Théâtre Le Petit Poucet ou du bienfait des balades en forêt dans l’éducation des enfants © Pierre Grosbois Texte et mise en scène Laurent Gutmann Durée : 1h à partir de 8 ans Catégorie C Contact secteur éducatif : Maud Cavalca / 03 84 58 67 56 / [email protected] Réservations : Caroline Diet / 03 84 58 67 67 / [email protected] jeudi 21 novembre à 19h Représentations scolaires : Jeudi 21 à 14h et vendredi 22 à 9h30 et 14h au granit Sommaire Distribution p.1 Entretien avec Laurent Gutmann, metteur en scène p.2 Repères biographiques Laurent Gutmann, metteur en scène p.4 Jade Collinet, comédienne p.5 David Gouhier, comédien p.5 Jean-Luc Orofino, comédien p.6 Extrait de texte p.7 La presse en parle p.9 Distribution D’après Charles Perrault Écriture et mise en scène Laurent Gutmann Avec Jade Collinet, David Gouhier, Jean-Luc Orofino Scénographie Mathieu Lorry-Dupuy, Laurent Gutmann Lumières Gilles Gentner Son Madame Miniature Costumes Axel Aust Maquillages, perruques Catherine Saint-Sever Prix Momix 2013 1 © Pierre Grosbois Entretien avec Laurent Gutmann, metteur en scène « Adapter le Petit Poucet, c’est d’abord se demander quel acteur choisir pour jouer le rôle-titre. Je ne voulais pas grimer un adulte en enfant, je trouve ça un peu pathétique. Alors j’ai décidé de donner le rôle à un comédien adulte très petit. Jean-Luc Orofino a une quarantaine d’années, on le représente donc comme un adulte petit, on ne fait pas croire que c’est un enfant. Et j’ai choisi des comédiens un peu plus jeunes que lui pour jouer le rôle de ses parents. On raconte ainsi que si le Petit Poucet est resté petit alors qu’il a vieilli, c’est parce que le regard que ses parents portent sur lui n’a pas changé. Ils continuent de voir en lui un enfant et c’est bien là le problème de cette famille. D’ailleurs le sous-titre que j’ai donné à la pièce l’illustre : « Le Petit Poucet ou de l’intérêt des balades en forêt dans l’éducation des enfants »... C’est une façon de dire qu’à un moment, finalement, abandonner ses enfants ça peut leur faire du bien ! Bien évidemment, présenté comme ça, c’est très provocateur mais c’est une façon de dire que pour que l’enfant ne soit plus un enfant, qu’il trouve sa juste place dans la famille et qu’il puisse ensuite être un adulte dans la famille, il faut que les parents l’aident à partir, à quitter la maison de son enfance. Et si dans le spectacle ses parents l’abandonnent de façon très égoïste, c’est en fin de compte une chance offerte à cet enfant. C’est paradoxal, il aura grandi grâce à l’abandon. Le problème dans la famille du Petit Poucet c’est le manque d’amour mais aussi le manque d’imaginaire. On n’imagine pas chez eux que la vie puisse être autre que telle qu’elle se présente. Chez l’ogre et l’ogresse, c’est tout le contraire. Ils sont très amoureux l’un de l’autre et ils ont une maison toute dorée. 2 C’est très bling-bling chez l’ogre et le Petit Poucet est naturellement attiré par cet univers aux antipodes de celui de ses parents. Je crois pouvoir garantir que ce spectacle est drôle, je prends cet engagement, et qu’il est parfaitement adapté aux adultes. Qu’il le soit pour les enfants, j’espère que c’est acquis, mais dans les villes où on l’a déjà joué les adultes ont eu la grande surprise de pouvoir rire autant lors d’un spectacle, qu’ils pensaient voir pour accompagner leurs enfants. Propos recueillis par Sébastien Daniel, Théâtre Jacques Prévert d’Aulna 3 Repères biographiques Laurent Gutmann, metteur en scène Il reçoit une formation de comédien à l’École de Chaillot dirigée par Antoine Vitez. Parallèlement et après une Maîtrise de Sciences Politiques, il obtient un DEA de philosophie à Paris X - Nanterre. Il commence à travailler comme assistant de Jean-Pierre Vincent et comme comédien avec Claude Régy à l’Opéra Bastille. En 1994, il crée sa compagnie (Théâtre Suranné) avec laquelle il réalise ses propres mises en scène : Le Nouveau Menoza de Jacob Lenz (1994-95) ; Le Balcon et Ce qui est resté d’un Rembrandt déchiré en petits carrés et foutu aux chiottes de Jean Genet (1996) ; Les Décors sont de Roger H, création collective (1996) ; Le Coup de filet de Bertolt Brecht (1997) ; La Vie est un songe de Calderon de la Barca (1997-1998) ; Œdipe roi de Sophocle (1999) ; En Fuite –textes de Georges Perec, Nathalie Sarraute et Jean Genet– (1999) ; En route, création collective (1999-2000) ; Le Retour au désert, de Bernard-Marie Koltès (au Pérou et en espagnol, 2000) ; Légendes de la forêt viennoise d’Ödön von Horvath (2001) ; Terre Natale de Daniel Keene (2002). À partir de 1999, la compagnie s’installe en Région Centre, associée à la Halle aux grains – Scène Nationale de Blois. En 2002, il est lauréat du concours «Villa Médicis hors les murs» pour un projet de collaboration à Tokyo avec l’auteur et metteur en scène japonais Oriza Hirata. Dans la continuité de ce projet, il met en scène India Song de Marguerite Duras, avec des comédiens japonais, au Théâtre Agora de Tokyo ; puis, en France, Nouvelles du Plateau S de Oriza Hirata. En janvier 2004, il prend la direction du Théâtre Populaire de Lorraine qui devient Centre dramatique national de Thionville Lorraine. Il met alors en scène Splendid's de Jean Genet (2004) ; Les Estivants d’après Maxime Gorki, spectacle de sortie du groupe 35 de l’École du TNS (2005), La Nuit va tomber tu es bien assez belle (texte qu’il a écrit, 2005) ; Lorenzaccio de Musset (En Allemagne et en allemand, 2006) ; Chants d’Adieu de Oriza Hirata ; Je suis tombé, d’après Au-dessous du Volcan de Malcolm Lowry ; Le Cerceau de Victor Slavkine (2009) ; La Rue spectacle qu’il conçoit pour un groupe de 52 comédiens amateurs de Thionville et de sa région ; Le Moineau à la langue coupée de Oriza Hirata (2009), spectacle Jeune Public, tourné en Lorraine et dans toute la France. Retrouvant en 2010 une activité de metteur en scène indépendant, il met en scène Pornographie de Simon Stephens (2010) ; Nouvelles Vagues de Ronan Cheneau, spectacle de sortie de la promotion 2012 de l’ESAD ; Le Petit Poucet ou du bienfait des balades en forêt dans l’éducation des enfants, (texte qu’il a écrit, 2012) Ce spectacle est reparti en tournée depuis septembre 2012 pour plus de soixante-dix représentations en France et à l’étranger. Parallèlement à ses spectacles, il mène depuis longtemps une activité de pédagogue, intervenant régulièrement dans les écoles supérieures d’art dramatique (Théâtre National de Strasbourg, Ecole Supérieure d’Art Dramatique, Ecole Régionale d’Acteurs de Cannes) et animant de nombreux ateliers en France comme à l’étranger. 4 Jade Collinet, comédienne Elle intègre l’Ecole Supérieure d’Art Dramatique de Paris où elle travaille notamment avec JeanClaude Cotillard, Marie-Christine Orry, Christophe Patty, le Théâtre du Mouvement et Paul-André Sagel. Elle participe à différents festivals sous la direction de Jany Gastaldi, Sharmila Roy, Emmanuelle Cordoliani et Stéphane Mir. Elle développe quelques numéros de clown (théâtre national d’Abu Dhabi 2009), travaille le masque au sein de la compagnie La Strada Dell’Arte (Saint-Cyr, La Grande Dame, Robin des Bois, Un pour tous tous pourris !), et la marionnette avec Christian Chabaud (La Conférence des Papillons). Elle travaille principalement en création, avec la compagnie Dawa (Apparemment pas, Le Bonheur, Histoire de Roméo et Juliette) et la compagnie Illico Echo issue de l’école Lecoq (Les Pieds dans le Plat). Elle joue sous la direction de Laurent Gutmann (Le Cerceau de Victor Slavkine), Gloria Paris (Les Amoureux de Carlo Goldoni), Francis Freyburger (Sad Lisa de Sabine Tamiser) et Philippe Lanton (La guerre au temps de l’amour de Jeton Neziraj). Elle participe également à un projet initié par le philosophe Bruno Latour sur le réchauffement climatique (Gaia Global Circus). David Gouhier, comédien Il a suivi les Cours Florent puis l’École Supérieure d’Art Dramatique du T.N.S. Au Théâtre, il a travaillé avec Elisabeth Chailloux dans Le Baladin du monde occidental, Les Acteurs de bonne foi mis en scène par Jean-Pierre Vincent, Peines d’amour perdues m.e.s Gilles Bouillon, L’école des femmes m.e.s Jean-Pierre Vincent, Le conte d’hiver m.e.s Jacques Osinski, J’ai spectacle rugby m.e.s. Guillaume Rannou, La Fausse suivante m.e.s. Elisabeth Chailloux, Splendid’s m.e.s. Laurent Gutmann, Sallinger de Bernard-Marie Koltès m.e.s. Elisabeth Chailloux , La Dernière Sirène m.e.s. Claude Merlin, L’Ombre de la vallée de John M. Synge m.e.s. Dominique Léandri, La Trilogie de la villégiature de Carlo Goldoni m.e.s. Jean-Louis Benoit, Tête d’Or de Paul Claudel m.e.s. Claude Buchvald, Lorenzaccio de Alfred de Musset m.e.s. Jean-Pierre Vincent, Homme pour homme de Bertolt Brecht m.e.s. Jean-Pierre Vincent, Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux m.e.s. JeanPierre Vincent, Le Tartuffe ou l’Imposteur de Molière m.e.s. Jean-Pierre Vincent, Armor de Elsa Solal m.e.s. Philip Boulay, Dans la jungle des villes de Bertolt Brecht m.e.s. H. Colas et Ph. Duclos etc… 5 Jean-Luc Orofino, comédien Au Théâtre, il a travaillé dans La Brasserie de Koffi Kwahulé mise en scène Paulin F.Fodouop, Oedipe, Don Quichotte, L’ivrogne dans la brousse, Le malade imaginaire, En attendant Godot, Le procès de Kafka m.e.s Philippe Adrien, Les géants de la montagne, m.e.s Bernard Sobel, Don Juan de Montherlant, m.e.s Jean-Luc Tardieu, Le livre de Job m.e.s. Bruno Netter et P. Simon, Pinocchio m.e.s. Bruno Boëglin, Le partisan m.e.s François Floris (solo), Roméo et Juliette m.e.s Jean-Luc Borg, Le magicien d’Oz m.e.s . Gil Galliot, Le magicien prodigieux m.e.s. Jacques Nichet, Astérix et d’Artagnan m.e.s. Jérôme Savary… En Danse, il a travaillé avec Karine Saporta dans La princesse de Milan et Chéri-chérie. Au cinéma et à la télévision il a travaillé avec Josiane Balasko, Jean-Pierre Mocky, Gérard Corbiau… 6 © Pierre Grosbois Extrait de texte LE PÈRE : Prenons le problème par le début : nous avons chaque jour trois bouches à nourrir, la tienne, la mienne et celle de notre petit poucet. Nous avons assez d’argent pour en nourrir deux LA MÈRE : Grand maximum. LE PÈRE : Grand maximum. Donc que faut‐il faire ? Il faut supprimer une bouche. Trois moins un égal deux. LA MÈRE : Ah oui. LE PÈRE : Envisageons maintenant comment y parvenir. On pourrait supprimer ma bouche LA MÈRE : Comment ça supprimer ta bouche ? LE PÈRE : C’est une image. Ça veut dire que je pourrai partir, vous laisser seuls tous les deux, le petit poucet et toi, et comme ça vous pourriez vous partager ce que je mange chaque jour. LA MÈRE : Ce serait une solution, c’est sûr, on serait plus à l’aise comme ça. LE PÈRE : Mais non, pas du tout : si je vous laisse tous les deux seuls, qui va travailler toute la journée pour ramener l’argent grâce auquel vous allez vous acheter à manger ? LA MÈRE : Ah oui, je n’y avais pas pensé. LE PÈRE : Imaginons maintenant qu’on supprime ta bouche – c’est encore une image – Je resterais seul à la maison avec notre petit poucet et nous mangerions chaque jour ta part en plus des nôtres. LA MÈRE : Et moi je mangerais quoi ? LE PÈRE : Ce n’est pas le problème. LA MÈRE : Ah bon ? 7 LE PÈRE : Il s’agit de savoir si cette solution est satisfaisante pour la majorité d’entre nous. LA MÈRE : D’accord. LE PÈRE : Dis-moi, est-ce que tu penses qu’un enfant qui a perdu sa mère puisse être parfaitement heureux ? LA MÈRE : Ah non. LE PÈRE : Donc cette solution n’est pas bonne non plus. (Silence) Je n’en vois plus qu’une. LA MÈRE : Ah oui ? LE PÈRE : Oui. (Temps) LA MÈRE : Supprimer la bouche du petit poucet ? LE PÈRE : C’est toi qui l’as dit. LA MÈRE : Ca veut dire ?... LE PÈRE : Ca veut dire le laisser partir, qu’il quitte cette maison et que nous nous partagions chaque jour toi et moi ce qu’il ne mangera plus. LA MÈRE : Plus de petit poucet ? LE PÈRE : Si, mais loin, ailleurs. LA MÈRE : Quand même, abandonner notre enfant… LE PÈRE : Tout de suite les grands mots. LA MÈRE : Je n’en vois pas d’autre. LE PÈRE : Ça serait pour son bien. LA MÈRE : L’abandonner tout seul sans défense… LE PÈRE : Lui offrir la chance d’un nouveau départ. (Il commence à couper en petits morceaux les restes de pizza. A la mère.) Tu m’aides ? 8 La presse en parle Comment vous est venue l’idée d’adapter Le Petit Poucet, célèbre conte de Charles Perrault ? Laurent Gutmann : Mes filles, qui ont 9 et 11 ans, me demandaient quand je ferais un spectacle qu’elles pourraient voir. J’ai fini par me lancer, après une première expérience jeune public, il y a douze ans. On a voulu faire un spectacle qui s’adresse aussi aux adultes. Pour l’instant, cette double lecture a l’air de fonctionner, tant sur les peurs que sur l’humour et l’ironie. Pourquoi avez-vous choisi Le Petit Poucet, qui évoque de nombreuses peurs ? L.G : En relisant les contes de Perrault, Grimm et Andersen, j’ai été stupéfait par leur force. Enfant, je n’adorais pas Le Petit Poucet. Je trouvais que ça ne finissait pas très bien. Mes filles n’étaient pas d’accord. Pour elles, le voyage du Petit Poucet est celui d’une vie. Le voyage qui permet de quitter ses parents en tant qu’enfant et de les retrouver parce qu’on est devenu adulte. Vous avez cherché à moderniser le propos. Comment avez-vous fait ? L.G : C’est entièrement réécrit mais la fable est fidèlement respectée. Pour donner une raison à l’abandon du Petit Poucet, je trouvais plus intéressant de raconter un manque d’amour que la faim. J’ai joué sur le regard qu’ils se portent mutuellement. Au début, Le Petit Poucet a la taille d’un enfant mais un visage d’adulte. La scénographie est constituée de plusieurs voiles pour évoquer les lieux, comme la forêt. Nous avons créé un univers sonore pour cette pièce. Propos recueillis par Christine Baucherel, Ouest-France, 25-26 février 2012 Sous-titré Du bienfait des balades en forêt dans l’éducation des enfants, la version du conte que propose aujourd’hui le metteur en scène place un comédien de petite taille (Jean-Luc Orofino) face à un couple de parents (Jade Collinet et David Gouhier) qui tentent de se persuader que s’ils abandonnent leur fils, c’est pour son bien, pour qu’enfin il grandisse. Conçu non comme une rêverie, mais comme une projection située « au plus près de l’évidence cauchemardesque du récit ». Ce Petit Poucet théâtral nous confronte aux terreurs de l’enfance : la peur de l’abandon, du meurtre, de la dévoration… » Manuel Piolat Soleymat, la Terrasse, le 23 novembre 2012 Comment éviter de partager une pizza avec une troisième bouche encombrante ? La solution la plus efficace à laquelle souscrivent les parents du Petit Poucet (enfant unique dans cette version) est la balade en forêt avec partie de cache-cache à la clé. Un conte d’abandon à faire des cauchemars, que Laurent Gutmann adapte pour la scène dans toute sa crudité mais avec humour aussi. Trois espaces scéniques distincts (la maison et le quotidien familial, la forêt et son rideau d’arbres, l’antre de l’ogre) dans lesquels évoluent les trois comédiens, tous excellents : l’éternel enfant, le père et la mère mais aussi l’ogre et l’ogresse, tous deux en costume de soirée. Le spectacle n’élude rien, ni la terreur de l’enfant ni l’atrocité du propos, et c’est de cette confrontation, de son évidence même que naît l’imaginaire. Un Poucet à suivre ! Télérama, 17 avril 2013 9 L’abandon, le meurtre, la dévoration… » Laurent Gutmann n’élude aucune des terreurs auxquelles le Petit Poucet est confronté. Il a choisi de porter à la scène un conte, et s’en empare dans tout ce qui fait sa force évocatrice. Jouant avec le concret des situations aussi bien qu’avec les incursions du fantastique, il promène le spectateur aux frontières d’un univers fantasmé, jusqu’à lui faire « perdre ses repères ». Au-delà de la fable, la cellule familiale devient avec ce spectacle, un terrain d’observations, car en homme de son temps, là où Perrault moralise, Laurent Gutmann analyse. Exploitant avec adresse la capacité suggestive de la forme dialoguée, il évoque avec humour et finesse, les relations de couple, et les attentes projectives des parents pour leurs enfants. Pour notre plus grand plaisir, il interroge les passages sur lesquels le conte passait trop rapidement. Ainsi la lecture qu’il propose de l’acte de l’abandon se révèle effrayante de simplicité et de justesse. Pour autant, la rationalisation qu’il amène ne va pas toujours dans le sens d’accroître l’abomination du récit, et peut même, aussi paradoxal que cela puisse paraître, nous transporter aux confins de l’absurde, comme c’est le cas dans la scène où les parents pour perdre leur fils, organisent une partie de cache-cache. Sophie Saada, Théâtre-contemporain.net 10