la suite, ce fut le cas dans les premiers temps de
la colonie mais non dans les décennies qui suivirent.
Les Néo-Zélandais se sont tachés de la tutelle britannique, pour tenter de construire leur
propre identité. Selon Francine Tolron, avec ses 170 ans d’histoire, la Nouvelle-Zélande serait
aujourd’hui, d’un point de vue identitaire, dans l’état dans lequel les pays européens se
trouvaient au 19e siècle, c’est-à-dire revendiquant haut et fort sa spécificité : « en train de se
redéfinir vaillante, comme une petite nation dotée d’une identité propre, trouvant son style,
très centrée sur elle-même, prête à imposer une image d’elle-même irréductible à tout
autre »3. Elle serait semblable au personnage enfantin omniprésent dans les œuvres néo-
3 Tolron Francine, ibid, p.142
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