Pour sauver l`Acropole - u n e s d o c . u n e s c o . o

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de l'unesco
*4
m
ï!M
.
Une fenêtre
ouverte sur le monde
TRESORS
DE
L'ART
MONDIAL
Athéna de Rome
La déesse Athéna, jaillie
tout armée et casquée de
la tête de Zeus, le dieu
des dieux, selon la
mythologie, a donné son
nom à la capitale grecque.
Elle lui aurait fait don de
l'olivier, symbole de
prospérité, mais surtout,
de paix. Ce buste
d'Athéna, à la tête
recouverte du traditionnel
casque, a été découverte
à Rome, près du Capitole,
dans les soubassements
de l'église Sant Omobono
sur l'ancien Forum
Boarium (forum aux
boeufs). Terre cuite
modelée à la main avec
des traces de décoration
polychrome, il s'agit d'une
sculpture d'inspiration
grecque (milieu du 6°
siècle avant notre ère).
Photo
Presses artistiques, Paris
Le CoUPFlGF ^e l'unesco
page
4
POUR SAUVER L'ACROPOLE
par Kharalambos Bouras
OCTOBRE 1977
30* ANNEE
10
LE MAL DES CARYATIDES
Photos
PUBLIÉ EN 16 LANGUES
Français
Japonais
Néerlandais
Anglais
Italien
Portugais
Espagnol
Hindi
Turc
Russe
Tamoul
Ourdou
Allemand
Persan
Arabe
Hébreu
12
LES METAMORPHOSES DU ROCHER SACRÉ
par Jean Travlos
15
L'ACROPOLE DES KORÈS AVANT PÉRICLÈS
Photos
18
AUTOUR DU PARTHENON
Photos
Mensuel publié par l'UNESCO
20
UNE ANTIQUE DÉMOCRATIE INSCRITE DANS LE MARBRI
Organisation des Nations Unies
par Manolis Andronicos
pour l'Éducation,
la Science et la Culture
Ventes et distributions :
24
L'ACROPOLE OU LA PASSION DE LA PERFECTION
Unesco, place de Fontenoy, 75700 Paris
par Alexis Diamantopou/os
Belgique : Jean de Lannoy,
112, rue du Trône, Bruxelles 5
ABONNEMENT : 1 an : 28 francs français ;
deux ans : 52 francs français. Payement par
chèque bancaire, mandat postal, CCP Paris
12598-48,
â
l'ordre
de
:
Librairie
de
l'Unesco,
26
L'OEUVRE DE PÉRICLÈS VUE PAR PLUTARQUE
28
POUR COPIES CONFORMES
Photos
Place de Fontenoy - 75700 Paris.
Reliure pour une année : 24 francs.
Les articles et photos non copyright peuvent être repro¬
duits à condition d'être accompagnés du nom de l'auteur
29
IL ÉTAIT UNE FOIS...
UN VILLAGE A L'OMBRE DES COLONNES
et de la mention « Reproduits du Courrier de l'Unesco »,
en précisant la date du numéro. Trois justificatifs devront
par Jacques Lacarrière
être envoyés à la direction du Courrier. Les photos non
copyright seront fournies aux publications qui en feront
la demande. Les manuscrits non sollicités par la Rédac¬
tion ne sont renvoyés que s'ils sont accompagnés d'un
coupon-réponse international. Les articles paraissant dans
le Courrier de l'Unesco expriment l'opinion de leurs
auteurs et non pas nécessairement celle de
l'Unesco ou
de
les légendes
la
Rédaction.
Les titres des articles et
31
ARISTOTE
UN ARCHITECTE DE LA PENSÉE MODERNE
par Constantin Despotopou/os
des photos sont de la rédaction.
Bureau de la Rédaction :
33
NOS LECTEURS NOUS ÉCRIVENT
34
LATITUDES ET LONGITUDES
Unesco, place de Fontenoy, 75700 Paris, France
Rédacteur en chef :
René Caloz
Rédacteur en chef adjoint :
2
TRESORS DE L'ART MONDIAL
ITALIE : ATHÉNA DE ROME
Olga Rodel
Secrétaires généraux de la rédaction :
Édition française : Édition anglaise :
Édition espagnole : Francisco Fernandez-Santos (Paris)
Édition russe : Victor Goliachkov (Paris)
Édition allemande : Werner Merkli (Berne)
Édition arabe : Abdel Moneim El Sawi (Le Caire)
Édition japonaise : Kazuo Akao (Tokyo)
Édition italienne : Maria Remiddi (Rome)
Édition hindie : H. L. Sharma (Delhi)
Édition tamqule : M. Mohammed Mustafa (Madras)
Édition hébraïque : Alexander Broïdo (Tel-Aviv)
Édition persane : Fereydoun Ardalan (Téhéran)
Édition néerlandaise : Paul Morren (Anvers)
Édition portugaise : Benedicto Silva (Rio de Janeiro)
Édition turque : Mefra Arkin (Istanbul)
Édition ourdoue : Hakim Mohammed Saïd (Karachi)
Notre couverture
WL^m
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L'Acropole d'Athènes est aujourd'hui en danger.
Wa&
M * ¿M
B-
Des mesures sont prises par le gouvernement
grec pour préserver et restaurer ses chefsd'*uvre de l'architecture et de la sculpture
-p%
classique de la Grèce. Ce numéro du Courrier
de /'Unesco est consacré à l'histoire de
l'Acropole jusqu'à nos jours. Notre couverture
Rédacteurs :
Édition française : Philippe Ouannès
Édition anglaise : Roy Malkin
Édition espagnole : Jorge Enrique Adoum
Br
y\ f*H
montre la tête d'une Caryatide entourée d'un
masque de plâtre qui servira â en faire un
1
moulage fidèle (voir aussi couverture de dos
tI
et photos page 10).
/'.
Documentation : Christiane Boucher
WÊ ^^ ^r'áf
Maquettes : Robert Jacquemin
Toute la correspondance concernant la Rédaction
doit être adressée au Rédacteur en Chef.
\ 1
bZTHH«' P '
Photo Walter Mori © Mondadori, Milan
L'Acropole d'Athènes, où s'élève l'un des plus
prestigieux ensembles architecturaux de l'Antiquité,
domine les bâtiments modernes de la capitale
grecque. L'Acropole, ou Rocher sacré, tire son nom
de deux mots grecs : akros (élevé) et polis (ville). Il
s'agissait déjà d'un sanctuaire plusieurs fois
séculaire, lorsque, au 5e siècle avant notre ère,
Périclès, le grand homme d'Etat athénien, lança
l'incomparable projet de construction de ces
monuments dont nous admirons encore les vestiges.
Sur cette vue aérienne de l'Acropole (voir aussi page
18) on reconnaît le Parthenon (vaste construction
rectangulaire du centre), l'Erechthéion (â gauche du
Parthenon), les Propylées et le temple d'Athéna
Niké (groupe à gauche sur la photo). Au pied de la
colline, deux des anciens théâtres d'Athènes :
l'Odéon (à gauche) et celui de Dionysos (â droite).
Le 10 janvier 1977 au Parthenon d'Athènes le Directeur
général de l'Unesco M. Amadou-Mahtar M'Bow a lancé
solennellement une campagne internationale pour la
sauvegarde des monuments de l'Acropole.
En témoignage exemplaire de solidarité internationale,
nombreux sont les Etats membres de l'Unesco qui ont déjà
répondu â cet appel. Non moins nombreux sont ceux qui se
proposent d'apporter à la Grèce
qui de son côté a décidé
d'assumer les frais des travaux de sauvegarde
leur
coopération scientifique et technique pour la préservation et
la restauration, notamment pour combattre les maladies dont
souffrent les marbres des monuments, et assurer la stabilité
du rocher de l'Acropole.
par
Kharalambos Bouras
Pour sauver
KHARALAMBOS BOURAS, prolesseur de l'histoire
de
l'architecture
à
l'Université
technique
nationale
d'Athènes, est membre du groupe de travail formé par
le gouvernement grec pour la préservation des monu¬
ments de l'Acropole. Ancien architecte auprès du Ser¬
vice archéologique grec, il a publié de nombreux ouvra¬
ges et articles sur les monuments de la Grèce ancienne
et médiévale.
'Acropole
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r~*f
QUARANTE ans nous séparent de la
veaux problèmes, qu'il nous faut à présent
d'une petite ville tranquille, pleine de sou¬
période qui a précédé la seconde
venirs
petit
affronter. Et ces problèmes sont si graves
que certains parlent de destruction de
nombre d'années, comparé à l'âge d'Athè¬
nes, mais des années capitales pour l'évo¬
l'Acropole, ou du moins d'altération pro¬
fonde et irréparable de ses chefs-d'éuvre
lution
d'architecture et de sculptures classiques.
guerre
et
mondiale.
l'aspect
de
Un
.la
bien
ville.
Pour
l'Acropole, ces quatre décennies se sont
apparemment écoulées sans grands chan¬
gements : les grands travaux de restaura¬
tion de
Nicolas
Balanos étaient terminés
depuis 1933.
Elles ont cependant créé, secrètement
mais irrévocablement, une série de nou
En fait, ces problèmes sont directement
liés à la modification rapide et incontrôlée
de la vie dans l'environnement des monu¬
ments
antiques.
Les
quarante
historiques et
de
modestes
bâti¬
ments néo-classiques, une grande capitale.
Il
lui faut compter avec deux millions
d'habitants, des industries importantes, de
grands immeubles
ports
des ports et des aéro¬
internationaux et
une
impression¬
nante pollution de I environnement.
dernières
Le paysage urbain perd de jour en jour
années ont vu se produire à Athènes de
ses rapports à la morphologie du terrain
grandes transformations économiques,
démographiques et sociales. Elles ont fait
phie classique et aux restes des édifices de I
naturel, aux points de repère ae la topogra- 1
l'Antiquité
l'Attique,
constructions qui ornent le Rocher sont les
On a tout d'abord examiné le rocher de
célèbre pour sa transparence cristalline, est
;
l'atmosphère
de
éléments les plus précieux de leur patri¬
l'Acropole dans son ensemble. Après une
assombrie par les fumées, tandis qu'une
moine
Grèce,
recherche exhaustive, géologues et ingé¬
marée de touristes submerge la ville, et en
particulier l'Acropole.
toute personne cultivée y voit la plus belle
nieurs ont écarté toute inquiétude quant à
Bien que le Service archéologique grec
n'ait jamais cessé d'effectuer sur les tem¬
ples de l'Acropole des travaux d'entretien,
d'étendue limitée,
il y a
seulement une
dizaine d'années que la nouvelle situation
et les nouveaux problèmes ont commencé
d'attirer l'attention des spécialistes.
En Juin 1968, un article de Georges Don-
architectural
et,
hors
de
expression de l'esprit classique du monde
la stabilité du rocher et quant à sa résis¬
antique.
tance à l'érosion par les eaux souterraines.
Aussi bien le gouvernement grec que les
services compétents, conscients de cet
tions des monuments sont en bon état (à
Ils ont également démontré que les fonda¬
l'exception de la Pinacothèque, c'est-à-dire
intérêt et de leur responsabilité scientifique
l'aile septentrionale des Propylées, et du
à
socle de la statue d'Agrippa).
l'égard
des
monuments,
ont
déployé
depuis deux ans une activité importante,
d'une part lançant un appel à l'aide interna¬
L'étude de la condition statique de la
tionale pour le financement des travaux de
superstructure
sauvetage et d'autre part organisant, au
cours. Tous ces monuments sont faits de
pole, paru dans le Courrier de l'Unesco,
niveau national, la meilleure étude possible
blocs de marbre du Pentélique, taillés et
donna une large diffusion aux inquiétudes
des dangers qui menacent les monuments,
afin d'en supprimer les causes. Dans ce
tas,
Directeur des monuments de l'Acro¬
des archéologues grecs.
envoyer deux missions
L'Unesco allait
scientifiques à
dernier
domaine,
ils
ont
également fait
des
monuments
est
en
parfaitement ajustés, sans mortier. De ce
fait, chaque bâtiment peut être examiné
dans son ensemble du point de vue de la
Athènes : trois spécialistes en 1969 et une
appel à l'assistance internationale, qui s'est
résistance aux séismes et à la pression du
équipe de
traduite par l'envoi d'une autre mission
vent,
d'experts de
c'est-à-dire que l'on détermine dans quelle'
photogrammétrie de
l'Institut
Géographique National français en 1971.
Cependant, pour que les problèmes de
l'Acropole soient étudiés et abordés de
façon véritablement active, il faudra atten¬
dre encore jusqu'en février 1975. A cette
date,
en effet,
se constituent à Athènes
une commission et une équipe de spécialis¬
tes dont les travaux sont désormais géné¬
reusement financés.
l'Unesco en
octobre
1975.
mais aussi dans ses composantes,
mesure les divers éléments de l'organisme
L'étude des problèmes de conservation
porteur
(colonnes,
chapiteaux,
poutres)
de l'Acropole et de ses monuments doit
pris séparément conservent la résistance
être menée à terme avant qu'on ne déplace
voulue aux épreuves de toutes sortes.
'
la moindre pierre et tout traitement doit se
fonder sur l'analyse exhaustive des phéno¬
mènes. D'autre part, les interventions obéi¬
ront à trois exigences : modifications aussi
L'intérêt du public pour le sort des monu¬
réduites que possible dans l'apparence des
monuments, respect scrupuleux des dispo¬
restauration
ments de l'Acropole a toujours été très vif.
sitions de la Charte de Venise (1), garantie
Congrès international des architectes et techniciens
Les Grecs d'aujourd'hui pensent que les
de réversibilité pour chaque intervention.
des monuments historiques, Venise, 25-31 mai 1964.
(1)
Charte Internationale
des
pour la
monuments,
conservation
adoptée
lors
et la
du
II"
Photo © Département des Antiquités de l'Acropole, Athènes
Le
à
ballon
la
rescousse...
Un ballon (à droite) approche de
l'Acropole pour une mission
photographique. Les photos
doivent aider â Identifier les
centaines de pierres et fragments
de construction répandus sur le
site. Celles qui appartiennent aux
monuments encore existants
pourront retrouver alors leur place
originelle. Autre étude en cours,
celle de la surface même du
rocher : les campagnes de fouilles
successives ont fait disparaître les
couches de sol qui la
protégeaient. On le voit bien
autour des soubassements du
Parthenon (à gauche). Quant aux
reliefs de marbre qui demeurent
sur l'Acropole (en bas à droite),
déjà erodes par 24 siècles de pluie
et de vent, leur dégradation s'est
I
fortement accélérée depuis peu en
raison de la pollution
atmosphérique. L'anhydride
sulfureux rejeté dans l'air par
l'industrie et le chauffage central
provoque sur les reliefs et les
statues la formation de croûtes de.
suie, lesquelles provoquent des
fissures dans le marbre (en bas, â
gauche : tête d'un cavalier sur la
frise occidentale du Parthenon).
Le gouvernement grec a pris des
mesures pour réduire la pollution
dans la zone environnant
, l'Acropole.
Photos © Deutsches Archäologisches Institut, Athènes
.
Le
premier
examen
comporte
entre
utilisées dans ses importantes et rapides
autres l'étude expérimentale des phénomè¬
restaurations
nes
probablement les possibilités de l'acier.
sur
le
Parthenon
par
la
méthode
moderne, dite de "photoélasticité", à l'aide
d'une maquette en
résine synthétique à
l'échelle du 1/100e, qui est soumise à des
forces transversales, proportionnelles aux
forces naturelles.
(1896-1933).
Il
surestimait
marbre, quand les plans laissés par Balanos
C'est ainsi qu'ont été ajoutées à presque
Au cours du second examen, on recher¬
marbres, provoqués jadis par les explosions
et les incendies, au moyen de méthodes
modernes : ultrasons et gammagraphie.
les
pour réunir des éléments
brisés,
L'humidité et l'environnement marin de
principes que nous avons exposés, exige
de
En
rouillant,
elles perdent
leur
résistance, mais aussi elles augmentent de
elles ont été insérées. Il existe à présent de
nombreuses fissures et, en certains points,
mesurer
un danger immédiat d'effondrement.
des
ultrasons dans la masse du marbre ; elle a
gramme aussi vaste, respectant tous les
rouillent.
ver d'échantillons. La première consiste à
transmission
tage de toutes les parties des monuments
l'Attique font que toutes ces pièces d'acier
volume et brisent le marbre dans lequel
de
d'acier suppos« le démontage et le remon¬
formant l'Acropole qui ont été restaurées
au cours des 19° et 20° siècles. Un pro¬
dans le portique des Caryatides.
Ces deux méthodes permettent d'effec¬
vitesse
Le remplacement des chevilles et poutres
ou
même des poutrelles d'acier pour soutenir
tuer des mesures de résistance sans préle¬
la
ne fournissent pas de détails suffisants.
tous les bâtiments de l'Acropole des chevil¬
chapiteaux et poutres de marbre, comme
che les fissures et les vides intérieurs des
La gammagraphie sert aussi à localiser
les pièces d'acier insérées dans les blocs de
travail,
une
excellente organisation et, surtout,
étude préparatoire complète.
nombreuses
années
de
une
En même temps que l'on rassemble tous
les
renseignements
disponibles
dans
les
L'étude exhaustive de la question a mon¬
bibliographies, les archives et les rapports
tré que la seule solution de ce problème
antérieurs sur les bâtiments de l'Acropole,
extrêmement grave est la suppression- de
voici deux ans que l'on a entrepris la vérifi¬
toutes ces pièces d'acier et leur remplace¬
cation systématique de la forme actuelle
ment par des chevilles d'un autre métal,
des monuments (photographies et dessins
mière fois sur les blocs de marbre, consiste
possédant
très détaillés). Ce travail, ainsi que les pro¬
à prendre des photographies à l'aide de
serait le titane,
rayons gamma émis par du cobalt.
quelles que soient les circonstances.
déjà été appliquée aux points d'appui du
plafond à caissons, dans la partie ouest du
Parthenon.
La seconde, mise en 'uvre pour la pre¬
Ces
une
résistance
illimitée.
Tel
parfaitement inoxydable,
positions
précises
d'intervention,
sont
presque achevés pour l'Erechthéion.
rayons traversent les éléments architectu¬
raux en marbre, et impressionnent une pel¬
licule
photographique,
donnant
quelque
chose d'analogue aux radiographies médi¬
cales.
Ces photographies permettent de
distinguer les fissures et les solutions de
continuité à l'intérieur de la masse du mar¬
bre, rendant possible le diagnostic des cau¬
ses d'affaiblissement de la pierre.
Mais les inquiétudes les plus vives que
suscitent les monuments de l'Acropole pro¬
viennent moins de leur condition statique
générale que des fissures provoquées par
les pièces d'assemblage métalliques pla¬
cées à l'intérieur des éléments de marbre.
Les Anciens utilisaient dans leur archi¬
tecture des chevilles de fer de petite taille
qu'ils rendaient pratiquement insensibles à
Déposition
d'un
roi
l'oxydation en les recouvrant de plomb.
Mais Nicolas Balanos n'a pas pris de telles
précautions pour les pièces d'acier qu'il a
mythique
Ces sculptures du fronton ouest du
Parthenon représentent Kékrops et sa fille
Pandrosos, figures légendaires de l'histoire
athénienne. Selon les anciens mythes,
Kékrops fut, au 16° siècle avant notre ère,
le premier roi d'Athènes. Rongé par le
temps et l'érosion, ce bel exemple de l'art
classique grec (5e siècle avant notre ère)
était tellement endommagé qu'il fallut, en
1976, le déposer de son fronton (â gauche)
pour le conserver au Musée de l'Acropole.
8
Un
Parthenon
dans
la
boîte
à épreuves
Réalisée en résine synthétique, cette maquette, au 1/100è, du
Parthenon (ci-dessus) sert â mesurer les tensions qui affectent
le monument. On peut ainsi évaluer sa stabilité et sa
résistance aux pressions exercées par le vent ou par
d'éventuelles secousses séismiques. Grâce à un appareillage
particulier, on peut ainsi varier ces tensions et les rendre
visibles sur la maquette. Ci-dessous, simulation de tensions
sur la façade occidentale du monument.
Quant au relevé architectural des temples
de l'Acropole, la méthode moderne de la
photogrammétrie terrestre a été employée
de façon limitée. On lui a préféré des
méthodes traditionnelles, qui permettent le
diagnostic des altérations subies par cha¬
que élément de marbre, en même temps
que sa mesure.
Autre sujet d'alarme :
la détérioration
superficielle des éléments architecturaux,
et surtout des sculptures d'à peu près tous
les monuments de l'Acropole. Le marbre
du Pentélique, matériau d'aspect splendide
et de grande résistance, perd son ancienne
surface, il se corrode, il se désagrège. La
principale cause du mal est la transforma¬
tion du marbre en plâtre sur une profon¬
deur plus ou moins grande, sous l'influence
de l'anhydride sulfureux présent dans l'at¬
mosphère polluée.
Les fumées d'usines et de chaudières de
chauffage central dans la ville moderne ren¬
les deux sculptures du fronton ouest ont
La solution radicale du problème de la
ferment un taux dangereux de ce gaz, qui
été provisoirement abritées au Musée de
pollution atmosphérique d'Athènes préoc¬
se
l'Acropole et remplacées par des copies.
cupe sérieusement le gouvernement grec.
On a délimité autour de l'Acropole une
répand
partout.
Une quantité
infime
d'humidité suffit pour que le marbre anti¬
On a suggéré d'enfermer les Caryatides
que soit attaqué et se transforme en plâtre,
lequel est dissous et entraîné par l'eau de
pluie, ou alors retient la suie et la poussière
et forme des croûtes qui bientôt s'effritent.
dans une boite transparente climatisée, afin
Si l'on ajoute à cela la détérioration natu¬
relle
du
marbre,
ininterrompue
pendant
vingt-quatre siècles, sous l'effet de la pluie,
de la grêle, des vents et surtout du gel, on
comprend
pourquoi
les
chefs-d'duvre
d'Athènes courent depuis quelques années
un danger inconnu jusqu'ici.
Il est évident que le problème est particu¬
lièrement aigu pour les sculptures, c'est-àdire les Caryatides de l'Erechthéion, la frise
et les sculptures qui demeurent sur les fron¬
tons du Parthenon.
Comme remède à tous ces maux, on pro¬
indépendamment de la solution
pose
radicale du nettoyage de l'atmosphère
des solutions d'attente, mais dont la mise
en application serait bien plus rapide. Des
de les protéger pleinement jusqu'au jour où
commencera
l'inévitable
démontage
du
portique sud de l'Erechthéion, pour le rem¬
placement de l'armature métallique de ses
poutres.
On a proposé également, mais la déci¬
zone, à l'intérieur de laquelle il est interdit
de chauffer les maisons au mazout, riche
en
soufre.
Parallèlement,
une
étude
technico-économique complète a été entre¬
prise sur le remplacement, à plus grande
échelle, du mazout par d'autres sources
d'énergie : gas-oil, gaz de ville ou même
sion définitive n'a pas encore été prise, de
énergie
transporter les Caryatides dans les salles
dépenses entraînées par ce remplacement
climatisées du Musée, réservant la possibi¬
lité de les remettre en place dès que l'état
de l'environnement le permettra. Les mou¬
d'habitations
lages qui, en pareil cas, prendraient provi-.
soirement la place des originaux sont déjà
électrique.
L'importance
des
il faut chauffer quelque 5 millions de M3
ainsi que le temps néces¬
saire à la réalisation de ce changement,
sont actuellement examinés par les services
publics d'Athènes.
en cours de fabrication.
Enfin, on ne cesse d'étudier la possibilité
Le sentiment de l'espace sur le rocher de
de protéger les marbres in situ ; dans ce
l'Acropole a beaucoup changé depuis
l'Antiquité. Cela est dû principalement aux
fouilles qui ont été effectuées par les
archéologues au 19e siècle (surtout après
domaine, le 2e Symposium sur la détériora¬
tion des pierres dans les constructions s'est
tenu à Athènes en septembre 1976. Cepen¬
dant l'exigence de réversibilité imposée à
toute intervention pratiquée sur les élé¬
1885), et qui ont presque partout dénudé le
rocher. Ainsi ont été découvertes les fon¬
abris en bois provisoires, d'aspect neutre,
ments antiques a immédiatement exclu la
dations des bâtiments, invisibles à l'époque
protègent déjà de la pluie et du gel la frise
quasi-totalité des matériaux de protection
locale utilisés aujourd'hui dans le bâtiment.
classique, et le terrain est devenu difficile- 1
du Parthenon et les Caryatides, tandis que
ment praticable.
|
>
Le désordre général est aggravé par des
centaines d'éléments architecturaux, petits
et grands, provenant des monuments con¬
nus ou inconnus d'époques diverses, qui
obstruent les passages et occupent une
fraction importante de l'espace libre. Enfin,
les pas des visiteurs entraînent des domma¬
ges irréparables. Aussi bien sur le sol des
monuments que sur le rocher (sur les surfa¬
ces apparentes dès l'Antiquité) la détériora¬
tion
a
atteint
un
degré inquiétant :
les
entailles antiques, les cavités destinées à
asseoir les socles et les fondations, le tracé
des voies, tous éléments qui présentent un
immense intérêt archéologique, sont mena¬
Le
mal
des
cés de disparaître.
L'effort
d'aménagement
par un examen
a
commencé
complet de la situation
actuelle. On a fait des plans topographi¬
ques détaillés, à l'échelle du 1/1008 et on a
pris des photographies de la surface du
rocher en utilisant un petit aérostat. Un
recensement des éléments architecturaux
épars est prévu ainsi qu'un système pour
les répertorier avant tout déplacement, ce
qui facilitera leur identification et leur clas¬
sement pour leur mise en place définitive.
On a étudié ensuite la possibilité de recou¬
vrir de terre une grande partie du rocher, de
façon à créer des accès faciles vers les anti¬
quités, et une esplanade plus large à l'est
de l'Erechthéion.
On envisage d'autre part de déplacer les
éléments architecturaux et de les disposer
de façon à rétablir la lisibilité de l'espace
archéologique et à faciliter les études scien¬
tifiques futures. Devant les Propylées, on
propose une nouvelle disposition de la
rampe d'accès, analogue à la voie antique.
Enfin, il a été décidé de construire, dans
les environs, un nouveau Musée de l'Acro¬
pole,
vaste
et
doté
d'installations
modernes, où seront exposées toutes les
luvres trouvées sur l'Acropole, et dont un
grand nombre s'entassent encore dans les
réserves. Un concours d'architecture pour
la
réalisation
des
plans
de
ce
nouveau
musée a été organisé.
Quant à l'altération du paysage urbain
d'Athènes et à son rapport avec l'Acropole,
quelques améliorations peuvent être appor¬
tées. Des dispositions d'urbanisme ont
écarté les grands immeubles des abords de
l'Acropole et de tous les lieux archéologi¬
ques voisins, tandis que, parallèlement, des
mesures ont été proposées pour la conser¬
vation de Plaka, le vieux quartier qui
s'étend au pied du rocher, du côté nord.
Enfin des expropriations ont rendu possible
le percement nécessaire pour reconstituer
le Péripatos, le chemin qui faisait le tour de
l'Acropole dans l'Antiquité.
L'Acropole et ses monuments ont connu
d'autres moments difficiles au cours-de leur
longue histoire, avant de nous parvenir
dans leur toujours jeune beauté, restes uni¬
ques d'une grande époque de la civilisation
occidentale. Aucun effort destiné à trans¬
mettre intact cet héritage de civilisation aux
générations à venir ne saurait être qualifié
d'excessif.
Kharalambos Bouras
10
Caryatides
Le portique des Caryatides (à droite) était
l'une des trois entrées du célèbre Erechthéion,
temple construit sur l'Acropole pour
perpétuer certains cultes primitifs. Les
Caryatides sont ces statues féminines qui
soutiennent l'entablement. Leur conservation
et leur restauration posent des problèmes
ardus que des spécialistes grecs choisis parmi
les meilleurs sont en train d'étudier (voir aussi
les deux pages de couverture de ce numéro).
La seconde Caryatide â partir de la gauche a
bénéficié de "retouches" en 1968-1969 (en bas
â droite : avant et après la restauration). Une
autre de ces statues (photo de gauche) n'est
en fait qu'une copie : l'original se trouve
depuis 1816 à Londres au British Museum.
C'est la seconde fois que l'on entreprend des
restaurations importantes sur l'Acropole au
20e siècle. Une photographie de 1902 (en bas à
gauche) montre que le toit du portique avait
été démonté pour permettre d'y insérer des
longerons d'acier. Mais l'architecte
responsable de l'opération n'avait pas prévu
que l'acier, en s'oxydant, gonflerait et
mettrait en péril les structures. Il fit de même
pour d'autres monuments de l'Acropole... Ce
qui met les spécialistes d'aujourd'hui devant
un problème délicat. Ceux-ci disposent
heureusement de procédés plus évolués.
Ainsi, pour relever les contours des
sculptures et des monuments au millimètre
près et en reconstituer ensuite les moindres
détails, a-t'on recours quelquefois â la
photogrammétrie. Ci-dessous : relevé
photogrammétrique de la Caryatide située â
l'extrémité sud-ouest du portique.
Photos © Musée de l'Acropole, Athènes
11
A gauche, l'Acropole telle qu'elle
pouvait apparaître â un Athénien
gravissant, il y a 2 400 ans, les
marches des Propylées (au
premier plan). Entre l'Erechthéion
(au fond â gauche) et le
Parthenon, se dressait la colossale
statue de bronze d'Athéna.
D'après Pausanias, voyageur et
écrivain grec de l'Antiquité, les
marins doublant le cap Sounion, â
50 km de là, pouvaient apercevoir
le cimier et la pointe de la lance
de la déesse. Bien avant que
Périclès, au 5e siècle avant notre
ère, ne fasse construire ce
prestigieux ensemble de
monuments, l'Acropole était déjà
un sanctuaire vénéré. Ce monstre
à trois têtes (à droite) décorait
sans doute l'Hécatompédon,
temple qui, au 6e siècle avant
notre ère, s'élevait, pense-t-on,
sur le site même du Parthenon.
Les métamorphoses
du
Rocher Sacré
par Jean Travlos
plus douce, ses sources, les nombreuses
libres qui existaient dans l'Antiquité, afin
grottes ouvertes sur ses côtés, offrirent un
que le visiteur actuel puisse,
refuge sûr aux premiers habitants qui s'y
pèlerin antique, marcher à son aise, appro¬
établirent à l'époque néolithique, environ
cher et admirer les monuments.
comme le
3500 ans avant notre ère.
Mais pour avoir une image nette de la
topographie de l'Acropole au 5" siècle, il
nous
LE Rocher sacré, l'Acropole
lui
conserver
son
nom
pour
historique
est une colline de calcaire massif.
Ses dimensions sont à la base de 330 x 170
m, son altitude au-dessus du niveau de la
mer de 156,20 m, tandis que sa hauteur
faut
connaître
les
monuments
et
La destruction des monuments et l'alté¬
ration
de
l'aspect
de
l'Acropole
ont
commencé dès le 17° siècle et se sont pour¬
autres ruines découverts au cours des fouil¬
suivies
les ; ils nous content l'histoire du "Rocher
d'Indépendance
sacré" depuis le moment où les premiers
Propylées ont été gravement endommagés
par l'explosion de barils de poudre vers le
s'y sont installés jusqu'à l'époque
jusqu'à
l'époque
de
la
hellénique de
guerre
1821.
Les
où les artistes de l'âge classique créèrent la
milieu du 17e siècle, tandis que le temple
nouvelle composition architecturale.
d'Athéna Niké fut démoli par les Turcs, peu
avant l'attaque vénitienne de 1687, pour
Le Parthenon, l'Erechthéion, les Propy¬
lées
et
le
temple
d'Athéna
Niké
construire
avec
ses
éléments
architectu¬
raux le grand bastion érigé devant les
Propylées. La destruction fut consommée
relative par rapport au sol sur lequel elle
(victorieuse)
repose ne dépasse pas 50 m.
tectural homogène, expression de l'esprit
quand
classique et de la perfection de la création
artistique du 5e siècle avant notre ère. Pour¬
(1619-1694) fit sauter le Parthenon en 1687,
quand l'Erechthéion tomba en ruines, puis
tant
quand les sculptures des temples antiques
Ses flancs abrupts, presque verticaux, à
l'exception du côté ouest dont la pente est
on
les
forment un ensemble archi¬
examine
d'ordinaire
sépa¬
rément, comme des monuments indépen¬
JEAN TRAVLOS, architecte et archéologue grec, est
un spécialiste de l'ancienne Athènes et de ses monu¬
ments.
Architecte de ¡'American School ot Classical
le
vénitien
Francesco
Morosini
furent systématiquement pillées.
dants, archéologues et architectes se bor¬
nant à les dégager, à les restaurer et à les
étudier.
En se fondant sur les descriptions de
voyageurs dès 18e et 19° siècles, sur les
Studies ( 1935- 1973) il a activement participé aux fouilles
anciennes peintures et sur les dessins qui
de l'Agora antique d'Athènes dont deux des monu¬
Aucune recherche systématique n'a été
ments ont été restaurés sous sa direction. Il a publié de
effectuée à ce jour pour préciser la topogra¬
ont été conservés,
phie
l'aspect que présentait l'Acropole dans les
nombreuses études dans des revues archéologiques et
des ouvrages sur Athènes comme, en français, Athènes
au fil du temps, éd. Joël Cuénot, Boulogne 1972.
12
de
l'Acropole,
pour
déterminer
et
reconstituer les passages et les espaces
on
peut reconstituer
premières années de l'Indépendance.
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Photo © Deutsches Archäologisches Institut, Athènes
Des murs très hauts et très épais enfer¬
C'est à la même époque que fut démoli le
maient de tous côtés le Rocher sacré, parti¬
grand bastion situé devant les Propylées et
(cent pieds, attiques, de long) sur l'empla¬
cement du Parthenon actuel, et un ancien
culièrement renforcés du côté occidental,
que les éléments architecturaux du temple
temple,
devant les Propylées, de manière à assurer
d'Athéna Niké furent extraits de ses murs
encore au sud de l'Erechthéion.
la sécurité de l'entrée. Une rangée de trois
et que la première restauration du temple
constructions plus petites, autels et monu¬
bastions armés de canons formait ici une
fut entreprise. Les grandes fouilles de
l'Acropole datent des années 1885-1890.
ments
très puissante fortification. Pour arriver sur
l'Acropole à partir de l'enceinte extérieure,
C'est alors que tous les monuments anti¬
furent découverts et l'endroit prit
il fallait donc passer par ces bastions et par
ques
six portes bien protégées.
l'aspect qu'il conserve encore aujourd'hui.
A l'intérieur de la citadelle, un grand rem¬
blai, formé par les gros blocs de marbre
provenant des temples détruits, recouvrait
la partie inférieure des monuments. Sur ce
remblai,
300
petites
maisons
environ
avaient été construites, où logeaient la gar¬
nison turque et les familles des soldats.
Un grand nombre de sculptures archaï¬
dont
votifs,
l'Acropole,
les
fondations
couvraient
toujours
¡"cyclopéen"
de
subsistent
le
rocher
entouré
l'époque
D'autres
du
de
mur
mycénienne
(13° siècle avant notre ère).
En 556 avant notre ère, la partie supé¬
rieure de la tour mycénienne, qui protégeait
ques, les célèbres Korès (jeunes filles), les
l'entrée de la citadelle, fut démolie et sur
sculptures
cet emplacement, visible de loin, on cons¬
en
tuf
des
frontons
d'autres éléments architecturaux,
et
bien
décou¬
verts dans le remblai, vinrent enrichir le
Musée
de
l'Acropole.
Les
fouilles
truisit
le
premier
autel
en
l'honneur
d'Athéna Niké, à l'occasion de la consecra- i
tion des Jeux Panathéniens (1).
I
terminées, on commença la restauration du
Parthenon, de l'Erechthéion et des Propy¬
lées, et, un peu avant la seconde guerre
Les travaux de déblaiement et de déga¬
gement
des
monuments
de
l'Acropole
commencèrent en avril 1833, aussitôt après
la libération d'Athènes et le départ de la
garnison turque.
Dès août 1834, lorsque
l'Acropole cessa, par décret royal, d'être
utilisée
comme
forteresse,
les
travaux
devinrent systématiques et les premières
fouilles furent entreprises.
La démolition
des édifices médiévaux (byzantins, francs
et d'époque turque) commença en 1835.
mondiale, la deuxième restauration du tem¬
ple d'Athéna Niké était achevée.
Le site de l'Acropole était donc habité
dès l'époque néolithique. Mais les premiers
temples y furent édifiés à partir de l'époque
géométrique (vers 1050 à 700 avant notre
ère) qui doit son nom aux motifs géomé¬
triques qui décoraient les vases.
Au 6e siècle, deux grands temples étaient
consacrés
à
Athéna :
l'Hécatompédon
(1) Ou Panathénées : la plus grande et la plus ancienne
de toutes les fêtes célébrées par les Athéniens et les
habitants de toute l'Attique, en l'honneur d'Athéna. Les
Petites Panathénées avaient lieu chaque année et les
Grandes tous les quatre ans. Elles duraient une dizaine
de jours et comprenaient des jeux athlétiques et choré¬
graphiques, des courses hippiques, un concours musi¬
cal, etc., et se clôturaient en grande pompe par une pro¬
cession allant porter en offrande un nouveau péplos
(tunique) à la déesse, et par des sacrifices.
13
.
L'ancien chemin tortueux qui partait du
tes, l'expressivité et la finesse de son style
L'archéologue américain G. P. Stevens a
pied de la tour de la Victoire et conduisait à
l'Acropole ne suffisait plus pour la foule qui
suivait la procession des Panathénées. On
ionique s'opposent à la sévérité du style
émis une hypothèse : le mur de soutène¬
dorique du Parthenon.
construisit alors la première voie montante,
l'emplacement
droite, large de 10 mètres et longue de 80, à
l'architecte
laquelle appartient le beau mur de soutène¬
ment (milieu du 68 siècle avant notre ère)
qui subsiste dans l'axe des Propylées.
Sur
le
côté
ment de la terrasse du
ouest
du
du
Parthenon,
propylée
à
archaïque,
Mnésiclès édifia de
nouveaux
Propylées (437-432), mais en leur donnant
une orientation différente. Cette modifica¬
tion devait provoquer chez le pèlerin, dès
Après la victoire des Athéniens à Mara¬
thon, en 490 avant notre ère, l'Hécatompé-
son
arrivée sur l'Acropole,
une émotion
intense : la statue colossale d'Athéna Pro¬
don fut démoli et, sur son emplacement, le
machos (guerrière) se trouvait exactement
premier grand Parthenon de marbre com¬
mença de s'élever. En même temps, sur
l'emplacement de la porte fortifiée mycé¬
nienne, un propylée monumental à portes
multiples fut construit
remplacé plus
tard par les Propylées actuels.
dans l'axe des Propylées, flanquée de part
et
d'autre
par
le
Parthenon
et
D'austère style dorique,
les
Propylées
servent de façade et d'entrée monumentale
au grand sanctuaire de l'Acropole. La par¬
Tel était, avec les temples imposants et
tie centrale, la plus vaste, sert d'entrée ; elle
est entourée de deux ailes plus petites.
décrites, l'aspect que présentait l'Acropole
L'aile sud était affectée au service du sanc¬
en 480 avant notre ère, année où les Perses
tuaire d'Athéna Niké, élégant temple ioni¬
s'en emparèrent et la détruisirent. Ils causè¬
rent d'effroyables dévastations aux temples,
sanctuaires, monuments votifs, bâtiments
que. Mnésiclès avait dû prévoir son empla¬
publics et maisons.
temple avait été décidée dès 448. Mais sa
les éclatantes victoires de Salamine et de
Platées en 479 avant notre ère, fut l'érec¬
tion d'une nouvelle enceinte pour assurer la
cement ainsi que le suggère la disposition
de l'aile droite des Propylées. L'érection du
construction ne commença qu'en 427, sur
des plans de Callicratès ; elle était achevée
en 424. En 410, une ballustrade décorée de .
détruits.
Le
programme
recherches ont permis de démontrer que
les entailles qui subsistent n'étaient pas
destinées à
la
construction
soutènement continu,
d'un
mur de
mais à la mise en
place de socles votifs isolés bordant, du
moins je le présume, le côté sud d'un grand
espace sacré.
On peut ainsi démontrer que la Voie
qu'elle s'arrêtait exactement à l'endroit où
est gravée l'inscription de la Gê Kourotro-
phos (Terre nourricière des Kouroi," jeunes
gens"). C'est à cet endroit précis que com¬
mence une autre grande esplanade, dont
les limites sont déterminées avec précision :
bornée au sud par le Parthenon et la série
des monuments votifs, au nord par l'Erech¬
théion, à l'est par le temple de Zeus Polieus
et à l'ouest, du moins jusqu'au milieu du 4e
siècle avant notre ère, par l'opisthodome
(partie
postérieure)
de
l'ancien
temple
d'Athéna.
Au
centre
(60x60
Victoires entoura le temple.
m)
de
se
cette
trouvait
vaste
le
esplanade
grand
autel
d'Athéna : il s'agit de la Cour Sacrée. Elle
était, je pense, indispensable pour accueillir
la grande foule du cortège des Panathénées
qui s'arrêtait, on le sait, au grand autel.
sécurité de la ville, et la reconstruction des
monuments
alors les 86 m. Cependant, mes dernières
Sacrée n'avait que 54 mètres de long et
l'Erechthéion.
les autres constructions que nous avons
Le premier souci des Athéniens, après
Parthenon devait
aller jusqu'à l'extrémité orientale du temple
et la longueur de la Voie Sacrée approchait
de
construction fut achevé dans la seconde
moitié du 5" siècle, par Périclès. Sous son
impulsion, architectes, peintres et sculp¬
teurs, réalisèrent ces chefs-d'muvre inimi¬
tables
que
nous
admirons
encore
aujourd'hui.
Tel est l'aspect conservé par l'Acropole
A l'intérieur de l'Acropole, immédia¬
tement en arrière des Propylées,
jusqu'à la fin de l'Antiquité. Les ajouts ont
été, en effet, peu nombreux. Le plus impor¬
se dessine une grande esplanade
de 50 x 43 m, bordée de plusieurs sanc¬
tant fut le temple circulaire de Rome et
d'Artémis
d'Auguste, construit devant le Parthenon.
D'autre part, au milieu du 1er siècle de notre
Temples et autels majestueux se dressè¬
rent sur l'Acropole, à l'emplacement de
ceux détruits par les Perses. Là aussi, de
nouvelles et très puissantes murailles
avaient été élevées ; elles servaient égale¬
tuaires :
ment de murs de soutènement destinés à
contenir les importants remblais accumulés
ce, le rempart et la maison des Arrhéphores, jeunes filles que l'on enfermait
pour niveler le rocher et, surtout, en aug¬
dans
menter la surface.
près d'une année pour qu'elles tissent le
péplos d'Athéna. A l'est, l'esplanade abou¬
Sur l'Acropole, les travaux furent exécu¬
tés en fonction d'un nouveau plan architec¬
au
sud
le
sanctuaire
Brauronia et la Chalcothèque, long bâti¬
ère, la voie montante conduisant à l'entrée
ment rectangulaire, arsenal où l'on conser¬
des Propylées fut remplacée par un escalier
vait différentes armes de bronze (du grec
de marbre monumental.
Khalkos : cuivre) ; au nord un petit édifi¬
tissait
l'enceinte
au
mur
de
l'Acropole
soutenant
la
pendant
terrasse
de
tural. Nouveau parce que l'orientation des
l'ancien temple d'Athéna, où se dressait la
Propylées fut changée et de très anciens
statue colossale d'Athéna Promachos.
autels et sanctuaires
recouverts
lors
du
nivellement du rocher et de l'aménagement
de chemins et espaces libres.
De
cet
endroit
précis
partaient
deux
voies : l'une vers le Parthenon, l'autre vers
l'Erechthéion. Celle qui menait au Parthe¬
Ictinos et Callicratès établirent les plans
non, la Voie Sacrée, est aujourd'hui recou¬
l'honneur
verte sur toute sa longueur par des marbres
d'Athéna Parthénos (vierge) : le Parthenon
antiques et d'autres éléments architectu¬
raux. Cependant, son emplacement et sa
du
nouveau
temple
élevé
en
(447-432 avant notre ère). Son ornementa¬
tion sculpturale est due à Phidias travaillant
largeur (6-7 m) peuvent être déterminés
en collaboration avec d'autres artistes de
grand talent. Plus tard, mais toujours con¬
avec une grande précision d'après les
entailles faites dans le rocher pour les fon¬
formément au plan initial, un élégant tem¬
dations des deux murs de soutènement, qui
ple
la bordaient : l'un appartient à la terrasse
du Parthenon, l'autre à celle de l'ancien
ionique,
l'Erechthéion
(421-406)
fut
érigé pour remplacer l'ancien temple
d'Athéna. Malgré ses dimensions modes
14
temple d'Athéna.
Aussi, les renseignements transmis par le
géographe et historien grec Pausanias, qui
a visité Athènes vers le milieu du 2e siècle
de notre ère, constituent-ils le témoignage
le plus complet et le plus digne de foi sur
l'Acropole du 5e siècle avant notre ère.
Dans sa Description de la Grèce, il décrit de
façon très détaillée édifices, statues et
monuments votifs qui existaient encore à
son époque sur le Rocher Sacré.
Jean Travlos
JT\
L'Acropole
des Korés
avant
Périclès
Le Parthenon voulu par
Pérjclès et décoré par Phidias
au 5e siècle avant notre ère
n'était que le troisième (ou le
quatrième) temple élevé sur
cet emplacement de
l'Acropole, colline consacrée
â la déesse Athéna. Vers la
fin du 6e siècle, le Rocher
était couvert de temples dont
les abords étaient peuplés de
statues de bronze et de
marbre : kouros (garçons)
toujours nus et korés (jeunes
filles) toujours vêtues, sùurs
de cette Koré (â gauche)
sculptée vers 500 et de celles
que nous reproduisons en
pages suivantes.
SUITE PAGE 17
15
w
16
Photo © Musée du Louvre, Paris
L'ACROPOLE DES KORÉS AVANT PÉRICLÈS (Suite)
Athéna, selon la légende,
permirent la mise au jour de
avait guidé Cyclopes et
ce cimetière sacré, avec ses
Géants (voir photo 6), ces
statues, bien conservées pour
porteurs d'énormes quartiers
la plupart. Statues
de rocs, pour construire un
votives, elles comptent parmi
mur autour de l'Acropole. Les
les plus belles de l'art dit
restes de ce "mur cyclopéen"
"archaïque", témoin ce
montrent qu'il atteignait par
Moschophore (1) ou porteur
endroits 6 m d'épaisseur et
de veau (vers 570) qui venait
plus de 10 m de hauteur.
apporter son offrande à
Mais au cours des Guerres
Athéna. Toutes les Korés de
mediques, les Perses
l'Acropole ont été sculptées
s'emparèrent d'Athènes en
entre 550 et 490. Nous
480 et détruisirent temples et
présentons ici quelques
statues de l'Acropole.
exemples de ces figures
Atterrés, les Athéniens
graves ou enjouées, sérieuses
Inhumèrent, après le départ
ou rieuses : (4) Kouros de
des envahisseurs, les statues
Milo daté d'environ 550-540 ;
mutilées et profanées dans
(3) Koré, dite au péplos, vers
des grottes et des caches de
540 ; (5) Koré de 1,20 m de
la colline. Ce n'est qu'à la fin
haut, vers 520 ; (2) Koré
du siècle dernier, entre 1886
datant de 520 ; (7) Koré de
et 1889 que des fouilles
1,82 m de haut, vers 520-510.
17
Photos © Tombazi, Athènes
Autour du
Les
numéros
indiquant
les
Parthenon
monuments
sur
l'Acropole correspondent aux numéros de la
droite.
Les
autres
monuments
portés
sur
ce
ce
plan
de
plan
sont :
tons du temple. Les sculptures du fronton Est (page 18) représentent la naissance d'Athéna
n'en donnent pas moins une bonne idée de l'Acropole du 5e siècle avant notre ère, puisque
tout armée et casquée ; celles du fronton Ouest (page 19) rappellent la lutte d'Athéna et de
Poséidon pour la possession d'Athènes. Aujourd'hui seuls subsistent des fragments de ces
chefs-d' que l'on a qualifié de "sommet de l'art grec."
seuls des monuments d'intérêt secondaire y avaient été ajoutés. Ci-dessus à gauche, reconsti¬
maquette, à
A. l'ancien temple d'Athéna ; B. l'autel d'Athéna ; C. l'Odéon
La maquette (ci-dessus) et le plan (à gauche) montrent l'Acropole au 2a siècle de notre ère, ils
féO
tution d'un des angles du Parthenon. Les panneaux de marbre, ou métopes, sont décorés de
sculptures rehaussées de peinture. En haut de cette double page, reconstitution des deux fron-
d'Hérode Atttcus ; D. le théâtre de Dionysos.
18
19
Une antique
démocratie
inscrite
dans
le
marbre
Soulignons
tout
d'abord
que
ces
bâtiments si justement célébrés s'inscrivent
par
Manolis Andronicos
dans le vaste programme de construction
de
la
démocratie
péricléenne.
Car
les
créations éblouissantes de l'Acropole font
trop souvent oublier que l'art classique
constitue un phénomène complexe qui
reflète l'ensemble de la société et témoigne
d'une
conception
du
monde
et
de
l'homme.
Comment ne pas être frappé en effet par
le grand
nombre des édifices construits
entre 450 et 400 avant notre ère, mais aussi
par la variété de leurs formes et de leurs
fonctions ? A Athènes même, ce sont' le
Stratégéion, le nouveau Bouleutérion, la
Monnaie,
l'Odéon
de
Périclès,
le
APRES avoir gravi le rocher de
l'Acropole, tout visiteur s'arrête
Pompéion, le Portique sud de l'Agora, la
Chalcothèque,
le
Portique
d'Artémise
Brauronia sur l'Acropole, etc.
Pendant la
ments chargés d'histoire. Des vestiges de
de l'angle sud-ouest du Parthenon, il peut,
même période,
assiste
à
une
floraison
bâtiments
aujourd'hui, soit avant tout celle de l'épo¬
d'Héphaistos (Théséion) et temple d'Apol¬
que classique.
lon Delphinios.
classique
a
qu'a
contribué
suscitée
à
la
perception de ces éuvres, où l'on voyait le
modèle
éternel
d'une
beauté
idéale,
désincarnée, olympienne et transcendante.
Notre époque,
en
réaction contre cette
attitude, a découvert l'art archaïque et le
pendule s'est déplacé
opposée.
Quoi
qu'il
aujourd'hui
en
soit,
se
est,
on
direction
peut
plus
Propylées,
Erechthéion,
d'Athènes
temple
temple
apparaissent
Cette activité fébrile traduit l'opulence et
les objectifs de la démocratie athénienne,
tels qu'ils s'expriment dans la politique de
Périclès.
La
puissance équilibrée des
formes qu'on constate dans l'art classique,
constitue
l'équivalent
intellectuel
de
la
ce moment historique privilégié, stabilité
qui n'est autre qu'un subtil équilibre entre
profonds.
Il
convient donc de tenter une interprétation
essentiellement historique de ce bonheur
architectural qu'expriment les édifices de
l'Acropole d'Athènes.
des forces opposées.
Ainsi,
l'art
tentative
de
classique
représente
conciliation
entre
Athènes 1975, ainsi que Merveilles des Musées grecs,
éd. Hachette, Paris 1975.
20
monde grec tout entier doit se regrouper
autour d'Athènes, dont l'hégémonie ne
saurait porter ombrage à quiconque, ami
ou ennemi, puisqu'il s'agit d'un fait, d'une
évolution historique.
le
C'est dans cette perspective que s'inscrit
"programme"
de
Périclès
où
la
de la cité et lieu de ses cultes ancestraux,
tient une place particulière.
Les
Barbares
(1)
avaient incendiés les
sanctuaires archaïques
donc
unique
de
;
l'occasion était
recréer
une
nouvelle
Acropole. Les trois grands bâtiments qui la
scandent,
Parthenon,
Propylées
et
Erechthéion, sont unis entre eux par les
fonctions qu'ils remplissent et par l'audace
des partis architecturaux adoptés, qui
une
témoignent
des
démocratie péricléenne.
de
l'esprit
novateur
de
la
tendances antithétiques, lesquelles, au lieu
de s'annuler ou de se combattre pour que
l'une subjugue l'autre, transcendent leur
antinomie dans un dialogue réfléchi, qu'on
aimerait dire démocratique.
MANOLIS ANDRONICOS, professeur d'archéologie
classique à l'Université de Thessalonique, a lait paraî¬
tre de nombreuses études sur l'archéologie grecque
et l'histoire de l'art. Citons en traduction française :
L'Acropole, aux éditions Ekdotike Athénon S.A.,
Inspirés par un patriotisme éclairé, les
compagnons de Périclès pensent que le
sacré, symbole de l'histoire très ancienne
car on sait désormais que l'art
très
écono¬
reconstruction des monuments du Rocher
d'Apollon à Délos, etc.
stabilité sociale et politique atteinte durant
l'expression de
politique,
nombre
d'autres temples : celui de Poséidon au cap
Sounion, le Télestérion à Eleusis, celui
lieux
dialectiques
des
Hors
Niké,
harmonie, beauté,
dans toute société,
rapports
la
ne
contenter
communs consacrés
sérénité
dans
d'Athéna
l'art
fausser
Parthenon,
de
sacrés :
l'admiration
capitale
le premier
théâtre de Dionysos est aménagé et on
en effet, suivre des étapes prestigieuses,
bien que l'Acropole, telle qu'elle se dresse
Or,
la
mique et intellectuelle de la Grèce.
saisi par la grandeur de ces monu¬
l'époque mycénienne à la tour médiévale
le musicien Damon, Périclès rêve de faire
d'Athènes
Derrière
cette
façade
d'harmonieuse
coexistence, on peut cependant discerner
les
idées
animent
radicales
et
l'Athènes de
audacieuses
Périclès.
Avec
Face
à
la
tradition
de
l'architecture
dorique
et
ionique,
les
édifices
de
l'Acropole d'Athènes fondent, en effet, un
nouvel ordre architectural qui fait coexister
ces deux composantes stylistiques et
parvient même à assurer leur synthèse dans
un
même
édifice.
Mieux
encore
:
les
qui
ses
amis, le philosophe Anaxagore et le
sophiste Protagoras, le sculpteur Phidias et
I
(1) Le mot grec "barbares" n'avait aucun sens péjoratif,
il désignait tous ceux qui ne parlaient pas la langue
grecque.
Edifice d'une grande rigueur, le Parthenon
mêle dans son architecture les styles
dorique et ionique. Ces colonnes de la
façade occidentale, fortement érodées par
le temps, appartiennent â l'ordre dorique,
mais la frise (au second plan), mieux
préservée, est un élément ionique voulu et
rajouté au temple par le sculpteur de génie
que fut Phidias.
frise dorique) soient toutes décorées de
sculptures.
Et pourtant ce ne sont pas ces chiffres
qui retiennent l'attention, mais plutôt la
beauté de l'exécution et la spiritualité qui
transcende
les
éléments
matériels
de
l'édifice.
Pour la
première fois dans
l'architecture grecque,
un temple est
construit à partir d'un volume intérieur qui
en
détermine
Phidias qui,
Athéna
la
forme
extérieure.
C'est
pour mettre en valeur son
d'or
et
d'ivoire,
a
dicté
cette
condition essentielle.
Tout
le
monument
est
fondé
sur
le
rapport de base, appelé "section d'or",
rapport entre les dimensions de deux
éléments de l'édifice. Pour le Parthenon, ce
éléments doriques et ioniques y prennent
une forme nouvelle, nettement différente
de
la
forme
traditionnelle
:
une
forme
attique.
Arrêtons-nous d'abord aux Propylées,
cette entrée de l'Acropole. L'architecte
Mnésiclès s'est servi de la forme simple du
propylon (porte protégée sur ses deux
faces par un auvent soutenu de deux
piliers) qu'il transfigure par de nombreuses
innovations
;
il
en
fait
un
prélude
architectural, à l'unisson des monuments
qu'introduisent les Propylées.
monumentale,
nous voici
sur le
Rocher
.sacré, face à ses deux monuments les plus
célèbres
:
le
Parthenon
au
Sud
l'Erechthéion au Nord, consacrés
deux à Athéna, patronne d'Athènes.
et
tous
gueurs (8 et 17), etc.
"Vivez heureux, habitants de cette cité,
assis à côté de la Vierge de Zeus et lui
rendant son amour..." dira Eschyle dans
les Euménides.
Car la déesse incarnait la
ville à un point tel que Périclès demanda à
Phidias
une
statue
d'or
et
d'ivoire
la
représentant et que le Parthenon abriterait.
soient oblitérées.
Athéna c'est donc l'apothéose de l'Etat
athénien
ou,
mieux
encore,
la
manifestation de son essence divine ;
l'aspect de la déesse est indissolublement
lié à celui d'Athènes : sa demeure, telle que
Périclès et ses conseillers la conçoivent, est
aussi le symbole éclatant de la cité qu'elle
patronne et qui atteint alors son apogée.
Une solution simple et géniale fut
également adoptée pour la colonnade
travaillé à la construction du Parthenon en
La forme du propylon et de ses éléments
y est clairement perceptible, mais l'on ne
peut
manquer
d'être
émerveillé
par
l'imagination créatrice qui a présidé à la
composition d'un ensemble cohérent sans
que la nature et la fonction de l'édifice ne
ionique intérieure.
Les Athéniens allaient se rendre en foule
au
sanctuaire
de
la
déesse
et
les
accès
devaient donc être aussi spacieux que pos¬
sible. C'est pourquoi, loin de placer, à
l'intérieur et à l'extérieur du portique, ces
volumineuses colonnes doriques, comme
l'aurait voulu la règle du style unique,
l'architecte choisit les colonnes ioniques,
plus élancées, qu'il pouvait élever à loisir,
sans encombrer le passage.
On
voit
bien
grâce
à
cet
exemple
comment la tradition est ici dépassée et
comment
Mnésiclès,
conscient
de
l'importance des formes indépendamment
de leur style, utilise cette leçon à ses
propres fins pour réaliser ainsi sa vision
architecturale.
Après
avoir
traversé
cette
entrée
rapport est de 4 à 9 : rapport largeurlongueur du stylobate (soubassement sur
lequel se dressent les colonnes) ; diamètre
des colonnes et espace entre les colon¬
nes ; hauteur-largeur du temple ; nombre
des colonnes sur les largeurs et les lon¬
Les architectes Ictinos et Callicratès ont
collaboration étroite avec Phidias, qui en a
influencé le plan d'une manière décisive.
L'édifice qui en résulte est le fruit d'une
conception visionnaire et d'une grande
habileté dans l'exécution.
Les sommes énormes qu'il coûta ne
purent être réunies en si peu de temps que
grâce à la volonté de Périclès et à la
prospérité de la cité. Les travaux durèrent
Les
colonnes
élancées
et
l'ordinaire,
du
plus
Parthenon,
plus
rapprochées
qu'à
portent un
entablement plus
léger. L'espace entre les colonnes et les
murs du temple est beaucoup plus étroit
que d'habitude (moins d'une fois et demie
la distance séparant les colonnes ellesmêmes), tandis que sur les deux façades,
une seconde rangée de colonnes donne
l'impression d'un temple diptère (à double
colonnade).
A cette densité vigoureuse de l'extérieur
l'ampleur sereine de l'espace
s'oppose
intérieur, souligné au fond de la celia
(chambre d'un temple abritant la statue du
dieu) par une colonnade transversale.
Par delà même ces savantes proportions
d'ensemble,
des
raffinements
de
détail
presque insaisissables font du Parthenon
un organisme vivant. Ils . sont de deux
ordres : courbure des lignes horizontales et
inclinaisons des verticales.
. Les courbures sont sensibles au niveau
les sculptures des
du stylobate, de l'épistyle ou architrave,
des triglyphes (ornements de la frise), de la
corniche et du fronton. Ainsi, le stylobate
Le Parthenon est le plus vaste temple
voudrait la statique de l'édifice : le milieu de
grec achevé (31x70 m environ). C'est
aussi
le
seul
temple
grec
qui
soit
entièrement en marbre et le seul de style
dorique dont les 92
métopes (espace,
sculpté ou non, entre les cannelures d'une
chaque longueur est légèrement bombé
(0,11 m) tout comme le milieu de chaque
de 447 à 438 avant notre ère pour
l'ensemble du temple, et se prolongèrent
six ans encore
pour
frontons.
n'est
pas
une surface plane,
comme le
largeur (0,06 m).
Murs
et
colonnes,
au
lieu
d'être f
2.1
Photo © Tombazi, Athènes
.parfaitement
Photo Dominique Roger - Unesco
verticaux,
sont
donc
légèrement inclinés vers l'intérieur : 7 cm
autour de ses dieux au jour de sa plus
grande fête, lorsque, à l'occasion des
perfection
pour
Panathénées, le cortège joyeux monte sur
détachent avec une surprenante netteté sur
colonnes d'angle, inclinées en diagonale.
Si la paroi des murs est verticale, la paroi
le
des
extérieure, elle, est inclinée vers le dedans.
d'or, destinée à draper le xoanon ou statue
Est,
Ainsi le volume du temple s'inscrit-il dans
archaïque taillée dans le bois d'un olivier).
rassemblés. En dépit de leur faible hauteur
les
une
colonnes
pyramide
et
10
et
cm
non
pour
les
dans
La
réalisation
de
ces
constitue
raffinements
une
prouesse
incroyable. Pour s'en convaincre, il suffit
de penser que chaque bloc n'était pas
rectangulaire mais trapézoïdal, avec une
forme particulière déterminée par sa place,
puisque
courbures
inclinaisons
angles
verticales
et des
horizontales
et
entraînaient
des
surfaces
sacré,
chargé
d'offrandes
et
un
parallélépipède.
d'architecture
Rocher
portant le péplos d'Athéna (tunique jaune
différents.
Pour
son
exécution avec la plus grande exactitude.
A
cette
égale,
création
Phidias a
architecturale
adjoint une
sans
décoration
sculptée grandiose et originale. Lui-même a
sans
doute
exécuté
les
sculptures
des
frontons, aidé par ses collaborateurs les
plus proches, Alcamène et Agoracritos. Le
fronton
Est
représente
la
naissance
d'Athéna dans une composition où s'allient
puissance et noblesse. Le fronton Ouest
raconte la légende attique et la dispute
d'Athéna et de Poséidon (dieu de la mer)
pour la possession d'Athènes.
mythologiques : combat des Dieux et des
Géants, des Centaures et des Lapithes, des
Phidias
l'occasion
de
raconter
d'une
manière unique les mythes très anciens
concernant la déesse et l'Attique.
la
geste
sculpteur, pas orateur. Il fallait son génie,
son
expérience,
son
audace
d'artiste
à
l'avant-garde de son époque pour traduire
en images cet hymne à la démocratie qu'il
envisageait.
Cette vision
réclamait- un
espace que
au temple dorique cet élément ionique dont
le bandeau ceint les murs du temple sur 160
mètres
de
longueur
et
1,60
mètre
de
hauteur.
Il
ne
faut
pas
considérer
cette
frise
comme une chronique de la
procession
réelle
c'est
des
Panathénées
composition
avant
tout
:
poétique,
une
tra¬
duction par des moyens plastiques d'un
moment sacré.
réels
sont
Ici,
abolis
l'espace et le temps
et
toutes
les
figures
composant ces Panathénées avancent au
"poétique" ; la procession acquiert ainsi
une unité symphonique, au sens musical,
qui confond réalité, religion et art.
Phidias semble suivre la cérémonie dans
le temps et l'espace, depuis son début, à
l'angle sud-ouest du temple ;
pianissimo
cet
avec
élément
de
en fait,
pour
simples
il
débuter
accords
et
athénienne à son apogée, il eut l'idée de
introduire
génie
comme le cheval cabré de la plaque VIII du
d'immortaliser
peuple d'Athènes
:
dans
le
hommes,
marbre
le
jeunes et
vieux, jeunes filles, toute la cité rassemblée
22
procession
là
m)
où
ce
les
sont
dieux
se
trouvent
d'imposantes
déjà
figures
;
s'ils étaient dans le paysage céleste de
l'Olympe, leur séjour mythologique.
attiques,
nouvelle de la démocratie. Mais Phidias est
exploite
Inspiré par la vision de la démocratie
Cette
se
félicité et d'un sentiment de liberté, comme
légendes
Grecs et des Amazones et chute de Troie.
Ainsi, frontons et métopes ont donné à
cavaliers
anciennes
rythme voulu par Phidias dans un milieu
Les 92 métopes illustrent quatre cycles
différents.
sept
a pensé qu'il fallait représenter, à côté des
elle se déploierait donc sur une frise
continue. Avec audace, il décida d'ajouter
contrôler
ou
rythmée converge vers le centre du côté
(1
il fallait donc calculer parfaitement chaque
aussi
plans
six
familièrement assis, les dieux rayonnent de
frontons et métopes ne pouvaient offrir ':
mais .
:
Ami de Périclès et d'Anaxagore, Phidias
réaliser une construction aussi minutieuse,
élément,
Sur ces plaques, l'art du relief atteint à la
ensuite ses
motifs
principaux
côté Ouest, comme l'escadron de cavaliers
sur les côtés Nord et Sud, etc.
Phidias
est
à
l'art
classique
ce
que
Périclès fut à la démocratie athénienne : sa
personnalité de génie a marqué son époque
et les suivantes. Avec lui, l'art plastique
Le temple des victoires
De style ionique, tout de gracilité et d'élégance, le temple
d'Athéna Niké (â gauche) se dresse â l'extrémité du Rocher
Sacré, là où la déesse de la victoire (niké) était vénérée. Les
Athéniens protégèrent le temple d'une balustrade de marbre aux
plaques ornées de reliefs : Athéna y recevait l'hommage de
victoires ailées, portant trophées et sacrifices. A gauche, une de
ces victoires dénouant sa sandale : mouvement spontané
souligné par les plis du manteau. A droite, éphèbe portant une
amphore, détail de la frise du Parthenon, par laquelle Phidias fait
revivre la procession des Panathénées.
pour
au-delà des cultes traditionnels. Il tirait sa
signifier les valeurs spirituelles, religieuses
dépasse
ses
limites
force d'un enracinement très ancien dans le
l'architecte a
et politiques les plus élevées ; il devient
sol même de l'Attique, qui le mettait en
comme
l'image visible et éternelle de la divinité, en
communication
ce qu'elle a
divines et démoniaques qui présidaient aux
Korés, c'est-à-dire l'élégante loggia qui fait
saillie au Sud, où des Caryatides sup¬
de
traditionnelles
plus insaisissable et de
transcendant ; ¡mage de l'homme aussi,
dans
la
pleine
acceptation
de
sa
responsabilité et de sa liberté ; image de la
cité enfin dans l'équilibre harmonieux des
forces qui la composent : "ni anarchie, ni
despotisme".
Face au Parthenon, sur le côté Nord de
l'Acropole, se dresse l'Erechthéion.
Bien
que consacré à Athéna Polias, patronne de
la cité, le temple était empreint d'une
signification religieuse telle qu'il se plaçait
avec
toute
les
forces
destinées du citoyen athénien.
Le
xoanon,
"tombé
du
immémorial,
statue
de
bois
d'Athéna,
ciel"
depuis
un
temps
était abrité dans l'ancien
sont
tradition,
la
fameuse
bonheur,
tribune
des
portent l'entablement sans rien perdre de
leur grâce féminine ni de leur charmante
noblesse.
oppose
Les
Perses
avaient
détruit
l'ancien
temple. Il fallait donc le reconstruire avec
une magnificence digne des cultes qu'il
donc
prenante.
vivants
de
Plutarque
une
Devant
grâce
ces
l'art attique
(50-125
discrète,
témoins
à
son
environ),
mais
toujours
apogée,
l'un
des
abritait. Périclès était mort en 421, mais il
derniers Grecs de l'Antiquité à demeurer
est certain que le projet était déjà au point
sensible au passé classique, dira bien des
siècles plus tard, ce que le monde antique
éprouvait face à ces temples (Vie de
Parthenon.
plus à l'écart du
Poséidon^ la tombe d'Erechthée (fils de Gê,
déesse
de
la
représenté
serpent
Périclès, XXVII, trad, de Jacques Amyot ;
voir page 26) :
Il abritait les cultes les plus
vénérables d'Athènes : ceux d'Athéna et de
droites
l'atteste
la
innover avec
attiques primitifs.
Le nouveau temple fut érigé plus au Nord
courbes
respectant
su
A la puissance et à la spendeur doriques
du
Parthenon,
l'Erechthéion
ionique
que le temple détruit,
les
en
temple où l'on célébrait encore les cultes
et l'emplacement choisi.
Quand
Tout
Terre,
protégé
mi-homme,
sacré
;
d'Athéna,
mi-serpent)
la 'tombe
de
et le
Cécrops
"Chacun d'iceux, dès lors qu'il fut
parfait, sentait déjà son antique quant à la
beauté et néanmoins quant à la grâce et
vigueur, il semble jusqu'aujourd'hui qu'il
vienne tout fraîchement d'être fait..."
(fondateur et premier roi d'Athènes, vers
1650 avant notre ère) et des ancêtres du
Manolis Andronicos
peuple athénien.
Ces croquis de la face est du Parthenon
montrent clairement les effets de l'illusion
optique
et
les
compensations
visuelles
On y voyait aussi la trace du coup de
trident de Poséidon, là où, ayant frappé le
rocher, il fit jaillir une source d'eau salée, la"
appliquées par l'architecte.
"mer
1. Le temple tel qu'il apparaît aux yeux du
visiteur ; les lignes semblent parfaitement
horizontales ou verticales bien qu'elles
soient incurvées ou inclinées comme sur le
croquis 3.
erechthéide".
Il
abritait
aussi
les
autels, de Zeus, de Poséidon, d'Héphaistos
(le Vulcain des Latins) ainsi que le très
ancien xoanon d'Hermès.
Enfin,
il
fallait
prévoir
également
de l'olivier sacré et du
2. La même face du temple telle qu'on la
l'emplacement
verrait, si elle avait été construite, comme
sanctuaire de Pandrosos (fille de Cécrops,
sur le croquis 1, dans des lignes parfaite¬
première
ment horizontales et verticales.
enfermait l'autel de Zeus Herkéios.
3. Le
temple
réalité :
les
tel
qu'il
colonnes
est
sont
construit
inclinées
en
vers
prêtresse
d'Athéna),
qui
Malgré toutes ces servitudes culturelles,
l'intérieur, et l'on a calculé que, prolongées,
malgré les différences de niveau du site, le
elles se rejoindraient â 1 500 m du sol ; le
temple qui fut érigé reste le plus original du
soubassement,
et la corniche ont une courbe convexe, pro¬
monde grec. Les solutions adoptées sont
simples mais habiles et l'ensemble tient
duisant l'impression optique du croquis 1.
compte de toutes les exigences.
l'entablement,
l'architrave
23
L'Acropole
ou la passion
de la perfection
par Alexis Diamantopoulos
TRENTE ans après le début de la cam¬
comment un siècle plus tôt, le peuple avait
En 506, ía jeune démocratie athénienne
pagne de Xerxès contre les Grecs,
repris l'Acropole aux tyrans, puis l'avait dis¬
éleva près de l'entrée de l'Acropole, pour
les Athéniens firent la paix avec les
putée au roi Spartiate Cléomène I qui, venu
qu'il soit bien visible, son premier trophée :
cette
prêter main-forte aux tyrans, avait à leur
guerre medique, l'Acropole fut prise d'as¬
place installé un gouvernement à sa solde.
un quadrige de bronze, coulé à partir du
butin pris aux Béotiens et au Chalcidiens
(1), tenants du régime aristocratique à la
Perses.
A
deux
reprises
pendant
saut et incendiée : par Xerxès lui-même en
480 avant notre ère, et, l'année suivante,
parson général Mardonios.
voit aujourd'hui sur l'Acropole d'Athènes
Propylées,
temple d'Athéna
Niké, Erechthéion) débuta à peu près au
moment de l'instauration de la paix entre
les Grecs et les Perses (449).
Périclès, chef du parti démocratique et,
sans conteste, la personnalité la plus mar¬
quante de la vie politique grecque depuis
Thémistocle, proposa à tous les Grecs en
448 de réunir un grand congrès pour déci¬
der en commun la reconstruction des sanc¬
tuaires détruits par l'envahisseur.
Le congrès n'eut jamais lieu et, l'année
suivante, les Athéniens se mirent, seuls, à
la
tâche.
Une
trêve
de trente
ans
entre
Athènes et Sparte allait favoriser la pro¬
gression rapide des travaux.
Reconstruire le temple d'Athéna, le Par¬
thenon, fut la première entreprise. Ensuite
s'édifièrent les Propylées, dont la guerre du
Péloponnèse vint interrompre les travaux
(431).
Enfin les Athéniens entamèrent la
construction du temple d'Athéna Niké (ou
temple de la Victoire Aptère) et de l'Erech¬
théion, bâti à l'emplacement présumé où
s'élevait jadis le palais du
roi mythique
Erechthée, être légendaire, mi-homme, miserpent.
Pour les Athéniens de l'Antiquité, rien de
plus prestigieux que l'Acropole : centre du
culte officiel, forteresse protectrice, lieu où
survivent les traditions les plus' chères ;
c'est l'antique cité, le siège des rois légen¬
daires, des demi-dieux et des êtres étran¬
ges
qui
peuplèrent
l'origine
d'Athènes.
Au 6e siècle, l'Acropole avait été le siège
des "tyrans", Pisistrate et ses successeurs.
Dans la comédie d'Aristophane Lysistrata
(411), les vieillards du chnur rappellent
ALEXIS DIAMANTOPOULOS, spécialiste du théâtre
grec, aussi bien antique que contemporain, est profes¬
seur à l'Ecole dramatique du Théâtre national grec.
Outre sa thèse sur le Prométhée d'Eschyle qui fait auto¬
rité, H a publié de nombreux articles dans le Journal of
helienic Studies aussi bien que dans des revues spécia¬
lisées Irançaises et grecques.
24
le peuple évoque ces
pour la démocratie athénienne : elle venait
La construction des monuments que l'on
(Parthenon,
Dans Lysistrata,
souvenirs avec fierté, à un moment critique
de
subir
Sicile.
le
désastre
de
l'expédition
de
(1) Béotie : contrée de l'ancienne Grèce, avec Thèbes
pour capitale, au nord d'Athènes. Chalcldique : pres¬
qu'île au nord de la Grèce, formant 3 péninsules, dont
celle qui abritera plus tard le mont Athos.
dant plus de trente ans, à partir des gran¬
des victoires grecques et du recul définitif
de l'envahisseur perse, cela prouve assez le
réalisme politique de Thémistocle. Il orga¬
nisa toute la politique économique, exté¬
rieure et militaire d'Athènes en suivant un
même but : étendre le pouvoir de la ville et,
pour ce faire, la transformer en une grande
puissance maritime.
Que l'Acropole ait été
négligée,
cela
prouve aussi l'ambition des jeunes radicaux
du parti démocratique de Périclès. Après
avoir écarté Cimon, chef du parti des oli¬
garques (il avait pourtant, par sa victoire,
sur les Perses aux bords de l'Eurymédon
rivière d'Asie Mineure
en 468, réussi à
faire de la mer Egée un lac athénien) et
s'être emparé du pouvoir dès 462, ils exa¬
cerbèrent l'esprit de conquête et mobilisè¬
rent la cité pendant plus de dix ans, menant
la guerre à la fois contre la Perse et contre
Sparte.
Il fallut attendre que la paix se fasse avec
les Perses (449),
puis avec Sparte (445)
pour que les Athéniens puisent entrepren¬
dre les travaux de reconstruction de l'Acro¬
pole et les mener grand train.
La fameuse oraison funèbre prononcée
par Périclès à la mémoire des morts de la
première année de la guerre du Pélopon¬
nèse, était un véritable acte de foi ;
de
même, mais à un degré encore plus élevé,
le Parthenon est le résultat d'une volonté
LA DEESSE ATHENA était vénérée dans tout le monde grec. Patronne des sciences et des
arts, personnification de la sagesse, elle est habituellement représentée coiffée d'un casque
et ¡armée d'une lance et d'un bouclier. La tête d'Athéna, ci-dessus, est un détail de la
Bataille des Géants qui ornait le fronton de l'ancien temple d'Athéna (vers 525 avant notre
ère) dont ne subsistent plus que les fondations sur l'Acropole. A gauche, la déesse la main
tendue, magnifique statue de bronze découverte en 1959 au Pirée, le port d'Athènes.
passionnée, elle aussi expression d'un acte
de foi. Volonté que l'on rencontre aussi à la
même époque dans le théâtre.
Les monuments de l'Acropole, les gran¬
des pièces jouées dans le théâtre de Diony¬
sos au pied du Rocher, ont souvent été
interprétés comme l'expression artistique
Spartiate et qui avaient, en vain, tenté de
renverser la démocratie athénienne.
Il est significatif que l'inscription commé¬
morant cette victoire en attribue les seuls
mérites
aux
"enfants
d'Athènes",
sans
aucune mention de chef politique ou mili¬
taire. Le fait est absolument exceptionnel
sur ce type de monument. Il prouve la fierté
démocratique du peuple athénien et plus
encore l'amour que vouait ce peuple à
l'Acropole, à sa "ville", comme la nomme
simplement le choeur de Lysistrata.
En 480 déjà, les Athéniens avaient mon¬
tré leur attachement au Rocher sacré. Face
La guerre finie, le premier soin de Thé¬
mistocle, l'artisan de la victoire, fut de forti¬
fier l'Acropole. Ce faisant, il conserva, au
haut des remparts Nord où on peut les voir
aujourd'hui encore, d'importantes ruines
de temples brûlées par les Perses : elles
l'Acropole. Et c'est précisément l'histoire
Les raisons de donner la priorité à l'archi¬
d'Apollon
Pythien,
selon
l'oracle
lequel
le salut
qui permet de mieux comprendre le sens
ses. La Confédération, ou ligue de Délos,
qu'il convient de donner à ces monuments
dont Athènes prit la tête (477 avant notre
de l'Acropole érigés pendant l'Age d'Or : il
ère), de purement défensive qu'elle était à
s'agit en fait de monuments consacrés aux
vaincus tout comme aux vainqueurs.
l'origine, devint vite offensive et expansion¬
Les
rivalités
entre
bientôt
alliés
en
d'hier
se
affrontements
armés.
posée d'hommes âgés mais encore capa¬
bles de soutenir un combat et de causer
quelque dommage à la puissante armée de
Xerxès, s'était enfermée à l'intérieur des
palissades de l'Acropole. Les autres com¬
battants au contraire, avaient suivi Thémis¬
tocle. Celui-ci soutenait, et la majorité le
suivait, que par "murailles de bois" il fallait
entendre la flotte que, sur ses conseils, la
cité s'était
constituée
au
cours
dès
dix
Avant d'embarquer,
prise où s'exprimeraient, mieux qu'autre¬
Par ailleurs, la campagne d'Egypte dura
sept ans et ne permit aux Grecs de repren¬
dre cette opulente province qu'au prix de
très lourds sacrifices. Ensuite, et à la même
époque, Athènes luttait contre Sparte et
ses alliés pour s'assurer l'hégémonie de
toute la Grèce continentale. Pareille activité
les cavaliers, qui
devenaient de simples hoplites (fantassins)
leurs choix.
Vaincus : parce que l'Acropole recons¬
truite, c'est aussi la contrepartie de la
défaite subie lors de cette première et folle
confrontation avec l'Histoire. Défaite qui
survenait après cinquante ans de prépara¬
tifs guerriers et de luttes pour que vivent
l'effort des bâtisseurs porta à cette époque
Athènes et la Grèce tout entière, pour que
sur la fortification de la ville.
soient préservés et étendus les acquis de
sans
conteste,
"Les
Longs
Murs"
qui
transformèrent en. une véritable forteresse
sur les trières (galères à trois rangs de
l'espace triangulaire délimité à l'Ouest par
rames), gravirent le Rocher sacré et, en
l'Acropole, au Nord par Phalère et au Sud
hommage à la déesse, laissèrent sur l'Acro¬
pole mors et rênes de leurs chevaux.
fois, leur liberté politique, leur pensée et
guerrière, et sur tant de fronts, fit que tout
Le plus important de ces ouvrages est,
dernières années.
Vainqueurs : parce que c'est la victoire
qui donna l'indépendance, l'opulence et la
puissance aux Athéniens, dans une entre¬
devait venir de "murailles de bois"
D'après Hérodote, la vieille garde, com¬
tes
entre les guerres contre les Perses et
la "Trêve de trente ans" signée avec Sparte
tecture militaire allaient devenir nombreu¬
niste.
à
Or, cette victoire avait précédé de trente
ans,
toute une génération,
l'explosion
architecturale des monuments érigés sur
de cette génération laborieuse et de ses lut¬
transformèrent
interprétation
peuple après la victoire finale.
devaient servir à maintenir présents les
tous
même
comme l'expression de la fierté de tout ce
sacrilèges de l'envahisseur.
à la menace perse, ils ne donnaient pas
la
d'un peuple arrivé à l'apogée de sa gloire et
par Le Pirée, le port d'Athènes.
Que l'Acropole ait été ainsi négligée pen
cette civilisation.
Ces combats laissèrent, semble-t-il, les
Athéniens
stupéfaits
devant
les
infinies!
perspectives qui s'ouvraient à eux, nou-,
veaux maîtres de la mer Egée, à eux profon¬
dément marqués par le doute et les décep- 1
tions face à tant d'entreprises dont l'issue I
25
était
laissée
Tyché,
à
la
Chance,
discrétion
Hasard,
de
cette
la
seule
nouvelle
déesse de l'aventure, plutôt que contrôlée
par l'expérience et le savoir de l'esprit.
Que pouvaient bien penser les artisans
athéniens, dont la perfection était le but,
des tragiques erreurs commises par les
L'exécution
dans
un
élan
du
Parthenon
passionné
de
fut
menée
perfection,
selon un plan où tout était prévu, jusqu'aux
altérations qu'auraient pu subir les structu¬
ceux, hommes et femmes qui, dans la cité,
partageaient leurs vues
et ils étaient
nombreux
une Odyssée de cauchemar, à une réalité
claire et dure,
loin des trahisons et des
convulsions sanglantes de l'histoire.
Car
ble du soleil.
prospères ; fils des dieux bienheureux, d'un
ils
trouver son inspiration esthétique et intel¬
sagesse : toujours dans l'air le plus resplen¬
de
la
plus
illustre
lectuelle dans la nature de l'Attique baignée
dissant ils vont avec grâce, là où jadis les
saintes Piérides,
les neuf Muses,
furent
enfantées, dit-on, par la blonde Harmonie.
Mais il montre également que cette aven¬
ture historique qui avait entraîné un chan¬
gement radical du mode de vie, ces catas¬
trophes
auxquelles
avaient
conduit
les
résolues dans ce grand élan de l'esprit vers
l'art, dans cet effort acharné dont l'enjeu
phe de Drabescos en 465 avant notre ère,
liser un noble projet, ce projet fût-il la per¬
lorsque
fection.
et
font leur pâture
de la lumière, alors limpide, de son ciel.
était de se prouver qu'il est possible de réa¬
femmes
terroir sacré qui n'a pas connu la conquête,
l'instinct poétique de ce peuple qui sut
Défaites sans gloire, comme la catastro¬
hommes,
¿es Érechthéides de tout temps furent
zon, aux montagnes, dans l'éclat impitoya¬
rêves expansionnistes s'étaient finalement
mille
réellement d'un acte de foi qu'il s'agit, de
l'expression responsable d'un choix, c'est
l'histoire avait enseigné aux Athéniens de
terribles leçons.
dix
Muses.
un vote pour la paix :
le Parthenon c'était le retour
à une Ithaque traditionnelle et solide après
Harmonie et les neuf
trouverait confronté au paysage, à l'hori¬
C'est ainsi que le Parthenon témoigne de
Pour ces artisans lucides et pour tous
nées
Qu'on n'y voie pas une figure de style, c'est
res initiales lorsque l'édifice enfin érigé se
apprentis sorciers de la politique d'expan¬
sion ?
Euripide glorifie simplement le pays où
sont
Aux
belles
ondes
du
Céphise,
Cypris,
comme on le conte, puise, pour les souffler
sur leur pays, des brises légères à la douce
haleine ; une couronne parfumée de roses
toujours posée sur sa chevelure, elle envoie
aux côtés de la Sagesse siéger les Amours,
auxiliaires de toute vertu. Comment donc la
cité des fleuves saints, la terre accueillante
aux amis, t'admettra-t-elle, toi l'infanticide,
toi l'impie, avec les autres ? Songe aux
enfants (nombre énorme par rapport à la
population de l'Attique) partirent fonder
maient alors, et exprimeront toujours, le
tre
une colonie en Thrace où ils se firent pres¬
désir d'en finir avec les délires historiques
genoux, de tout notre pouvoir nous t'en
et les aberrations expansionnistes que stig¬
supplions, ne tue pas tes enfants I
que tous massacrer.
Désastres en Egypte, où les Athéniens
combattirent sans relâche pendant six ans
(460-454). Désastre à Tanagra, en Béotie,
quand ils furent mis en déroute par les
Spartiates et les Béotiens (458), qui n'hési¬
tèrent pas ensuite à élever un insolent tro¬
phée
les
un bouclier d'or
athéniennes,
sur
le
fait des dépouil¬
temple
à
peine
Les
monuments
(447) où tant de volontaires issus des plus
grandes familles athéniennes, où le général
Tolmidis, où Clinias, le pèred'Alcibiade,
hasardeuse,
destinée à étendre l'hégémonie d'Athènes
en s'appropriant des terres fertiles apparte¬
nant aux voisins du Nord.
expri¬
coups portés à tes enfants,songe au meur¬
dont
tu
te
charges.
Non,
par
tes
matise aussi Euripide à la même époque
(Médée, tr.fr. de Louis Méridier, Sté
dans son Hippolyte, en montrant Aphrodite
d'éd. Les Belles Lettres, Paris 1976)
et Thésée divinement courroucés, qui rap¬
pellent à l'obéissance les hommes obstinés
dans la sottise.
De même, chaque détail de la conception
des monuments et de leur relation au pay¬
sage exprime ce choix de paix, d'une vie
L'harmonieuse relation entre le temple et
réglée
par
la
tradition.
On
le
sent
son milieu comporte une leçon d'autant
plus forte qu'elle pénètre la conscience,
d'ailleurs
Désastre à Coronée, en Béotie encore
une tentative
l'Acropole
sans rhétorique et sans emphase.
achevé d'Olympie.
périrent dans
de
remarquable
que
le
Il est
symbole
auquel les adeptes de la politique de puis¬
sance tenaient lé plus, ait été enfermé dans
le secret du temple, sous la forme de la
L'
statue d'or et d'ivoire de la déesse Athéna
en armes.
En voulant, en réussissant cette harmo¬
de
Périclès
nie avec le paysage, les artistes d'Athènes
retrouvaient le chemin de leurs origines, ils
Echec total enfin des relations avec les
retrouvaient la réalité de leur terre. Le Par¬
alliés des îles et des côtes de la Mer Egée.
thenon et les autres monuments de l'Acro¬
Tour à tour, ces alliés dénoncent les traités
pole ramenaient l'Athénien vers un horizon
passés avec Athènes et luttent sans relâche
familier et satisfaisant, son horizon marin
pour reconquérir leur indépendance. Révol¬
que ferment les îles d'Egine et de Salamine,
tes et répressions sanglantes sèment la dis¬
qui l'incitait à comprendre que c'est à de
vue
par
Plutarque
corde et la haine entre les alliés et suscitent
telles limites que tiennent la beauté et la
Buste de Périclès, homme d'Etat et
l'angoisse chez les Athéniens. Ils commen¬
justice.
général athénien du 5e siècle avant
cent à douter de la validité du choix histori¬
que fait à la fin des guerres contre les Per¬
ses lorsque la victoire leur avait ouvert les
voies de l'hégémonie dans toute la Mer
Egée.
notre ère. Le rôle qu'il joua dans la
Sur sa colline, le Parthenon célèbre la
l'Acropole a été décrit par Plutarque,
tre proche de Dionysos, les poètes tragi¬
ques et comiques à leur manière, mais tous
biographe grec du 1er siècle de notre ère.
"sans orgueil ni ivresse".
Sculpter le marbre est un art où, comme
Euripide chante dans sa Médée (en 431,
en politique, la faute ne peut s'effacer.
Pour cette
il y avait à Athènes des
artisans habiles qui, eux, savaient maîtriser
l'année même où éclata la Guerre du Pélo¬
la matière et l'outil et ajuster parfaitement
l' à leurs desseins. Après les dures
ponnèse) le destin unique et les rares vertus
du peuple d'Athènes, et leur chance divine
de vivre sur un tel terroir et sous un tel ciel.
leçons de l'histoire, ces hommes avaient
Nulle mention d'héroïsme ni de vertu guer¬
rière, nulle référence n'y est faite aux
soif de constance et de cohérence.
exploits militaires.
26
construction des monuments de
paix, comme le font, plus bas, sur le théâ¬
aujourd'hui encore face à la frise du Parthe¬
non avec sa procession des Panathénées.
Partant du flanc Ouest du temple, elle
s'avance, par le Nord et par le Sud, vers
l'apothéose de la partie Est où les dieux,
paisiblement assis, reçoivent l'hommage
citoyens d'Athènes. Représentation
des
démocratique tout à fait étrangère à ce que
l'on
peut
voir
ailleurs,
à
Olympie
par
exemple.
Lors des Jeux
A l'intérieur du temple, immense par rap¬
Panathéniens, donnés en
port au plafond de l'édifice et donc d'allure
l'honneur d'Athéna, des
cavaliers émérites, tenus
non-humaine, se dresse l'Athéna d'ivoire et
en haute estime par les
d'or, tout armée, alliée colossale de son
Athéniens, se
peuple.
mesuraient dans des
Dehors, les dieux rivaux d'autrefois, sur
courses de chevaux et
de chars. Toute la
le fronton occidental, sont devenus sur le
noblesse du cheval
fronton oriental (comme ailleurs sur la frise)
s'exprime dans cette
les sujets dociles de la grande mère des
splendide tête de
dieux et des hommes : Gê, la Terre, et ils
marbre, sculptée vers
détournent
490-480 avant notre ère,
l'homme
des
tentations
de
l'orgueil et de la violence.
et conservée au Musée
Alexis Diamantopouloa
de l'Acropole.
IL faut que la cité, suffisamment pourvue des ressources néces¬
saires pour la guerre, consacre le surplus de sa richesse à des
ouvrages qui lui donneront, une fois accomplis, un renom
immortel, et, en s'accomplissant, un bien-être immédiat ; car ils
On dit bien qu'une fois, entendant le peintre Agatharque se
vanter de faire ses figures vite et facilement, Zeuxis répondit : « Et
moi, mes travaux sont de longue durée. » Car la dextérité du faire
exigeront des travaux de toutes sortes et des matériaux variés.
et la rapidité ne donnent pas à une
uvre la solidité, garantie de
conservation, ni la beauté achevée ; le temps consacré à produire
Ranimant
une
ainsi
tous
les
arts
et
mettant
tous
les
bras
en
mouvement, ils procurent un salaire, peu s'en faut, à la ville
entière, qui, du même coup, s'embellit et se nourrit par ses propres
moyens, expliquait Périclès au peuple.
En effet, les citoyens d'âge viril et de constitution robuste
faisaient campagne et touchaient une solde de l'État. Quant à la
masse ouvrière, qui n'était pas enrôlée, Périclès ne voulait ni lui
refuser sa part des deniers publics, ni l'en faire jouir dans l'oisiveté
et l'inertie. Il s'empressa donc de soumettre au peuple de grands
projets de constructions, entreprises qui intéressaient un grand
nombre de métiers et prendraient du temps. De la sorte aussi bien
que les hommes appelés à servir dans la flotte, les forteresses ou
les armées, la population sédentaire avait' un titre à recevoir une
aide de l'État et une part du trésor. Les matériaux de ces travaux
étaient la pierre, le bronze, l'ivoire, l'or, l'ébène, le bois de cyprès ;
les artisans qui façonnaient et mettaient en euvre tout cela étaient
les charpentiers, les modeleurs, les forgerons, les sculpteurs, les
teinturiers, les fondeurs d'or, les tourneurs d'ivoire, les peintres,
laborieuse est un prêt qu'elle nous rembourse en
stabilité. Aussi l'on admire davantage les monuments de Périclès,
puisque, promis à une longue durée, ils se sont faits en peu de
temps. Car chacun fut tout de suite antique par sa beauté, mais
reste jusqu'à nos jours dans la fraîcheur de sa perfection, et semble
de la veille : tant y fleurit une jeunesse qui en préserve l'aspect des
atteintes du temps, comme si un esprit toujours verdissant et une
âme incapable de vieillir ne faisaient qu'un avec ces chefs-d'
Les Propylées de l'Acropole furent faits en cinq ans, sous la
direction de l'architecte Mnésiclès.
Un événement merveilleux,
arrivé pendant leur construction, révéla que la déesse Athéna, loin
de s'en désintéresser, prenait à ceur ce travail et y collaborait. A la
suite d'un faux pas, le plus actif et le plus zélé des ouvriers tomba
du faîte, et il se trouvait dans un état très grave, abandonné des
médecins. Comme Périclès se désespérait, la déesse lui apparut
en songe et lui indiqua un remède, dont il n'eut qu'à se servir pour
opérer là prompte et facile guérison du patient. C'est à cette
occasion qu'il érigea, dit-on, dans l'Acropole la statue de bronze
les émailleurs, les ciseleurs. Il fallait aussi du personnel pour se
d'Athéna Hygie, près de l'autel qu'elle y avait déjà. Phidias faisait la
procurer les matières premières et les convoyer : négociants,
matelots et pilotes sur mer ; et, sur terre, charretiers, nourrisseurs,
cochers, cordiers, tisserands, corroyeurs, terrassiers et carriers ;
chaque art, comme un général, avait sa propre armée, la masse
des mannuvres non spécialisés, outil dont l'âme était le métier.
Ainsi les exigences de l'entreprise dispersaient et répandaient
l'aisance, on peut le dire, sur tous les âges et toutes les aptitudes.
statue d'or de la déesse, et son nom figure à ce titre sur la table de
marbre : mais de plus, presque tous les détails de l'entreprise
dépendaient de lui, et il était à la tête de tous les artistes, grâce à
l'affection que Périclès lui portait...
Plutarque, Vies parallèles, « Périclès ».
Trad. B. Latzarus - Classiques Garnier, Paris
Les monuments s'élevaient donc, superbes par leur grandeur,
inimitables par leur beauté et leur grâce, les artisans se prenant
d'un beau zèle pour l'emporter en perfection ; mais le plus
merveilleux fut la rapidité de l'exécution. Car on aurait cru que
chaque édifice demandait pour être terminé, et à grand-peine, la
succession de plusieurs âges d'homme ; mais tous prirent' leur
forme définitive dans la période d'une seule carrière politique.
27
Nashville (Etats-Unis)
Munich (Rép. féd. d'Allemagne)
Pour copies conformes
Le 19" siècle a connu un véritable engoue¬
et
ment pour l'architecture grecque ancienne.
duites de façon parfaite". Les Propylées de
l'autre
précisément
étudiées
et
repro¬
C'est vers les années 1815-1820 que naît le
Munich
style appelé "néo-grec". Depuis, et jusqu'à
à 1862, vont jusqu'à reproduire le passage
nos jours,
en creux que les constructeurs des Propy¬
lées d'Athènes avaient été obligés d'amé¬
de
très
ont été construits,
nombreux
monuments
notamment en Europe
(photo n° 2),
construites de
1832
et aux Etats-Unis, qui copient et même pas¬
nager, en raison de la pente, pour l'entrée
tichent les modèles athéniens. Cette page
du char des Panathénées. Dans le Walhalla
en donne quelques exemples.
de
A
la
différence
du
"Néo-Classique"
en
faveur au 18e siècle, le style néo-grec s'ap¬
puie souvent sur des données archéologi¬
ques précises. C'est ainsi que le Parthenon
américain de Nashville (photo n° 1), inau¬
guré en
1931,
est la reproduction exacte,
par ses dimensions, du Parthenon athénien.
Le
recensement de
ces
monuments a
été
Ratisbonne (photo n° 3), construit de
1830 à 1842, même les techniques grecques
d'assemblage des pierres ont été ¡mitées.
Certes,
les
Caryatides
de
l'église
Saint-
Pancras à Londres (photo n° 4), celles de la
Faculté de médecine à Paris (photo n° 5)
ou
celles du
Parlement de Vienne (photo
n° 6) sont loin d'approcher la qualité de
leurs antiques
modèles...
mais,
réussi
ou
entrepris par le Français Pierre-Yves Balut,
non, le style néo-grec montre bien toujours,
historien de l'art et professeur à l'Université
selon l'expression de P. Y. Balut, "la péren¬
Paris-Sorbonne. Ce chercheur a remarqué,
nité de cette fascination, de ce mirage que
pour certains d'entre eux, un "retour savant
sont pour l'Occident les temps révolus de
à des techniques et à une esthétique l'une
son enfance".
S Vienne (Autriche)
28
Il
était une fois...
un village à l'ombre
Une marée de toits enserre les
ruines du Parthenon sur cette
-uvre réalisée au début du.
19e siècle par le voyageur anglais
Edward Dodwell. A moitié
des
enfouis, les autres temples de
l'Acropole sont perdus dans un
colonnes
lacis de ruelles. En 1833, un
officiel se plaignait en ces
termes : "Les archéologues
détruiront tous ces pittoresques
ajouts (sur l'Acropole) dans leur
rage à déterrer et restaurer tous
par Jacques Lacarrière
les anciens monuments".
Photo © Agora Excavations, Athènes
NJ^EST-IL pas curieux de penser
néant que les siècles négligés par l'histoire,
simplifier)
que pendant des siècles et des
une sorte de "trou noir" du temps comme
Arméniens, Albanais. Pendant des siècles,
siècles, de la fin du monde anti¬
ceux que les astronomes découvrent dans
ils furent
l'espace ?
contemplateurs
que jusqu'au seuil de l'époque romantique,
l'Acropole fut un lieu totalement inconnu
de l'Occident, absent de nos images, de
nos
rêveries,
de
nos
mémoires,
aussi
étranger à nos vies que les ères d'avant le
Pendant cette longue période d'avant sa
découverte ou sa redécouverte, l'Acropole,
bien
sûr,
n'a
pas
pelait
:
les. seuls occupants,
alors
Château.
Grecs au début puis Turcs,
de
l'Acropole
simplement
le
les seuls
qu'on
Fort
ap¬
ou
le
.
cessé
Regardons à nouveau cette époque, ces
époques
véritablement
d'homme ? Un lieu plus englouti dans le
anciennes,
voyageurs
habitée, affairée, encombrée de maisons,
gravures
qui
nous
\a
montrent,
si
injustement
méconnues
et' qui " nous
racontent cette histoire étrange et oubliée.
Par exemple, celles de Stuart et Revett
JACQUES LACARRIÈRE, écrivain et helléniste fran¬
d'églises puis de mosquées.
deux voyageurs anglais qui séjournèrent en
Déluge ou les cavernes de nos premiers cris
d'être.
çais, a participé aux représentations du Théâtre anti¬
Les
gravures
les
la
récits
des
des
montrent
au
plus vieux
contraire
Là, dans ce fouillis d'histoires, de m
que de la Sorbonne à Epidaure, Delphes, etc., et mis
en scène Grécité de Yannis Ritsos. Il a publié récem¬
et de façades, si différent de la nudité et de
ment l'Été grec aux éditions Pion, Paris 1975. Traduc¬
la
teur du grec ancien et moderne, il a fait connaître des
poètes et des écrivains de la Grèce contemporaine
comme Georges Séféris (Prix Nobel de
1963), Vassili Vassilikos, l'auteur de Z, etc.
littérature
clarté
se
Un flot de maisons, des méandres de
promener, vivre, flâner, aimer peut-être,
ruelles, des jardins d'oliviers et de mimosas
une
occupent
foule
d'aujourd'hui,
d'habitants,
d'Acropolitains
on
tout
(appelons-les
voit
Grèce de 1751 à 1753 et virent l'Acropole en
son état ancien.
un
peuple
ainsi
pour
tout
le site,
des
Propylées
à w
l'arrière du Parthenon, enserrant ce dernier r
29
dans un réseau de façades et de branches.
A l'intérieur du temple, on voit briller les
coupoles
d'une
mosquée
turque
qui
l'occupera pendant longtemps et ne sera
démolie qu'en 1842.
Plus loin, dans une
autre gravure, l'Erechthéion derrière lequel
on distingue une grande maison et une
cour ponctuée d'un cyprès.
Le
vieux
temple
Aujourd'hui, les nouveaux Acropolitains
ombres et des lumières dans la lueur de ce
se nomment les touristes. L'archéologie est
qui naît ou de ce qui s'efface, on croit
devenue
entendre une voix vous murmurer : "Qui
ici
lieu
de
nouvelle
foi,
et
les
archéologues les nouveaux célébrants de
m'a édifié à l'aube de l'Occident, encensé
ce culte laïque. Mais après tant de siècles
au
zénith de la
raison,
protégé au
crépuscule de mes dieux ?" L'homme. Et
obscurs
et
profanes,
je
ne
peux
m'empêcher de penser à l'étrange destin de
pas seulement l'homme grec mais par lui,
ce lieu. Car depuis qu'il a surgi
avec
un
semble
notre
siècle
dans
la
il y a juste
conscience
occidentale, depuis qu'il est devenu
ou
méditation : un Acropolitain assis sous son
redevenu après vingt cinq siècles d'oubli
portique (dont la hauteur est presque la
le lieu même où naquit la raison, le voici
moitié de sa hauteur actuelle en raison du
déjà menacé.
lui,
l'homme
et
l'homme
ont pu, ont su cohabiter sur ce rocher qui
ne sera jamais un rocher comme les autres.
Le monument que de tout temps j'ai
préféré sur l'Acropole est,
niveau du sol) regarde le ciel en rêvant
Tant qu'il fut ville, bazar ou forteresse,
tandis
qu'à
ses
côtés
des
hommes
enturbannés, des enfants et des chiens se
lieu de méditation, débris encore vivants et
petit
refuges des religions, il continua au ralenti
Athéna Niké.
promènent comme sur la place et dans les
sa vie marmoréenne et villageoise.
ruelles d'un village.
d'Orient
d'Occident qui, pendant les siècles oubliés,
en sa
partie
ouest, face à la mer et au soleil couchant, le
temple
d'Athéna
Victorieuse
ou
Il y avait à l'intérieur une vieille statue en
Devenu lieu des cultes modernes de la
bois de la déesse, taillée dans un tronc
culture, il nous propose le message à
nouveau transparent de ses siècles, l'éclat
d'olivier, représentée debout, offrant dans
tard lorsque Dodwell, un autre voyageur
anglais auteur d'un remarquable ouvrage
patiné de ses marbres, la pureté d'un sol
statue,
Views
qui a retrouvé par les fouilles et les déblais
plus aujourd'hui, pas plus qu'elle n'existait
au temps des Acropolitains.
Même
impression
in
Greece
l'Acropole
dans
cinquante
from
plus
drawings,
années
peint
le
xoanon,
n'existe
évidemment
Les
la virginité du rocher primordial (sur lequel
à l'automne poussent ici et là les taches
Mais je vois en elle le plus clair et le plus
des courettes ombragées d'oliviers, de fins
jaunes des camomilles, car il y a des fleurs
durable symbole de la nécessaire pérennité
cyprès.
sur l'Acropole pour qui sait les trouver)
grand
1805.
sa main droite un fruit : une grenade. Cette
maisons y sont entourées de murs abritant
Un
les
ans
bâtiment
jouxte
le
Parthenon sur son flanc nord : caserne ou
mais
entrepôt
l'excès de ses foules modernes.
?
Des
beys
et
des
bergers
conversent et paressent sous la lumière
blanche, brisée par l'éclat rouge des tuiles
des maisons.
N'en doutons pas : c'est un village
non un temple, un lieu saint, un haut-lieu
un
vrai
village que
le
peintre
nous
montre, avec ses heures de turbulence et
il
Entre
tumulte,
propose
ce
aussi
long silence
l'insouciance
et
et ce .soudain
le temps des cultes anciens et
de ce lieu et de ce rocher : cette Victoire
issue
d'un
l'éternité
tronc
le
Cela aussipar
des
plus
d'olivier
proposant
éphémère
d'homme,
de
leur
vieille
:
l'Acropole continue de nous poser la même
cela aussi appartient à tous.
question que le Sphinx à Oedipe. Que nous
la regardions à l'aube, en plein midi, au
crépuscule,
que nous lisions le jeu des
Jacques Lacarriire
ces
colonnes presque enfouies, ces visages et
ces
torses
de
marbre
sur.
lesquels
conversent parfois les Acropolitains.
Bien d'autres pèlerins ont vu et décrit
cette Acropole muée en village oriental, en
forteresse improvisée, en bazar encombré
de marbres et de statues. De leurs récits,
de
leurs
gravures
émane
une
même
impression à la fois rassurante et triste :
l'Acropole
n'est
pendant tous
pas
morte
ces siècles
à
l'histoire
obscurs
puis¬
qu'elle a survécu humblement, puisqu'elle
fut tour à tour village, fort, château, bazar,
ruelles et jardins, que le Parthenon fut ruine
abandonnée, puis église de la Vierge puis
mosquée turque. Puisqu'une vie quotidien¬
ne,
d'abord
grecque
puis turque,
chré¬
tienne puis musulmane a continué sur le
Rocher Sacré des anciens Grecs,
sur le
Château des Byzantins et des Grecs de
l'Indépendance.
Je me dis qu'au fond cette vie séculaire à
la fois profane et religieuse fut peut-être
conforme à l'antique vocation de ce lieu, à
l'Acropole profane et religieuse du temps
de
Périclès,
parcourue
par
les
foules,
jonchée
d'autels
et
de
trophées,
encombrée de statues. Elle a poursuivi à sa
façon, nourri même indirectement l'âme de
ce lieu puisqu'on a continué d'y adorer des
dieux ou un dieu.
Ce sont les hasards de la guerre qui
détruisirent et firent sauter une partie du
Parthenon.
grecs
et
Beys
albanais,
et
bergers,
marchands
villageois
turcs
et
devins arméniens, le peuple acropolitain ne
Au début du 20e siècle, l'artiste hongrois Csontvary s'est servi de
l'Acropole comme décor d'arrière-plan pour peindre la promenade
fut pour rien dans ce désastre.
en calèche de ces élégantes d'Athènes.
30
geste
d'offrande, de certitude et de lumière
Ultime trace
présence
ce
ceux de la culture moderne, il semble que
marché ou son bazar. Ici, les dieux anciens
pourtant
à
fruits.
ce symbole, cet olivier enté
mains
de repos, ses cris d'animaux, peut-être son
sont morts inéluctablement.
des
Aristote
un
de
architecte
la pensée moderne
il y a 2300 ans
par Constantin Despotopoulos
Aristote est né en Chalcidique, dans la
ans, qu'il passa dans cet entourage inspiré,
petite ville de Stagire en 384 avant notre
aux côtés de Platon et de ses illustres amis.
ère.
Il , passa son enfance à
Pella,
Macédoine, où son père, Nicomaque était
médecin du roi Amyntas II. Orphelin de
sans défaillance, d'études, de recherche et
DE tous les penseurs de toutes les
époques,
Aristote est celui dont
l'
exerça,
directement
ou
indirectement, la plus grande influence sur
la
philosophie
et
sur
la
pensée
des
hommes, en Europe, puis sur tout le pour¬
tour
de
la
Méditerranée
et,
finalement,
dans tous les pays qui se réclament de la
bonne heure, il partit à 17 ans (367)
compléter ses études à Athènes, centre de
la civilisation grecque à l'époque.
culture occidentale.
Il
métaphysique
mieux
à
la
qu'elle
nature
de
acquérir
une
grande
discours,
son zèle,
esprit, la
surtout,
durant lesquels il se distingua par
son intelligence, l'audace de son
rigueur de sa dialectique et qui,
lui permirent de se former une
personnalité originale.
le
humain.
économiques et culturels. Il devait surtout
la direction de l'Académie. Aristote jugeant
y
alors qu'il n'avait plus rien à faire au sein de
s'accordait
l'esprit
y
de discussions fécondes, d'écriture et de
expérience de la réalité sociale de son
temps et de ses phénomènes politiques,
Marx admirait Aristote. Bergson disait de
sa
devait
Vingt ans de réflexion et d'application
Depuis des siècles, philologues, philoso¬
goûter
le
fameux
"discours
attique"
Platon disparu, Speusippe lui succéda à
phes et historiens se penchent sur l'puvre
aristotélicienne et leurs études, déjà bien
amertume, pour Assos, petite ville de la
nombreuses, continuent à se succéder.
Troade, en Asie Mineure où, avec l'aide de
Car
cette
Nuvre
est
complexe.
cette institution, quitta Athènes, non sans
quelques disciples, platoniciens, il fonda sa
Elle
première Ecole, annexe, en quelque sorte,
représente l'une des étapes essentielles de
la pensée grecque, à laquelle elle donne
de l'Académie, et y poursuivit ses travaux.
une dimension scientifique nouvelle. Elle
Trois ans plus tard, il quitte Assos pour
façonne et détermine à la fois les
problèmes, les concepts et les principes de
la philosophie ultérieure ; elle explore, voire
Mytilène, dans l'île de Lesbos où, en
compagnie de Théophraste, natif du lieu, il
se livre pendant deux ans à des recherches
biologiques,
ainsi qu'à
une
réflexion
approfondie sur diverses questions.
même élabore, de nombreuses branches de
la
science,
organise
en
système
philosophique les règles de la morale et du
droit et, finalement, pose les bases de la
Puis, répondant en 342 à l'invitation du
roi
réflexion politique.
de
Macédoine
Philippe
II,
il
quitte
Mytilène pour s'installer à Pella où il est
rayonnement sur la civilisation occidentale
chargé de l'éducation du jeune héritier du
trône, celui-là même qui allait devenir
fut
apparaît
Alexandre le Grand, mais qui n'avait alors
aujourd'hui, après tant de siècles, comme
que:13 ans. Absorbé par ses fonctions de
Oeuvre
immense
considérable
et
donc,
qui
nous
dont
le
un bienfait, une fortune intellectuelle dont
précepteur (342-340),
nous sommes les bénéficiaires.
entièrement à ses recherches qu'à partir
Cette
quvre
fut
pourtant
il
ne se consacre
de 340.
conçue
progressivement, avec des difficultés mais
Mais c'est en 335 que commence
aussi avec une grande cohérence, par un
phase essentielle de la vie d'Aristote. Il
décide alors de revenir à Athènes et d'y
homme doué de génie certes, mais aussi un
travailleur infatigable, ballotté de bonheurs
en malheurs, de deuils en amertume une
Buste d'Aristote, au Musée
fonder sa
propre école
du Capitole, Rome.
Lycée.
le
dirigera
qu'il
appelle
le
douze
ans,
se
distinguant par ses qualités de penseur et
de maître à penser, de chercheur mais aussi
vie profondément humaine, ponctuée de
réelles amitiés,
Il
la
marquée par la fréquen¬
tation du plus grand des philosophes,
Platon, éclairée par l'estime et la collabo¬
auquel s'adonnaient à l'excès rhéteurs et
d'organisateur méthodique d'équipes de
professeurs
recherche scientifique.
ration de disciples d'élite.
embrassait
CONSTANTIN DESPOTOPOULOS, spécialiste de la
philosophie d'Aristote et de Platon, est professeur à
l'Ecole des Sciences politiques Pantéios d'Athènes.
Il a consacré de nombreuses études et plusieurs ouvra¬
de
toutes
rhétorique,
les
mais
connaissances
qui
et
Surtout, et parallèlement à son enseigne¬
tous les jugements portés à l'époque sur les
ment,
valeurs humaines.
auxquels il donne cette forme définitive
il complète ses immenses travaux
L'Académie, cette école de philosophie
qui, déterminant les principes de la pensée
fondée par Platon, fonctionnait alors à
Athènes, sous la direction provisoire, en
spirituels de l'humanité pour les siècles à
l'absence de Platon retenu en Sicile,
du
ges aux philosophes de la Grèce ancienne. Citons,
en langue française. Etudes sur la Liberté, éditions
philosophe et astronome Eudoxe de Cnide.
Marcel Rivière, Paris 1974.
Aristote s'y inscrivit. Il devait y rester vingt
humaine, devait faire de lui l'un des maîtres
venir.
Un violent mouvement anti-macédonien k
éclata à Athènes en 323 avant notre ère et f
31
v.,1
> Aristote fit naturellement l'objet de persé¬
cutions. Tant et si bien que, confiant à
Théophraste la direction du
garde de ses
manuscrits,
Lycée et la
il
dut quitter
l'Attique pour Chalcis, patrie de sa mère. Il
y mourut quelques mois plus tard, dans
VT,
C'est dans sa Politique
qu'Aristote développa le
premier l'idée que la
Y
surpopulation entraînait
pauvreté, troubles
sociaux, délinquance, etc.
t
Vingt-quatre siècles plus
l'amertume et la solitude de l'exil, en 322
tard, les conseils du
avant notre ère (1).
philosophe grec (contrôler
le développement
L'.uvre
d'Aristote
est
considérable.
démographique pour
Les ouvrages qui nous sont parvenus et
parvenir à un
qui ne représentent que le quart de l'nuvre
développement
équilibré) commencent
complète du philosophe, traitent des diffé¬
rentes branches de la connaissance : logi¬
que,
physique,
biologie,
n
à peine â être entendus.
»
'
i
Í '
-
/,-
ft
métaphysique,
morale, politique, psychologie, etc.
Plus qu'à toute autre science, c'est à la
fondation de la Logique qu'a contribué
l'uuvre d'Aristote. Explorant à fond les dif¬
'&£,
férentes découvertes faites en ce domaine
par les philosophes grecs qui l'avaient pré¬
7
cédé, il les compléta, les précisa, en incor¬
*
pora la substance aux siennes pour créer
1 T
un
!
système
cohérent
et
véritablement
scientifique.
"A
.<
!&'
#1
C'est ainsi que naquit la Logique, qui
s'imposer au cours des siècles
devait
Pour être aujourd'hui moins estimée que
sa Logique, la Physique d'Aristote n'en est
pas moins de grande valeur. Elle a pour
objet ies êtres "naturels" c'est-à-dire ceux
qui ont en eux le principe du mouvement,
soit qu'ils se déplacent dans l'espace, soit
qu'ils croissent ou décroissent, soit enfin
qu'ils se modifient. De tels êtres sont les
animaux, les plantes et les corps simples
comme la terre et l'air, le feu et l'eau.
C'est à partir de ces quatre éléments
qu'Aristote
explique
les
transformations
que subissent les corps naturels et corrupti¬
bles sans pour autant supposer de stricts
rapports de causalité. Aristote n'identifie
d'ailleurs pas la nature à la matière, mais
tient celle-là pour "inspirée et d'essence
divine".
Afin de bâtir sa Physique sur une base
théorique solide, Aristote étudia avec une
rigueur de raisonnement souvent mathé¬
Autre préoccupation d'aujourd'hui qu'abordait déjà Aristote dans sa
Politique au 4e siècle avant notre ère : l'éducation pour tous. Il insistait
d'ailleurs sur le fait que tout programme d'éducation devait apprendre
le continu, le mouvement, la puissance et,
aux citoyens comment utiliser leurs loisirs, car, selon lui, un État sans
autour de ces concepts, il élabora d'auda¬
matique, l'infini, l'espace, le vide, le temps,
loisirs risquerait de s'effondrer. Ci-dessus, athlètes sur un vase grec.
cieuses théories, entre autres celle qui se
rapporte au temps
théories qui devaient
bien plus tard influencer la pensée d'aussi
comme
l'un
des
trésors
spirituels
de
recouvre
pas
la
totalité
de
la
fonction
selon l'expression du philosophe allemand
cognitive. Il savait que la connaissance des
concepts premiers, à partir desquels sont
Emmanuel Kant.
formés les jugements, est le résultat d'une
La Logique d'Aristote a pour objet la
pensée humaine, non seulement lorsqu'elle
s'exerce au niveau le plus élaboré, mais
activité directe de la fonction cognitive.
l'humanité.
"Science close et achevée",
encore sous sa forme quotidienne dépour¬
vue de rigueur. Elle se divise en deux par¬
ties : l'Analytique, la plus importante, et la
Dialectique.
grands
savants
et
philosophes
que
Newton, Husserl ou Bergson.
N'avait-il d'ailleurs pas envisagé la possi¬
bilité que la terre soit ronde ? On pense
même que c'est la lecture d'un des passa¬
raisonnement pour étudier les problèmes
ges de la Physique qui encouragea Christo¬
phe Colomb à chercher la route des Indes,
philosophiques et scientifiques, il a égale¬
en naviguant vers l'Ouest.
Aristote d'ailleurs ne se sert pas du seul
ment recours à l'observation, la classifica¬
tion,
l'analogie
et
aussi
la
méthode
historico-discursive.
L'Analytique traite principalement du rai¬
La contribution d'Aristote à la Biologie
n'est pas moindre. Nombre de savants ont
exprimé leur admiration : Darwin disait de
Lorsqu'il étudie un problème philosophi¬
Linné que, comparé à Aristote, il n'était
que son élève. C'est que le philosophe grec
ces au développement des sciences exac¬
que, il commence de préférence par
l'analyse du sens des mots, puis il procède
tes. Sans \Analytique d'Aristote, Euclide
à
et fit preuve en outre de connaissances
n'aurait pu construire sa géométrie avec
sujet, exposant même les opinions contrai¬
d'anatomie
tant de cohérence et de clarté.
res aux siennes propres.
gie ; il exposa des doctrines de physiologie
sonnement et de la preuve : sur le plan de la
méthode, elle a rendu d'inestimables servi¬
"Père
de
la
Logique",
Aristote
l'analyse des difficultés inhérentes au
(1) A l'occasion du 23' centenaire de la mort d'Aristote,
Il avait conscience de ce que le raisonne¬
le gouvernement grec envisage d'organiser en 1978 un
Congrès mondial sur "Aristote et la pensée contempo¬
ment
raine".
32
et donc la pensée discursive
ne
comparée
et
d'embryolo¬
et introduisit pour la première fois la notion
sut
cependant éviter les excès du "logicisme".
catalogua plus de 500 espèces d'animaux,
d'organisme.
Créant le concept à'enté/échie (être ou
réalité à l'état d'achèvement ou de perfec-
Les principes essentiels de cette morale
tion), ¡I donna de la genèse de la vie une
interprétation téléologique (1). Pour lui,
l'âme est principe de vie. Elle modèle l'orga¬
sont le bien,
le
bonheur,
nisme des êtres vivants et le conserve, elle
arbitre de l'homme.
la vertu
et la
faculté de choix qui présuppose le libreLe bonheur se définit
profonde influence sur la littérature et la cri¬
tique littéraire.
Aristote
comme
conçoit
une
la
création
imitation
de
la
artistique
"forme"
de
engendre et dirige les mouvements et les
"l'activité de l'âme selon la vertu",
sensations, mais aussi la volonté et l'éner¬
activité liée à la liberté, mais dépendant des
sons, des mouvements ou des mots.
gie spirituelle de l'homme.
conditions individuelles déterminées par les
surtout,
circonstances de la vie de chaque homme.
catharsis
Les théories juridiques d'Aristote exercè¬
rent une influence durable tant sur les juris¬
expression fameuse qui devait faire couler
C'est ainsi qu'il distingue une âme nutri¬
tive dans les plantes, une âme sensible qui
s'ajoute à l'âme nutritive chez les animaux,
et une âme pensante qui s'ajoute aux deux
autres chez les hommes.
tes romains que médiévaux et modernes.
Cela est vrai en particulier du Droit distribu¬
te ou correctif, du Contrat, de la Récirîro-
Mais en psychologie également Aristote
fut un précurseur. On trouve déjà chez lui
des théories qui apparurent par la suite
cité et de l'Equité. La théorie d'Aristote sur
la famille a, elle aussi, profondément mar¬
La politique d'Aristote pose en principe
que "tout homme est un animal politique".
Il
présente la société politique non plus
Notons que les concepts de la psycholo¬
gie aristotélicienne sont les suivants : les
passions, les facultés ou dispositions, la
sensation, l'appétit, l'intelligence, le désir
et la volonté.
création
artificielle
mais
comme
émanant de la nature humaine. Le critère
suprême des sociétés étant pour lui l'intérêt
commun des citoyens, Aristote fait coïnci¬
der société politique et réalisation de la jus¬
tice, qui seule différencie les "bonnes" des
Pour constituer sa Morale, Aristote com¬
mença par la critique des croyances popu¬
laires et des doctrines professées par les
sages de la Grèce, qu'il adapta à ses pro-11
près
conceptions
psychologiques
et
métaphysiques, en se livrant à une explora¬
tion philosophique des actions pratiques de
l'homme.
y
définit
"mauvaises" sociétés.
tragédie
(purification)
des
Et
comme
passions,
beaucoup d'encre.
Cependant,
l'iuvre
maîtresse
d'Aris¬
tote, sa Métaphysique, pose le problème
de l'Etre, source d'inépuisable perplexité
pour l'homme.
comme celle du Moyen Age, et servir de
support
à
la
pensée
et
l'enseignement
catholiques. C'est à Aristote que nous
devons
ces
concepts
primordiaux de
"forme
et
matière",
ou
de
"virtuel"
et
"réel", le premier pour exprimer la nature
composite
de
chaque
être
existant,
le
deuxième pour rendre compte de la transi¬
tion de chaque être vers son actualisation.
La théorie de la politique d'Aristote se
Aristote, dans sa Métaphysique, traite de
répandit en Europe occidentale à partir du
conçue comme art du possible, la sépara¬
problèmes eschatologiques tels que la
génération et la corruption des êtres natu¬
rels, par opposition à l'éternité du monde,
de la cause première et du principe de
l'existence du monde, de même que du fait
tion des pouvoirs, les constitutions, la riva¬
fondamental de la conscience, que Descar¬
lité entre pauvres et riches, sont des con¬
tes allait formuler, tant de siècles plus tard,
haut Moyen Age et en pénétra toute l'idéo¬
logie politique. Ainsi, l'Etat, la loi, les régi¬
mes politiques, les citoyens, la politique
cepts que l'on trouve déjà chez Aristote.
Ce qui par ailleurs a été sauvé de son Art
par son Cogito, ergo sum (je pense, donc je
suis).
Poétique exerce depuis la Renaissance une
(1) Téologie : étude des fins, de la causalité.
la
avec des variantes, la philosophie arabe,
chez Kant et chez Fichte, chez les fonda¬
comme
il
Cette nuvre fondamentale allait nourrir,
qué moralistes et juristes.
teurs de la psychologie des formes et de la
psychologie associative.
l'objet par des signes, des couleurs, des
Constantin Despotopoulos
l'Asie, de l'Afrique ou de l'Amérique du Sud
Nos
semble difficile à restreindre. Pourtant dans
certaines- de ces mêmes régions qui connais''
sent un fort ensoleillement, l'utilisation
directe du soleil pourrait remplacer celle du
lecteurs
bois, grâce à des réflecteurs paraboliques
appropriés.
On
pourrait
les
fabriquer
en
grande série, peut-être en duralumin pour
en diminuer l'épaisseur. Distribués dans les
pays où la pénurie de bois est sensible, cela
nous
compenserait largement, malgré le prix de
revient, les inconvénients de la destruction
des arbres.
L. Paillard
écrivent
Vertus, France
L'article
d'Erik
Eckholm
paru
dans
votre
numéro sur les déserts (juillet 1977) traitait
. "400"
RUBENS EN TIMBRES
anniversaire , de
Rubens".
Le
numéro
du
Courrier de ¡'Unesco
célé¬
La
série a
série de timbres a été émise en hommage
à
naissance
réalisée par
de
G.
Komlev et la reproduction photographique
L.V. Vassiliev
Société philatélique
de l'URSS, Moscou
des
"Alliance de l'eau avec la terre", les "Voi-
forcenée du bois ne laisse, en effet, pas
d'être inquiétante et malgré mes 86 ans, je
pense qu'il faut préparer l'avenir. Indépen¬
damment de l'utilisation du bois pour faire
de la pâte à papier, son usage pour le
chauffage dans des régions pauvres de
et
cinq
timbres
turiers", "Chasse au lion", "L'Arc en ciel"
et "Portrait de Dame" (photo). Sur la plan¬
che : un autoportrait de Rubens avec, à gau¬
che, un détail de "La statue de Cérès". En
bas,
un
cartouche
contient
l'inscription :
breuses
régions du
monde,
mais que je
sache, il n'y a pas pénurie d'ensoleillement.
6olaire ?
Cela
semble
aujourd'hui
techni¬
réaliser, il permettrait aux forêts de renaître,
vés au Musée de l'Ermitage de Leningrad :
planche
pénurie dé bois de chauffage dans de nom¬
quement possible. Et si ce projet pouvait se
reproduisant des tableaux de Rubens conser¬
une
Il a
régions des cuisinières alimentées à l'énergie
ENERGIE, SOLEIL ET DESERTS
Dans le Courrier de ¡'Unesco de juillet 1977,
consacré à l'avance des déserts j'ai surtout
été intéressé par l'article intitulé le Pétrole
comprend
par les plus pauvres, par ceux qui utilisent
du bois pour se chauffer et cuisiner.
Pourquoi donc, ne pas introduire dans ces
Rubens par le ministère des postes et
télécommunications de l'URSS. Cette série
de la crise de l'énergie telle qu'elle est vécue
fortement retenu mon attention. Il y a certes
est due à A. Riazantsev.
brant le 400e anniversaire de Rubens (juin
1977) aurait pu être une providence pour
les philatélistes si vous aviez accordé plus
d'importance à la rubrique philatélique
(page 18). Il serait intéressant de signaler
aux lecteurs du Courrier de l'Unesco qu'une
la
été
Pauvres
d'Erik
Eckholm.
L'utilisation
mais surtout, il épargnerait aux pauvres du
tiers monde l'épuisante et pitoyable quête de
bois de chauffage. Je pense, enfin, que toute
notion de profit découlant de cette intro¬
duction devrait être écartée du projet. Alors
comme le disait le prophète Isaïe : "La
lumière surgira des ténèbres et les ténèbres
envahiront le milieu du jour."
Sean O'Cadhla
Corcaigh, Irlande
33
L-gnir?
eg
E
(Ü
russe sont en préparation. Pour tous renseigne¬
ments, prière de s'adresser à la Division de la
LECTURES
Presse
et
de
l'information
audio-visuelle,
Unesco, 7 place de Fontenoy, 75700 Paris.
L'art grec
par K. Papaioannou
J. Bousquet et autres
Unesco et patrimoine
Ed. d'art Lucien Mazenod
culturel
Editio, Paris 1972
Une nouvelle médaille consacrée à l'Acropole
- Athènes au fil du temps
vient d'être frappée par l'Unesco simultanément
> par Jean Travlos
en France et en Suisse. En vue de soutenir la col¬
Atlas historique
lecte des fonds nécessaires à la sauvegarde des
d'urbanisme et d'architecture
Ed. Joël Cuénot
Boulogne 1972
Introduction
à la pédagogie
par Gaston M¡alaret
Presses Universitaires
de France. Paris 1977
La peinture
en Thaïlande
Calendrier Unesco
par Jean Boisselier
photos de Hans Hinz
L'Unesco prépare pour l'année 1978 un grand
monuments et des sites relevant du patrimoine
calendrier (40 x 36 cm) présentant douze vues de
l'Acropole ou d'duvres d'art la concernant. Le
culturel de l'humanité, l'Unesco fait frapper une
série de médailles représentant ces monuments
Livre, Fribourg, 1976
bénéfice de la vente de ce calendrier, édité par
et sites menacés de destruction et que l'Organi¬
L'eau qu'est-ce que c'est ?
Siebdruck Süd,
sation s'efforce de sauver grâce à une action
par René Colas
Coll. "Papa dis-moi"
d'Allemagne), sera versé au programme de
l'Unesco pour la préservation du patrimoine cul¬
dirigée par le Palais
turel de l'humanité.
de la Découverte
Rédigé en plusieurs langues, le calendrier sera
disponible dès octobre 1977. Les renseigne¬
Ed. Bibliothèque des Arts,
Paris et Office du
Ed. Ophrys, Paris 1977
Pour tous les livres ci-dessus s'adresser à
son libraire habituel.
Ne pas passer commande à l'Unesco.
Leonberg-Eltingen
(Rép. féd.
menée sur le plan international. La maquette de
la médaille consacrée à l'Acropole a été créée par
R. et S. Santucci, Paris, et présente sur l'avers
ments concernant prix et points de vente peu¬
vent être demandés au Service philatélique de
l'Unesco, 7, place de Fontenoy, 75700 Paris.
une vue d'ensemble de l'Acropole, et au revers
une Caryatide.
Plusieurs établissements (ban¬
ques, caisses d'épargnes, marchands, etc.) dans
un grand nombre de pays membres de l'Unesco,
participent à la diffusion de ces médailles. D'or,
d'argent ou de bronze, elles peuvent être livrées
avec ou sans bélière et portées comme bijoux.
PUBLICATIONS UNESCO
Film Unesco sur les
Pour tous renseignements, prière de s'adresser
arts africains
au Service philatélique de l'Unesco, 7 place de
Fontenoy, 75700 Paris.
La science et la technologie
dans le développement
des Etats arabes
"Etudes et documents
La télévision nigériane et l'Unesco viennent de
consacrer un film 16 mm couleurs au Deuxième
festival
mondial
des
arts
négro-africalns
de
de politique scientifique"
Lagos (15 janvier-12 février 1977). Ecrit et réalisé
Unesco, Paris 1977. 333 pages
par Philip Gaunt, le film montre des danses, des
Les techniques de groupe
dans la formation
"Etudes et documents
d'éducation" N° 24
pièces de théâtre, de la musique, etc., présentés
prière de s'adresser à la Division de la Presse et
L'éducation en Afrique
Conférence de Lagos (1976)
Unies, 1976, le produit national brut pour 1975 a
de Fontenoy, 75700 Paris.
eu une croissance nulle par rapport à celui de
1974.
Découverte préhistorique
Unesco, Paris 1977. 59 pages
Le 9 juillet 1977 l'université Ca'Foscari de
Venise a
en Sibérie
attribué le
titre
de
5
Docteur honoris
I
causa à M. Amadou-Mahtar M'Bow, Directeur
"Etudes et documents
d'éducation", N° 25
D'après l'Annuaire statistique des Nations
de l'information audio-visuelle, Unesco, 7, place '
Unesco, Paris 1977. 53 pages
à la lumière de la
En bref...
lors du Festival. Pour d'autres renseignements,
Un bébé mammouth a récemment été découvert
sous le permafrost (terre gelée) de Sibérie, où il
avait été parfaitement conservé depuis plus de
général de /'Unesco.
9. Selon les chiffres cités lors du Colloque des
L'innovation dans
10 000 ans. Le mammouth, forme éteinte d'élé¬
organisations non-gouvernementales réuni au
l'enseignement des sciences :
phant, a vécu il y a 2 500 000 à 10 000 ans ;
synthèse mondiale
c'était un gibier apprécié par les hommes des
siège de l'Unesco à Paris en juin dernier, le
monde a consacré en 1975 plus de 25 milliards de
par Albert V. Baez
cavernes. D'après le Dr Kartachov de l'Institut
Unesco^ Paris 1977. 279 pages
des Sciences géologiques de Leningrad, le bébé
L'intégration de l'enseignement
sera étudié et conservé.
mammouth a été transporté à Leningrad où il
dollars pour la recherche militaire, crédits six fois
S
plus élevés que ceux de la recherche médicale.
De plus la recherche militaire a employé 40 pour
cent de l'ensemble du personnel scientifique.
technique et professionnel
La Suisse a contribué en service d'experts
à l'éducation spéciale
Autriche, Colombie,
Sauver l'Acropole
un projet d'irrigation et d'installation d'une cen¬
Iran, Tunisie
Unesco, Paris 1977. 227 pages
"Sauver l'Acropole", tel est le titre d'un film
Pensée et valeurs
Unesco, 16 mm en couleurs, qui évoque les réali¬
sations de la Grèce de l'Age d'Or (5" siècle avant
notre ère). Il explique pourquoi l'Acropole doit
de l'Islam
pour un montant équivalent à 100 000 dollars à
dans Cultures, vol. IV, N° 1, 1977
être sauvée des menaces qui pèsent tant sur les
Les Presses de l'Unesco
monuments qui la couvrent que sur le Rocher
trale hydro-électrique dans le nord de la Thaï¬
lande. Le projet est mis en
parlé Comité
Metong, organisation intergouvernementale affi¬
liée à la Commission économique et sociale pour
l'Asie et le Pacifique.
et la Bâconnière, 1977
lui-même.
d'une durée de 27 minu¬
L 'Organisation Pan-américaine, de Santé fête
Abonnement annuel : 75 F
tes, a été conçu et réalisé par Jehangir
Bhownagary ; il existe en langues française et
anglaise. Les versions allemande, espagnole et
cette année son 75' anniversaire. C'est la plus
Le fascicule ; 22 F
34
Ce film,
ancienne institution destinée à établir la coopéra¬
tion internationale en matière de santé.
<
o
o
NOUVEAUX PRIX
DU
"COURRIER
DE
L'UNESCO"
\ Prix d'abonnement applicables à partir du 1er janvier 1978
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DÉCEMBRE 1977
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1 an :
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sant directement à l'agent général (voir liste ci-
LITEXSA,
dessous). Vous pouvez vous procurer, sur simple
demande, les noms des agents généraux non
inclus dans la liste. Les paiements des abonne¬
ments peuvent être effectués auprès de chaque
agent de vente qui est à mâme de communiquer
le montant du, prix de l'abonnement en monnaie-
ALBANIE.
N.
Sh.
Botimeve
Nairn
Freshen,
Tirana.
ALGÉRIE. Institut pédagogique national, 11, rue Ali Haddad,
Alger, Société nationale d'édition et de diffusion ISN ED), 3, bd
Zirout Youcef, Alger. - RÉP. FED. D'ALLEMAGNE. Unesco
Kurier (Édition allemande seulement : Colmanstrasse, 22,
5300 Bonn.
Pour les cartes scientifiques seulement :
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:
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München
Dokumentation,
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Ludwigshöhe).
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Possenbacher
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2,
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Roldana.
S.A.
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Castello
Técnica
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3,
37,
Sevilla
Madrid
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Tuset,
4.
D.F.
1.
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(Edificio Monitor) Barcelona. Mundi-Prensa Libros, S.A., Cas¬
talio 37, Madrid 1.
- ÉTATS-UNIS. Unipub. Box 433,
Murray Hill Station/ New York, N. Y. 10016. - FINLANDE.
Akateeminen
Kirjakauppa,
Keskuskatu
1,
00100
Helsin¬
ki 10.
FRANCE.
Librairie Unesco, 7-9,
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Fontenoy, 75700 Paris. C.C.P. 12.598.48.
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HAÏTI. Librairie A la Cara¬
velle, 26 , rue Roux,
locale.
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AI - Andalus.
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Port-au-Prince.
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MOZAMBIQUE.
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MONACO.
Monte-Carlos.
Instituto Nacional do livro e do Disco
(INLD), Avenida 24 de Julho, 1921 r/c e 1« andar, MA¬
PUTO. - NIGER. Librairie Mauclert, B.P. 868, Niamey.
NORVÈGE.
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le « Courrier » seulement : A. S. Narvesens, Litteraturtjeneste
Box 6125 Oslo 6. - NOUVELLE-CALÉPONIE. Reorex
S.A.R.L., B.P. 1572, Nouméa. - PARAGUAY. Agencia de
diarios y revistas, Sra. Nelly de Garcia Astillero, Pte.
VOLTA. Lib. Attie B.P. 64, Ouagadougou. - Librairie
Catholique « Jeunesse d'Afrique ». Ouagadougou.
HONGRIE. Akadémiai Konyvesbolt, Váci U. 22, Budapest
V.A.K.V. Konyvtárosok Boltja. Népkoztarsasag utja 16,
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Budapest VI.
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Marg. Ballard Estate. Bombay 400 038 ; 17 Chittaranjan
Avenue, Calcutta 13 ; 36a Anna Salai, Mount Road, Madras 2.
B-3/7 Asaf Ali Road, Nouvelle-Delhi 1, 80/1 Mahatma
Gandhi Road, Bangalore-560001, 3-5-820 Hyderguda, Hyderabad-500001. Publications Section, Ministry of Education and
Social Welfare, 511, C-Wing, Shastn Bhavan, Nouvelle-Delhi110001 ; Oxford Book and Stationery Co., 17 Park Street,
Martinus Nijhoff, Lange Voorhout 9, 's-Gravenhage.
POLOGNE. ORPAN-Import. Palac kultury i Nauki, Varsovie,
Calcutta 700016;
Scindia
House,
Nouvelle-Delhi
110001.
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Ruysdaelstraat 71-75. Amsterdam-1007. Agent pour les autres
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Varsovie.
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Lisbonne.
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7,
00-901
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Livrane
ROUMANIE.
ILEXIM. Romlibri, Str. Biserica Amzei N° 5-7, P.O.B. 134135, Bucarest. Abonnements aux pénodiques : Rompresfilatelia
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Victorieinri
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Bucarest.
-
ROYAUME-UNI.
H. M.
Univer. of Téhéran P.O. Box 14/486, Téhéran. - IRLANDE.
Stationery Office P.O. Box 569, Londres S.E. 1. - SÉNɬ
GAL. La Maison du Livre, 13, av. Roume, B.P. 20-60,
Dakar, Librairie Clairafnque, B.P. 2005, Dakar, Librairie « Le
Sénégal » B.P. 1954, Dakar. - SEYCHELLES. Seychelles
National Commission for Unesco P.O. Box 48 Mahé, Republic
BELGIQUE. Ag. pour les publications de l'Unesco et
pour l'édition française du "Courrier" : Jean de Lannoy,
112, rue du Trône, Bruxelles 5. CCP 000-0070823-13. Edition
The Educational Co. of Ir. LTD., Ballymont Road Walkinstown,
of Seychelles.
Dublin 12.
néerlandaise seulement : N.V. Handelmaatschappij Keesing,
Keesinglaan 2-18, 21000 Deurne-Antwerpen. - REP. POP.
DU BENIN. Librairie nationale, B.P. 294. Porto Novo.
Street, Tel-Aviv ; 9 Shlomzion Hamalka Street, Jérusajem.
Fritzes Kungl. Hovbokhandel, Fredsgatan, 2, Box 16356,
103-27 Stockholm, 16. Pour le Ç Courrier » seulement :
Europa Verlag, 5, Ramistrasse, Zurich. C.C.P. 80-23383.
Librairie Payot, 6, rue Grenus, 1211, Genève 11, C.C.P: 12.236.
BRÉSIL. Fundación Getúlio Vargas, Servicio de Publicacöes,
JAPON.
Caixa postal 21120. Praia de Botafogo. 188 Rio de Janeiro ;
Tokyo
G.b.
BULGARIE. Hemus, Kantora Literatura, DO Housky6,
Sofia. - CAMEROUN. Le Secrétaire général de la Commis¬
Frères ; B.P. 656, Beyrouth. - LUXEMBOURG. Librairie
Paul
Brück,
22,
Grand-Rue,
Luxembourg.
MADAGASCAR. Toutes les publications
Commission
nationale de la RéD. dém. de Madagascar pour l'Unesco,
ALLEMANDE. Buchhaus Leipzig. Postfach
Internationale Buchhandlungen, en R.D.A.
140. Leipzig.
AUTRICHE.
Dr Franz Hain, Verlags- und Kommissionouchhandlung, mdustriehof Stadlan, D' Otto Neurath - Gasse, 1220 Vienne.
sion
nationale
de
la
République
unie
du
Cameroun
pour
l'Unesco, B.P. N° 1600, Yaounde. - CANADA. Renouf Pu¬
IRAN.
Commission
Iranchahr Chomali
nationale
N° 300,
iranienne
B.P.
1533,
pour l'Unesco,
Téhéran,
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Kharazmie
Publishing and Distribution Co. 139 Shah Reza Ave. Opposite to
ISRAËL. Emanuel Brown, formerly Blumstein's
Book-stores
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ITALIE. Licosa (Librería Commissionaria Sansoni, S.p.A.)
via Lamarmora, 45, Casella Postale 55?, 50121
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blishing Co. Ltd, 2182 St. Catherine Street West, Montreal,
Ave MJM IM7. - CHILI. Bibliocentro Ltda., Casillo 13/J1
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Librairie « Aux belles images », 282, avenue Mohammed-V,
Rabat, C.C.P. 68-74. « Courrier de l'Unesco » : pour les
:ONGO. Librairie populaire, B.P. 577. Brazzaville.
CÔTE-
D'IVOIRE. Centre d'édition et de diffusion africaines.
B.P.
4541. Abidjan-Plateau. - DANEMARK. Ejnar Munksgaard
Ltd., 6, Nörregade, 1165 Copenhague K. - EGYPTE (RÉP.
ARABE D'). National Centre for Unesco Publications, N" 1,
Talaat Harb Street, Tahrir Square. Le Caire.
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Sr. A. González
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Donaire, Aptdo
ESPAGNE.
Ondárroa
(Viscayal ;
de Correos 341, La
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l'Education
nationale,
Librairie populaire du Mali,
membres
du
marocaine
(C.C.P.
corps
pour
324-45).
enseignant
l'Unesco
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Tananarive.
B.P. 28,
20,
:
MAROC.
Commission
Zenkat
MARTINIQUE.
MALI.
Bamako.
nationale
Mourabitine,
Librairie
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Rabat
Boul'
SUÈDE. Toutes les publications : A/B CE.
SYRIE. Librairie Sayegh Immeuble Diab, rue du Parlement,
B.P. 704, Dames. - TCHÉCOSLOVAQUIE. S.N.T.L., Spalena
51, Prague 1 (Exposition permanente) ; Zahranicni Literatura, 11
Soukenicka, Prague 1. Pour la Slovaquie seulement : Alfa
Verlag publishers,
HurDanovo nam. 6, 893 31
TOGO.
Êvangélique,
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B.P.
378,
Bratislava.
Lomé ;
Librairie
du Bon Pasteur, B.P. 1164, Lomé , Librairie Moderne,
B.P. 777, Lomé. - TUNISIE. Société tunisienne de diffusion,
5, avenue de Carthage, Tunis. - TURQUIE. Librairie Hachette,
469 Istiklal Caddesi ; Beyoglu, Istanbul. - U.R.S.S. Mejdunarodnaya Kniga, Moscou, G -200.
URUGUAY. Editorial
Losada Uruguaya, S.A. Librería Losada, Maldonado, 1092,
Colonia 1340, Montevideo. - YOUGOSLAVIE. Jugoslovenska
Knjiga, Terazije 27, Belgrade. Drzavna Zalozba Slovenije,
Mich », 1, rue Perrinon, et 66, av. du Parquet, 972,
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Bourbon Street ; Port-Louis. - MEXIQUE. SABSA, Servicios
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P.O.B.
50,
Ljubljana.
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a Bibliotecas, S.A., Insurgentes Sur N° 1032-401, México 12,
l'Unesco,
Ministère de l'Éducation
RÉP.
DU ZAIRE.
La librairie. Institut national d'études politiques,
B.P. 2307,
Rép. du Zaïre pour
nationale,
Kinshasa.
:<
Des centaines de millions de pas (1,5 million
de touristes) martèlent chaque année le sol
du Rocher sacré (photo ci-dessus) et
détériorent inexorablement les fondations
de l'Acropole. A cela s'ajoutent les
déprédations des marbres de l'Acropole,
dues à la pollution de l'atmosphère. Ainsi,
les Caryatides qui supportent le toit de
l'Erechthéion sont à ce point rongées qu'il
a été envisagé de les remplacer, du
moins provisoirement, par des moulages.
A gauche, une Caryatide en cours de
fabrication, au stade expérimental. Elle est
faite d'un mélange de ciment, de sable et
de poudre de marbre.
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