Oh les beaux jours de Samuel Beckett mise en scène Anne Bisang avec Christiane Cohendy Dossier de presse Comédie de Genève www.comedie.ch Christine Ferrier +4122 809 60 83 [email protected] Ana Regueiro +4122 809 60 73 [email protected] mardi, vendredi 20h, mercredi, jeudi, samedi 19h, dimanche 17h. Lundis et dimanche 9 mars relâche. du 04 au 22 mars 2014 Mars-avril à la Comédie 25 mars - 06 avril 2014 Cabaret de Hanokh Levin mise en scène Nalini Menamkat avec Ahmed Belbachir, Camille Figuereo, Michel Kullmann, Brigitte Rosset. plein tarif CHF 30.tarif réduit CHF 23.tarif abonnés CHF 18.- 08-11 avril 2014 Yvonne, princesse de Bourgogne de Witold Gombrowicz mise en scène Geneviève Guhl avec Elidan Arzoni, Julia Batinova, Greta Gratos, Geneviève Guhl, Ilil Land-Boss, José Lillo, Frédéric Lugon, Olivia Seigne, Joël Hefti. plein tarif CHF 40.tarif réduit CHF 30.tarif étudiant CHF 20.- 2 Oh les beaux jours de Samuel Beckett mise en scène Anne Bisang Avec : Christiane Cohendy Vincent Aubert dramaturgie : Stéphanie Janin scénographie et costumes : Anna Popek lumières : Colin Legras son : Andres Garcia maquillage et coiffure : Arnaud Buchs production : Comédie de Genève avec le soutien de la Fondation Leenaards et le concours d’Arc en Scènes, Centre neuchâtelois des arts vivants - TPR Oh les beaux jours © 1963 Les Éditions de Minuit 3 Oh les beaux jours La pièce Une femme, Winnie, « la cinquantaine, de beaux restes », recouverte jusqu’à la taille d’un monticule de terre, qui, au cours de la pièce, l’absorbera jusqu’au cou. À l’arrière-plan, Willie, son mari, le plus souvent caché aux yeux du public... C’est Winnie qui parle. Elle évoque le passé, manipule des objets, lutte contre le temps. Des mots qui font entendre l’increvable désir d’exister. La solitude, la difficulté d’être, d’être deux face au vieillissement et à la mort. L’instinct de vivre, dans sa force et sa splendeur. 4 Oh les beaux jours Note de travail par Stéphanie Janin, dramaturge Au fil des créations Happy Days est créée à New York en 1961 par Alan Schneider1, et codirigée l’année suivante par George Devine et Tony Richardson au Court Theater à Londres. En 1963, Roger Blin y met en scène Madeleine Renaud à l’Odéon, sous le titre Oh les beaux jours – que Beckett emprunte au Colloque sentimental de Verlaine. Dès lors le texte ne cesse d’être joué, traversant les décennies et les frontières. En 1996, Michael Colgan décide de graver dans la pellicule dix-neuf œuvres de l’auteur irlandais, et c’est à la réalisatrice canadienne Patricia Rozema qu’il confie la réalisation de ce texte avec Rosaleen Linehan (Winnie), dans Beckett on Film. Les innombrables indications scéniques du dramaturge qui jugulent tout élan d’adaptation personnelle ne découragent pas de grands metteurs en scène tels que Peter Brook, Deborah Warner ou Bob Wilson, ni même le pari d’une distribution « cross-gender » en 2012 de Blandine Savetier avec Yann Collette dans le rôle de Winnie. [...] Un couple dissymétrique Chez Beckett, le propos se définit par son absence plus que par sa présence, à la façon d’un trou noir existant par la masse vertigineuse du vide qu’il provoque. Dire de Oh les beaux jours que le texte parle du couple peut sembler paradoxal, et pourtant c’est bien un couple que l’auteur met en scène : un couple dissymétrique, à une voix, celle de Winnie essentiellement, qui révèle l’isolement, la solitude, le besoin d’exister aux yeux de l’autre, et la difficulté « d’être deux » face au vieillissement et à la mort. Ce flot de souvenirs heureux et de reproches de Winnie à Willie, de questions rhétoriques sur le sens des choses adressées à un partenaire dont on ignore s’il les entend ou les comprend est un monologue sans fin. Cette voix inextinguible retrace ainsi l’épopée des stratégies de survie dans cette solitude du couple, tels que les rituels pour donner sens à cette relation qui s’étiole au fil des heures. On pourrait croire qu’on assiste à la descente aux enfers d’un Adam et d’une Ève de fin du monde, ou comme dit Winnie, des « derniers humains à s’être fourvoyés ici ». Cependant, ce texte, rythmé de peurs, de joies, de déceptions, de rires et de reconnaissance célèbre l’instinct de vie dans toute la force irrationnelle de son optimisme et la splendeur de sa fragilité : « malgré tout, jusqu’ici. » Une partition tyrannique Ses didascalies tyranniques rythment les corps, les paroles et les gestes à la façon d’un chef d’orchestre ou d’un chorégraphe. On peut se demander alors où est la place pour l’individualité du metteur en scène dans la partition. Et pourtant, même si ces derniers doivent renoncer à apposer explicitement leur griffe personnelle, chaque production témoigne d’une rencontre particulière entre un metteur ou une metteuse en scène et une actrice, puis entre le texte, l’actrice, et son jeu : Brook et Parry, Warner et Shaw, Wilson et Asti. On aurait tort de prendre Beckett pour un intellectuel. Sa matière, atrocement humaine, passée au crible d’un maniaque du contrôle, n’a cependant rien de conceptuel. Évoquant la difficulté du processus de répétition, Fiona Shaw répondait au New York Times qu’après avoir « mélangé du béton » pendant plusieurs semaines, la solution vint du réalisateur, Roger Michel, assistant de Beckett sur la production au Royal Court en 1979. Il leur rappela combien la partition de Oh les beaux jours était autobiographique : « C’est en fait une œuvre remplie d’émotion. Une fois que nous avons compris cela tout a changé. » 1 Alan Schneider réalisera trois ans plus tard le scénario de Beckett Film, avec Buster Keaton. 5 Oh les beaux jours Jean-Louis Barrault, à propos de « Oh les beaux jours » En général dans les pièces de théâtre, il y a quelque chose : une action qui arrive, passe et s’en va. Ici, dans Oh les Beaux Jours de Samuel Beckett, il y a quelqu’un ; une femme qui est là. Il semble même que les choses soient déjà passées ou disparues. De ce long fil de la vie, vie individuelle ou vie universelle, il semble qu’il n’en reste plus que quelques brasses : « Ça va bientôt sonner pour le sommeil. » Une femme est là, enlisée jusqu’à la taille, au milieu d’un sol aride, une terre brûlée par le soleil. À l’instant où la représentation commence, le temps a fait son œuvre, la vie s’est écoulée. Il ne reste plus que quelques secondes. En fait on n’a rien pu faire : « On ne peut rien faire. » On n’a pas pu dire grand chose : « Il y a si peu qu’on puisse dire. » La terre va bientôt craquer. Il semble qu’elle a perdu son atmosphère. Le globe ? Peut-être en reste-t-il quelques restes ? Ce pourrait être bientôt le froid éternel, la glace éternelle. Et de tout cela il y a si peu dont on puisse parler. Cette femme est là, tenue à la taille de cette façon, n’ayant plus que d’elle à s’occuper, de quelques affaires renfermées dans son sac (toute sa vie !) et derrière elle, à peu près invisible, un homme qui fut et qui semble être encore tout ce qui reste de sa vie. Une ombre d’homme qui « attend », en se rôtissant les fesses au soleil, en détaillant à l’occasion une carte postale obscène, en rongeant son mouchoir quand il ne peut plus dormir. Un dernier couple d’êtres humains s’est un moment fourvoyé par ici « main dans la main, chacun une sacoche ; puis se sont éloignés, flous, puis plus, plus rien. » Nous sommes au terme de la Vie. Au terme de Tout. Et pourtant cette femme qui est là, est gaie et reconnaissante. Elle remercie. Elle comprend tout. Sa nature est obstinément braquée vers l’optimisme. C’est une damnée de l’espérance : « Ça que je trouve si merveilleux ! » Tout à l’heure, ce n’est plus à la taille qu’elle sera enfoncée, c’est jusqu’au cou. Ne plus pouvoir bouger que les yeux. Sa vie passée se déroulera dans sa tête : vie récente, vie ancienne. Et la joie restera en elle malgré quelques « bouillons de mélancolie ». « Ah oui ! de grandes bontés, de grandes bontés. » Mais pourquoi s’enlise-t-elle ainsi ? La jeunesse, dit-on, est le temps des illusions. Avec l’âge nous entrons dans la réalité des choses telles qu’elles sont ; une réalité fort triste, un petit monde décoloré qui va en se rétrécissant. L’enlisement progressif de cette femme est la traduction plastique, poétique et logique de ce resserrement constant. Au moment où « ça va sonner pour le sommeil », où « on devra fermer ses yeux et ne plus les ouvrir » il n’y a plus que la tête qui émerge. Et néanmoins il y aura eu « abondance de bontés » : « ...Ah ! le beau jour encore que ça aura été. Après tout. Malgré tout. Jusqu’ici. » C’est en côtoyant d’aussi près le néant et le désespoir que Beckett réussit cette espèce d’hymne à la vie, à l’amour, à la joie, à la reconnaissance, à la grâce. Peut-on dire grâce mystique ? « Oui, 6 Oh les beaux jours Jean-Louis Barrault, à propos... (suite) j’ai l’impression de plus en plus que si je n’étais pas tenue, dit la femme, de cette façon, je m’en irais tout simplement flotter dans l’azur... simple hasard, je présume, heureux hasard. Oh ! oui, de grandes bontés, de grandes bontés. » Il ne faut pourtant pas oublier dans tout cela la cocasserie, l’humour et même l’humour noir... Quand même n’oublions pas que tout à l’heure, sur cette terre brûlée et sentant déjà la mort, une fourmi est passée, tenant la vie entre ses bras : des œufs... « comme une petite balle blanche ». On aurait dit de la vie !... Oh les Beaux Jours L’Avant-Scène/Théâtre, n° 313, 15 juin 1964 7 Oh les beaux jours Entretien avec Anne Bisang Propos recueillis par Hinde Kaddour C’est votre première mise en scène d’un texte de Beckett… Il est des petites musiques qui vous accompagnent longtemps sans être vraiment entendues. Les pièces de Beckett sont de celles-là : il est l’un des premiers auteurs que j’ai lu au début des mes cours de théâtre au Conservatoire de Genève – j’avais quatorze ans. Mon enfance a baigné dans la culture anglo-saxonne – j’ai fait une partie de ma scolarité au Japon puis au Liban – et son univers à proximité du burlesque m’a d’emblée été familier. Mais monter Beckett dans ma jeunesse aurait été saugrenu. Je crois qu’il faut un peu connaître les méandres du temps pour aborder son théâtre. Les didascalies de Beckett, précises, omniprésentes, sont tyranniques... Où est l’espace de liberté de la mise en scène ? Chaque production témoigne d’une rencontre particulière entre la mise en scène, le jeu et la pièce de Beckett. Il y a donc des voies pour échapper à cette tyrannie ! Et pour commencer, celle d’être à l’écoute de résonances intimes avec le texte. Car tout se joue ici sur le terrain émotionnel et musical. Winnie dit : « le chant doit venir du cœur », « couler de source ». Cette évidence, fluide et cristalline, ce cœur qui bat suffisamment fort pour entraîner une salle – une part essentielle du théâtre en somme – cela n’est pas dans le « mode d’emploi » de Beckett ! Toute la structure de l’œuvre, texte et didascalies comprises, tout ce carcan apparent doit permettre de libérer cela : le chant du cœur. Monter Oh les beaux jours, c’est faire le pari d’une révélation. La contrainte oblige la mise en scène à trouver une autre voie d’expression qui peut être une façon de rejoindre l’état des personnages, en particulier l’immobilité forcée de Winnie. Comme elle, il faut trouver un autre chemin vers la transgression et la liberté. On s’aperçoit vite que cette partition théâtrale nécessite, comme pour toute autre pièce, une infinité de choix et de décisions. En immobilisant son personnage central, Beckett cherche à capturer son essence même. Si la mise en scène existe ici en creux, les didascalies, loin de la disqualifier, tentent de maintenir cette fonction dans sa dimension invisible. Cette contrainte fait donc apparaître que l’essentiel d’une mise en scène n’est pas dans sa partie visible mais dans toutes les strates et les désirs qui nourrissent le jeu des acteurs et conduisent à la manifestation d’une esthétique collective. Comme le dit joliment Christiane Cohendy, c’est une œuvre pour orchestre de chambre où acteurs et metteure en scène doivent s’accorder et traverser ensemble la partition. Pour moi, ce travail représente une étape passionnante qui vient à un moment où je me défais volontiers d’une certaine idée de la fonction de metteure en scène. On a souvent cherché à rattacher Beckett au « théâtre de l’absurde »... À tort ? Oui, à tort. Beckett est un génie du paradoxe et de l’équivoque qui me paraît au contraire très attaché au sens (par opposition à nonsense, « absurde » en anglais). L’aveuglement ou le déni d’impuissance qui caractérise la plupart de ses personnages est une loupe grossissante sur des attitudes humaines qui échappent à la raison sans être pour autant absurdes. Il y a dans son 8 Oh les beaux jours Entretien avec Anne Bisang (suite) œuvre un regard « extralucide » sur une folie très ordinaire qui nous invite à composer avec ce qui échappe à notre maîtrise. Pour Alain Badiou, les personnages de Beckett ne sont pas, contrairement à ce que souvent, on a pu lire, le reflet déformant d’une humanité désespérée. Et si Beckett les place dans des situations désespérées, c’est plutôt pour montrer l’acharnement des êtres à vivre, et la beauté de cet acharnement. Êtes-vous d’accord avec cela ? La vision de Badiou est en effet très éclairante et me convient parfaitement. C’est encore le paradoxe qui est au centre de « l’entomologie beckettienne ». Beckett met en scène l’irréductibilité de l’énergie vitale face à la logique rationnelle, et ce paradoxe est un phénomène qu’il ne se lasse pas de décliner obsessionnellement. Comme pour en venir à bout. À la manière dont Giacometti souhaitait se débarrasser de la sculpture en répétant ses figures d’homme marchant. Ce faisant, et sans jugement pour ses personnages qui ne tirent aucune conclusion de leurs expériences alors que tout les inciterait à l’abdication, il met en scène, presque joyeusement, le triomphe de l’instinct de vie aux antipodes du pessimisme. On a souvent tendance à oublier de parler du personnage de Willie, tant on est ébloui par le rôle de Winnie. Mais Oh les beaux jours, c’est aussi une pièce sur le couple, et une pièce qui se joue à deux... Absolument. Et par ailleurs, il y a quelque chose de révolutionnaire à placer une femme dans la fonction de l’universel. Winnie parle au nom de l’humanité. Ce qui est aussi dissonant, à notre époque baignée de sentimentalisme et de good feeling, c’est de peindre le couple dans toutes ses dimensions : tragi-comiques, triviales, dérisoires, merveilleuses… En travaillant sur la pièce j’ai pensé notamment au film Amour de Haneke. À ces liens déraisonnables faits de mille batailles avec leurs lots de défaites et d’amnisties. Pouvez-vous nous dire quelques mots du remplacement d’Yvette Théraulaz par Christiane Cohendy ? Winnie n’est pas un rôle comme un autre pour une actrice : c’est une promesse de dépassement de soi. Winnie est elle-même une actrice qui se met constamment en scène. Pour moi, elle partage un même mystère merveilleux avec ces grandes comédiennes qui gardent au fil du temps une intacte jubilation de jouer : comment ce miracle est-il possible ? Il était donc important de proposer ce projet à une actrice qui porte avec elle ces incroyables traversées théâtrales et qui soit une authentique rencontre pour Winnie… Après une formidable année 2013 où Yvette Théraulaz a reçu la prestigieuse récompense de l’Anneau Reinhart et fait vibrer les foules d’ici et d’ailleurs avec son tour de chant Les Années, elle a dû accepter que les forces nécessaires n’étaient pas au rendez-vous et a transmis le témoin. C’est vers une autre grande dame du théâtre, français cette fois, que nous nous sommes tournés. Figure emblématique de la scène francophone actuelle, multi-primée, « Moliérisée », c’est la Providence qui nous l’envoie. 9 Oh les beaux jours Samuel Beckett, biographie Samuel Beckett est né le 13 avril 1906 dans une banlieue aisée de Dublin. Il étudie le français, l’italien et l’anglais au Trinity College de Dublin, entre 1923 et 1927 et obtient son Bachelor of Arts et, après avoir enseigné quelque temps au Campbell College de Belfast, est nommé au poste de lecteur d’anglais à l’École normale supérieure de Paris. C’est là qu’il est présenté à James Joyce. Cette rencontre devait avoir une profonde influence sur Beckett, qui aida notamment James Joyce dans ses recherches pendant la rédaction de Finnegans Wake. C’est en 1929 que Beckett publie son premier ouvrage, un essai critique intitulé Dante... Bruno. Vico.. Joyce., dans lequel il défend la méthode et l’œuvre de Joyce dont certains critiquent le style obscur. Les liens étroits entre les deux hommes se relâchèrent cependant lorsque Samuel repoussa les avances de Lucia, la fille de Joyce. C’est aussi au cours de cette période que la première nouvelle de Beckett, Assumption, fut publiée par l’influente revue littéraire parisienne, Transition. L’année suivante, il est le lauréat d’un petit prix littéraire pour son poème Whoroscope, composé à la hâte, et inspiré par une biographie de Descartes. En 1930, il revient au Trinity College en tant que lecteur et écrit en 1931 un deuxième essai en anglais intitulé Proust. En 1932, pour la revue « This Quarter », il traduit un poème d’André Breton, Le Grand secours meurtrier, paru en France dans le recueil Le Revolver à cheveux. Il se lasse assez vite de la vie universitaire, et exprime ses désillusions en écrivant un article érudit au sujet d’un auteur toulousain nommé Jean du Chas, fondateur d’un mouvement littéraire appelé concentrisme ; ni du Chas ni le concentrisme n’ont jamais existé, sinon dans l’imagination de Beckett, lui permettant de se moquer du pédantisme littéraire. Pour marquer ce tournant important de sa vie, inspiré par la lecture des Années d’apprentissage de Wilhelm Meister de Goethe, il écrit le poème Gnome, que publie le Dublin Magazine en 1934. Après plusieurs voyages en Europe, notamment en Allemagne, il se fixe définitivement à Paris peu avant la Seconde Guerre mondiale. Son premier roman, Murphy, fit l’objet de trente-six refus avant d’être finalement publié par Bordas en 1947. Lors de la déclaration de la guerre, il se trouve en Irlande. Il regagne alors précipitamment la France où il participe activement à la résistance contre l’occupation nazie. Il est recruté au sein du réseau Gloria SMH par son ami, le normalien Alfred Péron. Quand le réseau est dénoncé, Samuel Beckett, prévenu par la femme de son ami Péron, échappe de peu à la police allemande. Il se réfugie d’abord chez l’écrivain Nathalie Sarraute, puis de 1942 à 1945 à Roussillon, dans le midi de la France. Beckett apprend en 1945 que Péron est mort après la libération du camp de Mauthausen. Selon son biographe James Knowlson, l’œuvre de l’écrivain est profondément marquée par les récits de déportation des camarades de Péron et par la guerre. Les années 1960 représentent une période de profonds changements pour Beckett, dans sa vie personnelle comme dans sa vie d’écrivain. Le triomphe que rencontrent ses pièces l’amène à voyager dans le monde entier pour assister à de nombreuses représentations, mais aussi participer dans une large mesure à leur mise en scène. En 1956, la BBC lui propose de diffuser une pièce radiophonique : ce sera All That Fall (« Tout ce qui tombe »). Il continue à écrire de temps à autres 10 Oh les beaux jours Samuel Beckett, biographie (suite) pour la radio, mais aussi pour le cinéma (Film, avec Buster Keaton) et la télévision. Il recommence à écrire en anglais, sans abandonner pour autant le français. Le prix Nobel de littérature lui est attribué en 1969 : il considère cela comme une « catastrophe » ; en fait, il rejette par là une certaine industrie beckettienne, au sens où cette récompense accroît considérablement l’intérêt de la recherche universitaire pour son œuvre. Son éditeur Jérôme Lindon ira tout de même chercher le prix. Suzanne Beckett, son épouse, décède le 17 juillet 1989. Beckett, atteint d’emphysème et peutêtre de la maladie de Parkinson, part en maison de retraite où il meurt le 22 décembre de la même année. Ils sont tous deux enterrés au cimetière du Montparnasse à Paris. (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Samuel_Beckett) 11 Oh les beaux jours Parcours Anne Bisang Née à Genève en 1961, Anne Bisang grandit au Japon puis au Liban avant de retrouver la Suisse. Au sortir de l’École supérieure d’art dramatique, elle fonde sa compagnie et réalise sa première mise en scène en 1986. Premier essai, succès immense. Sa carrière artistique démarre en trombe et ne connaît pas d’éclipse. En 1999, elle est nommée à la tête de la Comédie de Genève. Elle y développe une ligne artistique claire et exigeante : un théâtre de créations, fortes et audacieuses, qui fait une large place aux auteurs contemporains. Ses trois derniers grands rendez-vous artistiques : Katharina de Jérôme Richer (d’après L’Honneur perdu de Katharina Blum de Heinrich Böll, Comédie de Genève, 2011), Desperate Alkestis d’après Euripide (Théâtre du Grütli, 2012), et L’Embrasement de Loredana Bianconi (Théâtre du Galpon, 2013). Depuis août 2013, elle est directrice artistique d’Arc en Scènes, Centre neuchâtelois des arts vivants – TPR. Christiane Cohendy Le parcours de Christiane Cohendy est jalonné de rencontres rares et de grandes aventures théâtrales : après la fondation du Théâtre Eclaté d’Annecy avec Alain Françon, André Marcon et Evelyne Didi, elle intègre le collectif du Théâtre National de Strasbourg dirigé par Jean-Pierre Vincent, et coopère aux premiers chantiers sur l’écriture contemporaine de Théâtre Ouvert avec Micheline et Lucien Attoun. Pendant ces trente dernières années elle travaille essentiellement sur les scènes du théâtre subventionné avec entre autres Alain Françon, André Engel, Jean-Pierre Vincent, Klaus Michael Grüber, Matthias Langhoff, Jorge Lavelli, Hans Peter Cloos, Bruno Boeglin, Georges Lavaudant, Patrice Chéreau. Elle y joue des classiques : Eschyle, Shakespeare, Racine, Molière, Kleist, Marivaux, de grands contemporains tels que Tchekhov, Gorki, Claudel, Horvath, Brecht, Beckett, et aussi des auteurs d’aujourd’hui : Koltès, Müller, Bond, Rullier, Valletti, Berkoff... De ce dernier, elle interprète avec Michel Aumont Décadence, mis en scène par Jorge Lavelli, ce pour quoi elle reçoit, en 1995, le Prix de la Meilleure Actrice du Syndicat de la Critique et, en 1996, le Molière de la Meilleure Comédienne. En 2013, elle joue Collaboration de Ronald Hardwood avec Michel Aumont et Didier Sandre au Théâtre de la Madeleine (mise en scène de Georges Werler), et, au Théâtre des Célestins, à Lyon, La Chatte sur un Toit Brûlant de Tennessee Williams (mise en scène de Claudia Staviski). On a pu la voir ces dernières années à La Comédie de Genève dans Roberto Zucco de Koltès, Les Grands Personnes de Marie N’Diyae (mise en scène Christophe Perton) et Le Mystère du Bouquet de Roses de Manuel Puig (mise en scène Gilberte Tsaï). C’est en 1984 qu’elle joua pour la première fois à la Comédie, dans La Cerisaie mise en scène par Matthias Langhoff. En 2012, elle est nommée en Officier dans l’Ordre des Arts et des Lettres. Vincent Aubert Né en 1951, Vincent Aubert a d’abord sagement commencé par faire des études de sciences politiques. Puis il a embrassé la carrière de clown en faisant l’Auguste pendant 15 ans. Ses spectacles l’ont amené à parcourir une bonne partie de la planète, et il a récolté de nombreux prix. 12 Oh les beaux jours Parcours (suite) Le théâtre prend de plus en plus de place dans son travail. Il a joué plus de 500 représentations pour le théâtre Am Stram Gram, dont Les Deux Gredins. Il a également joué à la Comédie, chanté à l’Orangerie, fait le bouffon au Théâtre de Carouge et porté les valises de Lucky à la Parfumerie. Avec son comparse contrebassiste Jacques Siron, il crée un duo, aubert & siron®, qui a à son actif plusieurs spectacles et des dizaines d’interventions. La musique et le mouvement sont une deuxième nature chez lui. Ce qui lui a permis de côtoyer des grands noms de l’opéra dans les Arènes de Vérone. Mais surtout de créer des concerts-spectacles, avec entre autres l’Ensemble Variante (Les Tableaux d’une exposition de Moussorgski, La Boîte à joujoux de Debussy), et également, sous la direction d’Eric Bauer, Le Carnaval des animaux de Saint-Saëns et L’Histoire du soldat de Stravinski et Ramuz. 13