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La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
DOSSIER
Les Journées de techniques avancées
en gynécologie obstétrique, AMP et pédiatrie
Coordination : M. Azoulay
JTA : 17, avenue du Dr Arnold-Netter, 75012 Paris
Les JTA (Journées de techniques avancées en gynécologie obstétrique, AMP et pédiatrie), mot
magique, ambiance magique avec nos collègues antillais, subtile alchimie de médecine (les articles
ci-dessous vous donneront un excellent apercu de l’aspect scientifique et de la convivialité. Où donc
pouvez-vous prendre le petit déjeuner avec le conférencier dont l'exposé vous a ravi la veille et poser
les questions qu’un timing trop serré vous a empêché de poser ? Souvent imitées, mais jamais éga-
lées, les JTA sont l’occasion pour tous de se rencontrer, d'échanger, de se retrouver et d’enrichir nos
connaissances scientifiques. Puissent les quelques articles ici sélectionnés vous donner envie d'être
avec nous l’année prochaine du 14 au 19 janvier 2006.
Joëlle Belaïsch-Allart, participante depuis... 1985
La détection du papillomavirus humain par biologie moléculaire doit-
elle remplacer le frottis dans le dépistage du cancer du col ?
Detection of human papillomavirus in depistage of cervix cancer
P. Lopes
*, C. Papy**, M. Coste-Burel**
* Service de gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction, CHU de Nantes, 9, quai Moncousu,
44093 Nantes Cedex.
**
Service de virologie,
CHU de Nantes, 9, quai Moncousu, 44093 Nantes Cedex.
Modalités thérapeutiques d’une maladie abortive
d’origine dysimmunitaire
Therapeutics modality of recurrent pregnancy loss
B. Carbonne*, V. Lejeune*
* Service de gynécologie obstétrique, Groupe ARPEGE (Association de recherche sur les pertes fœtales. et échecs de
grossesse, hôpital Saint-Antoine, Paris.
Exposition au DES et projet d’enfant en 2004 : quelles problématiques,
quelle prise en charge quand la grossesse ne s’initie pas spontanément ?
Exposure in utero to DES and pregnancy outcome in 2004?
S. Epelboin*
* Service de gynécologie obstétrique, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 82, avenue Denfert-Rochereau, 75014 Paris.
DPI et choix du sexe
DPI and sex selection
A. van Steirteghem*
*Centre de médecine de la reproduction, Centre de recherche reproduction et génétique, université libre de
Bruxelles néerlandophone (Vrije Universiteit Brussel).
IRM et endométriose
MRI and sendometriosis
J.P. Rouanet*, M. Viala*, C. Courtieu*, P. Mares**, A. Maubon***
* Centre médico-chirurgical Beau Soleil, 119, avenue de Lodève, 34070 Montpellier.
** Service de gynécologie obstétrique, CHU de Nîmes, place du Pr Robert-Debré, 30000 Nîmes.
*** Service de radiologie, CHU de Limoges, 2, avenue Martin-Luther-King, 87000 Limoges.
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La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
a question de savoir si la recherche des papillomavi-
rus oncogènes va devenir le test de dépistage le plus
pertinent pour dépister le cancer du col utérin chez la
femme est d’une grande actualité.
Sans entrer dans les enjeux économiques qu’impose une modi-
fication de nos habitudes de dépistage et sans présumer des
possibilités d’application actuelle ou rapide de cette technique,
nous discuterons sur l’apport rationnel que pourrait permettre
l’application de ce nouveau test de dépistage et verrons les
progrès qu’il pourrait être susceptible d’apporter.
CE QUE L’ON DEMANDE À UN TEST DE DÉPISTAGE :
AVOIR LA MEILLEURE PERTINENCE POSSIBLE
Le dépistage d’une maladie doit être simple avec un seul test,
facile à effectuer, reproductible, peu coûteux. Il doit permettre
de découvrir une pathologie traitable à un stade précoce per-
mettant d’éviter l’évolution vers la maladie grave.
Les éléments concernant l’apport d’un test en constituent la
pertinence. Le test doit être sensible, capable de découvrir
parmi les femmes ayant un test de dépistage positif les por-
teuses de l’affection. Les faux positifs doivent être les plus
rares possibles.
Le test doit être spécifique, en cas de négativité du test, il doit
garantir que les patientes non porteuses ne vont pas développer
rapidement la maladie. Les faux négatifs doivent être rares. De
plus, en fonction de la prévalence de la maladie, il doit avoir une
excellente valeur prédictive positive et prédictive négative.
Le dépistage du cancer du col utérin n’est pas organisé en
France. Il est uniquement fondé sur les frottis de dépistage qui,
découvrant des anomalies cytologiques, vont permettre de
dépister les dysplasies et, en les traitant, d’éviter les cancers du
col utérin.
La spécificité des frottis est excellente mais la sensibilité insuf-
fisante puisqu’elle est en moyenne de 60 à 80%.
Cette sensibilité médiocre fait que la pertinence du test n’est
pas excellente et qu’il faut craindre 20 à 40 % de faux négatifs.
Les frottis en phase liquide permettent, selon les études
récentes, une amélioration de cette sensibilité.
Nous discuterons plus loin la limite du dépistage individuel,
limite qui ne sera pas modifiée fondamentalement par l’arrivée
d’un nouveau test comme la détection de l’HPV, mais par
l’extension du dépistage. En effet, le dépistage individuel ne
touche pas toutes les femmes et, en particulier, les femmes aux
conditions socio-économiques défavorisées, celles chez les-
quelles la prévalence du cancer du col utérin est la plus impor-
tante.
LE CANCER DU COL UTÉRIN EST ENCORE RESPONSABLE
DE PLUS DE 1 000 DÉCÈS PAR AN
Le cancer du col de l’utérus représente un problème important
de santé publique ; classé au deuxième rang des cancers de la
femme dans les pays en voie de développement et au huit ou
neuvième dans les pays développés, il apparaît comme le pre-
mier cancer viro-induit prouvé puisque la présence du génome
HPV est observée dans plus de 95 % des cancers cervicaux.
Parmi les HPV oncogènes, responsables de ces carcinomes, le
génotype 16 possède la plus forte prévalence (plus de 50 %),
quel que soit le pays étudié.
La question se pose donc de savoir si connaissant le facteur
étiologique du cancer du col utérin, pour prévenir, en France,
les 3 300 nouveaux cas de cancers du col utérin par an et éviter
plus de 1 000 décès par an, il ne faudrait pas mieux rechercher
ce facteur étiologique.
Rappelons que la pratique des frottis a permis des progrès
considérables depuis la description de Papanicolaou il y a plus
de 50 ans. Le dépistage par frottis a permis de dépister les lésions
dysplasiques et de les traiter, faisant très probablement diminuer
le nombre de cancers invasifs du col et réduisant la mortalité.
DOSSIER
La détection du papillomavirus humain par biologie
moléculaire doit-elle remplacer le frottis dans le dépistage
du cancer du col ?
* Service de gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction, CHU de
Nantes, 9, quai Moncousu, 44093 Nantes Cedex.
** Service de virologie, CHU de Nantes, 9, quai Moncousu, 44093 Nantes Cedex.
P. Lopes*, C. Papy**, M. Coste-Burel**
Detection of human papillomavirus in depistage of cervix cancer
L
CIN 2-3 CIN 2-3
présent absent
Test positif vrai faux
(frottis et/ou HPV) positif (a) positif (b) a + b
Test négatif faux vrai
(frottis et/ou HPV) négatif (c) négatif (d) c + d
a + cb + d Population totale
(a + b + c + d)
Tableau I.
Sensibilité Se = a/a + c. Spécificité Sp = d/b + d. VPP = a/a + b. VPN = d/c + d
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La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
DOSSIER
Pourquoi le cancer du col utérin n’a-t-il pas disparu ?
Parmi les cancers du col utérin observés, on considère que :
Les deux tiers sont secondaires à l’absence de dépistage des
femmes pour lesquelles les mauvaises conditions socio-écono-
miques sont certainement responsables de la majorité des
femmes non dépistées. Ce point est fondamental comme le
rappelait J. Lansac (5) dans un éditorial récent : “Ce cancer, si
simple à dépister et à traiter dans les formes débutantes, ne
mériterait-il pas une organisation comme le dépistage du can-
cer du sein ou le cancer colorectal avant de se lancer dans les
frottis en phase liquide et la recherche du virus HPV ?”.
Pour le tiers restant, on montre du doigt la mauvaise sensibi-
lité des frottis conventionnels et pour une petite catégorie de
patientes par une mauvaise prise en charge.
Pour Mubyahi (2002), qui a repris le suivi cytologique de
146 femmes ayant un cancer du col utérin, 36,8% des femmes
n’ont jamais eu de frottis, 34,5 % ont eu des frottis occasion-
nels, mais tous de plus de trois ans, 8,1 % des femmes ont été
perdues de vues après un frottis positif, 3,4 % ont été traitées
pour dysplasie dans une période de moins de 3 ans et 17,5%
ont eu des frottis négatifs dans la période des trois ans qui a
précédé le diagnostic de cancer. Dix-sept frottis sur 28 ont été
relus et les auteurs ont constaté 15 erreurs et seulement 2 vrais
négatifs.
En France, 6 millions de frottis par an sont réalisés (5 405 402
en 2000), ils touchent 60% de la population et 50% des
femmes de 50 à 55 ans. Seules 20 % des femmes de plus de
60 ans en bénéficient.
L’amélioration du dépistage par frottis doit donc inclure :
La mise en place d’un dépistage organisée avec système de
contrôle invitant les femmes n’ayant pas eu de frottis depuis
3 ans à consulter leur médecin ou leur gynécologue. Comme le
souligne l’Anaes, les médecins faisant des frottis doivent avoir
bénéficier d’une formation.
La technique de prélèvement associe au mieux la spatule
d’ayre et la brosse pour l’endocol.
La technique de conservation et d’étalement peut bénéficier
de la procédure des prélèvements transmis en phase liquide
pour améliorer la qualité de l’étalement et de sa lecture. Dans
son rapport 2004, l’Anaes (1) spécifiait que les aspects coût-
efficacité étaient, en 2002, inconnus et nécessitaient des études
complémentaires.
L’AGENT ÉTIOLOGIQUE DU CANCER DU COL
EST MAINTENANT PARFAITEMENT IDENTIFIÉ
Les papillomavirus sont individualisés depuis peu et forment
l’unique genre de la famille des papillomaviridae. Ces papillo-
mavirus (du latin papilla, diminutif de papula signifiant bou-
ton, et du suffixe grec -ome, désignant le caractère tumoral)
sont des virus très anciens et extrêmement stables, mais leur
caractérisation fut relativement longue, car il n’existe pas de
système cellulaire permettant leur propagation in vitro. C’est
le développement de la biologie moléculaire, dans les années
1970, qui a permis d’établir leur remarquable pluralité, leur
spécificité tissulaire et leur pathogénicité dépendante du géno-
type (8). À ce jour, plus de 120 génotypes de papillomavirus
ont été identifiés ; plus de 100 sont spécifiques de l’espèce
humaine, dont une quarantaine ont un tropisme anogénital. Les
infections génitales liées aux papillomavirus humains (HPV)
sont très fréquentes, en particulier chez les jeunes femmes en
période d’activité sexuelle, et peuvent passer inaperçues ou
être responsables de dysplasies. Ces lésions régressent dans la
majorité des cas, mais peuvent évoluer vers un carcinome
invasif, à la suite notamment de l’intégration de l’ADN viral
au génome cellulaire lié à l’action d’autres facteurs comme
prédisposition génétique, statut immunitaire, comportement
sexuel et tabac.
L’HPV oncogène est donc l’agent étiologique nécessaire –
mais pas suffisant – au développement du cancer. La recherche
des HPV intervient donc bien en amont du dépistage des
lésions dysplasiques et de la révélation d’un cancer du col.
Sa découverte va permettre de mieux identifier une population
à risque et surtout de préciser, pour un grand nombre de
femmes, le non-risque. Cette identification permettra de mieux
conseiller et de mieux surveiller cette population.
La technique de prélèvement et d’identification
Les papillomavirus ne sont pas détectables en routine par des
tests sérologiques ; ils ne sont pas cultivables in vitro. Les
méthodes de détection qualitative et quantitative, ainsi que le
typage de ces virus sont donc essentiellement des techniques
de biologie moléculaire, et reposent sur la mise en évidence
de l’ADN viral dans les cellules infectées. On distingue les
techniques de détection de l’ADN viral sans amplification
(techniques d’hybridation moléculaire) et après amplification
par PCR (techniques d’amplification).
Techniques d’hybridation moléculaire
Plusieurs techniques sont disponibles : le southern blot est une
technique très longue (plusieurs jours), lourde et onéreuse, qui
manque de sensibilité et ne peut être appliquée au dépistage de
masse. Le dot-blot est une méthode qui présente l’intérêt d’être
plus sensible, plus simple et plus rapide que le southern-blot,
mais elle manque de spécificité (faux positifs).
L’hybridation in situ (HIS)
Elle est réalisée sur frottis cellulaires et/ou coupes tissulaires.
Elle permet de préserver la morphologie du prélèvement et de
localiser spécifiquement les cellules infectées, donc d’établir
des corrélations avec l’histopathologie.
Après prétraitement et dénaturation des acides nucléiques,
l’hybridation consiste à déposer une sonde marquée (différents
marquages existent : marqueur radioactif, enzymatique...)
directement sur les cellules ou les coupes de tissus, et à laisser
incuber une nuit à une certaine température. L’aspect du signal
final de révélation permet alors la localisation des zones infec-
tées et aussi de préjuger l’état de l’ADN viral dans le noyau :
un signal ponctué est en faveur d’une intégration au génome
cellulaire alors qu’un signal diffus et homogène évoque plutôt
des formes libres de l’ADN viral dans les cellules.
Cette technique est cependant peu sensible (moins sensible que
le southern-blot et le dot-blot), en particulier pour les formes
cliniques évoluées (lésions de haut grade et carcinome). De
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La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
plus, la quantité de sondes nécessaire est généralement très
importante et proportionnelle à la surface cellulaire ou tissu-
laire à explorer.
L’hybridation en phase liquide
Cette technique d’hybridation moléculaire non radioactive, com-
mercialisée par Digene Diagnostics sous le nom de Hybrid
Capture™, a été agréée comme méthode de détection des HPV
par la Food and Drug Administration. Une trousse de deuxième
génération (plus sensible que Hybrid Capture I™) est utilisée,
depuis 1997, comme complément de la cytologie, aux États-Unis
et dans la plupart des pays européens (6).
À partir d’un brossage cervicovaginal, la détection de l’ADN viral
se fait par hybridation avec des sondes ARN. La capture des
hybrides est réalisée avec un anticorps spécifique des hybrides et
ces couples ADN/ARN sont ensuite révélés par une technique
immunoenzymatique utilisant un substrat qui permet une amplifi-
cation du signal par un mécanisme de chimioluminescence.
Il existe deux mélanges de sondes : sondes d’ARN spécifiques
de 13 types d’HPV à haut risque oncogène et de 5 types
d’HPV à bas risque oncogène (6).
C’est une méthode simple, rapide (environ 4 heures), repro-
ductible, très sensible et applicable en routine à de grandes
séries. Elle permet aussi une analyse semi-quantitative de la
charge virale, mais elle ne permet pas de génotyper spécifique-
ment l’HPV isolé à partir des cellules infectées.
Les techniques d’amplification
La PCR
À l’heure actuelle, la technique d’amplification en chaîne de
séquences d’ADN par la polymérase (polymerase chain reac-
tion ou PCR) est la méthode la plus sensible (elle nécessite 10
à 100 copies d’ADN dans le prélèvement pour être positive)
pour mettre en évidence l’HPV au niveau des prélèvements
génitaux. C’est la technique utilisée au CHU de Nantes.
Cette réaction est le plus souvent réalisée à l’aide d’amorces
dites consensus ; elles sont choisies au sein des régions com-
munes et très conservées des génomes d’HPV et permettent
l’amplification de la grande majorité des génotypes anogéni-
taux. Les amorces consensus les plus couramment citées dans
la littérature sont les couples MY09/MY11 et GP5+/GP6+,
tous deux localisés dans la région L1. L’identification du
génotype précis d’HPV s’effectue, dans un second temps, à
partir du produit de PCR ; différentes stratégies peuvent être
suivies : hybridation à l’aide de sondes spécifiques, analyses
de profil de restriction, séquençage direct du produit de PCR
(cette dernière solution a été choisie chez nous). Pour augmen-
ter la sensibilité de la PCR, on peut utiliser deux couples
d’amorces et réaliser deux PCR successives (PCR nichée ou
nested-PCR).
À côté de ces techniques “maison”, une trousse PCR (marquée
CE-IVD) vient récemment (mai 2004) d’être commercialisée
par Roche diagnostics sur le principe de la détection globale
des 13 génotypes HPV à haut risque avec absence de génoty-
page précis.
La PCR reste une technique délicate, exposée aux risques de
contamination.
La PCR in situ
Au même titre que l’hybridation in situ, cette technique qui per-
met d’associer la très grande sensibilité de la PCR et la localisa-
tion tissulaire des acides nucléiques et de génotyper des HPV sur
des coupes fixées en paraffine, se révèle souvent très délicate, dif-
ficile dans sa réalisation et sa reproductibilité, avec un risque de
faux positifs lié à un bruit de fond trop élevé.
La PCR quantitative
Le développement de PCR quantitatives, notamment celles fon-
dées sur la technologie récente en temps réel, permet de mesurer
la charge virale du virus au sein d’un échantillon. L’apport de ce
paramètre quantitatif en tant que facteur pronostique d’évolutivité
de la lésion cervicale reste encore néanmoins à évaluer.
L’IMPORTANCE DES COFACTEURS
POUR LE DÉVELOPPEMENT DES CANCERS DU COL UTÉRIN
Si la présence d’HPV oncogènes est nécessaire au développe-
ment des lésions intraépithéliales, le fait qu’une minorité de
femmes soit susceptible de développer un cancer, indique
qu’elle ne saurait, à elle seule, expliquer l’évolution vers la
cancérisation. En effet, de nombreux facteurs exogènes et
endogènes jouent un rôle dans les étapes d’initiation, de pro-
motion et de progression tumorale :
– comportement sexuel (nombre de partenaires sexuels, préco-
cité des premiers rapports sexuels et des grossesses) ;
– grossesses multiples (lié aux traumatismes lors de l’accou-
chement, mais également aux modifications hormonales et
immunologiques pendant la grossesse, exposition secondaire
de l’endocol à l’environnement vaginal qui favorise la méta-
plasie et le développement des virus HPV) ;
– antécédents de lésions génitales ou de MST chez le parte-
naire (infection herpétique HSV2 en particulier, infection à
Chlamydia trachomatis...). Certains agents pathogènes pour-
raient constituer des cofacteurs de promotion des lésions dys-
plasiques ;
– statut immunitaire : les femmes immunodéprimées sont plus à
risque de développer des lésions dysplasiques. Cela est notamment
observé chez les transplantées rénales et les dialysées (chez les
allogreffées de moelle osseuse, la prévalence des infections HPV
est moins élevée), ainsi que chez les patientes VIH+ où la progres-
sion des lésions est d’autant plus importante que le nombre de
lymphocytes CD4+ est faible. Le risque est, en effet, très élevé si
le taux de CD4+ est inférieur à 500 par µl.
Les défenses immunitaires sont également perturbées lors d’une
longue période de stress, de dépression et chez les femmes
atteintes de maladies auto-immunes (LED, sarcoïdose, polyarthrite
rhumatoïde, diabète...). Tous ces événements sont fréquemment
associés au développement de lésions liés à HPV.
L’immunité cellulaire joue un rôle majeur dans le contrôle de
l’infection à HPV et dans l’évolution des lésions dysplasiques ; en
particulier, la présence d’une immunité cellulaire spécifique vis-à-
vis de la protéine E6 des HPV16 (lymphocytes T mémoires) favo-
riserait la clairance virale (Welters et al., 2003) :
Prédisposition génétique. La mutation de la p53 est un facteur de
risque familial. De plus, certaines prédispositions génétiques,
DOSSIER
19
DOSSIER
notamment au niveau du système HLA (particulièrement impli-
qué dans les mécanismes de défenses de l’organisme), augmente-
raient le risque de développer un cancer.
Tabac : il engendre une immunodépression locale et favorise à la
fois l’évolution vers le cancer et les récidives des lésions virales.
EXEMPLE DE L’ÉTUDE FAITE AU CHU DE NANTES
Avant janvier 2004, la recherche d’HPV était proposée dans le
cadre du diagnostic des lésions cervicales suspectes ou identi-
fiée sur frottis et/ou biopsies ou proposée chez des femmes
ayant des antécédents de CIN.
Entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2002, 78 femmes,
chez lesquelles un HPV16 a été détecté et typé au niveau géni-
tal, ont été incluses dans une étude rétrospective. Elles étaient
âgées de 20 à 75 ans (moyenne d’âge de 35,2 ± 11,2), avec une
répartition selon l’âge comme suit :
– 23 femmes âgées de 20 à 29 ans (29,5 %) ;
– 34 femmes âgées de 30 à 39 ans (43,6 %) ;
– 13 femmes âgées de 40 à 49 ans (16,7 %) ;
– 5 femmes âgées de 50 à 59 ans (6,4 %) ;
– 3 femmes âgées de plus de 59 ans (3,8 %).
Toutes les patientes ayant un HPV 16 ont été convoquées pour
une colposcopie avec prélèvement histologique dirigé en cas
d’anomalies histologiques.
Au total, on souligne que 18 patientes avaient un HPV 16 posi-
tif sans lésion cytohistologique, soit 20% de la population des
femmes porteuses d’HPV oncogène.
LES DONNÉES DE LA LITTÉRATURE MONTRENT
UNE MEILLEURE PERTINENCE POUR LA RECHERCHE
DU VIRUS CHEZ LES FEMMES DE 30 À 60 ANS
Depuis 5 ans on percevait un changement possible de la prise
en charge du dépistage. L’article de Cuzick, publié le 6
décembre 2003 (2), permet d’envisager un changement radical
d’attitude en privilégiant la recherche de l’HPV. Dans cette
étude, la recherche d’HPV s’est faite par Hybrid Capture™.
Il s’agit d’une étude multicentrique, réalisée de 1998 à 2001,
comprenant 11 085 femmes de 30 à 60 ans et portant sur
10358 femmes éligibles. Quatre groupes ont été initialement
définis :
Un premier groupe de 147 femmes qui ont eu 2 à 3 FCV non
satisfaisants et ont été référés en colposcopie : 123 colposcopies
réalisées ont permis d’éliminer une dysplasie, 21 femmes ne sont
pas venues faire la colposcopie et 3 colposcopies étaient inadé-
quates.
Un deuxième groupe de 213 femmes avec anomalies cytolo-
giques imposant une prise en charge immédiate (dyscaryose ou
lésions de haut grade). Une colposcopie a été prescrite ; 199 col-
poscopies étaient contributives et ont permis, sur la biopsie diri-
gée, de diagnostiquer 70 CIN de grade 2 et plus ; 3 colposcopies
étaient inadéquates et 11 femmes n’ont pas fait la colposcopie.
Un troisième groupe de 9173 femmes qui avaient à la fois
une cytologie normale et une recherche d’HPV négative. Dans
ce groupe, après randomisation, 460 colposcopies ont été pres-
crites et aucune dysplasie n’a été diagnostiquée parmi les 283
colposcopies contributives. Pour 8 713 femmes, un suivi habi-
tuel tous les 3 à 5 ans a été recommandé.
Enfin un quatrième groupe de 825 lésions cytologiques border-
line ou de recherche d’HPV positif ou les deux associés. Ces
femmes ont été randomisées entre colposcopie immédiate et suivi
cytologique et recherche d’HPV : 414 femmes ont eu une pres-
cription de colposcopie versus 411 femmes pour surveillance. Les
principaux résultats de cette étude sont riches d’enseignement :
– 90 lésions de haut grade sur histologie sont rapportées pour
toute la population ;
– pour les frottis, la sensibilité a été de 70,1 % pour les hauts
grades, la spécificité de 98,6 % et la VPP de 34,0 % ;
– toutes les femmes qui avaient une lésion de haut grade avec
FCV borderline étaient HPV positives ;
– il n’y a pas eu de lésions de haut grade chez les 178 femmes
avec cytoborderline et HPV négative (73 % des lésions border-
line). Chez les 9 femmes ayant une lésion de haut grade et
suivi, il n’y a pas eu de négativation du test HPV.
Si l’on compare les deux tests en dépistage des lésions de
CIN2 et plus, on note une pertinence meilleure en faveur de la
recherche d’HPV :
La lecture de cet article fait donc poser la question du rempla-
cement des frottis par la recherche de l’HPV en dépistage pri-
maire chez les femmes de plus de 35 ans.
LES RECOMMANDATIONS ACTUELLES
L’Anaes a publié, en 2002, un rapport sur le dépistage du can-
cer du col utérin puis en 2004 un rapport complet sur l’évalua-
tion de l’intérêt de la recherche HPV dans le dépistage des
lésions précancéreuses et cancéreuses du col de l’utérus. La
La Lettre du Gynécologue - n° 302 - mai 2005
Cytologie ou Nombre de % de la population
histologie patientes/89
Normal 5 5,6
Interprétation limitée 1 1,1
Inflammatoire 12 13,5
Condylome
SIL de bas grade 11 12,3
SIL de haut grade
Carcinome invasif 59 66,3
Histologie non retrouvée 1 1,1
Tableau II. Classement des résultats anatomopathologiques des échan-
tillons.
Cytologie ou Nombre de % de la population
histologie patientes/89
“négatif” 18 20,2
“positif” 70 78,7
Tableau III. Classement des résultats anatomopathologiques des échan-
tillons. HPV FCV P
Sensibilité 97,1 76,6 0,002
Spécificité 93,3 95,8 P < 0,0001
1 / 6 100%
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