avant- projet de loi portant mise en œuvre de la parite homme

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AVANT- PROJET DE LOI PORTANT MISE EN ŒUVRE DE LA PARITE HOMME – FEMME
1. EXPOSE DES MOTIFS
Depuis son accession à l’Indépendance, la République Démocratique du Congo fournit des efforts pour offrir des
opportunités légales aux hommes et aux femmes en vue de leur protection et sécurité. Cependant, la femme souffre
encore de marginalisation, ce qui notamment ne lui permet pas d’accéder aux instances de prise de décision et freine
ainsi sa réelle participation politique et citoyenne.
Des inégalités de droits, de chances et de sexes persistent encore entre les hommes et les femmes et font perdre à la
République Démocratique du Congo l’utile contribution des femmes à la réalisation de ses objectifs de développement
humain durable. Cette persistance des disparités entre hommes et femmes est constatée dans presque tous les
domaines de la vie nationale particulièrement dans les domaines politique, économique, social et culturel.
Conscient de cette situation, le constituant congolais a décidé d’affirmer dans la constitution du 18 février 2006, en
ses articles 12,13 et 14, les principes d’égalité de droits, de chances et de sexes, en ce que ces articles disposent :
Article 12 : Tous les congolais sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection des lois.
Article 13 : Aucun Congolais ne peut, en matière d’éducation et d’accès aux fonctions publiques ni en aucune
autre matière, faire l’objet d’une mesure discriminatoire, qu’elle résulte de la loi ou d’un acte de l’exécutif, en
raison de sa religion, de son origine familiale, de sa condition sociale, de sa résidence, de ses opinions ou de ses
convictions politiques, de son appartenance à une race, à une ethnie, à une tribu, à une minorité culturelle ou
linguistique.
Article 14 : Les pouvoirs publics veillent à l’élimination de toute discrimination à l’égard de la femme et assurent
la protection et la promotion de ses droits. Ils prennent, dans tous les domaines, notamment civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels, toutes les mesures appropriées pour assurer la pleine participation de la femme
au développement de la Nation. Ils prennent des mesures pour lutter contre toute forme de violences faites à la
femme dans la vie publique et dans la vie privée. La femme a droit à une représentation équitable au sein des
institutions nationales, provinciales et locales. L’Etat garantit la mise en œuvre de la parité homme-femme dans les
institutions. Une loi particulière fixe les conditions de mise en œuvre de la parité homme-femme.
Ces options fondamentales sont conformes aux instruments juridiques internationaux, régionaux et sous-régionaux
ratifiés par la République Démocratique du Congo.
Il s’agit notamment de la Déclaration universelle des droits de l’homme proclamée le 10 décembre 1948, la Charte
de l’organisation des Nations Unies, la Charte africaine des Droits de l’homme et des Peuples, la Convention des
Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le Pacte international
relatif aux droits civils, politiques, économiques et sociaux, les Résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des
Nations Unies, la Convention relative aux Droits de l’Enfant et ses protocoles facultatifs, la Charte Africaine des Droits
et du Bien être de l’Enfant , le Plan d’action de Beijing, la Déclaration de Vienne, la Déclaration de Philadelphie et le
Protocole de la SADC sur le genre et développement qui proclament tous l’égalité de droits entre les hommes et les
femmes et constituent autant d’engagements pour la République Démocratique du Congo à prendre des mesures
légales et administratives pour garantir la jouissance de ces droits par la femme.
L’élaboration de la présente loi portant mise en œuvre de la parité homme-femme, en application de l’article 14 de la
constitution, renforce l’engagement de l’Etat Congolais à bâtir une société juste où les comportements, les aspirations
et les différents besoins des hommes et des femmes sont pris en compte.
Ainsi, la présente loi a pour but la promotion de l’équité de genre et de l’égalité des droits, de chances et de sexes
dans toute la vie nationale, notamment pour la participation équitable des femmes et des hommes dans la gestion des
affaires de l’Etat.
Elle comprend 37 articles regroupés en 4 chapitres.
Le chapitre 1er consacre les dispositions générales relatives à la définition des concepts. Le 2ème chapitre traite des
objectifs. Le 3ème concerne le champ d’application de la Parité Homme – Femme dans la vie nationale. Enfin, le 4ème
chapitre traite des dispositions transitoires et finales.
Telles sont les grandes articulations de la présente loi.
LOI
L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Chapitre 1er : Dispositions Générales
Article 1er : Au sens de la présente loi, on entend par :
• Genre : régime qui fait référence aux différences entre l’homme et la femme au sein de la société, différences
acquises et susceptible de se modifier avec le temps et qui présente de grandes variations tant au sein d’une
même culture que d’une société à l’autre. Il s’agit d’une variable socio-économique qui permet d’analyser les rôles,
les responsabilités, les contraintes, les chances et les besoins des hommes et des femmes dans n’importe quel
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contexte.
Intégration de la dimension genre : l’approche qui consiste à évaluer les implications des femmes et des hommes
dans toute action planifiée comprenant la législation, les procédures ou les programmes dans tous les domaines
et à tous les niveaux. Cette stratégie permet d'intégrer les préoccupations et les expériences des femmes et des
hommes à la conception, à la mise en œuvre, au contrôle et à l'évaluation des procédures et des programmes
dans toutes les sphères politiques, économiques et sociétales pour qu'ils en bénéficient de manière égale et que
l'inégalité actuelle ne soit pas perpétuée.
Equité : un sentiment de justice naturelle fondée sur la reconnaissance des droits de chacun.
Equité de genre : démarche de reconstruction sociale fondée sur la justice naturelle qui conduit à l’égalité des
sexes par rapport aux rôles et responsabilités dévolus aux hommes et aux femmes.
Egalité des sexes : le principe et la réalisation d’une attribution équitable des ressources et des occasions aux
hommes et aux femmes. Elle élimine les pratiques discriminatoires qui représentent un obstacle à la pleine
participation de la femme autant que de l’homme. Dans ce sens, l’égalité des sexes indique que les hommes et
les femmes ont les mêmes droits, chances et opportunités, de manière paritaire, dans tous les domaines de la vie
nationale.
Parité Homme-Femme : l’égalité fonctionnelle qui consiste en la représentation égale entre l’homme et la femme
dans l’accès aux instances de prise de décision à tous les niveaux et dans tous les domaines de la vie nationale,
sans discrimination.
Discrimination : Toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion,
l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité des
chances ou de traitement.
Discrimination positive : Principe consistant à instituer des inégalités pour promouvoir l’égalité, en accordant à
certains un traitement préférentiel.
Traitement préférentiel : Traitement d’une personne ou d’un groupe de personnes susceptible de se traduire par
des avantages, accès, droits, chances ou statuts supérieurs à ceux dont bénéficie une autre personne ou un autre
groupe. Ce traitement peut avoir un sens positif lorsqu’il comporte une action positive destinée à supprimer une
pratique discriminatoire antérieure ou un sens négatif lorsqu’il vise à conserver les écarts ou les avantages d’une
personne ou d’un groupe par rapport à un(e) autre.
Chapitre 2 : Objectifs
Article 2 : La présente loi a pour but de consacrer la parité homme-femme dans les institutions publiques et privées
conformément à l’article 14 de la Constitution.
Cet objectif est réalisé par pallier suivant le prescrit de l’article 29 de la présente loi.
Article 3 :L’accès égal des hommes et des femmes aux mandats publics à tous les échelons ainsi que leur
inscription sur les listes de candidature sont garantis par la présente loi.
Chapitre 3 : CHAMP D’APPLICATION DE LA PARITE HOMME-FEMME
Article 4 : Les dispositions de la présente loi s’appliquent à tous les domaines de la vie nationale notamment
politique, économique, social, administratif, culturel, judiciaire et sécuritaire.
Section 1 : Domaine politique et Administratif
Article 5 : Les hommes et les femmes jouissent de façon égale de tous les droits politiques.
Article 6 : Les partis politiques sont tenus au respect de la parité homme-femme dans leur création, organisation
et fonctionnement.
Article 7 : Les partis politiques sont tenus au respect de la parité lors des inscriptions de leurs candidats sur les
listes électorales conformément au prescrit de l’article 2.
Le candidat sur la liste électorale et son premier suppléant ne peuvent être de même sexe.
Article 8 : Les institutions d’appui à la démocratie et le Conseil économique et social sont tenues au respect
du principe de la parité selon les termes de l’article 2.
Article 9 : Les mandats publics énoncés à l’article 81 de la constitution sont dévolus aux hommes et aux
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femmes conformément aux termes de l’article 2.
Article 10 : L’Etat veille à l’équité dans la participation des femmes et des hommes en ce qui concerne le
processus électoral notamment dans le mode de scrutin, l’enregistrement des électeurs et les opérations de
vote.
Article 11 : Dans son processus de réforme, l’Administration publique telle que définie à l’article 193 de la
constitution atteint la parité selon les termes de l’article 2, et ce, notamment par l’intégration de la dimension genre.
Section 2 : Domaine économique
Article 12 : Les politiques et les programmes économiques de développement du pays sont élaborés et mis
en œuvre en tenant compte de la parité homme-femme. Ils assurent à tous l’égal accès aux ressources et aux
avantages consécutifs.
Article 13 : Conformément à l’article 35 de la constitution, l’Etat garantit le droit à l’initiative privée.
Il favorise, sans discrimination basée sur le sexe, l’accès à l’épargne, aux crédits, aux diverses opportunités et aux nouvelles
technologies.
Article 14 : L’Etat assure des droits égaux à l’homme ainsi qu’à la femme en matière d’accès à la propriété, à la
gestion, à l’administration, à la jouissance et à la disposition des biens.
Sections 3 : Domaine social
Paragraphe 1 : Education
Article 15 : Les hommes et les femmes ont, sans discrimination, l’égalité de chances et d’accès à l’éducation et à
la formation.
L’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer la parité des filles et des garçons en matière de
scolarisation.
Il encourage l’orientation des filles dans toutes les filières d’enseignement et surtout celles réservées traditionnellement aux
hommes.
Il met tout en œuvre pour réduire l’écart dans le taux d’analphabétisme entre les hommes et les femmes.
Il s’engage à développer les programmes spéciaux de récupération d’apprentissage et de formation
professionnelle en faveur des enfants non scolarisés des deux sexes.
L’Etat veille à la prise en charge des enfants démunis, filles ou garçons.
Article 16 : La maternité ne constitue pas un obstacle à la poursuite de la scolarité.
L’Etat élabore et exécute des politiques et mesures d’encadrement qui assurent aux filles mères ou enceintes la poursuite de
leur scolarité.
Article 17 : Tous les stéréotypes et clichés sexistes sont interdits à tous les niveaux d’enseignement,
notamment dans les outils pédagogiques, dans les curricula, dans les activités parascolaires et culturelles, dans
l’orientation scolaire, les choix de carrière, la publicité et l’audio-visuelle.
Article 18 : L’Etat développe une politique qui encourage la construction sur fonds publics ou privés de centres
d’information, de formation, de promotion et de défense des droits de la femme et de la jeune et petite
fille, dans chaque ville, cité, commune, quartier, secteur, chefferie, village.
Paragraphe 2 : Santé
Article 19 : L’homme et la femme sont des partenaires égaux dans la santé de la reproduction.
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Ils choisissent de commun accord une méthode de planification familiale.
Article 20 : La femme bénéficie pendant la grossesse, à l’accouchement et après l’accouchement d’une attention
particulière et de services de soins de santé appropriés et à coût réduit ainsi que des avantages sociaux
professionnels acquis.
Article 21 : Dans la lutte contre le VIH et SIDA, des mesures spéciales sont prises pour une meilleure protection de
la femme, en vue de réduire l’écart du taux de propagation du VIH entre les deux sexes.
Article 22 : Dans la lutte contre les violences faites à la femme, l’Etat prend des mesures particulières pour la
vulgarisation et l’application sans faille des lois, spécialement pour la répression des harcèlements et violences
sexuels.
L’Etat veille à la prise en charge psycho médicale et judiciaire, à l’indemnisation ainsi qu’à la réinsertion socio-économique
des victimes.
Paragraphe 3 : Famille
Article 23 : L’homme et la femme ont, dans leurs rapports familiaux et conjugaux, les mêmes droits et obligations.
Article 24 : L’Etat prend des mesures pour garantir le caractère symbolique de la dot qui ne peut, en aucun cas,
constituer une entrave au mariage mais qui doit être l’expression de l’union entre les familles, exempte de toute
exploitation ou traite des êtres humains.
Paragraphe 4 : Travail
Article 25 : Il est interdit de discriminer les travailleurs en raison du sexe, directement ou indirectement, en se
fondant notamment sur l’état civil, sur la situation familiale ou, s’agissant des femmes sur leur grossesse.
Sans préjudice des dispositions légales en vigueur, l’interdiction de toute discrimination s’applique notamment à
l’embauche, à l’attribution des tâches, aux conditions de travail, à la rémunération et autres avantages sociaux, à
la formation et au perfectionnement professionnels, à la promotion et à la résiliation de contrat de travail.
L’Etat encourage, par des mesures incitatives, les employeurs qui embauchent les femmes pour corriger les
inégalités existantes et qui adoptent des politiques permettant de mieux concilier les obligations familiales et
professionnelles telles que les horaires de travail variables et souples, l’emploi à temps plein et partiel, les autres
conditions de travail et la sécurité sociale.
Section 4 : Domaine culturel
Article 26 : L’Etat garantit le respect de la dignité humaine dans le traitement de l’image de l’homme et de la
femme, dans la production et la diffusion de la publicité, de la danse, de la chorégraphie, du théâtre, de la mode et
de l’audiovisuel.
L’atteinte à la dignité humaine, aux bonnes mœurs et à la pudeur constituent des comportements punissables au regard de
la présente loi.
Les pratiques des brimades notamment à l’occasion des obsèques sont proscrites.
Section 5 : Domaine judiciaire et sécuritaire
Article 27 : Toute discrimination fondée sur le sexe en milieu judiciaire, dans la police, l’armée et les services de
sécurité est prohibée.
Article 28 : Les Instances compétentes en la matière encouragent et promeuvent l’accès des femmes à la
magistrature, aux Forces Armées, à la Police et aux services de sécurité.
Elles veillent à l’intégration de la parité homme-femme au sein de leurs institutions conformément à l’article 2 de la présente
loi.
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Chapitre 4 : DES DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES
Article 29 : En application de la présente loi, des mesures nécessaires à la correction des inégalités existantes
seront prises pour l’exécution progressive de la parité homme-femme au moyen de la discrimination positive telle
que définie en son article 1er.
Le calendrier-programme de la mise en œuvre de la parité dans les institutions et administration se présente comme suit :
•
De 2009 à 2011 : 30-35% de l’un ou l’autre sexe
•
De 2011 à 2013 : 35-40% de l’un ou l’autre sexe
•
De 2013 à 2015 :40-47.5% de l’un ou l’autre sexe
•
Au-delà de 2015 : 47.5-50%de l’un ou de l’autre sexe
Un décret du Premier Ministre fixe le calendrier-programme de la représentation des femmes.
Article 30 :
La représentation des hommes et des femmes dans les instances de prise de décision des partis politiques,
des institutions publiques et privées existants au moment de la promulgation de la présente loi évoluera
conformément aux prescrits de ses articles 2 et 29.
Article 31 : L’administration publique, le Conseil Supérieur de la Défense et le Conseil Supérieur de la Magistrature
publient leurs dispositions respectives relatives à l’esprit de la présente loi et ce, endéans les 12 mois qui suivent
la promulgation de celle-ci.
Article 32 : Toutes les mesures sectorielles, notamment la discrimination positive, réputées appropriées et prises
dans un domaine précis, qui visent à promouvoir dans les faits la parité entre les femmes et les hommes sont
conformes à l’article 14 de la constitution.
Article 33 : Un comité interinstitutionnel veille à la réalisation adéquate de la politique nationale relative à la
parité homme-femme.
Un décret du Premier Ministre en fixe les modalités d’organisation et de fonctionnement.
Article 34 : Le Conseil National de la Femme assure dans sa mission le suivi de la mise en œuvre de la parité
homme-femme en République Démocratique du Congo.
Article 35 : Le non respect des dispositions de la présente loi, particulièrement, en ses articles
2,6,7,8,9,10,15,26,27 et 29 donnent lieu, selon le cas, au paiement d’une amende allant de 1000 à 100000 Francs
constants, à la suspension de fonctionnement, à la réparation et à l’annulation devant les juridictions compétentes,
à la nullité de la liste électorale ou au refus de l’agrément.
Article 36 : Toutes les dispositions antérieures contraires à la présente loi sont abrogées.
Article 37 : Le Ministre ayant le Genre dans ses attributions est chargé de l’exécution de la présente loi qui entre
en vigueur à la date de sa promulgation.
Fait à Kinshasa, le
Joseph KABILA KABANGE
Ministère du Genre, de la Famille et de l’Enfant 2009
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