L`adhésion cellulaire, une sonde de l`environnement mécanique

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Ladhésion cellulaire,
une sonde de lenvironnement
caniquedanslestissus
AliceNicolas
alice.nicolas@unice.fr
LaboratoiredePhysiquedelaMatreCondensée,UMR 6622,CNRS/UniversitédeNiceSophiaAntipolis,Nice
Ladhésion descellulesdestissus sur unsubstratvarie en fonction de sesproprtéscaniques.Cesdifférents
modesdadhésion s’accompagnentd’une activitébiochimiquescifique:ladhésion serévèle ainsiune sonde
de lenvironnementcaniquedelacellule. Parquelscanismeslacellule perçoit-elle larigiditédeson
substrat?Nous proposonsunscénario purementcanique,oùnous illustronslamanièredontil nous faut
repenserlesprincipesphysiquesusuelspour crirelecomportementde cessystèmesvivants.
estissus animaux sontstructurésen plusieurs cou-
chesquidiffèrentparladensitédescellulesquiles
composent.Lépiderme,quiest lacouche laplus
externe,est une barrreimperable oùlescellulessont
aucontactlesunesdesautres.En-dessous setrouvele
tissu connectif,composantduderme,oùdescellules
éparsessontenchevêtréesdansune matricedefibresde
collagène etautresglyco-protéines.Cesmacromolécules
constituentlarmaturedutissu etluiconfèrentsespro-
prtéscaniques.Ainsi,dansuntissu,lescelluleséta-
blissentdesliaisonssoitentreelles,soitavecune matrice
extracellulaire. Cest cettedernièresituation quivanous
intéresser:ladhésion cellule-matrice.
Pour cescellules,ladhésion joueunrôle crucial. En
effet,cenest quelorsqu’ellesadhèrentqu’ellespeuvent
ensuiterépliquerleur ADN, sediviser,oubien sediffé-
rencier.Une cellule saine (non cancéreuse) quisetrouve
danslimpossibilitédadhérersedonne lamort dansde
brefsdélais.Cemécanisme dauto-régulation éviteque
descellulesdéfaillantesne serépandentetdégradentle
fonctionnementde lorganisme entier.Ladhésion est
ainsiune étape-clé dansle contrôle de laprolifération et
de ladifférenciation. Comme on vale voirparlasuite,
limportancedeladhésion danslavie d’une cellule vient
dufaitqu’elle assurelelien avecle milieuextérieur :adhé-
sion etsignalisation étantétroitementcouplées,lescellu-
lessondentleur environnementparle biaisde leurs
adhésionsetadaptenten réponseleur activitéchimique.
Ladhésion impliquelaformation de liaisonsentredes
protéinesmembranairesetleurs récepteurs extracellulai-
res.Lesprotéinesmembranairesserépartissenten amas,
sibien queladhésion sefaitpardespoints discrets,ainsi
quelemontrelafigure1.Suiteàlaformation de ces
liaisonstransmembranairesseconstruitune architecture
protéiqueintra-cellulairecomplexe,berceaud’une forte
activitéchimique. Silaconstruction desadhésionsces-
sitelacompatibilitéchimiqueentrelacellule etson envi-
ronnement,une compatibilité«caniquest aussi
requise:suivantlesproprtéscaniquesdusubstrat,et
en particuliersarigidité,lesjonctionsadhésivessefor-
mentavecune architectureprotéiqueparticulière,qui
L
Figure1Lescellulesadhèrentpardespoints dadhésion. (a)Vuedelasur-
facedadhésion d’une cellule parune méthode interrométrique(RICM).
Leszonesnoiressontleszonesde contact.(b)Marquage fluorescentde pro-
téinesdadhésion pour lamême cellule. Lesflèchesrepèrentlesmêmessites
adhésifsentrelesdeux images.Barre10µm (extraitavecpermission de Cesa
etal.,Rev.Sci. Instr.,78 ,0340301(2007)).
Ladhésion cellulaire,une sonde de lenvironnementcaniquedanslestissus
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donne lieuàuncomportementcellulaireprécis.Ainsi,
sur unsubstratdontlarigiditéexcède quelquesdizaines
de kPa, lescellulesétablissentdesadhésionsstablesdans
le tempsetde taille notable (plusieurs µm2 ,cesontles
zonesbrillantesde lafigure2a ,comme celle pointée parla
flèche rouge). Cetype particulierdadhésions,appelées
adhésionsfocales ,clenche une cascade de réactionschi-
miquesquiinfluencelexpression génique,laproliféra-
tion etlasurvie cellulaire. Bien aucontraire,pour des
substrats plus souples,on observedesadhésionstransi-
toires,comme lillustrelafigure2b:lespoints fluores-
cents,de taille inférieureauµm2comme celuipointépar
laflèche verte,ontdesduréesde vie inférieuresàla
minute. Cesadhésionstransitoiresvontde pairavecla
miseenmouvementde lacellule. Ilapparaîtdoncqueles
cellulesdestissus sondentlesproprtéscaniquesde
leur environnementetyadaptentleur activitéchimique.
Lescanismesàlorigine de lasensibilitédescellu-
lesdestissus aux proprtéscaniquesde leur environ-
nementfontaujourdhuilobjetdintensesrecherches
lafoisauniveaumoléculaireaveclaide doutilsbiochimi-
ques,etàléchelle de lacellule grâceauveloppementde
techniquesdapplication etde mesuredeforceslocales
(voirparexemple larticle de B.Ladoux danscenuro,
p. 94). Notrecontribution iciest de proposerunmodèle
purementcaniquepour comprendrecomment,parle
biaisde sesjonctionsadhésives,une cellule déposée sur
unsubstratpeut sonderson environnement.Cemodèle
supposelexistenced’uncomplexeprotéiquelocaliséde
manièrehomogène danschacune desadhésions,qui
clenche une activitédesignalisation en réponseàsa
déformation mécanique. Nous proposonsdonclexis-
tenced’ucano-senseur »présentdanschaquesite
adhésif. Nous montronsqu’untel scénario rend compte
de ladynamiqueobservée desadhésionsetouvredenou-
veaux horizonssur lacompréhension ducouplage entre
adhésion etréponsecellulaire.
Dupointde vuedelaphysique,cemodèle interroge
le(s)principe(s)quigouverne(nt)ladynamiqueàléchelle
de lacellule. Lescellulespossèdenten effetunréservoir
dénergie quasiillimité,quifaitqueleur évolution nest a
prioripasguidée parlarelaxation vers uquilibre. Dans
le cadredecescénario,nous montronsqueladynamique
desadhésionssemble êtrecontrôlée parlaquantité
dénergie quelacellule investitpour fairevarierlataille
dusiteadhésif :ladhésion ne granditquesilajout d’un
élémentrapportedelénergie àlacellule. Cecisedifféren-
cie descanismesde croissancedessystèmesinertes
comme parexemple lescristaux,oùdanscecasladyna-
miqueest contrôlée parlavariation dupotentiel chimique
desatomesindividuels.
Lesadhésionsfocales,desjonctions
adhésivessous contrainte
Lescellulesanimalesontleur forme fixée parlanalo-
gued’unsquelette,le cytosquelette. Cederniersecompose
de polyressemi-rigides,parmi lesquelslesmicrotubu-
les(longueur de persistance1de quelquesmillimètres)et
lesfilaments dactine (longueur de persistancedelordre
de 17µm). Contrairementàunsqueletteosseux,lachar-
pentedescellulesest dynamique. La dynamiqueentrela
polyrisation/dépolyrisation de cesfibrespermetàla
cellule dadaptersaforme oude sedéplacer.Maislaprinci-
pale fonction ducytosquelettequinous intéresseiciest
son aptitude àexercerdesforces:le cytosqueletteest àla
foisle squeletteetle muscle de lacellule.
Commentcesfibresexercent-ellesdesforces?Enpre-
mierlieu,grâceàlapolyrisation. Attachéesàune extré-
mité,lajout d’unmonomèreàleur autreextrémitése
traduitparune forcedepoussée pouvantatteindre10pN.
Ensecond lieu,certainesprotéines,lesmoteurs molé-
culaires,sontcapablesde fairecoulisserune fibreparrap-
port àlautre,comme dansunmuscle. Cemécanisme
permetde développerdesforcesde lordrede1.5 pNpar
moteur.
Lecytosquelettedactine joueunrôle-clé dansladhé-
sion cellulaire. Lesadhésionsfocales,quisontcesadhé-
sionsstablesobservéeslorsquelacellule est déposée sur
unsubstratrigide (figure2a ),ysontconnectées.Parle
biaisde moteurs moléculaires,cecytosqueletteexerceune
forcedetraction sur le siteadhésif,comme schématisé
sur lafigure3.Cetteforcedetraction semble êtreassimila-
ble àune contrainteconstante,de lordrede5nN/ µm2:
plus lairedadhésion est grande,plus laforcetotale exer-
cée parlacellule est élevée. Chaquesiteadhésif exerce
ainsiune forcecompriseentre10et30nNsur le substrat.
Cest cettecapacitéàtirersur le substratquipermetaux
cellulesde sonderlesproprtéscaniquesde leur envi-
ronnement.Eneffet,lescellulesdontlactivitédemoteurs
moléculairescibsest inhibée (etquidoncnexercent
plus de forcessur leurs adhésions)nesontplus capables
de formerdadhésionsfocales.Ilneresteplus quedes
adhésionsextrêmementtransitoires,cequiproscritla
miseenmarche de lamachinerie de division cellulaireou
de différentiation.
Figure2La morphologie desadhésionsdiffèresuivantlesproprtésca-
niquesdusubstrat.(a)Adhésionsfocalessur unsubstratrigide (40kPa). (b)
Adhésionstransitoiressur unsubstratmou(3.5kPa). Barre:10µm.Extrait
de Pelhametal.,PNAS, 94,13661(1997).
1. Longueur en dessous de laquelle le polyreapparaîtcomme rigide.
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Ladhésion cellulaire,une sonde de lenvironnementcaniquedanslestissus
Deux exriences-csontouvert lavoie àlacompré-
hension descanismesquigouvernentlasensibilitédes
cellulesàleur environnementcanique.
La premièreamontréquelon peut remplacerla
contrainteappliquée parle cytosquelettedactine parune
contraintedecisaillementexterne,appliquée àlacellule à
laide d’une micropipette. Danscetteexriencedévelop-
pée parD.Riveline etA.Bershadsky(Weizmann Institute
of Science,Israël),lesmoteurs moléculairesadéquats sont
inhibés.Ons’attend ànobtenirquedesadhésionstransi-
toires.Néanmoins,derrrelepassage de lapipette,on
observequelespoints adhésifsde petitetaille ontgrandi,et
ce,dansladirection de laforceappliquée. Onpourraitpen-
serassistersimplementàlétirementdessitesadhésifs.
Desmesuresde fluorescencemontrentcependantquela
densitédesprotéinesadhésivesne varie paslorsquela
structuregrandit.Ils’agitdoncbel etbien de lacroissance
d’une structure,cettecroissances’effectuantessentiellement
dansladirection de lacontrainte .Unaspecttout aussiimpor-
tantquedévoile cetteexrienceest le faitquelesadhé-
sionssituéesen avaldelapipette,nayantpasété
directementcisaillées,nontpasvarié de taille de manière
sensible. Seulescellesquiontétédirectementcisailléespar
lapipetteontgrandi. Cetteexriencemontredoncqueles
adhésionsrépondentàune contraintelocale.
La seconde exrience,menée parK.Beningo et
Y.Wang (Univ.ofMassachusetts MedicalSchool),mon-
trequelesadhésionsfocalesne grandissentpasavec
nimportequel type de contrainte:une composantetan-
gentielle est cessaire. Eneffet,en plaçantune cellule
entredeux lamellesde verrefonctionnalisées2parallèles,
lesauteurs observentquelesadhésionsliéesàdesfibres
dactine quitraversentlacellule dansson épaisseur (qui
doncappliquentune forcedontlacomposantenormale
est dominante) sonten trèsfaible nombre. Dansce
système,lacellule nadhèreplus quepardespoints adhé-
sifsde petitetaille,contrairementaucasoùelle nest en
contactqu’avecune seule desdeux lames(lacomposante
de forcedominanteest alors lacomposantetangentielle ;
casde lafigure3 ). Cecomportementest inattendu,carle
modèle le plus courantde ladhésion cellulairepour les
physiciensest celuid’une vésicule dontlamembrane
contientdesprotéinesadhésives.Danscecas,il est connu
quelavésicule adhèreaussipardestachesdiscrètessur
le substrat,comme une cellule. Néanmoins,sous
linfluenced’uncisaillement,contrairementàune cellule,
lesjonctionsadhésivesde lavésicule serompent.
Cesdifférentesexriencesmontrentque:
–lecomportementdynamiquedeladhésion d’une cel-
lule sur unsubstratne peut pasêtredécritàlaide de la
physiquedobjets passifscomme lesvésicules;
–lexistenceetladynamiquedesadhésionsfocalessont
étroitementliéesàlaprésenced’une contraintetangen-
tielle,lorigine physiquedecettecontraintenesemblant
pasavoirdinfluence;
–lacroissancedesadhésionsfocalesconsisteenun
apport anisotrope de matre,dansladirection de la
contrainte;
–leffetde lacontrainteest local.
Lemécanisme quicontrôle ladynamiquedesadhé-
sionsfocalesetleur sensibilitéàlenvironnementca-
niquesemble échapperàune description physiquepas-
sive,qu’apermisjusqu’àaujourdhuilemodèle desvési-
cules.La contraintetangentielle quelacellule applique
sur sesadhésionsparaîtavoirune influencedéterminante
tout àlafoissur leur dynamiqueetleur adaptation à
lenvironnementcanique. Danslasuitedutexte,nous
nous intéressonsàleffetde lacomposantetangentielle de
contraintequis’exercesur le siteadhésif.
Unscénario de mécano-sensation
Quel mécanisme peut-on envisagerpour crirecette
croissancesous contrainte,fortementanisotrope ?
Lesdifférentesexriencesprécitéeslaissentpenser
qu’il existeuncapteur de déformation locale,activéparla
contraintetangentielle qu’appliquelacellule sur chaque
siteadhésif. Nous proposonsquecederniersetrouve
répartidemanièrehomogène dansle siteadhésif lui-
même (figure4). Eneffet,sionsupposequelecapteur est
une molécule ouunensemble de moléculesdadhésion
répartidemanièrehomogène,son activation vaêtrefonc-
tion de ladistribution de contraintequis’appliquesur
ladhésion etde sasytrie. Ainsi,siladistribution de
contrainteest undisquedontlaireest inférieureàcelle
Figure3Lescellulesadhèrentsur le substratpardessitesadhésifsdiscrets
maintenus sous tension parle cytosquelettedactine. Encadré:représenta-
tion schématiquedelastructured’une adhésion focale.
2.Lamellestraitéesbiochimiquementpour quelescellulesadhèrent.
Ladhésion cellulaire,une sonde de lenvironnementcaniquedanslestissus
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dusiteadhésif,lesmoléculesdadhésion situéesàlavant
dudisque,en avaldelacontrainte,sontcomprimées;les
moléculessituéesàlarrre,en amontde lacontrainte,
sontespacéesalors quecellesquisontsituéessur lescôtés
ne subissentpasde déformation (voirfigure5). Onrepro-
duitalors bien une activation anisotrope etlocale ducap-
teur,quiconduitàune dynamiquedifférenteenamontet
en avaldelarégion sous contrainteainsiquelemontrent
lesexriences.
Notremodèle reposesur ladéformation élastiqued’un
capteur moléculairededéformation,permiseparle fait
quecedernierest ancréparune extrémitéausubstratet
est soumisàune contrainteàson extrémitéopposée. Ce
modèle contientdoncintrinsèquementle faitquelactiva-
tion ducapteur dépend desproprtéscaniquesdu
substratpuisqu’il yest lié. Lobjetdesparagraphessui-
vants est de développerune approche en termesde physi-
questatistiquepour appréhenderladynamiquede
croissancedecesystème etlaconfronteràlexrience
desadhésionsfocales.La difficultéréside dansle faitque
le comportementdescellulesnest pasguidé parla
recherche d’uquilibre,carcesdernièressontdotées
d’unréservoirdénergie quasi-illimité:leur production
est denviron 10 17k B T/ squand le tempscaractéristiquede
croissancedesadhésionsfocalesest de lordredequel-
quessecondes!
Physiquestatistiqueappliquée
àladynamiquedesadhésionsfocales
Commentgrandissentlesadhésionsfocales?Exri-
mentalement,on observequeleur croissanceest le résul-
tatde ladsorption de nouvellesprotéinesissuesdumilieu
intracellulaireoude lamembrane,quisejoignentà
ladhésion existantedemanièreanisotrope,dansladirec-
tion de lacontrainteappliquée. Cettecroissancenalieu
qu’en présenced’une contrainte,habituellementle fait
desmoteurs moléculaires.Cemécanisme dadsorption
est doncsous le contrôle d’unprocessus hors équilibre.
Àpremièrevue,le gradientde déformation descap-
teurs moléculairessemble jouerunrôle dominant,puis-
quenous avonssupposéquelactivation de cescapteurs y
étaitdirectementliée. Onest alors tentédepenserquela
dynamiquedeconstruction/construction desadhé-
sionsest contrôlée parcettequantité. Appliquonscette
idée aucasoùlacellule reposesur unsubstratélastique
mou.Lesmoteurs moléculairesappliquentune
contraintefsur lensemble adhésion +substrat.Maisla
contrainttantimposée,ladéformation ducapteur est
en faitindépendantedelarigiditédusubstrat:fétant
transmiseàtravers lessolidesélastiques,le gradientde
déformation de chaquesolide est simplementf/ Yi ,oùYi
est le module dYoung de ladhésion (i=1)oudusubstrat
(i=2). Avecuntel scénario,on préditdoncqueladynami-
quedesadhésionsfocalesest indépendantedelarigidité
dusubstrat,puisquelegradientde déformation ducap-
teur moléculairenen dépend pas.Malheureusement,
exrimentalement,ladépendanceest claire(voir
figure2 ):lesadhésionsfocalesdisparaissentsur lessubs-
trats dontlarigiditéest inférieureàunseuil.
Même silegradientde déformation ducapteur molé-
culairenepermetpasde comprendrelecomportement
desadhésionsfocalessur unsubstratmou,il participe
pourtantàladynamiquedecesadhésionspuisquecest
luiquiest responsable de lanisotropie de leur croissance.
Ils’agitdoncde trouverle paratreadéquatqui
contienne àlafoislanisotropie de ladynamiqueetlasen-
sibilitédecettedynamiqueaux proprtésélastiquesde
lenvironnement.
Nous proposonsqueceparatresoitlavariation de
lénergie àléchelle de lacellule lorsqueladhésion grandit .Dans
cettevision,il s’agitdévaluerlénergie quelacellule –qui
jouelerôle d’unorateur –investitdanslacroissancedes
adhésions,etnon lénergie de chacune desmoléculesqui
s’adsorbesur le siteadhésif. Pour lacellule,lajout de
matredansunsiteadhésif implique,de manièreschéma-
tique,deux typesdéchangesdénergie. D’une part,elle doit
fournirde lénergie pour maintenirune contraintecons-
tantesur cettestructurequicrt;cettnergie donne lieu
àladéformation élastiquedeladhésion etdusubstrat,et
est doncdépendantedesproprtésélastiquesde ceder-
nier.Dautrepart,lacellule échange de lénergie dorigine
chimiquelorsquedenouvellesprotéinessadsorbentsur
ladhésion. Ladsorption ayantlieupréférentiellementdans
Figure4Ladhésion est vuecomme unmilieuélastiquecontenantune dis-
tribution homogène de capteurs de déformation etcisaillé parune distribu-
tion de contraintetangentielle donnée.
Figure5Une distribution de contraintesous laforme d’undisqueconduit
àlacompression desmoléculesàlavantde lazone sous contrainteetune
dilatation àlarrre. Uncapteur de déformation situédansle siteadhésif
seradoncactivédifféremmentsuivantsalocalisation.
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Ladhésion cellulaire,une sonde de lenvironnementcaniquedanslestissus
lesrégionsactivéesdusiteadhésif,cettnergie dépend du
gradientde déformation descapteurs moléculairesetdonc
de leur localisation (en amontouen avaldelacontrainte
imposée,voirfigure5). Mathématiquement,nous suppo-
sonsquecettnergie dorigine chimiqueest simplement
proportionnelle àcegradientde déformation ducapteur
moléculaire. Ecrituresimpliée,pour une cellule déposée
sur unsubstratrigide (nous traiteronsleffetde lélasticité
dusubstratplus loin),lavariation dénergie àléchelle de la
cellule lorsqueladhésion granditd’une unitédesurface
s’écritalors :
(1)
ou,lorsqu’elle décrtd’une unitédesurface:
(2)
Danslesdeux expressions,le premierterme est léner-
gie associée àladéformation élastiquedusiteadhésif
(module dYoung Yetépaisseur h ,voirfigure4)soumisà
une contraintef.Lesecond terme est lénergie chimique
échangée lorsqueladhésion granditd’une unitédesur-
face. Lesigne de ceterme est donné parle gradientde
déformation ducapteur moléculaire. Onchoisitpar
convention ecomme étantlénergie librederéaction par
unitédesurfacelors de ladsorption d’une unitédansune
zone comprimée (etdonlavantdusiteadhésif dansle
casd’une distribution de stress comme celle proposée
figure4). Àcestade,nous ignoronslanatureendo- ou
exothermiquedesréactionsen jeu,etepeut êtrepositif
(réactionsexothermiques)ounégatif (réactionsendother-
miques).
Supposonsquelacinétiquesoitcontrôlée parlaréac-
tion etnon parladiffusion. La théorie de Bell,quiest un
casparticulierdesthéoriesde Smoluchowski,Collinset
Kimball,proposequelesconstantescinétiquesdassocia-
tion etde dissociation varientde lamanièresuivante:
(3)
oùΔ Fest lavariation dénergie librepour passerde létat
libreàlétatassocié (laconstantecinétiquecalculée est
alors notée k on),oubien pour passerde létatassocà
létatdissocié (on notealors k=koff). La probabilitépar
unitédetempsqu’uncomplexemoléculairelibres’asso-
cie àlarégion comprimée dusiteadhésif s’écritalors :
oùaest lataille caractéristiqued’uncomplexemolé-
culaire.Enlabsencedecontraintef,
on observequelesiteadhésif sedissocie :on adonc
.Enprésenced’une contrainte,ladsorption de
nouvellesmoléculesdanscetterégion nest
doncpossible quesi,cequiimpliquee>0:
lesréactionschimiquesen jeuontdoncunbilanexother-
mique. Enconséquence,danslesrégionsdilatées,laden-
sitédénergie chimiqueintervenantdansleséquations(1)
et(2tant+ef/ Y,lesmoléculesquittentle siteadhésif
(dFoff/ dS<dFon/ dS ). Cetteanalyserapide nous montre
doncqueladsorption de nouvellesmoléculessefaitpré-
rentiellementdanslesrégionscompriméesalors que
lesrégionsdilatéesperdentde lamatre.
Nous concluonsiciquesieffectivementladynamique
desadhésionsfocalesest gouvernée parlavariation de
lénergie àléchelle de lacellule,alors lajout de matre
dansle siteadhésif s’accompagne d’ungain dénergie
pour lacellule. La croissanced’unµm2d’une adhésion
focale fournitàlacellule,dansle cadredecemodèle,une
énergie surieureàcelle produiteparladégradation de
7000 moléculesdATP (ladégradation de lATP est l’une
desprincipalessourcesdénergie danslescellules:une
molécule dATP dégage environ 25k B T).
La rigiditédusubstratinfluence
l’adhésion cellulaire
Nous prolongeonsnotremodèle aucasoùlacellule est
déposée sur unsubstratélastique. Danscettesituation,la
contraintequ’appliquelacellule sur sesadhésionsest
transmiseausubstrat.Quel est limpactde lélasticitédu
substratsur lénergie échangée àléchelle de lacellule
lorsquelesiteadhésif grandit?La contrainteappliquée
étantimposée,lénergie additionnelle quefournitlacel-
lule pour maintenircettecontrainteest en effetsensible à
larigiditédusubstrat.Deplus,
linteraction élastiqueest une interaction àlongueportée,
sibien quelescaractéristiquesgéométriquesdusubstrat
vontavoirleur importance.
Ainsi,silesubstratest fin devantlataille de ladhésion
(de lordredequelquesmicrons),ladéformation décrt
exponentiellementetlaseule longueur caractéristiqueest
lépaisseur dumilieuélastiquesubstrat+adhésion. La
dynamiquedenotresystème est alors criteparune
équation dumême type queprécédemment(équation (1))
quiinclut lacontribution de ladéformation dusubstrat
dépaisseur H:
(4)
Lecalcul(non présentéici) montreque
.Léquation (4) révèle donclexistence
d’unseuil de rigiditéau-dessous duquel ladhésion ne
peut plus grandirmême danslesrégionsoùle capteur
moléculaireest comprimé :dFon/ dS>0sque
.Ceseuil,calculé nuriquementàpartirde
léquation (4),dépend de lépaisseur dusubstrat,comme
lillustrelafigure6 .
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