Le développement de la structure psycho
affective de l'enfant
Résumé de la 1ere année
Introduction
A travers des différents systèmes théoriques proposés pour décrire le développement psycho
affectif de l'enfant certain sont complémentaires et permettent en les associant d'avoir un
début de compréhension des processus de structuration et de maturation psychique. Ce
document se présente comme une étude de certain de ces systèmes en suivant la progression
du développement de l'enfant dans ses premières années.
Ainsi les théories d'auteurs incontournables seront évoqués : le développement libidinal de
S. Freud, celui du moi de M. Klein, celui de l'intelligence de J. Piaget
L'implication de la petite enfance dans les structures psychiques de l'adulte sont perçues
comme fondamentales, dans le sens premier du terme, pour les psychanalystes et certains
psychologues.
Le graphique suivant ne se veut en aucun cas scientifiquement fiable; Il permet juste de se
représenter la dynamique de développement de la structure psycho-affective de l'enfant au
fil des années.
C'est également suivant cette logique qu'est construit cet article: les premiers mois étant
nettement plus détaillés que les années suivantes.
Chaque période sera découpée en trois partie:
Ce que l'on voit de l'extérieur, qui renvoie à l'expérimentation directe avec l'enfant.
Ce que l'on sait qu'il se passe, qui correspond à l'analyse systémique de Piaget, un des
fondateurs de la psychologie du développement de l'enfant.
Ce que l'on pense qu'il se passe, qui renvoie aux différentes théories psychanalytiques. Ces
théories semblent avoir acquises une validation au fil du temps.
Avant la naissance: l'enfant fantasmé
Un enfant ne peut pas être compris sans la matière première de l'attente de ses parents : le
fantasme. Avant même sa naissance, l'enfant est déjà imaginé, fantasmé et donc pré construit
dans le désir des parents.
Un exemple parmi d'autre pourrait être la position de l'enfant à venir dans sa place dans la
fratrie qui rentre en écho avec la fratrie du parent, produisant ainsi tout un cortège de
parallèles et de comparaisons (ce qu'on appelle des projections).
Il est important d'entendre que l'enfant est une partie de soi qui, normalement, nous survie. On
peut y voir un fragment de sa propre immortalité! Voyez ces parents qui veulent que leurs
enfants réussissent mieux qu'eux, ou qu'ils fassent des choses qu'eux-mêmes auraient voulu
faire lorsqu'ils avaient leur âge. Entendons nous bien, nous parlons ici de la Lignée, de la
survie de son espèce et ainsi d'un darwinisme fondamental et nécessaire.
Ceci étant, une partie du travail d'être parent réside dans l'acceptation de son enfant réel tel
qu'il est et donc du deuil de cet enfant fantasmé.
Ce n'est pas le sujet de ce présent article mais si cela vous intéresse, nous vous conseillons
d'étudier l'hyper-adaptation, le faux self infantile, l'enfant-béquille, etc
Par l'interaction avec l'environnement, c'est le début de l'apprentissage de la différentiation
émotionnelle qui se met en place.
L'apport parental
Le rôle des parents est fondamental tant pour sa survie physique qu'émotionnelle. Tout au
long des premières années de vie de l'enfant, les parents vont jouer un rôle étayant pour le
développement du psychisme : par le holding (porter l'enfant), le handling ( manipuler
l'enfant) et l'object presenting (lui présenter des objets) (notion winnicottienne), l'enfant
va découvrir les limites de son corps et ainsi les limites entre moi et non-moi.
Par l'empathie et le langage, l'enfant va apprendre à se structurer; et par la triade parentale
symbolique, l'enfant finira par découvrir la différence des sexes et des générations.
Cette triade est dite symbolique parce que la Mère et le Père en psychanalyse ne sont pas
forcément ces deux parents au sens propre. En fait il s'agit plus de dynamiques: le maternant
qui s'occupe de l'enfant et le paternant qui incitera l'enfant à découvrir le monde par lui-
même. Ainsi nous trouvons chez les deux parents des dynamiques des deux sortes. Cette
analyse permet d'avoir un autre regard sur la monoparentalité ou sur l'homoparentalité.
On peut le dire simplement, sans l'apport d'un environnement maternant et structurant
l'enfant ne peut pas se développer. Pire, Spitz a découvert dans les orphelinats d'après
guerre des cas de ralentissement et d'arrêt du développement psycho-affectif chez ces jeunes
enfants parce qu'ils étaient coupés de tout lien affectif. Par ce Syndrome d'hospitalisme,
certains enfants sont même morts de carence affective extrême.
Ajoutons juste que le nom de ce syndrome est mal choisi car il fait en fait référence à des
situations en pouponnière et non à l'hôpital.
Les débuts du nouveau né : les trois-quatre 1er mois
Ce qu'on voit de l'extérieur
Les premières semaines de vie, le nourrisson dort presque toute la journée. Il présente une
hypertonie musculaire et une hypotonie axiale.
Au niveau perceptif, si sa vision reste encore très faible, il semble reconnaître le son de voix
de sa mère grâce à l'apprentissage intra-utérin. Au fil des semaines, il se mettra
progressivement à fixer les visages humains.
Ses gestes sont un ensemble désordonné de réflexes innés comme le grasping, le
toussotement, la succion, les mictions, la défécation, le gigotement, les pleurs, etc.
Essentiellement tourné sur son corps, le nourrisson émet une réponse émotionnelle au confort,
à la frustration, à la fatigue ou à l'angoisse. Il les exprime à la fin du premier mois par des cris
spécifiques, identifiables par ses parents.
Ce que l'on sait qu'il se passe
Selon Piaget cette période recouvre les 1er (0-1 mois) et 2nd (1-4 mois) stades de la période
sensori-motrice (0-2 ans).
Des réflexes innés du premier mois, la structuration des schèmes moteurs atteint
progressivement un stade où les premières coordinations sont possibles: le bébé coordonne
grossièrement doigt, coude, épaule et bouche pour sucer son pouce.
C'est l'âge des réactions circulaires primaires: le nourrisson prend plaisir à répéter les mêmes
mouvements. Cette sollicitation répétée permet l'apprentissage et l'automatisme de ces
schèmes.
Ce qu'on pense qu'il se passe à l'intérieur
Essayons de nous mettre à la place du psychisme émergeant en se basant sur les théories
psychanalytiques.
A la naissance, le psychisme, fondamentalement, c'est le Ça: c'est des pulsions, des besoins.
Cet aspect est perceptible à travers les cris et besoins du nourrisson. Mais c'est également l'âge
de la toute puissance.
Pour comprendre cette toute puissance, il faut avoir à l'esprit ce que le nourrisson est en train
de vivre. Il est une conscience – qu'elle soit fragmentée pour les uns, en devenir pour d'autre -,
et en cela il est un processus de centralisation et d'organisation des informations perçues. On
peut résumer en disant « ça est ».
Il y a existence d'une conscience sans qu'elle puisse pour l'instant se rattacher à une identité
ni même à un corps. En cela le nouveau né est tout puissant, simplement parce qu'à ce stade,
sa conscience n'a pas accès à ses propres limites physiques et encore moins accès à l'existence
des autres. Il est tout ce qu'il expérimente, c'est en cela qu'il est tout puissant.
Par l'accouchement, qui est pour certain théoriciens le premier traumatisme, le nouveau-né
accède un état d'hyperstimulation constante. Avant, il était protégé dans la zone intra-utérine
des trop fortes stimulations des sens. Désormais la confrontation est directe. Et, à cette toute
puissance s'oppose ces expériences désagréables. Voici en substance la situation qui amènera
le psychisme à développer ses premiers mécanismes de défense : incorporation et
projection.
Pour Sigmund Freud, par la naissance, le nourrisson entre dans le stade oral, le premier
stade de l'évolution libidinale. Il dure de 0 à 1 an.
Le plaisir est lié à la zone bucco labiale, et essentiellement à l'alimentation. Karl Abraham qui
approfondira la question divisera le stade oral en deux périodes, la première, de 0 à 6 mois,
étant associée à la succion, et la seconde, le stade sadique oral, liée à la morsure, qui va de 6
mois à un an. Il s'agit en substance de l'idée de manger ou d'être mangé.
Le plaisir oral est dit autoérotique et selon Freud, la pulsion s'accomplit par le processus
d'incorporation: le nourrisson intègre et par là-même devient ce qui le satisfait. Le bébé
rassasié est satisfaction.
Le psychisme passe d'un état où la notion même de désir n'existe pas, car dans le ventre
maternel les apports nutritifs sont constants, à un état où le désir prend sens à travers la
frustration d'une réalisation immédiate des désirs.
Le nourrisson a une gêne qui est résolue au mieux par la mère. Et c'est justement dans cet
intervalle de temps entre expression du manque et assouvissement du besoin que réside les
premières séquences de ce que sera le Moi : la satisfaction hallucinatoire. Cette hallucination
c'est la reviviscence des premières traces mnésiques de satisfaction.
Pour Freud, le psychisme s'appuie sur les toutes premières traces de souvenir positif comme
support pour contrebalancer le fait d'être submergé d'angoisse. Ces premiers îlots de 'positif'
seront les bases de l'idéalisation et de ce que sera l'identification, mais aussi les les centres qui
seront protégés par la projection.
Pour Freud, ces satisfactions hallucinatoires précoces sont l'origine de la construction du
Moi.
Pour Mélanie Klein, psychanalyste qui a beaucoup travaillé sur la question, le nourrisson se
trouve dans cette période dans la position schizo-paranoide.
Elle correspond à un moment où le psychisme se vit comme tout puissant, mais non pas par
un versant mégalomaniaque mais parce que le psychisme n'a pas conscience de la différence
entre lui et l'extérieur de lui (« le moi et le non-moi ») et encore plus simplement, entre lui et
sa mère. Ce n'est que bien plus tard que cette distinction est intégrée, pour le moment, le
psychisme est sans avoir conscience qu'autour de lui d'autres psychismes sont présents... ni
même encore conscience du sens de « autour de lui ».
A ce niveau de conscience, un malêtre venant d'une lumière trop vive ou de la faim ne seront
pas comprises comme différentes, l'une venant d'un intérieur et l'autre d'un extérieur, les
limites corporelles n'étant pas intégrées. Le psychisme s'organise à travers de dynamiques
rudimentaires qui correspondent en substance à absorber ce qui est bon et rejeter ce qui est
désagréable.
Techniquement, M. Klein parle d'introjection et de projection pour signifier l'acceptation de
l'agréable et le rejet du désagréable. La ligne de démarcation entre ces deux « zones »
correspond à la dynamique de clivage.
Le rejeté se veut annihilé, et cette dynamique est appelé le déni.
Ainsi, selon M. Klein, on peut parler du « bon sein » et du « mauvais sein », le premier étant
celui qui nourrit et le second celui qui frustre de par son absence. Il n'a pas encore conscience
que « ces deux seins » sont en fait une seule et même dynamique, une seule et même personne
: la mère.
Dans cette période, parce que la satisfaction dépasse, normalement, l'insatisfaction, le
psychisme infantile va s'identifier comme étant une expérience positive. C'est ce sentiment de
bien être qui va permettre une suffisamment bonne intégration des limites de son corps et par
là une densité psychique suffisante pour faire émerger un Moi.
M. Klein a émis l'hypothèse que des défaillances dans la structuration du psychisme qui
auraient lieu au cours de cette position pourraient être les sources de troubles psychotiques
ultérieurs. Les pathologies les plus importantes du psychisme seraient rattachées aux périodes
de fondation de celui-ci.
De trois-quatre mois à six-huit mois
Ce qu'on voit de l'extérieur
Au cours de cette période, le tonus s'améliore au niveau des membres et de son axe central.
Les schèmes de coordination s'affine et le bébé commence a différencier les articulations des
bras.
Il apprécie de se tenir droit et assis même si cela est encore fatigant pour lui. Il commence à
s'affirmer dans son corps en tapant par terre ou dans l'eau de son bain qui devient un de ses
terrains de jeu favoris.
A partir du cinquième mois, son ouïe s'est affiné et il est attentif au moindre bruit. Le mois
suivant cette même dynamique s'appliquera pour la vue. Par cette augmentation globale de la
vigilance, son environnement a désormais un rôle important dans sa stimulation sensorielle et
cognitive.
Pour intégrer le monde, il manipule avec ses mains et met tout ce qu'il peut en bouche. C'est le
bon moment pour varier l'alimentation de l'enfant.
Moins symbiotique avecre, il va mettre en place une relation privilégiée avec un objet,
l'objet transitionnel, le fameux doudou, élément de monde extérieur qu'il contrôle et qui le
rassure. A la fin de cette période, l'enfant sera un explorateur à quatre pattes du monde
environnant.
Il commence à montrer des expressions faciales d'émotions claires de joie ou de tristesse. Il
les reconnaît sur le visage des gens qui l'entourent d'ailleurs dès trois mois il a eu la capacité
de différencier les visages familiers. Le troisième mois est également celui du sourire social,
des premiers éclats de rire et des premiers gazouillis.
Progressivement, la discrimination des personnes alentours et l'exploration de l'environnement
poussent l'enfant à se confronter à la multitude des autres, à l'immensité du monde. En un
mot, il réalise la puissance du non-moi. C'est l'amorce de l'angoisse du 8ème mois.
Ce que l'on sait qu'il se passe
Jean Piaget a appelé cette période de 4 à 8 mois le 3ème stade de la période sensori-
motrice.
L'enfant se vit désormais distinct du monde extérieur et est capable d'action intentionnelle. Il a
accès à la permanence pratique (il revient à un objet qu'il a laissé) mais pas encore à la
permanence de l'objet ( il ne cherche pas un objet caché).
Maintenant, il fait des réactions circulaires mais en lien avec des interactions avec le monde
extérieur initialement amorcées par hasard. Par exemple, il va toucher un jouet et le déplacer
et reproduire ce geste, ce schème, de nouveau avec la satisfaction … peut être de la
facilitation du geste à travers la simplification du geste.
Ce n'est que plus tard que le contact avec les objets est intentionnel.
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