La valeur chinoise de la « face » est beaucoup plus forte que celle des Occidentaux, et essentielle
dans la société chinoise. Ce phénomène est peu connu des Occidentaux. Selon Lihua Zheng, la face
« correspond à une forme de contrainte ancrée dans la culture et elle constitue la charpente de la
conduite des Chinois dans leurs relations interpersonnelles ordinaires » (1995: 15). Elle détermine
trois aspects constitutifs du concept de face, qui sont la réputation morale, le prestige social et le
sentiment personnel.
Ainsi, dans la salle de classe, l'acte de demander de l'aide, ou de poser une question publiquement
est considéré comme une marque d'incompétence, voire de faiblesses, et on risque de faire perdre la
face à la fois de l'enseignant et la sienne. Un étudiant chinois signale donc rarement à l'enseignant
qu'il n'a pas compris. Même si on le lui demande en cours, il préfère garder le silence. En outre,
l'importance accordée à la « face » contribue à augmenter la peur de faire des erreurs chez les
apprenants chinois. Moins on écrit ou parle, moins il y a de risques de faire des erreurs.
Un apprenant chinois (mais aussi coréen ou japonais) n'a pas compris un mot ou plusieurs mots du texte ou du
discours. Plutôt que de s'informer, il cherche dans son dictionnaire (souvent petit) au risque de se laisser distancier
dans le déroulement du cours. L'enseignant, qui s'en aperçoit, demande à l'apprenant d'écouter son explication
plutôt que de chercher dans le dictionnaire. Ce qui peut signifier pour ce dernier une perte de face : rendre public
le fait qu'il n'a pas compris. Cet apprenant acquiesce à l'injonction de l'enseignant « oui » (oui, j'écoute, je ne
regarde pas dans le dictionnaire), ce qui est pour lui répondre à la politesse de l'enseignant (merci de me proposer
une explication personnelle, c'est très courtois), mais, à la grande surprise de l'enseignant, continue à feuilleter son
dictionnaire sans écouter les explications (moi aussi, je veux être courtois, je peux très bien trouver le mot tout seul,
ne perdez pas votre temps, et le temps de la classe, avec moi). Et c'est le drame, l'échec de communication. (Robert,
2002: 141)
La valeur du silence
Dans la culture chinoise, la valeur du silence est supérieure à celle de la parole qui est généralement
considérée comme non efficace et non persuasive. Savoir se taire est un signe de sagesse. Si les
enseignants occidentaux ont souvent tendance à interpréter les silences des apprenants chinois
comme un refus de communications, les enseignants chinois, eux les respectent. Contrairement à
beaucoup d'étudiants français qui peuvent répondre immédiatement à une question, « le Chinois
s'accorde quelques instants de réflexion, de maturation, d'organisation de sa pensée et de sa
réponse » (Robert, 2002: 138). Un silence peut être un signe d'incompréhension. Dans ce cas, on ne
dit rien afin de respecter le code de politesse et/ou conserver la face ainsi que celle de l'enseignant.
L'étudiant chinois est réputé silencieux et prudent car il est entraîné à parler seulement lorsqu'il
connaît la bonne réponse. Il se taira plutôt que de réaliser un énoncé incorrect.
Le manque de l’autonomie
Le terme autonomie a été introduit dans la pensée philosophique par E. Kant (1724-1804) pour
désigner « dans la sphère de la raison pratique, l’indépendance de la volonté par rapport à tout désir
ou à tout objet de désir et sa capacité à se déterminer en conformité avec sa propre loi » (Barbot et
Camatarri, 1999; 25). Si nous voulons retenir la définition de Kant comme le point de départ, c’est
parce que le philosophe est le premier qui a conçu une conception de l’autonomie comme la
capacité d’agir sur la base de normes autodéterminées, et non comme l’affirmation d’une
subjectivité absolue.
En didactique des langues étrangères, l’idée de trouver d’autres possiblités d’apprendre une langue,
qui ne soient pas fondées sur le rôle primordial de l’enseignement mais sur l’acquisition de langue
en termes d’apprenant et d’apprentissage, a émergé au début des années 1970. Cette recherche de
solutions alternatives est devenue la base de la démarche pédagogique dite de l’autonomie. À cet
égard, Holec propose en 1991 sa définition de l’autonomie: « L’autonomie de l’apprenant implique