QRC n°7 (17 février 2012)

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Ministère des Affaires Étrangères et Européennes 2011-2012
Préparation au concours interne de secrétaire des affaires étrangères
Économie internationale
D. GLAYMANN (UPEC)
QRC n°7 (17 février 2012)
1. Commentaire
Expliquez et analysez la citation suivante : « Dans l’économie de marché, le pouvoir
ultime appartient à ceux qui achètent ou décident de ne pas acheter ; donc, à quelques
réserves près, c’est le consommateur qui le détient. Ce sont ses choix qui déterminent
la courbe de la demande. Comme l’urne confère l'autorité aux citoyens, la courbe de la
demande, dans la vie économique, donne le pouvoir aux consommateurs. Dans les
deux cas, il y a une bonne dose d’imposture : tant pour l’urne que pour l’acheteur, une
gestion redoutable et fort bien financée de la réaction du public est à l’œuvre ; tout
spécialement à l’âge de la publicité et de la promotion moderne des ventes. » (J. K.
Galbraith, Les Mensonges de l’économie, Grasset, 2004, p. 26-27).
L’économiste américain d’origine canadienne John Kenneth Galbraith (1908-2006) que
l’on peut classer parmi les keynésiens ou parmi les économistes hétérodoxes est
notamment l’auteur de quelques ouvrages importants tels que L’Ère de l’opulence
(1958), Le Nouvel état industriel (1967) ou La République des satisfaits (1992). Il est
également connu pour avoir été l’un des conseillers économiques de différents
présidents démocrates. Dans ce passage des Mensonges de l’économie, il reprend sa
fameuse thèse de « la filière inversée » selon laquelle ce sont désormais les entreprises
qui imposent des produits aux consommateurs, et non l'inverse compte tenu de la
structure oligopolistique de la quasi-totalité des marchés et du rôle joué par le
marketing. Il conteste ainsi l’idée au cœur du modèle néoclassique selon laquelle le
« client roi » dicterait ses choix aux producteurs à travers le mécanisme du marché,
ceux-ci adaptant leur production aux préférences des consommateurs exprimées apr
leur demande assimilée à un bulletin de vote.
Dès lors, la qualité autorégulatrice de marchés concurrentiels permettant d’approcher
l’équilibre économique optimal apparaît aux yeux de Galbraith comme une illusion,
voire un « mensonge de l’économie ».
2. La désintermédiation financière
Après avoir brièvement décrit le fonctionnement du financement intermédié, vous
expliquerez pourquoi et comment les pouvoirs publics français ont agi pour favoriser la
désintermédiation financière à partir des années 1980.
Le financement intermédié de l’économie est une modalité consistant à répondre aux
besoins de financement des investisseurs par le recours à des intermédiaires financiers
(les banques et les autres organismes collectant de l’épargne) qui fournissent des
moyens financiers sous la forme de prêts. Ces prêts sont alimentés d’une part par
l’épargne collectée auprès des agents en capacité de financement (principalement des
ménages) qui est transformée en volume comme en durée, et d’autre part par de la
création monétaire. Cette intermédiation financière permet d’avancer les moyens
nécessaires à l’investissement qui seront remboursés grâce aux résultats de l’activité
générée par ces mêmes investissements.
L’une des caractéristiques de ce financement intermédié largement développé en
Europe occidentale depuis le milieu du XXè siècle est le risque inflationniste.
C’est principalement pour faire face à la forte inflation des années 1970 que les
différents pays européens et donc la France ayant fait le choix d’une politique de
désinflation compétitive vont chercher à favoriser une désintermédiation financière à
partir des années 1980. Cette orientation a largement été inspirée par les tenants du
monétarisme devenus très influents qui considèrent que la stabilité des prix et des
monnaies constituent l’impératif premier d’une bonne gouvernance économique.
Il s’agit alors de développer le financement direct par lequel les entreprises et les États
ayant des besoins de financement émettent des titres (actions, obligations, etc.) et
s’efforcent de les vendre à des épargnants qu’ils rencontrent sur les marchés (marché
monétaire et marché financier). Cela conduit à limiter la création monétaire considérée
comme la principale source d’inflation.
Dans le cas de la France, la désintermédiation est notamment passée par :
- la création du second marché (en 1983) qui permet à une partie des PME
d’accéder au marché financier pour financer leurs investissements en vendant
des valeurs mobilières alors que seules les grandes entreprises pouvaient jusque
là accéder à la cotation boursière ;
- la création (en 1985) d’un compartiment du marché monétaire ouvert à
l’ensemble des agents (et non aux seuls acteurs financiers comme c’est le cas
sur le marché interbancaire), le marché des titres de créance qui sert au
financement à court et moyen termes au moyen de billets de trésorerie, de
certificats de dépôt négociables, de bons du trésor en compte courant etc.
L’essor des OPCVM (SICAV et FCP) et les privatisations (à partir de 1986) ont aussi
contribué à cette désintermédiation en permettant d’attirer vers le marché financier
une plus large partie des épargnants.
Ce mouvement a été accéléré par le mouvement de déréglementation financière dans
le cadre de la globalisation financière qui a suivi le changement de règles du SMI
intervenu au milieu des années 1970. Le choix des pouvoirs publics française de viser
la désintermédiation financière s’inscrit également dans la logique du Système
monétaire européen auquel succèdera bientôt la construction de la future Union
économique et monétaire.
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