9710 - UQAM

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CAHIERS
D'ÉPISTÉMOLOGIE
Publications du
Groupe de Recherche en Épistémologie Comparée
Directeur: Robert Nadeau
Département de philosophie
Université du Québec à Montréal
Le nominalisme et les modalités
Claude Panaccio
ième
Cahier nº 9710
240
http://www.philo.uqam.ca
numéro
"S'il devait un jour n'être plus possible pour les observateurs scientifiques de s'entendre au sujet des énoncés de
base, cela équivaudrait à l'échec du langage comme moyen de communication universel. Cela équivaudrait à une
nouvelle ‘‘Tour de Babel’’, la découverte scientifique s'en trouverait réduite à une absurdité. Dans cette nouvelle
Babel le haut édifice de la science tomberait bientôt en ruines."
Karl Popper, La Logique de la découverte scientifique, s e c t i o n 2 9 .
"But, even if there is agreement about ‘basic’ statements, if there is no agreement whatsoever about how to
appraise scientific achievement relative to this ‘empirical basis’, would not the soaring edifice of science
equally soon lie in ruins ? No doubt it would."
Imre Lakatos, "Popper on Demarcation and Induction", in T h e M e t h o d o l o g y o f S c i e n t i f i c
Research Programmes, p . 1 4 5 .
Couverture:
La Tour de Babel (Bruegel, 1563)
Bureau des graphistes de l'UQAM
Cette publication, la deux cent quarantième de la série, a été rendue possible grâce à la contribution financière du
Fonds pour la Formation de Chercheurs et l’Aide à la Recherche du Québec ainsi que du Programme d’Aide à la
Recherche et à la Création de l’UQAM.
Tirage: 75 exemplaires
Dépôt légal - 4e trimestre 1997
Bibliothèque Nationale du Québec
Bibliothèque Nationale du Canada
ISSN 0228-7080
ISBN 2-89449-040-2
© 1997 Claude Panaccio
2
LE NOMINALISME ET LES MODALITÉS
Claude Panaccio
Université du Québec à Trois-Rivières
Courrier électronique: [email protected]
Ce texte a été présenté au premier colloque de la Société de Philosophie
analytique, tenu à Caen du 22 au 24 mai 1997.
3
4
Le nominalisme, au sens où je l’entends, n’admet dans son ontologie que des
entités singulières, spatio-temporellement localisables.
Contre
cette
position, le philosophe américain George Bealer a récemment formulé un
argument très subtil, que je voudrais examiner ici1. Beaucoup d’autres ont
été avancés avant celui-là, certes.
Il y a eu, parmi les mieux connus,
l’argument de l’indispensabilité des universaux pour les mathématiques de
Quine, de Gödel et d’autres, l’argument de l’indispensabilité des universaux
pour la sémantique de Church, l’argument de l’indispensabilité des
universaux pour la logique et la physique de Putnam, et avant cela encore,
l’argument des ressemblances de Russell. L’entreprise de Bealer, amorcée
déjà dans un livre remarquable paru en 19822, repose, si je ne m’abuse, sur
une insatisfaction de l’auteur à l’endroit de ces argumentations déjà
classiques. Celles-ci ont été largement débattues au cours des dernières
décennies, elles ont suscité moult réponses et contre-réponses, la séculaire
querelle des universaux s’est beaucoup enrichie depuis un demi-siècle et le
nominalisme à travers tout cela s’est beaucoup affiné, dans ses analyses
logiques en particulier3. Bealer aujourd’hui — qui est l’un des meilleurs
défenseurs du platonisme dans la philosophie récente — estime nécessaire
de lancer un nouvel assaut, fondé, cette fois, sur la logique modale.
Mon intention ici est de discuter cet argument, et seulement celui-là. Je
le ferai à partir d’une suggestion que j’ai avancée ailleurs pour l’analyse
nominaliste des contextes indirects à l’aide d’un connecteur propositionnel
1
Cf. George Bealer, «Universals», The Journal of Philosophy, 90/1, 1993. pp. 5-32.
2
Cf. G. Bealer, Quality and Concept, Oxford, Clarendon Press, 1982.
3
Je pense aux travaux des Lesniewski, Quine, Goodman, Sellars, Prior, Davidson, Martin,
Marcus, Bonevac, Chihara, Eberle, Field, Gochet, Gottlieb, Orenstein, Scheffler et d’autres
qui ont tous, à leur façon, enrichi l’arsenal du nominalisme. Pour une courte présentation
d’ensemble de la question, je me permets de renvoyer le lecteur à mon article «La question
du nominalisme», dans l’Encyclopédie philosophique universelle, vol. I, A. Jacob, dir.,
Paris, P.U.F., 1989, pp. 566-573.
5
spécial, que j’ai appelé — un peu artificiellement — tantumsi4. J’avais alors
émis l’hypothèse que le même type d’analyse pourrait avec profit être
généralisé à tous les énoncés modaux et en particulier, donc, à ceux qui
recourent aux modalités aléthiques comme ‘il est nécessaire que p’, ‘il est
possible que p’, etc. Je voudrais maintenant montrer que cette approche
permet de contrer l’argument de Bealer.
Je commencerai par exposer l’argument en question (section 1).
J’introduirai ensuite le connecteur tantumsi que j’ai proposé pour l’analyse
des énoncés de croyance (section 2) et je l’appliquerai à l’analyse des énoncés
modaux (section 3). J’essaierai à partir de là de montrer deux choses :
comment cette approche neutralise l’argument de Bealer par le rejet d’une
de ses prémisses (section 4); et comment elle traite les contre-exemples
précis qu’il oppose au nominalisme, ce qui nous amènera à réfléchir, en
particulier, sur le phénomène — redoutable — de la quantification de
l’extérieur dans les contextes modaux (section 5).
1. L’argument de Bealer
Tel que l’auteur le présente, l’argument que je veux discuter repose sur
quatre prémisses. Celles-ci étant mises en place, Bealer avance certains
énoncés modaux précis dont l’analyse requiert selon lui — étant donné les
prémisses — l’admission sans réserve d’universaux ante r e m dans
l’ontologie, comme des propriétés en soi, des relations ou des propositions.
Bealer entend défendre par là une forme radicale de platonisme et pense
réfuter non seulement le nominalisme sous ses diverses formes, mais aussi,
du même coup, le réalisme modéré, celui qui soutient que l’existence des
universaux dépend d’une façon ou d’une autre de l’existence des êtres
singuliers.
4
Cf. C. Panaccio, «Belief-Sentences : Outline of a Nominalistic Approach», dans Québec
Studies in the Philosophy of Science. Part II : Biology, Psychology, Cognitive Science and
Economics, M. Marion et R.S. Cohen, dir. (Boston Studies in the Philosophy of Science, 178),
Dordrecht, Kluwer, 1996, pp. 265-277.
6
Voici donc les quatre prémisses de l’argument, que j’appellerai
respectivement P1, P2, P3 et P4.
(P1)
Les
expressions
spécifiquement
modales
comme
«est
nécessaire», «est probable», «est possible», qui figurent dans
des énoncés modaux de forme ‘il est nécessaire que p’, ‘il est
possible que p’, etc., sont des prédicats (ou en tout cas quelque
chose de très apparenté à des prédicats).
La raison — tout à fait correcte à mon avis — que fournit l’auteur à l’appui
de cette prémisse est qu’il faut pouvoir former des énoncés généraux
quantifiés avec ces expressions-là («est nécessaire», «est possible», etc.) en
position de prédicats.
On doit, par exemple, tenir pour valide le
raisonnement suivant :
tout ce qui est nécessaire est vrai
tout ce qui est vrai est possible
donc :
tout ce qui est nécessaire est possible.
Or ce raisonnement présente une forme typique reconnue par le calcul des
prédicats, dans laquelle, précisément, ce sont les expressions «est
nécessaire», «est possible» et «est vrai» qui sont en position de prédicats.
(P2)
La clause subordonnée de forme ‘que p’ qui figure dans u n
énoncé de forme ‘il est nécessaire que p’, ‘il est possible que p’ ,
etc., est toujours, dans son ensemble, un terme singulier.
Pourquoi? Parce que sans cela, on ne pourrait rendre compte, selon Bealer,
de certains arguments typiques que nous voulons pouvoir construire à l’aide
d’énoncés de ce genre, comme le suivant :
tout ce qui est vrai est possible
il est vrai que p
donc :
il est possible que p.
7
Ce raisonnement présente la même forme que l’exemple classique :
tout ce qui est humain est mortel
Socrate est humain
donc :
Socrate est mortel,
sauf que c’est la clause ‘que p’, prise comme un tout, qui y joue le rôle de
terme singulier.
(P3)
La quantification de l’extérieur est admissible en contexte modal.
On doit pouvoir construire, par exemple, des raisonnements comme le
suivant :
tout ce qui est vrai est possible
(∀x) il est vrai que x = x
donc :
(∀x) il est possible que x = x.
Ces trois prémisses relatives à la forme logique étant posées, Bealer tient
qu’une seule formulation générale est admissible pour les conditions de
vérité des énoncés modaux élémentaires. C’est ce qu’il exprime dans une
quatrième prémisse :
(P4)
Un énoncé modal de forme ‘il est F que p’ est vrai si et seulement
si il y a effectivement quelque chose qui est dénoté par le terme
singulier ‘que p’ et cette chose appartient à l’extension du
prédicat ‘est F’.
En d’autres mots : seule une interprétation référentielle de la clause ‘que p’
paraît à Bealer compatible avec ses trois premières prémisses, augmentées
de quelques considérations techniques accessoires dont on peut faire ici
l’économie.
À partir de là, la stratégie de notre auteur est celle des contre-exemples.
Il avance à cet effet certains énoncés complexes, mais que nous voudrions
certainement tenir pour vrais à moins de rejeter entièrement tout discours
modal, et montre sur ces exemples qu’une analyse référentielle de ce type
8
d’énoncés qui soit conforme aux prémisses P1 à P4 ne peut pas être
strictement nominaliste.
Deux sortes de nominalisme sont distingués dans cette entreprise : celui
que j’appellerai «inscriptionnaliste» (token nominalism), qui n’admet
comme réalités linguistiques que des occurrences singulières, des tokens; et
d’autre part, le nominalisme des types (type nominalism), qui admet les
types linguistiques dans l’ontologie, mais pas d’autres universaux.
À
chacune des deux variantes, Bealer oppose des contre-exemples spécifiques.
Je m’en tiendrai ici principalement à sa discussion de l’inscriptionnalisme,
qui constitue à mon sens le seul nominalisme conséquent.
Les types
linguistiques ne sont pas, après tout, des entités singulières spatiotemporellement localisables.
Quelle sorte de référents devraient-ils être dénotés par la clause ‘que p’
d’un énoncé de forme ‘il est nécessaire que p’? Bealer ne voit à cette question
qu’une seule réponse possible pour le nominalisme inscriptionnaliste : ce
qui est dénoté par une telle clause est une occurrence linguistique
singulière. L’exigence référentialiste P4 veut qu’un énoncé de forme ‘il est F
que p’ soit vrai si et seulement si il existe un x tel que x = [que p] et Fx. Pour
l’inscriptionnaliste, ce x doit être de l’ordre des occurrences linguistiques
singulières.
Considérons maintenant, à la demande de Bealer, un schéma d’énoncé
avec deux foncteurs modaux emboîtés, comme :
(1)
il est nécessaire qu’il soit possible que p.
La formulation référentialiste des conditions de vérité devra être dans ce cas:
(2)
(∃x) (x = [que p] ∧ il est nécessaire que x soit possible).
Le x en question, pour l’inscriptionnaliste, doit être une occurrence
linguistique, ce qui, jusque là, ne semble pas faire problème. Mais prenons
un cas particulier du schéma (1), dans lequel figurerait, conformément à P3,
une quantification de l’extérieur, qui ne serait extérieure, cependant, que
par rapport à l’un seulement des foncteurs modaux :
(3)
il est nécessaire que pour tout x, il soit possible que x = x.
9
C’est là un énoncé que l’on voudra certainement admettre comme vrai. La
formulation inscriptionnaliste de ses conditions de vérité devrait être, en
vertu de ce qu’on a déjà dit :
(4)
il est nécessaire que pour tout x, il existe une certaine occurrence
linguistique y telle que y = [que x = x] ∧ y est possible.
Or cela, de quelque façon qu’on le prenne — Bealer en envisage quelquesunes —, requiert selon lui la condition absurde que pour chaque chose
possible, il existe effectivement
—
ou même nécessairement, selon
l’interprétation qu’on favorise — une occurrence linguistique de l’énoncé qui
dit que cette chose-là est identique à elle-même, ce qui exige, au demeurant,
l’existence réelle — voire nécessaire — d’un nom propre pour chaque chose
possible.
Que cette condition soit satisfaite est « entirely implausible» ,
commente Bealer, pince-sans-rire (p. 19), «les ressources référentielles du
langage sont trop clairsemées» (p. 20)! Le nominalisme inscriptionnaliste
est ainsi réfuté.
2. Tantumsi
C’est là un très bel argument, dont je ne saurais trop dire s’il est valide
ou non tant les détails en sont complexes.
Ce que je voudrais montrer,
néanmoins, est que sa conclusion est incorrecte et qu’une analyse des
contextes modaux à l’aide du connecteur que j’appelle tantumsi permet de
rescaper le nominalisme inscriptionnaliste.
Il me faut d’abord rappeler comment fonctionne l’analyse avec tantumsi
dans le cas des énoncés de croyance.
Selon cette analyse, un énoncé de
forme :
(5)
A croit que p
peut être représenté de la manière suivante :
(6)
(∃r) (r est vrai tantumsin p ∧ A croit-vrai r);
ou plus simplement :
(7)
A croit [quelque chose et ce quelque chose est vrai tantumsin] p.
Cette dernière formulation, formellement moins précise et que je n’utiliserai
plus par la suite, présente à ce stade-ci l’avantage de faire apparaître,
10
graphiquement pour ainsi dire, le trait le plus saillant de l’analyse proposée
: le mot «que» dans « A croit que p» y est vu comme l’abréviation d’une
expression complexe et logiquement adventice, composée de plusieurs unités
différentes ayant chacune des fonctions logiques différentes : «quelque chose
et ce quelque chose est vrai tantumsin». Ce genre d’approche s’apparente
assez à celle d’Arthur Prior, à ceci près que Prior, lui, pose que le «que» en
pareil contexte est un «semi-connecteur»5, alors que je propose plutôt de dire
qu’il dissimule deux connecteurs distincts : un connecteur de conjonction et
un autre très spécial, tantumsi, affecté d’un indice n (que je caractériserai
de façon plus précise dans un instant);
plus deux occurrences d’une
variable liée et, par-dessus tout, un prédicat de vérité.
Je ne reviendrai pas ici sur les raisons détaillées qui me conduisent à
cette proposition pour les énoncés de croyance. Mais il me faut caractériser
— au moins informellement — le connecteur en question (que je noterai tsi
dans les formules).
Comme son nom l’indique, c’est une variante — mais une variante très
spéciale, on le verra — du «seulement si». Il se distingue d’abord par les
règles de formation suivantes, qui régissent la forme canonique des énoncés
avec tantumsi et qui, il faut le souligner, ne sont pas purement syntaxiques
ou purement formelles :
(RF1) le membre de droite d’une expression complexe de forme ‘ tsi n
’
est une phrase fermée quelconque;
(RF2) le membre de gauche d’une expression de forme ‘
tsi n
’ a la
forme ‘Vr’, où «V» est le prédicat de vérité («est vrai») et «r» est
une variable dont les valeurs admissibles sont (normalement) des
entités susceptibles d’être vraies ou fausses (c’est-à-dire des
occurrences représentationnelles singulières — des tokens —
susceptibles d’une valeur de vérité, par exemple des occurrences
5
Cf. Arthur Prior, «Oratio Obliqua», Proceedings of the Aristotelian Society, Suppl. vol. 37,
11
de phrases orales, écrites ou mentales, ou quelque chose
d’équivalent sémantiquement);
(RF3) la variable qui, en vertu de RF2, figure dans le membre de gauche
d’une expression de forme ‘
tsi n
’
est
liée par un quantificateur qui a dans sa portée toute l’expression
en question.
En vertu de ces règles, la forme canonique d’un énoncé tantumsi est donc la
suivante :
(8)
(∃r) (Vr tsi n p).
Je laisse ici de côté le cas simple où on aurait une constante au lieu de la
variable liée r. Rien ne devrait l’interdire, certes, mais la chose ne peut être
qu’exceptionnelle (peu d’occurrences représentationnelles ont un nom
propre!) et n’intéresse pas vraiment la présente discussion.
Ces règles de formation, je l’ai noté, ont ceci de particulier qu’elles ne
sont pas purement syntaxiques. Cela tient à RF2, qui exige la présence dans
le membre de gauche d’un certain prédicat bien précis, le prédicat de vérité
en l’occurrence. Le connecteur que je propose d’introduire n’est utilisable
que dans le voisinage immédiat de ce prédicat-là.
Cette limitation dépend à son tour de la condition de vérité générale que je
propose pour un énoncé canonique avec tantumsi (condition qui fournit, si
l’on veut, le sens du connecteur en question) :
(CV) un énoncé de forme ‘(∃r) (Vr tsi n p)’ est vrai si et seulement si il
y a au moins une valeur admissible de r qui est équivalente a u
degré n à «p» .
En vertu de RF1-3, tantumsi est un connecteur asymétrique (une variante de
«seulement si» avec une contrainte spéciale sur la composition du membre
de gauche), mais la vérité des énoncés formés à l’aide de ce connecteur
1963, pp. 115-126.
12
requiert en vertu de la condition CV une équivalence (à degré variable — je
reviendrai sur ce point dans un instant) non pas entre le membre de droite et
le membre de gauche (comme ce serait le cas pour un connecteur
symétrique), mais entre le membre de droite et une représentation qui n e
figure pas dans l’énoncé en question, mais qui est une valeur admissible de
la variable qui apparaît dans le membre de gauche (ou la dénotation de la
constante si, exceptionnellement, il s’agissait d’une constante plutôt que
d’une variable).
Ceci peut être utilement visualisé à l’aide du schéma
suivant :
‘(∃r) (Vr tsin
p)’
équivalence
au degré n
occurrence représentationnelle
singulière appartenant au
domaine de «r»
On saisira mieux l’intérêt d’un tel connecteur si l’on considère, à titre
d’exemple, l’usage que j’en propose pour l’analyse du discours indirect.
Selon cette suggestion, un énoncé de forme
(9)
A dit que p
se représente sous la forme suivante :
(10)
(∃r) (Vr tsi n p ∧ A dit r).
L’intuition de base ici est celle de Davidson : le locuteur qui affirme (9) se fait
«même-diseur» (samesayer) que celui dont il parle — A dans l’exemple (9)
— au moment où il énonce la clause subordonnée ‘ p’ de son rapport
indirect6.
Cette relation de «même-dire» entre les deux locuteurs ne
requiert-elle pas en effet l’existence d’une certaine équivalence sémantique
entre une partie de ce que dit le rapporteur (le ‘p’ de l’énoncé (9)) et une
occurrence représentationnelle externe au discours du rapporteur (celle qui
6
Cf. Donald Davidson, «Dire que» (1968), dans Enquêtes sur la vérité et l’interprétation,
trad. P. Engel, Nîmes, Éd. Jacqueline Chambon, 1993, p. 159.
13
a été produite par A)? La clause ‘p’ en question, néanmoins, est bel et bien
utilisée par le locuteur de (9) et non pas seulement mentionnée.
Pour
l’analyse que je propose comme pour celle de Davidson, les termes
constitutifs de la clause subordonnée ‘p’ dans (9) (comme dans (5) d’ailleurs
et dans tous les autres énoncés de ce genre) y sont pris avec leur sens et leur
dénotation habituels : «tantumsi» est un véritable connecteur propositionnel
unissant entre elles deux phrases complètes. Son caractère spécial tient à ce
que son usage évoque une certaine relation sémantique — une relation
d’équivalence — entre une de ces phrases (le membre de droite) et une tierce
occurrence représentationnelle, externe au discours du locuteur (par
exemple la phrase prononcée par A).
C’est justement pour cette raison que la variable r (ou la constante, le cas
échéant) doit être associée, dans le membre de gauche, à un prédicat
sémantique (le prédicat de vérité).
On verrait mal autrement quelle
pertinence il y aurait à évoquer par le biais de « tantumsi» un rapport
d’équivalence sémantique entre le membre de droite et la valeur de r 7.
Quant au «n» qui figure en souscrit après «tsi» dans les règles RF1-3 et
CV, il devrait en principe prendre, dans chaque énoncé particulier formé à
l’aide du connecteur en question, une valeur numérique donnée : 1, 2, 3, etc.
Cela suppose qu’il y ait différents degrés d’équivalence sémantique possible
entre deux représentations, depuis la simple équivalence vérifonctionnelle
(disons, dans ce cas, que n = 1) jusqu’aux formes d’isomorphismes aussi
contraignantes que l’on voudra, en passant, évidemment, par l’équivalence
stricte (l’équivalence de valeurs de vérité dans tous les mondes possibles).
Tantumsi présente la particularité d’être un connecteur indexical : la valeur
numérique du souscrit n est déterminée d’une façon ou d’une autre par le
contexte d’énonciation.
Je ne saurais formuler de façon minimalement
7
On peut évidemment envisager une généralisation formelle de «tantumsi», en vertu de
laquelle un énoncé de forme ‘(∃x) (Fx tsin p)’ serait vrai si et seulement si il existe au
moins une valeur de x qui est F-équivalente au degré n à «p». Par exemple : ‘(∃x) (x est
coloré tsi n p)’ serait vrai si et seulement si il y a au moins une valeur de x qui est équivalente
14
précise les règles qui interviennent dans cette détermination, mais aucune
analyse sérieuse des contextes indirects ne peut, au bout du compte, faire
l’impasse sur ce phénomène tout à fait frappant de variabilité contextuelle.
Quand je produis un énoncé de forme ‘A croit que p’ ou ‘A dit que p’, la
clause ‘ p’ que je formule alors doit être équivalente à un degré qui est
variable selon les contextes à une certaine représentation crue ou proférée
par A. Il y a des cas où une très grande précision est requise (un haut degré
d’isomorphisme, par exemple, ou l’équivalence d’une grande partie des
connotations), et d’autres, au contraire, où l’équivalence des conditions de
vérité suffit. Les limites bien connues à la substituabilité des identiques en
contexte indirect tiennent justement, selon cette analyse, aux contraintes
ainsi imposées par le contexte : dès que n est plus grand que 1 en vertu des
exigences du contexte, la substitution d’un terme à un autre qui lui est
coextensif dans la clause p ne garantit plus la préservation de la valeur de
vérité originale de l’énoncé total de forme ‘(∃r) (Vr tsi n p)’, puisqu’il pourrait
alors se faire que la nouvelle clause p’ ainsi obtenue, bien qu’elle soit
vérifonctionnellement équivalente à p, ne soit plus équivalente au degré
requis par le contexte aux occurrences représentationnelles extérieures qui
sont les valeurs pertinentes de r.
L’analyse avec tantumsi requiert donc idéalement, on le voit, une théorie
de l’éventail des équivalences sémantiques possibles, et même,
préférence,
une
énumération
ordonnée
de
ces
diverses
de
formes
d’équivalences. Encore un point que je ne discuterai pas plus avant ici.
L’application d’une analyse de ce genre aux énoncés de croyance ne
fournit, soulignons-le, aucune explication de la relation de croyance ellemême, mais tout au plus une représentation de la forme logique qu’on peut
attribuer à de tels énoncés dans le cadre d’une reconstruction philosophique.
Et la même chose, évidemment, peut être dite au sujet des autres sortes
d’énoncés que l’on voudrait soumettre à des reformulations analogues avec
en couleur (au degré n) à l’occurrence de «p» figurant à droite de «tantumsi» dans cette
phrase. Mais je n’en vois guère, pour l’instant, l’intérêt pour les questions qui m’occupent.
15
tantumsi, comme les énoncés du discours indirect, les énoncés d’attitudes
propositionnelles en général et, comme on le verra, les énoncés impliquant
des modalités aléthiques. Dans le cas de la croyance, je me suis simplement
permis, dans le passage de (5) à (6) ci-dessus, de remplacer le verbe «croire»
qui apparaissait dans (5) (‘A croit que p’) par un nouveau verbe artificiellement construit : «croire-vrai». Ceci pour bien marquer que, quelle que soit
la façon exacte dont on le comprenne, le verbe pertinent qui figure dans la
formule reconstruite à l’aide de tantumsi diffère syntaxiquement du verbe
«croire» de la langue naturelle.
Alors que ce dernier admet comme
compléments des subordonnées introduites par «que», le nouveau verbe, lui,
est un prédicat relationnel ordinaire à deux places. Il marque en fait une
relation binaire (dont la nature exacte reste inanalysée) entre certains
individus — ceux qui croient — et d’autres, qui, dans le cas précis, sont des
occurrences singulières de représentations susceptibles d’être les valeurs
admissibles de la variable r dans une formule de forme ‘(∃r) (A croit-vrai r)’.
Cela répond à l’exigence inscriptionnaliste.
Seule m’importe pour le
moment la forme logique qui est compatible avec cette exigence.
3. L’analyse des énoncés modaux
Comment cette analyse des énoncés de croyance et du discours indirect se
transpose-t-elle à l’analyse des énoncés avec modalités aléthiques de forme
‘il est nécessaire que p’, ‘il est possible que p’, etc.? J’ai brièvement indiqué
les grandes lignes de cette généralisation dans l’article «Belief-Sentences…»
(1996). Prenons le cas des énoncés de nécessité. Le traitement sera le même,
mutadis mutandis, pour les énoncés de possibilité, de contingence ou
d’impossibilité. La suggestion est la suivante :
(11)
il est nécessaire que p
s’analysera sous la forme :
(12)
(∀r) ((Vr tsi n p) → N Vr),
où «NV» est le prédicat unaire «nécessairement vrai».
16
Cette reformulation ne fournit aucune explication de ce que c’est pour
une occurrence donnée que d’être «nécessairement vraie», pas plus que
notre analyse des énoncés de croyance ne fournissait une explication de ce
que c’est que croire-vrai, mais elle propose pour les énoncés modaux une
forme logique compatible avec les exigences du nominalisme. Si je préfère
utiliser ici l’expression «nécessairement vrai» plutôt que le terme ordinaire
«nécessaire», c’est pour souligner qu’on parle ici d’une modalité aléthique,
et non pas, par exemple, d’une existence nécessaire.
Quelle que soit
l’interprétation exacte qu’on donne au prédicat «nécessairement vrai», il ne
faut pas le confondre en tout cas avec «nécessairement existant». Dire d’une
occurrence de «2 + 2 = 4» qu’elle est nécessairement vraie n’implique pas du
tout qu’elle soit nécessairement existante!
Le point le plus important à noter dans la transformation de (11) en (12)
est que cette dernière formule utilise la quantification universelle, plutôt que
la quantification existentielle comme on le faisait pour l’analyse des énoncés
de croyance (la reformulation de (5) sous la forme (6)) ou celle des énoncés du
discours indirect (la reformulation de (9) sous la forme (10)).
Dans ces
derniers cas, en effet, on voulait évoquer une ou plusieurs occurrences
représentationnelles effectivement entretenues ou proférées par l’agent dont
on voulait parler. Mais quand on pose qu’il est nécessaire que p, on n’entend
pas évoquer l’une ou l’autre occurrence représentationnelle en particulier.
On veut dire, selon l’analyse que je propose, que toutes les occurrences
représentationnelles qui sont équivalentes (au degré voulu) à « p» sont
nécessairement vraies.
On pourrait, cependant, s’inquiéter de ce que la reformulation (12)
n’aboutisse, dans ces conditions, à un résultat tout à fait curieux et
certainement indésirable. L’utilisation du quantificateur universel dans un
énoncé de forme conditionnelle — comme c’est le cas ici — présente certes
l’avantage
d’éviter
l’engagement
ontologique
présumément, le quantificateur existentiel.
que
véhiculerait,
D’un point de vue purement
logique, la formulation (12) pourrait être vraie, semble-t-il, même s’il
n’existait en réalité aucune valeur de r qui en rendrait l’antécédent vrai, ce
17
qui paraît un bon point pour qui veut répondre à quelqu’un comme Bealer
qui associe aux énoncés modaux d’énormes engagements ontologiques
incompatibles avec le nominalisme. Mais n’aboutirons-nous pas ainsi au
résultat malencontreux que tout énoncé p pour lequel il n’existe de facto
aucune occurrence r qui satisfasse l’antécédent de (12) doive être dit
nécessairement vrai? Dans ce cas, en effet, (12) ne serait-il pas trivialement
vrai, puisque son antécédent est faux pour toute valeur de «r» ?
La réponse à cette difficulté est double. D’abord rien ne nous force à lire
le connecteur «→» dans (12) comme représentant l’implication matérielle,
ce qui paraît présupposé par l’objection.
La seconde considération,
cependant, est plus amusante : toute occurrence d’un énoncé ayant la forme
(12) fournit elle-même — en son propre sein, pour ainsi dire — une
occurrence représentationnelle qui est équivalente au plus haut degré
possible à l’énoncé p qui figure dans le membre de droite de son antécédent,
et c’est cette occurrence de « p» elle-même!
linguistique
ayant
la
forme
(12)
se
trouve
Dès qu’une occurrence
posée,
on
est
ainsi
automatiquement assuré qu’il existe de facto au moins une valeur de r pour
laquelle l’antécédent en est vrai, quelle que soit la valeur numérique du
souscrit n…
4. Retour à Bealer
Comment donc cette analyse avec tantumsi permet-elle de contrer
l’argument antinominaliste de George Bealer qu’on a exposé ci-dessus? La
réponse est très simple : l’analyse en question implique le rejet de la
deuxième prémisse de l’argument — la prémisse P2 — selon laquelle
l’expression «que p» dans une tournure de forme «il est F que p» est
sémantiquement un terme singulier, et par voie de conséquence, le rejet
également de la prémisse P4 — qui, dans la formulation qu’en donne Bealer,
dépend crucialement de P2 — selon laquelle les conditions de vérité d’un
énoncé modal canonique requièrent que le terme singulier «que p» y dénote
effectivement quelque entité. Dans l’analyse proposée ici, non seulement
l’expression «que p» n’est pas un terme singulier dénotant, mais ce n’est
18
pas un terme du tout. Le «p» y est une phrase fermée ordinaire, alors que le
«que» apparaît comme une capsule abréviative dissimulant sur le plan
logique toute une suite disparate d’éléments distincts, qui de fait vont très
souvent ensemble dans le discours, et en particulier dans tous les contextes
modaux au sens large (y inclus les contextes indirects). Et si la séquence
«que p» n’est pas un terme singulier, l’argument de Bealer est compromis.
Certes, l’analyse avec tantumsi recourt, dans la grande majorité des cas,
à une variable liée par un quantificateur objectuel, dont les valeurs sont des
inscriptions représentationnelles singulières, des tokens. C’est la variable
« r» de la formule (12) ci-dessus. Mais, comme on l’a observé, cette variable
dans (12) apparaît dans une proposition de forme conditionnelle, où elle se
trouve liée par un quantificateur universel. Il s’ensuit que la vérité d’un
énoncé de forme ‘il est nécessaire que p’, ‘il est possible que p’, etc., ainsi
analysé, n’entraîne aucun engagement ontologique, pas même à l’endroit
des occurrences singulières qui pourraient être les valeurs de la variable r.
On évite ainsi la conséquence désastreuse que Bealer tirait du nominalisme
inscriptionnaliste, selon laquelle il devrait exister dans le monde réel une
expression linguistique distincte pour chaque objet possible.
L’argument de Bealer à l’appui de P2 se trouve neutralisé, parce que le
genre d’inférence qu’il veut sauver par l’exigence que la clause «que p» soit
un terme singulier, est reconnu valide sans aucun problème par l’analyse
avec tantumsi. L’exemple qu’il donnait, souvenons-nous, était le suivant :
tout ce qui est vrai est possible
il est vrai que p
donc :
il est possible que p,
dont il pense qu’on n’en peut sauvegarder la validité qu’en le ramenant au
modèle bien connu :
tout ce qui est humain est mortel
Socrate est humain
donc :
Socrate est mortel.
19
Or, dans l’analyse inscriptionnaliste avec tantumsi, l’inférence en question
est représentée de la façon suivante (j’utilise «V» pour le prédicat de vérité et
«PV» pour «possiblement vrai») :
(∀r) (Vr → PVr)
(∀r) ((Vr tsi n p) → Vr)
(∀r) ((Vr tsi n p) → PVr)
donc :
Le
lecteur
vérifiera
facilement
par
lui-même
qu’étant
donné
la
caractérisation de tantumsi fournie ci-dessus à la section 2, cette inférence
est bel et bien valide.
Notez, par ailleurs, que la prémisse P1 de Bealer peut être acceptée sans
réserve.
Dans l’analyse avec tantumsi, les expressions spécifiquement
modales («nécessaire», «possible», etc.) sont effectivement représentées par
des prédicats («nécessairement vrai», «possiblement vrai», etc.), ainsi que le
requiert cette prémisse.
Quant à la prémisse P3, qui exige l’admissibilité de la quantification de
l’extérieur en contexte modal, on l’acceptera également, bien qu’elle soit
notoirement plus problématique. J’y reviendrai dans un instant.
Notez également que l’analyse avec tantumsi satisfait à une autre
contrainte très importante proposée par Bealer, et dont je n’ai pas parlé
jusqu’ici.
C’est la contrainte d ’analyse unifiée, selon laquelle il est
souhaitable, si on le peut, de fournir une théorie unifiée pour tous les
contextes modaux au sens large, qu’il s’agisse de modalités épistémiques (‘A
croit que p’, ‘A espère que p’, etc.), illocutionnaires (‘A affirme que p’ , ‘ A
ordonne que p’, etc.), aléthiques (‘il est nécessaire que p’, ‘il est possible que
p’, etc.) ou autres8.
8
Cf. G. Bealer, «Universals», p. 6 : «The argument emphasizes the need for a unified
treatment of intensional statements — modal statements as well as statements of assertion
and belief. Some nominalists, conceptualists, and in re realists have tended to neglect this
point».
20
5. L’analyse des contre-exemples et la quantification de l’extérieur
Il reste à voir comment l’analyse avec tantumsi traite les contreexemples
précis
que
Bealer
oppose
au
nominalisme.
Contre
l’inscriptionnalisme, il invoque, rappelons-le, l’énoncé suivant, que l’on veut
certainement considérer comme vrai :
(3)
il est nécessaire que pour tout x, il soit possible que x = x.
Contre le nominalisme des types, il pense devoir recourir à un énoncé plus
complexe, mais non moins indubitable :
(13)
pour tout x, il est nécessaire que pour tout y, soit il est possible
que x = y, soit il est impossible que x = y.
Une première caractéristique de ce genre de cas est que les énoncés en
question contiennent deux foncteurs modaux emboîtés. En lui-même ce trait
ne pose pas de problème spécialement difficile pour notre analyse. Soit un
énoncé de forme :
(14)
il est nécessaire qu’il soit possible que p.
Cela devient dans un premier temps :
(15)
(∀r) ((Vr tsi n il est possible que p) → NVr)
Et si le degré n n’est pas trop fort — c’est-à-dire s’il ne requiert pas u n
isomorphisme avec ‘il est possible que p’, mais seulement une équivalence
stricte —, la clause intérieure de forme ‘il est possible que p’ peut à son tour
être soumise au même type de reformulation. Ce qui donnera au total :
(16)
(∀r) ((Vr tsi n (∀r′) ((Vr′ tsin¢ p) → PVr′)) → NVr).
So far so good!
Il y a cependant dans les contre-exemples de Bealer une seconde
caractéristique plus intéressante. C’est que par rapport à l’un des foncteurs
modaux au moins, nous avons affaire à une quantification de l’extérieur. Or
la quantification de l’extérieur en contexte modal est un phénomène
notoirement troublant, dont je n’ai guère parlé jusqu’ici dans le présent
21
exposé9. Les règles de formation RF1-3 et la condition de vérité CV avancées
ci-dessus ne concernent que ce que j’ai appelé la forme canonique des
énoncés avec tantumsi.
Or justement, cette forme canonique ainsi
caractérisée ne fait jamais appel à une quantification de l’extérieur liant une
variable localisée dans la clause ‘p’ qui constitue le membre de droite des
formules avec tantumsi.
Si nous voulons faire place à la quantification de l’extérieur en contexte
modal — ce qui, conformément à la prémisse P3 de Bealer, paraît en effet
souhaitable —, il nous faut donc ajouter à ce sujet une règle de formation,
qui rende intelligible le rapport des nouvelles formules ainsi obtenues avec
celles qui présentent la forme canonique prévue par RF1-3. La voie la plus
naturelle, étant donné la caractérisation déjà fournie pour les phrases avec
tantumsi, est de recourir ici à la quantification substitutionnelle. Ce n’est
pas essentiellement une question d’économie ontologique en l’occurrence,
mais d’intelligibilité. Si on admettait des formules comme :
(17)
(∃r)
(∃x)
(Vr tsi n Fx),
on ne comprendrait pas très bien ce que veut dire tantumsi maintenant et
quel est son rapport dans ce genre de contexte avec le sens qu’on lui a
reconnu ci-dessus par le biais de CV.
Considérons, par contre, l’énoncé
suivant avec la quantification substitutionnelle (j’adopte ici la convention
proposée par Kripke en notant le quantificateur substitutionnel au moyen
d’une majuscule grecque et la variable correspondante par un «x» qui n’est
pas en italique)10 :
9
La piste que j’envisageais dans «Belief-Sentences…» pour le traitement de l a
quantification de l’extérieur (pp. 272-3) me paraît aujourd’hui insatisfaisante.
Elle
requérait l’introduction d’une règle spéciale de généralisation existentielle qui supposait
que toute quantification de l’extérieur en contexte modal soit obtenue à partir d’un énoncé
modal sans quantification extérieure, ce qui est une contrainte trop forte pour
l’inscriptionnalisme. Qui plus est, elle nécessitait une distinction, que je n’avais pas
thématisée, entre des occurrences d’un terme donné qui sont «directement référentielles» et
d’autres qui ne le sont pas.
10
Cf. Saul Kripke, «Is There a Problem about Substitutional Quantification?», dans Truth
and Meaning, G. Evans et J. McDowell, dir., Oxford, Clarendon Press, 1976, pp. 325-419.
22
(18)
(∃r) (∑x)
(Vr tsi n Fx).
En regard de la condition CV, cela paraît très clair. Ça veut dire qu’il existe
une
représentation
r
(le
premier
quantificateur,
lui,
n’est
pas
substitutionnel) qui est équivalente au degré n à une certaine phrase fermée
de forme ‘Fa’ (où «a» est une constante substituable à «x» dans la phrase
ouverte «Fx». «Tantumsi» conserve ici la même signification générale que
dans les autres cas.
Je propose donc le principe suivant, qui permet une extension des
énoncés avectantumsi au-delà de la seule forme canonique prévue par RF1-3:
(RF4) la quantification substitutionnelle est admissible pour lier de
l’extérieur une variable figurant dans le membre de droite d’un
énoncé avec tantumsi.
Il est à noter que le recours à la quantification substitutionnelle ne véhicule
aucun engagement ontologique fort en faveur de l’existence réelle des
occurrences linguistiques substituables à la variable «x» : le quantificateur
substitutionnel, après tout, n’est pas un quantificateur objectuel à caractère
métalinguistique11.
On a parfois l’impression très nette, bien sûr, que la quantification de
l’extérieur dans certains contextes modaux ou épistémiques évoque bel et
bien des objets réels du monde. Prenons par exemple :
(19)
il y a quelqu’un dont Marie pense que c’est un espion.
Le locuteur qui énonce (19) ne peut-il pas vouloir dire qu’il existe
effectivement une personne réelle dont Marie pense que c’est un espion?
C’est justement pour aménager l’espace de telles interprétations que les
philosophes, fréquemment, parlent de modalités de re. Toute approche qui
exclurait de telles lectures par simple décret serait certainement lacunaire.
Heureusement, ce n’est pas le cas de celle que je propose. L’intuition qu’il y
11
Cf. Alex Orenstein, Existence and the Particular Quantifier, Philadelphie, Temple
University Press, 1978, en particulier pp. 34-5. Voir aussi Ruth Barcan Marcus,
«Nominalism and the Substitutional Quantifier» (1978), dans Modalities. Philosophical
Essays, Oxford, Oxford University Press, 1993, pp. 111-124.
23
a des modalités de re peut à peu de frais y être accommodée au moyen d’une
représentation légèrement plus complexe qui combine la quantification
objectuelle avec la quantification substitutionnelle.
L’énoncé (19), ainsi
interprété, s’analyserait comme suit :
(20) (∃r) (∃x) (∑x) (x = x ∧ (Vr tsi n x est un espion ∧ Marie croit-vrai r)).
On conserve ainsi, par la première clause de la conjonction entre
parenthèses, l’impact existentiel requis par l’interprétation de re, sans pour
autant enfreindre la règle que nous nous sommes donnée, selon laquelle
seul un quantificateur substitutionnel peut lier de l’extérieur une variable
figurant dans le membre de droite d’une clause de forme ‘Vr tsi n
’.
On
peut de la sorte admettre l’idée qu’il y a parfois dans les énoncés du langage
ordinaire une ambiguïté de re / de dicto. Le type de reformulation qu’on envisage ici distingue même au moins trois lectures distinctes d’un énoncé
comme :
(21)
Marie pense que quelqu’un est un espion.
Il y a celle qui est représentée sous la forme (20) ci-dessus et qui correspond à
l’interprétation de re. Il y a l’interprétation de dicto, qui ne fait appel à
aucune quantification de l’extérieur :
(22)
(∃r)
((Vr tsi n quelqu’un est un espion) ∧ Marie croit-vrai r).
Et il y a aussi une tierce interprétation, intermédiaire entre les deux autres,
qui se lirait comme suit :
(23)
(∃r) (∃x) (∑x) ((Vr tsi n x est un espion) ∧ Marie croit-vrai r).
Ce dernier énoncé serait vrai, par exemple, si Marie entretenait la croyance
que le Père Noël est un espion!
Au demeurant, le recours exclusif à la quantification substitutionnelle
pour rendre compte de la quantification de l’extérieur en contexte modal
présente l’avantage non négligeable d’éviter les problèmes existentiels qui
24
avaient amené Quine à rejeter en bloc la quantification de l’extérieur dans
les contextes modaux ou indirects12. Supposons, par exemple, qu’on ait :
(24)
Albert pense que Cicéron était un grand orateur.
Quine craignait qu’en admettant la quantification de l’extérieur dans les
contextes indirects, on ne soit forcé d’inférer de (24) :
(25)
(∃x) (Albert pense que x était un grand orateur ∧ x = Cicéron).
Ce qui, puisque Cicéron est identique à Tullius, nous amènerait à accepter :
(26)
(∃x) (Albert pense que x était un grand orateur ∧ x = Tullius),
et par conséquent :
(27)
Albert pense que Tullius était un grand orateur,
ce qui, pourtant, pourrait bien être faux même si (24) était vrai. Or, pour
l’approche proposée ici, le problème ne se pose pas du tout de la même façon.
(24) y sera représentée comme :
(28)
(∃r)
((Vr tsi n Cicéron était un grand orateur) ∧ Albert croit-vrai r).
D’où l’on peut inférer, certes :
(29)
(∃r) (∑x) ((Vr tsi n x était un grand orateur) ∧ Albert croit-vrai r),
mais guère plus! Le reste de l’inférence maudite est bloqué. Dans ce cas
comme dans les autres, les limitations à la substitution des identiques dans
le membre de droite de la clause avec tantumsi de l’énoncé (28) tiendront
exclusivement à la valeur numérique de n.
Cela étant dit, il n’est pas difficile de voir ce que deviennent les contreexemples de Bealer. L’énoncé (3), dont il croit la vérité incompatible avec le
nominalisme inscriptionnaliste, prend, dans un premier temps, la forme :
(30)
(∀r)
((Vr tsi n pour tout x, il est possible que x = x) → N Vr),
ce qui se lit ainsi : si une occurrence représentationnelle quelconque est
vraie tantumsi (au degré n) pour tout x, il est possible que x = x, alors elle est
12
Cf. W.V.O. Quine, «Reference and Modality», dans From a Logical Point of View, New
York, Harper and Row, 1963, pp. 139-159, et «Quantifiers and Propositional Attitudes», dans
The Ways of Paradox and Other Essays, Cambridge, Mass., Harvard U.P., 1976, pp. 185196.
25
nécessairement vraie. On ne voit pas qu’un tel énoncé conditionnel entraîne
un engagement ontologique inadmissible pour qui que ce soit.
Par ailleurs, si n dans (30) n’est pas trop fort — c’est-à-dire n’exige pas
ici d’isomorphisme —, on peut réitérer l’analyse pour le membre de droite
de la clause avec tantumsi. Mais comme dans ce cas, le quantificateur lie de
l’extérieur une variable en contexte modal, on aura recours, conformément
à RF4, à un quantificateur substitutionnel, ce qui donnera :
(31)
(∀r) ((Vr tsin (∀r ) (∏x) ((Vr
tsi n′ x = x) → PVr )) → N Vr).
Si en outre on veut attribuer une portée objectuelle à la quantification sur x
dans (3), comme c’est sans doute l’intention de Bealer, on pourra procéder
sur le modèle de ce qu’on a fait en (20) ci-dessus, en écrivant :
(32)
(∀r)
((Vr
tsin (∀r )
∧
(∀x) (∏x ((x = x
(Vr
tsin′
x = x))
→
P Vr )) → NVr).
La vérité de (31) ou celle de (32) ne posent guère plus de problème au
nominalisme inscriptionnaliste que celle de (30).
Quant à (13), que Bealer oppose au nominalisme des types, le traitement
en est à l’avenant, sauf que l’énoncé original étant plus complexe, les
formules obtenues par l’analyse avec tantumsi le sont également, mais elles
ne soulèvent pas de nouvelles difficultés théoriques.
(13) deviendra ainsi
dans un premier temps :
(33)
(∀r) (∏x)
((Vr tsi n (pour tout y, soit il est possible que x = y, soit il est
impossible que x = y)) → NVr),
et dans un deuxième temps (si la valeur de n n’est pas trop forte) :
(34)
(∀r) (∏x)
((Vr tsin (∀r ) (∏y)
(((Vr
tsi n x = y) → P Vr ) ∨ (Vr
tsi n x = y)) → ImpVr )) → NVr),
que l’on pourrait, comme ci-dessus, enrichir encore par une ou plusieurs
clauses objectuelles.
Il apparaît de la sorte que le nominalisme, armé de tantumsi, résiste à
l’assaut de Bealer. D’une part, il récuse les prémisses P2 et P4, cruciales
26
pour son argument, et d’autre part il permet des analyses ontologiquement
inoffensives des contre-exemples invoqués par lui. Resterait à voir de quelle
manière et jusqu’à quel point on pourrait développer sur une telle base une
logique modale intéressante.
27
Numéros disponibles/Still available
(Novembre/November 1997)
Jocelyne Couture: Les reconstructions formelles de l'analyticité: logique et méthodologie (No 8510);
Jocelyne Couture: Substitutional Quantifiers and Elimination of Classes in Principia Mathematica ( N o
8602);
Jean Leroux: Le problème de l'analyticité dans le modèle empiriste standard des théories scientifiques (No 8603);
Yvon Gauthier: A theory of local negation: the model and some applications (No 8604);
Daniel Laurier: Analyticité, traduction, intentionnalité (No 8605);
François Tournier: Le scepticisme économique d'Alexander Rosenberg (No 8606);
Daniel Laurier: La langue d'une population: le lien entre la sémantique et la pragmatique (No 8607);
Jocelyne Couture: Méta-éthique (No 8609);
François Latraverse: Contingence, identité, règles, corps, esprit, etc. Remarques à propos de
“Identity and Necessity” de Saul Kripke (No 8610);
François Lepage: L'analytique et le synthétique dans la première philosophie de Russell (No 8611);
Claude Panaccio: Le nominalisme de Nelson Goodman (No 8612);
Jean-Guy Meunier: L'interprétation sémantique chez Montague et Chomsky (No 8702);
Michel Seymour: L'expérience de Burge et les contenus de pensée (No 8909);
Jean-Guy Meunier: La structure générique des systèmes sémiotiques (No 8911);
Daniel Desjardins: Le paradoxe de Newcomb et la solution d'Ellery Eells (No 8913);
E.Jennifer Ashworth: La sémantique du XIVe siècle vue à travers cinq traités oxoniens
sur les Obligationes (No 8915);
Claude Panaccio: Attitudes propositionnelles, sciences humaines et langage de l'action (No 9001);
Robert Nadeau: Cassirer et le programme d'une épistémologie comparée: trois critiques (No 9002);
Jocelyne Couture: Le molécularisme: logique et sémantique (No 9003);
Grzegorz Malinowski: Shades of Many-Valuedness (No 9004);
Bernard Walliser: Les processus de généralisation des modèles économiques (No 9010);
Claude Panaccio: Solving the Insolubles: Hints from Ockham and Burley (No 9020);
David Davies: Perspectives on Intentional Realism (No 9021);
Stephen P. Stich: Moral Philosophy and Mental Representation (No 9101);
Daniel Mary: La dualité génotype-phénotype en épistémologie évolutionnaire:
remarques sur le modèle de David Hull (No 9102);
Daniel Vanderveken: What Is a Proposition? (No 9103);
Robert Nadeau: Trois images de la science (No 9107);
Jean-Pierre Cometti: Pour une poétique des jeux de langage (No 9113);
Michel Rosier: Rationalité universelle et raisons singulières (No 9115);
Paul Dumouchel: Scrutinizing Science Scrutinized (No 9116);
Jacques Carbou: Le Néo-finalisme de Raymond Ruyer (No 9117);
Robert Nadeau: Friedman's Methodological Stance and Popper's Situational Logic (No 9118);
Jocelyne Couture: Pour une approche légaliste et non réductionniste des droits moraux (No 9120);
Jeremy Shearmur: Popper's Political Philosophy: Some Problems (No 9125);
Richard Collette: La controverse du calcul socialiste: la question de Ludwig von Mises (No 9202);
Lukas K. Sosoe: Henry Sidgwick et le fondement de l'éthique (No 9205);
Paisley Livingston: Bratman's Dilemma: Aspects of Dynamic Rationality (No 9209);
Paul Dumouchel: Les émotions sociales et la dichotomie affectif/cognitif (No 9210);
Michael Hartney: Existe-t-il des droits collectifs? (No 9211);
Jérôme Maucourant: Monnaie et calcul économique socialiste: la position de Karl Polanyi (No 9213);
Andrea Salanti: Popper, Lakatos and Economics: Are We Begging the Questions? (No 9214);
Pierre-Yves Bonin: La liberté de choisir son “style de vie”: le dilemme de Rawls (No 9215);
Alfred R. Mele: Intentions, Reasons, and Beliefs: Morals of the Toxin Puzzle (No 9217);
Kai Nielsen: Justice as a Kind of Impartiality (No 9218);
Paul Dumouchel: Gilbert Simondon's Plea for a Philosophy of Technology (No 9219);
Pierre Livet: L'intentionnalité réduite ou décomposée? (No 9221);
Paisley Livingston: What's the Story? (No 9223);
Claude Panaccio: Guillaume d'Ockham et la perplexité des platoniciens (No 9224);
28
Dagfinn Føllesdal: In What Sense is Language Public? (No 9225);
Denis Sauvé: La seconde théorie du langage de Wittgenstein (No 9227);
Philippe Mongin: L'optimisation est-elle un critère de rationalité individuelle? (No 9301);
Richard Vallée: Do “We” Really Matter? (No 9302);
Denis Fisette & Pierre Livet: L'action mise en cause (No 9304);
Charles Larmore: Moral Knowledge (No 9305);
Robert Nadeau: Karl Popper et la méthodologie économique: un profond malentendu (No 9309);
Jean-Guy Prévost et Jean-Pierre Beaud: How should occupations be classified? The Canadian model
and its British-American counterpart in the inter-war period (No 9311);
Daniel Vanderveken: A Complete Formulation of a Simple Logic of Elementary Illocutionary Acts (No 9312);
Daniel Vanderveken: La théorie des actes de discours et l’analyse de la conversation (No 9313);
Henri Atlan: Is Reality Rational? (No 9314);
Robert Nadeau: Sur la pluralité des mondes. À propos de Nelson Goodman (No 9315);
Pierre-Yves Bonin: Le libéralisme politique de Rawls (No 9316);
Claude Panaccio: Belief-Sentences: Outline of A Nominalist Approach (No 9317);
Stéphan D’Amour: Walter Gropius et le rationalisme constructiviste (No 9318);
Michael Bratman: Shared Intention and Mutual Obligation (No 9319);
Hugues Leblanc: Of A and B Being Logically Independent of Each Other and of Their Having
No Common Factual Content (No 9322);
Wenceslao J. González: Economic predictions and human activity. An analysis of prediction
in Economics from Action Theory (No 9323);
Pierre-Yves Bonin: Les deux libéralismes de Charles Taylor, le Québec et le Canada (No 9325);
Richard Vallée: Do I Have To Believe What I Say? (No 9327);
Christian Brassac: Actes de langage et enchaînement conversationnel (No 9401);
Claude Panaccio: De la reconstruction en histoire de la philosophie (No 9403);
Richard Vallée: Talking About Oneself (No 9404);
Robert Nadeau: Trois approches pour renouveler l’enseignement des sciences (No 9405);
Robert Nadeau: Economics and Intentionality (No 9407);
Myriam Jezequel-Dubois: La communauté en question (No 9410);
Alfred R. Mele: Real Self-Deception (No 9412);
Paul Dumouchel: Voir et craindre un lion. Hobbes et la rationalité des passions (No 9413);
Jean-Pierre Cometti: Pragmatisme, politique et philosophie (No 9415);
Jean-Pierre Cometti: Le langage et l’ombre de la grammaire (No 9416);
Paul Dumouchel: De la tolérance (No 9417);
Jean-Pierre Cometti: Quelle rationalité ? Quelle modernité ? (No 9418);
Paul Dumouchel: Rationality and the Self-Organisation of Preferences (No 9419);
Chantale LaCasse & Don Ross: A Game Theoretic Critique of Economic Contractarianism (No 9420);
Christian Schmidt: Newcomb’s Problem : A Case of Pathological Rationality ? (No 9502);
Mufit Sabooglu: Hayek et l’ordre spontané (No 9503);
Jean-Paul Harpes: Plaidoyer en faveur d’une portion congrue de démocratie directe et de démocratie modulée (No
9504);
Paul Dumouchel: Pinel’s Nosographie and the Status of Psychiatry (No 9505);
Ianick Marcil: La signification des anticipations rationnelles face à la dynamique de stabilité faible (No 9507);
Robert Nadeau: Disputing the Rhetoricist Creed (No 9508);
Paul Dumouchel: Le corps et la coordination sociale (No 9509);
Gilles Dostaler: La genèse de la pensée de Keynes (No 9510);
R. A. Cowan & Mario J. Rizzo: The Genetic-Causal Tradition and Modern Economic Theory (No 9602);
Claude Panaccio: Des signes dans l'intellect (No 9603);
Don Ross & Fred Bennett: The Possibility of Economic Objectivity (No 9605);
Paul Dumouchel: Persona: Reason & Representation in Hobbes's Political Philosophy (No 9606);
Shigeki Tominaga: Voice and Silence in the Public Space: The French Revolution
and the Problem of Secondary Groups (No 9607);
Paisley Livingston: Reconstruction, Rationalization, and Deconstruction (No 9608);
Richard Hudson: Rosenberg, Intentionality, and the ‘Joint Hypothesis Problem’ in Financial Economics (No
9609);
29
Claude Meidinger: Vertus artificielles et règles de justice chez Hume: une solution au dilemme du prisonnier
en termes de sentiments moraux (No 9610);
David Gauthier: Resolute Choice and Rational Deliberation: A Critique and a Defence (No 9611);
Pierre-Yves Bonin: Neutralité libérale et croissance économique (No 9612);
Paul Dumouchel: Exchange & Emotions (No 9613);
Robert Nadeau: The Theory of Spontaneous Order (No 9614);
Jean-Guy Prévost: Francis Walker’s Theory of Immigration and the Birth Rate: An Early Twentieth-Century
Demographic Controversy (No 9701);
D o n R o s s : The Early Darwinians, Natural Selection and Cognitive Science (No 9702);
Raimondo Cubeddu: The Critique of Max Weber in Mises’s Privatseminar (No 9703);
Jean Mathiot: Monnaie, macroéconomie et philosophie (No 9704);
Luciano Boi: Questions de géométrie et de phénoménologie husserliennes:
intuition spatiale, modes de la constitution et prégnances (No 9705);
Daniel Vanderveken: Formal Pragmatics and Non Literal Meaning (No 9706);
Robert Nadeau: Hayek’s Popperian Critique of the Keynesian Methodology (No 9707);
L o u i s R o y : Pour une interprétation large de la norme fondamentale-transcendantale de Hans Kelsen (No.
9708];
Marguerite Deslauriers: La radicale égalité féministe et l'histoire de la philosophie (No. 9709);
Claude Panaccio: Le nominalisme et les modalités (No. 9710).
Prix: individus (2,00$), institutions (5,00$). Frais de poste: 2,00$ l'unité.
Pour commander, prière de s'adresser à Robert Nadeau, Département de philosophie, Université du Québec à
Montréal, Case Postale 8888, succ."Centre-ville", Montréal (Québec), Canada, H3C 3P8. Tél.: (514)
987-4161; télécopieur: (514) 987-6721; courrier électronique : [email protected]
Pour consulter, s'adresser au Centre de Documentation des Sciences Humaines ou encore à la Bibliothèque
Centrale de l'UQAM (Pavillon Hubert-Aquin, local A-M100).
Internet: les numéros parus à compter de l’année 1996 sont également disponibles sur le site Internet du
département de philosophie de l'UQAM à l'adresse suivante : http://www.philo.uqam.ca
Prices: individuals ($2.00), institutions ($5.00). Mailing fee: $2.00 for each copy.
To order, please send your request to: Robert Nadeau, Department of Philosophy, University of Quebec in
Montreal, P.O. Box 8888, succ."Centre-ville", Montreal (Quebec), Canada, H3C 3P8. Phone.: (514)
987-4161; Fax: (514) 987-6721; E-mail : [email protected]
A c o p y o f a l l p u b l i s h e d i s s u e is also made available at UQAM’s central library (Hubert-Aquin Building,
room A-M100).
Internet: beginning with 1996, all new issues are also placed on our WWW site at the following address:
http://www.philo.uqam.ca
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