L’enfant borderline en devenir : validation préliminaire de l’Échelle des traits de personnalité limite pour enfants Miguel M. Terradas, Ph.D., psychologue Professeur Département de psychologie Université de Sherbrooke 18 février 2016 Institut universitaire de première ligne en santé et services sociaux Plan de la présentation Présentation d’un cas clinique : Jonathan Personnalité saine versus trouble de la personnalité Bref rappel de la définition et des critères diagnostiques du Trouble de personnalité limite (TPL) Le diagnostic de TPL chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé Notion de l’enfant borderline en devenir Une vision alternative : l’évaluation des traits de personnalité associés au trouble de personnalité limite L’Échelle des traits de personnalité limite pour enfants : résultats de la première étude de validation et recherches à venir ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan Jonathan, âgé de 9 ans, est référé à la clinique par le psychologue scolaire. Il aurait une tendance à l’agir et des comportements violents envers ses pairs. Il est très méfiant et réagit impulsivement quand il se sent contrarié par ses camarades de classe. Lors des entrevues d’anamnèse, le psychologue constate des difficultés importantes chez les parents. Monsieur avoue avoir une importante dépendance à l’alcool. Madame se dit très impulsive et avoir une humeur variable. Les deux parents semblent se reconnaître dans les difficultés que présente Jonathan. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Les parents se seraient séparés lorsque Jonathan avait 4 ans. Les deux années particulièrement précédant difficiles : les la séparation parents se ont été disputaient fréquemment et Jonathan était témoin de leur agressivité, souvent verbale, quelquefois physique. Il a fallu faire trois entrevues d’anamnèse afin de compléter l’histoire développementale de l’enfant. Les parents étaient souvent en désaccord entre eux et avaient tendance à déborder dans leurs explications. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Lors de la première rencontre d’évaluation, il a été très difficile pour Jonathan d’être seul dans la salle de thérapie avec le psychologue. L’enfant semblait triste et fâché. Il ne voulait pas être présent et avançait n’avoir rien à dire. Il refusait de parler, de jouer ou de dessiner. Lors de la deuxième séance d’évaluation, Jonathan était très fâché. Il a crié et quitté la salle de thérapie de façon très colérique. Il a accepté toutefois de revenir dans la salle vers la fin de la rencontre. Il s’est montré sociable et a fait une construction avec des lego. Cependant, il n’a pas accepté de parler de sa réaction de colère. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Lors de la troisième rencontre d’évaluation, Jonathan entre dans la salle de thérapie sans difficulté. Il est capable de partager avec le psychologue des événements tant positifs que négatifs qu’il a vécu à l’école. Le psychologue constate cependant que lorsque Jonathan raconte un évènement survenu durant la semaine, il emploie un ton de voix et des gestes physiques comme s’il était toujours dans la situation problématique. Il est envahi par son émotion et mime certains comportements qu’il aurait effectué plutôt que de les expliquer verbalement. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Quand le psychologue lui pose des questions afin de mieux comprendre ce qui lui est arrivé (une chicane avec un collègue qui s’est transformée en un épisode d’agressivité physique), Jonathan manifeste une attitude défensive, dit que le psychologue ne le croit pas et lui crie : C’est pour ça que je ne veux pas venir te voir ! Tu penses que c’est moi qui l’a frappé en premier, que c’est ma faute ! Jonathan sort en courant de la salle de thérapie. Il n’accepte pas de revenir dans la salle. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Lors de la quatrième séance d’évaluation, Jonathan entre dans la salle de thérapie sans difficulté. Il est de très bonne humeur et dit au psychologue qu’il avait hâte à la rencontre. Il reproduit ensuite avec les lego des structures et des personnages qu’il connaît déjà. L’enfant semble avoir de la difficulté à créer un scénario et à imaginer des histoires avec ces personnages. Lorsque le psychologue tente d’induire un jeu imaginaire, Jonathan n’arrive pas à ajouter des éléments au récit ou à imaginer des actions, des sentiments ou des pensées aux personnages. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Bien que Jonathan semble frustré par les questions du psychologue, il lui répond avec un sourire plutôt plaqué. Il dit à son père à la sortie de la salle de thérapie qu’il aime venir voir le psychologue et qu’il a déjà hâte à la prochaine rencontre. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Présentation d’un cas clinique : Jonathan (suite) Commentaires, idées, réflexions et hypothèses sur Jonathan et ses difficultés ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Personnalité saine vs trouble de personnalité ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Personnalité saine vs trouble de personnalité (PDM Task Force, 2006) La personnalité saine se définit selon les critères suivants : Capacité à s’engager dans des relations interpersonnelles satisfaisantes Capacité à expérimenter un vaste spectre de pensées et d’émotions en fonction du niveau de développement atteint ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Personnalité saine vs trouble de personnalité (PDM Task Force, 2006) La personnalité saine se définit selon les critères suivants : Capacité à se montrer flexible face à des situations de stress internes et externes Flexibilité : Capacité d’utiliser différents points de vue afin d’évaluer une situation problématique et de se servir de diverses stratégies pour la résoudre Identité personnelle stable et bien définie Capacité d’adaptation aux circonstances environnantes ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Personnalité saine vs trouble de personnalité (PDM Task Force, 2006) Alors que le trouble de personnalité se définit plutôt ainsi : Façon rigide de répondre aux situations de stress (p. ex., utiliser une seule stratégie pour faire face aux différentes sources de détresse, sans tenir compte de leur nature) Difficultés significatives au plan de l ’ identité, des relations interpersonnelles, de l’épreuve de réalité, de l’adaptation au stress, du fonctionnement moral et de la régulation des affects Ces difficultés se manifestent principalement à travers les traits de personnalité ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Définition du trouble de personnalité limite tel qu’il se manifeste chez les adultes (DSM-5, 2013) Mode général d ’ instabilité des relations interpersonnelles, de l’image de soi et des affects avec une impulsivité marquée, qui apparaît au début de l’âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme témoignent au moins cinq des manifestations suivantes : ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Critères Critères diagnostiques diagnostiques du du trouble trouble de de personnalité personnalité limite limite tel tel qu’il se manifeste les adultes qu’il sechez manifeste chez les adultes (DSM-5, 2013) Efforts effrénés pour éviter les abandons réels ou imaginés Relations interpersonnelles instables et intenses caractérisées par l’alternance entre des positions extrêmes d’idéalisation et de dévalorisation Perturbation de l’identité : instabilité marquée de l’image ou de la notion de soi ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Critères Critères diagnostiques diagnostiques du du trouble trouble de de personnalité personnalité limite limite tel tel qu’il se manifeste les adultes (suite) qu’il se manifeste chez chez les adultes (suite) (DSM-5, 2013) Impulsivité se manifestant dans au moins deux domaines potentiellement dommageables pour le sujet : finances, sexualité, conduite automobile, alimentation… Répétition d’automutilations, de comportements, gestes ou menaces suicidaires Instabilité affective due à une réactivité marquée de l’humeur (p. ex., dépression épisodique intense, irritabilité) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Critères Critères diagnostiques diagnostiques du du trouble trouble de de personnalité personnalité limite limite tel tel qu’il se manifeste chez les adultes qu’il se manifeste chez les adultes (suite) (suite) (DSM-5, 2013) Sentiment chronique de vide Colères intenses ou inadéquates; difficulté à contrôler la colère Survenue transitoire, dans des situations de stress, d’idées persécutrices ou de symptômes dissociatifs sévères ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Enfin, selon le DSM-IV-TR (APA, 2003) et le DSM-5 (APA, 2013), le diagnostic d’un trouble de personnalité ne doit être effectué avant l’âge de 18 ans que si les caractéristiques ont été présentes depuis au moins un an (Exception : trouble de personnalité antisociale). ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Il n’existe pas de consensus quant à la responsabilité éthique du clinicien qui observe cette manifestation clinique (Dubé, Terradas, Arsenault, Lallier Beaudoin, & Pesant, 2013; p. 36) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Quelques constats issus de la recherche sur le TPL chez l’enfant et l’adolescent… Les connaissances scientifiques concernant le TPL chez l’enfant et l’adolescent proviennent d’études rétrospectives (Links, Boiago, Huxley, Steiner, & Mitton, 1999). L’évaluation diagnostique du TPL chez l’enfant et l’adolescent s’appuie sur le système catégoriel proposé par le DSM-IV-TR, c.-à-d. sur des critères utilisés pour établir le diagnostic chez les adultes (Crick, Murray-Close, & Woods, 2005). ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Quelques constats… (suite) La plupart des études concernant le développement du TPL chez l’enfant et l’adolescent se basent sur des populations cliniques et non sur la population générale. On note une prépondérance marquée de garçons dans la population clinique d’enfants et d’adolescents… … alors qu’environ 70 % des personnes présentant un TPL à l’âge adulte sont des femmes (75 % selon le DSM-5; APA, 2013). (Guzder, Paris, Zelkowitz, & Marchesault, 1996; Gunderson, Zanarini, & Kiesel, 1991) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Quelques constats… (suite) Nécessité de… réaliser des études longitudinales faire des évaluations diagnostiques dimensionnelles tenir compte des aspects développementaux considérer les éléments sous-cliniques n’étant pas pathologiques en bas âge, mais pouvant le devenir à l’âge adulte (précurseurs) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Les changements annoncés par le DSM (Rationale for the proposed changes to the personality disorders classification in DSM-5; APA, 2012) Modèle hybride, de nature à la fois dimensionnelle et catégorielle, de la personnalité. Les cliniciens seraient alors en mesure de décrire la personnalité du patient, qu’il ait un TP ou non, en se basant sur l’altération du fonctionnement de la personnalité et sur la présence des traits de personnalité pathologiques. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Les changements annoncés par le DSM… (Rationale for the proposed changes to the personality disorders classification in DSM-5; APA, 2012) Il serait ainsi possible d’identifier des caractéristiques chez les enfants et les adolescents (moins de 18 ans), sans pour autant porter un diagnostic de TPL, si le niveau de fonctionnement et les traits de personnalité ne s’inscrivent pas dans un processus de développement normal. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Les changements proposés par le DSM-5 (APA, 2013) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Modèle dimensionnel proposé par le DSM-5 (APA, 2013) Fonctionnement de la personnalité déficitaire ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité chez l’enfant et l’adolescent : un diagnostic controversé (suite) Modèle dimensionnel proposé par le DSM-5 (APA, 2013) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) L’enfant est submergé, au sein de sa famille, par toutes sortes d ’ expériences traumatisantes qui encombrent l ’ appareil psychique (trauma relationnel précoce ou trauma au sein de la relation d’attachement; Allen, 2005). Ces expériences entraînent chez l’enfant des déficits développementaux importants. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) L’enfant présente des déficits développementaux significatifs à plusieurs niveaux : Il ne développerait pas de confiance en la personne qui lui procure des soins Exacerbation du stress et non soulagement. Son environnement plutôt chaotique et imprévisible ne lui permettrait pas de développer la fonction d’anticipation de l’anxiété En l’absence de soulagement de l’anxiété, toute difficulté deviendrait une source importante de détresse. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) Déficits développementaux significatifs à plusieurs niveaux : L’enfant ne serait pas en mesure d’associer la satisfaction des besoins physiques et émotifs à une personne spécifique de son entourage lui permettant de créer un patron de fonctionnement au plan relationnel. Constitution d ’ un pattern de satisfaction des besoins : lorsqu’il y a satisfaction inconstante ou insatisfaction des besoins, l ’ enfant doit composer avec un excès de stimulations internes pouvant devenir traumatiques. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) Déficits développementaux significatifs à plusieurs niveaux : Déficit au plan de la gestion de l’agressivité : Le manque d ’ intégration des expériences positives (reliées aux manifestations d’amour provenant des figures d’attachement) et négatives (associées à la colère manifestée par les mêmes figures d’attachement) de soimême et de l’autre ne favorise pas la modulation de la colère. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) Déficits développementaux significatifs à plusieurs niveaux : L’absence d’un patron de satisfaction des besoins se traduit par l’utilisation répétitive et rigide de mécanismes de défense partiellement efficaces. L’expérience de relations interpersonnelles insatisfaisantes laisse l’enfant avec l’impression d’être mauvais et donc responsable des comportements imprévisibles de ses principales figures d’attachement et affecte son estime de soi. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) L’enfant fonctionne dans un mode de survie, avec des mécanismes de défense déficitaires : Lutte contre l’annihilation psychique. Répétition de patterns de comportement qui sont inefficaces et qui affectent les étapes du développement subséquentes. Mécanismes de défenses prédominants : Clivage, pensée magique, grandiosité, identification pathologique et destructrice à l’agresseur-aimé et retrait schizoïde dans un monde de fantaisie dépourvu d’affect. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Notion de l’enfant borderline en devenir (Borderline-child-to-be; Pine, 1986) (suite) En conclusion… sans proposer l’établissement d’un diagnostic en bas âge, le modèle de Pine suggère la présence d’une continuité des traits inadaptés vers un TPL à l’âge adulte. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Facteurs de risque du TPL recueillis auprès d’une population clinique adulte et de façon rétrospective Attachement préoccupé (Patrick, Hobson, Castle, Howard, & Maugham, 1994; Fonagy et al., 1996) Difficultés au plan de la capacité de mentalisation (Bateman & Fonagy, 2006) Certaines personnes présentant un TPL ont une sensibilité à l’état d ’ esprit de l ’ autre, mais ils l ’ utilisent souvent dans le but de manipuler et de contrôler l’autre. Les personnes présentant un TPB ne sont pas aveugles quant à l ’ état d ’ esprit de l ’ autre (mind blind), mais ils n ’ en sont pas conscients (mind conscious). Ils sont capables de capter des signaux qui influencent les comportements des autres, mais ils ne sont pas capables de les utiliser dans un but relationnel. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Facteurs de risque du TPL recueillis d’une Uneauprès vision alternative : l’évaluation traits adulte de personnalité associés au populationdes clinique et de façon trouble de personnalité limite rétrospective Les abus sexuels et physiques, la négligence, les séparations multiples et les troubles des parents (Bradley et al., 2005; Goldman, et al., 1992; Guzder, Paris, Zelkowitz, & Marchessault, 1996; Guzder et al., 1999; Herman, Perry, & van der Kolk, 1989; Kernberg, 1990; Links, Steiner, & Huxley, 1988; Paris, 2000; Rogosch & Cicchetti, 2005; Shachnow et al., 1997; Zanarini & Frankenburg, 1997; Zanarini, Gunderson, Marino, Schwartz, & Frankenburg, 1989) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Une vision alternative : l’évaluation des traits de personnalité associés au trouble de personnalité limite En considérant ces facteurs étiologiques, il est possible de supposer que les premières manifestations de traits de personnalité pathologiques surgissent pendant l’enfance, à la même époque que les traumas. Ainsi, certains patrons de comportements s’approchant du TPL pourraient être identifiés pendant l’enfance et se révéler des précurseurs du trouble à l’âge adulte (Dubé et al., 2013). ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Une vision alternative : l’évaluation des traits de personnalité associés au trouble de personnalité limite (suite) Une proposition intéressante… Borderline Personality Features Scale for Children (BPFS-C; Crick, Murray-Close, & Woods, 2005) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (Crick, Murray-Close, & Woods, 2005) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Échelle de mesure dimensionnelle permettant d’identifier des traits de personnalité limite chez les enfants de 9 ans et plus, issus d’une population non clinique. Selon les auteurs, les enfants de 9 ans présentent des traits de personnalité plus ou moins stables et un sens de l’identité suffisamment développé. Par conséquent, ils sont en mesure de reconnaître et de rendre compte de leurs propres patrons de comportement. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) Une échelle composée de 24 énoncés distribués en 4 sous-échelles Traits de personnalité et comportements associés au TPL ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Modèle théorique basé sur certaines tâches reliées à différents acquis développementaux ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Sensibilité cognitive Perception hostile et persécutrice de l’entourage Centré sur l’information négative Méfiant à l’égard des intentions des autres; distorsion des intentions des autres Acquis développementaux : reconnaître que les autres peuvent avoir des perspectives différentes d ’ un même événement, identifier la nature de ces perspectives ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Sensibilité émotionnelle Affects intenses, instables et souvent inappropriés au contexte Expérimente les émotions de façon intense Réagit de manière imprévisible Présente une labilité affective Acquis développementaux : tolérer l ’ ambigüité qui caractérise l ’expression des affects, réguler les émotions, tenir compte du contexte dans lequel les affects sont exprimés ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Relation d’exclusivité avec les amis Relations interpersonnelles de dépendance très intenses Manifeste une peur d’être abandonné Doute constamment de l ’ amour et du soutien de ses proches Acquis développemental : capacité d ’ établir et de maintenir des relations d’amitié significatives ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Impulsivité Agressivité physique et relationnelle Incapable de réguler les émotions, de contrôler les manifestations d ’ agressivité et d ’ inhiber son propre comportement Acquis développementaux : régulation du comportement, internalisation des stratégies internalisation des normes sociales ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) de contrôle du self, Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Sens cohérent de l’identité Manquant Acquis développemental : intégration de l’identité ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Propriétés psychométriques Étude de la validité et de la fidélité effectuée auprès de 400 enfants (54 % de filles) de quatrième, cinquième et sixième année d’une école primaire régulière (Crick et al., 2005) Stabilité temporelle de l’instrument et des traits de personnalité limite Validité de construit : correspondance avec des indicateurs théoriques du TPL adaptés à la période développementale de l'enfance (Geiger & Crick, 2001) et dérivant d’une analyse de contenu des critères diagnostiques du DSM-IV (APA, 1994). ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Borderline Personality Features Scale for Children (suite) (BPFS-C; Crick et al., 2005) Propriétés psychométriques (Crick et al., 2005) Spécificité de la mesure : administration d'un instrument mesurant la présence des symptômes dépressifs. Conclusion : les indicateurs mesurés par le BPFS-C sont significativement associés aux traits caractéristiques du TPL et non à d’autres psychopathologies. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (Arsenault, Dubé, Terradas, Lallier Baudoin, & Pesant, 2012; Dubé, Terradas, & Arsenault, 2015) Traduction française, selon traduction/retraduction, du BPFS-C la méthode de (Terradas & Achim, 2012; d’après la version originale du BPFS-C, Crick et al., 2005) Participants : 328 enfants québécois, âgés entre 9 et 12 ans, en quatrième, cinquième et sixième année du primaire en cheminement régulier. Parmi ceux-ci : 262 sont francophones 23 sont anglophones 43 sont bilingues ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Procédure Les questionnaires ont été administrés en classe et complétés individuellement par les enfants : Les enfants francophones ont complété l’ÉTPLE. Les enfants anglophones ont complété le BPFS-C. Les enfants bilingues ont complété les deux versions de l’instrument, avec une semaine d’intervalle. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Résultats Structure factorielle ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Le contrôle des impulsions regroupe des énoncés relatifs à la perte de contrôle, à l’impulsivité et aux comportements autodestructeurs. Exemples : 7. Je fais des choses sans penser avant de les faire. 17. Quand je suis fâché(e), je ne peux pas contrôler ce que je fais. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Les relations interpersonnelles négatives réfèrent à la durabilité des relations et à l’agressivité relationnelle. Exemples : 10. J’ai déjà choisi des amis qui m’ont maltraité(e). 13. Les gens qui étaient proches de moi m’ont laissé(e) tomber. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) La régulation des émotions est en lien avec le caractère changeant et intense des émotions, de même qu’avec la peur d’être abandonné. Exemples : 8. Mes sentiments sont très forts. Quand je suis en colère, je suis vraiment très très en colère. Quand je suis heureux(se), je suis vraiment très très heureux(se). 14.Je passe souvent d’un sentiment à un autre, comme être fâché(e), puis triste ou heureux(se). ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Le sentiment de vide regroupe des énoncés portant sur l’ennui, la solitude et l’expérience d’un vide intérieur. Exemples : 9. Je sens qu’il me manque quelque chose d’important, mais je ne sais pas quoi. 22.Je m’ennuie souvent très facilement. ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Résultats Corrélations entre les deux versions : Corrélations inter-énoncés significatives (0,45 < r < 0,85) Corrélation entre les sous-échelles significatives (0,67 < r < 0,83) Corrélation des scores totaux (r = 0,84) Toutes ces corrélations sont significatives à p < 0,001 Cohérence interne : α ÉTPLE = 0,87 α BPFS-C = 0,86 ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Échelle des traits de personnalité limite pour enfants (suite) Nouvelle étude de validation Validité convergente et divergente Fidélité test-retest Validité de construit de groupes contrastes (enfants issus de la population générale et hébergés en centres jeunesse) Calcul du pourcentage de la variance dû à la traduction de l’instrument (administration des versions anglaise et française à des enfants bilingues avec deux semaines d’intervalle) Établissement des normes de comparaison ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Références Allen, J. G. (2005). Coping with trauma: Hope through understanding (2nd Ed.), Washington: American Psychiatry Publishing, Inc. American Psychiatric Association (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (5th ed.). Washington, DC: American Psychiatry Publishing. American Psychatric Association (2012). Rationale for the proposed changes to the personality disorders classification in DSM-5. 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(2016) Trouble de personnalité limite chez l’enfant et l’adolescent : Caractéristiques cliniques (Sharp & Romero, 2007) (suite) Impulsivité pouvant aller jusqu’à l ’ automutilation (p. ex., fugues, vols, abus de substance, promiscuité sexuelle, troubles des conduites alimentaires) Instabilité affective Labilité affective (changements brusques d ’ humeur de l’euthymie à la dépression, à l’anxiété ou à l’irritabilité; p. ex., attaque d’anxiété au début de l’après-midi, suivie d’une participation avec succès à un match de soccer) ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité limite chez l’enfant et l’adolescent : Caractéristiques cliniques (Sharp & Romero, 2007) (suite) Difficulté au niveau de la gestion de l’agressivité Accès de colère intenses et inadéquats Manque de contrôle de l’agressivité (p. ex., agressivité physique) Menaces et gestes suicidaires récurrents ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016) Trouble de personnalité limite chez l’enfant et l’adolescent : Caractéristiques cliniques (Sharp & Romero, 2007) (suite) Distorsion de la réalité Perturbation significative et persistante au niveau de la perception de soi Confusion au niveau de l’identité de genre, des rôles sexuels, de l’image corporelle, des comportements socialement acceptés, des plans de carrière (p. ex., se proposer comme président de la classe alors qu’on n’a pas d’amis) Effort significatif pour éviter l’abandon réel ou imaginaire, ou préoccupation excessive au sujet de l’abandon Sentiment chronique de vide ©Terradas, M. M., & Dubé, G. (2016)