Construction unitaire de l’État et sa remise en cause 17
taient les coutumes générales d’un Pays. La féodalité influença
durablement le droit privé. La diversité des conditions juri-
diques résultait de la diversité des états. Chaque service devant
être rendu permettait de revendiquer les privilèges qui en
constituaient la contrepartie. La noblesse, le clergé et le tiers
état n’étaient donc pas soumis aux mêmes règles de droit. Les
clercs n’étaient, par exemple, justiciables que des Tribunaux
ecclésiastiques, les officialités. Plus encore, l’Église avait
imposé, dès le Xesiècle, sa juridiction en matière matrimoniale.
Le droit corporatif constituait également une importante source
du droit. Les communautés de métiers encadraient strictement
l’activité économique grâce au pouvoir réglementaire qu’elles
s’étaient arrogées. Elles étaient toutefois animées par de puis-
santes solidarités. Leurs membres bénéficiaient de franchises
ou d’immunités qui servaient tout à la fois leur bien propre et le
bien commun. L’inégalité était donc la règle, car chacun s’em-
ployait à se distinguer des autres.
L’affirmation du pouvoir royal entraîna cependant une cer-
taine harmonisation du droit. L’unification politique du royaume
permit, dans une large mesure, son unification juridique.
L’origine la plus lointaine du mouvement conduisant à la codi-
fication fut, en 1454, l’ordonnance de Montils-lès-Tour exigeant
la rédaction des coutumes. Plusieurs centaines de coutumiers
furent rédigés et diffusés avec l’invention de l’imprimerie. Ces
coutumes furent ensuite réformées à de nombreuses reprises
sous le contrôle des Commissaires royaux, dont l’intervention
contribua à leur unification. Des jurisconsultes, tel Loisel avec
les Institutes coutumiers, s’efforcèrent également de les étudier
et de les comparer. La Coutume réformée de Paris de 1580
devint même une coutume type, un modèle.
Parallèlement, le pouvoir royal s’efforçait de codifier sa
propre législation. C’est ainsi que, sur l’ordre d’Henri III,
Barnabé Brisson, président au parlement de Paris publia en
1587 un recueil de plusieurs milliers d’actes royaux. Bien qu’il