G. Emery / SA 2010 / Cours : Dieu Trinité I (résumé) Textes 8
III.1 Des formules de foi du Nouveau Testament aux symboles de foi des Pères
A. Formules christologiques et trinitaires
Les formules kérygmatiques du Nouveau Testament concernent la foi au Christ Jésus. De telles
formules kérygmatiques, dont le contenu est essentiellement christologique (voir le résumé de la
section II du cours), se retrouvent bien sûr chez les Pères de l’âge post-apostolique. Un bon exemple de
ces formules kérygmatiques christologiques est fourni par le texte suivant de saint Ignace d’Antioche :
« Soyez donc sourds quand on vous parle d’autre chose que de Jésus-Christ, de la race de
David, né de Marie, qui est véritablement né, qui a mangé et qui a bu, qui a été véritablement
persécuté sous Ponce Pilate, qui a été véritablement crucifié, et est mort, aux regards du ciel,
de la terre et des enfers, qui est aussi véritablement ressuscité d’entre les morts. C’est son
Père qui l’a ressuscité, et c’est lui aussi, le Père, qui à sa ressemblance nous ressuscitera en
Jésus-Christ, nous qui croyons en lui, en dehors de qui nous n’avons pas la vie véritable »
(saint Ignace d’Antioche, Aux Tralliens IX,1-2 ; SC 10 bis, Paris 1998, p. 101-103).
La foi chrétienne est dite ici sous la forme d’une confession des mystères du Christ, de sa naissance
à sa résurrection et à la communication eschatologique de sa résurrection aux fidèles (avec une note
antidocète marquée par la répétition de l’adverbe “véritablement”). Ce type de confession
christologique se trouve alors associé aux formules trinitaires, à la suite de l’usage du Nouveau
Testament lui-même. On observe en effet un « mariage » (Bernard Sesboüé) des formules
christologiques et trinitaires. Ce mariage s’effectue de deux manières principales : 1° par ajout de la
formule christologique au credo trinitaire ; 2° par insertion de la séquence kérygmatique christologique
dans le credo trinitaire.
1. Formule christologique ajoutée au credo trinitaire
Dans le premier cas, la formule christologique est ajoutée la formule trinitaire à laquelle elle fait
suite. Cet ajout peut être illustré par le texte suivant de saint Irénée :
« En effet, l’Église, bien que dispersée dans le monde entier jusqu’aux extrémités de la terre,
ayant reçu des apôtres et de leurs disciples la foi en un seul Dieu, Père tout-puissant, “qui a
fait le ciel et la terre et la mer et tout ce qu’ils contiennent”, et en un seul Christ Jésus, le Fils
de Dieu, qui s’est incarné pour notre salut, et en l’Esprit Saint, qui a proclamé par les
prophètes les économies, la venue, la naissance du sein de la Vierge, la Passion, la
résurrection d’entre les morts et l’enlèvement corporel dans les cieux du bien-aimé Christ
Jésus notre Seigneur et sa parousie du haut des cieux dans la gloire du Père, pour “récapituler
toutes choses” et ressusciter toute chair de tout le genre humain [...]. Ayant donc reçu cette
prédication et cette foi, ainsi que nous venons de le dire, l’Église, bien que dispersée dans le
monde entier, les garde avec soin, comme n’habitant qu’une seule maison, elle y croit d’une
manière identique, comme n’ayant qu’une seule âme et qu’un même coeur, elle les prêche,
les enseigne et les transmet d’une voix unanime, comme ne possédant qu’une seule bouche »
(saint Irénée de Lyon, Contre les hérésies I,10,1-2 ; SC 264, p. 154-159).
On observe tout d’abord, dans ce texte, une confession des Trois (foi en seul Dieu Père, en un seul
Christ Jésus et en l’Esprit Saint) ; et ensuite, rattachée à la mention de l’Esprit, le détail des mystères de
la vie du Christ (l’économie du Christ, dans une formulation de type kérygmatique) : naissance,
passion, résurrection, parousie. On note également, à la fin de l’extrait ci-dessus, la place reconnue à la
règle de foi : l’Église a mission de garder, croire, prêcher, enseigner et transmettre la foi. La vie de
l’Église s’organise autour de la règle de foi. À la fin de l’Antiquité encore, le symbole Quicumque
(pseudo-athanasien, datant probablement de la fin du Ve siècle dans le sud de la Gaule) témoigne de la