Sixième Journée de réinformation de Polémia

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 Sixième Journée de la réinformation
La désinformation publicitaire et comment y faire face ?
Samedi 26 octobre 2013
Intervention de Bruno Gabriel
Polemia.com
56/10/2013
1 Les techniques de manipulation publicitaires, comment échapper à l’ahurissement ? Introduction Dans notre modèle démocratique, deux institutions devraient, de manière privilégiée, contribuer à la réalisation d’une vie citoyenne caractérisée par la pensée et la discussion critique : l’éducation et les médias. Si vous êtes aussi nombreux aujourd’hui c’est que la réalité ne vous parait probablement pas aussi idyllique. Alors qu’elle s’adressait par le passé aux facultés conscientes de notre psyché -­‐ souvenons-­‐nous des réclames des années 40 énumérant les qualités du produit -­‐ la publicité d’aujourd’hui, est dans le non-­‐dit, dans des sourires, des formes suggestives, des ambiances et des couleurs, des émotions et des excitations qui nous sont délivrés sur mesure. Parfois, le produit est à peine cité, voire pas du tout. Le message n’agit plus par le biais de l’analyse, mais par celui de la persuasion inconsciente en laissant des traces mémorielles « implicites » dans notre cerveau. C’est la raison pour laquelle nous sommes incapables de citer les 350 publicités que nous avons croisées hier, ni d’estimer l’impact des milliers de stimuli commerciaux (enseignes de magasins, logos sur les vêtements, appareils ménagers, voitures…) reçus dans la même journée. Expérience sur l’attention de Daniel Simons A moins de faire des provisions pour plusieurs années et d’aller vivre dans une caverne sans télévision ni internet, il est donc très difficile de se soustraire à la publicité et à ses conséquences. Nous allons cependant étudier quelques moyens permettant d’en réduire l’influence, en passant en revue différents supports ou situations à risque, avant de proposer des solutions plus générales. Nous nous intéresserons particulièrement aux mécanismes psychologiques mis en œuvre par la publicité afin de bien les comprendre. Il a en effet été démontré qu’un conditionnement psychologique ne fonctionne pas si le sujet a été préalablement informé des intentions sous-­‐
jacentes. En mobilisant sa conscience et son attention ce dernier a alors pu préserver une liberté de réaction. La presse écrite L’influence psycho-­‐cognitive de la publicité dans la presse écrite peut être considérée comme relativement limitée par rapport à d’autres médias. En effet, contrairement à ce qui se passe avec la télévision, lorsque nous lisons, notre cerveau crée des images mentales à partir de mots, ce qui limite le risque de manipulation par la publicité (mais pas par les contenus, c’est là un autre débat). De plus, en lisant, nous restons maîtres du rythme de production de ces images, ce qui facilite le recul et la réflexion. 2 Nous allons cependant nous arrêter un instant sur une exception notable : la presse féminine. Les femmes étant les principales responsables des achats du ménage (70% des achats dans la vie de tous les jours) elles constituent une cible de choix, ce qui explique que les magazines féminins sont composés presque pour moitié de publicité. Le reste du contenu, généralement difficile à distinguer (que ce soit thématiquement ou graphiquement), participe souvent au renforcement des effets de la publicité en utilisant des mécanismes culpabilisants de comparaison sociale (photos retouchées, faux témoignages, femmes modèles qui réussissent…) ou d’injonctions contradictoires (occupez-­‐vous de vous / occupez-­‐vous des autres, maquillez-­‐vous / soyez naturel…). L’injonction contradictoire : l’injonction contradictoire – également fréquemment utilisée à la télévision -­‐ explique qu’une publicité pour des barres chocolatées puisse suivre une publicité pour un régime ou que les recettes de cuisine sont souvent à la fin des magazines. Le mécanisme qui se met en place inconsciemment chez le téléspectateur ou le lecteur est le suivant : dans un premier temps, les images de mannequins ultra-­‐minces provoquent des sentiments négatifs de morosité, d'infériorité et de dévalorisation. Mais dans un second temps, le besoin de se sentir mieux va déboucher sur une perte de contrôle alimentaire, et des élans compulsifs vers la nourriture, surtout la nourriture sucrée. Les deux stimulations, minceur et chocolat, se répondent finalement assez bien dans cette complémentarité des mécanismes psychologiques. La coexistence de normes publicitaires contraignantes, telle que la minceur et le plaisir de manger fait que ces normes se renforcent mutuellement, la première suscitant la frustration et la seconde apportant une consolation à cette frustration. Ces techniques peuvent, à long terme, entrainer anxiété, sentiment d’impuissance, mauvaise estime de soi et dans les cas extrêmes, favoriser les comportements d’anorexie ou la dépression1. La manipulation, dans les magazines féminins, porte aussi sur le choix des thématiques abordées, généralement très réductrices, que l’on pourrait résumer de la sorte : -­‐ des conseils minceur, beauté, hommes, astrologie, sexologie, achats ou régimes ; -­‐ des dossiers sur la situation des femmes afghanes, des fillettes africaines excisées ou sur le régime minceur – et équitable – d’une écrivaine [sic] germanopratine ; -­‐ des jeux, des tests, des horoscopes. 3 Une de la rubrique actualité sur elle.fr au moment de la rédaction de cet article (septembre 2013) (http://www.elle.fr/Societe/News/Les-­‐talibans-­‐executent-­‐une-­‐ecrivaine-­‐indienne-­‐2575624) 4 Exemples de Unes du magazine Marie Claire (juin 2009 et aout 2013) 5 La presse masculine, en plein développement, n’est pas en reste (GQ – avril 2012) Ce qui est particulièrement pernicieux avec la presse féminine c’est qu’il est difficile d’y échapper. Ainsi, alors qu’elles sont beaucoup moins nombreuses à l’acheter, près d’une femme sur deux lit régulièrement la presse féminine. Nous la trouvons en effet de partout : collègues, amies, salles d’attentes, salons de coiffure, clubs sportifs… Autant de situations « à risques », puisque nous avons alors tendance à feuilleter plutôt qu’à lire, enregistrant sans le savoir les images et les messages des marques. Vous l’aurez compris, méfiez-­‐vous particulièrement de la presse féminine (et n’oubliez pas d’emmener un livre lors de votre prochaine visite chez le dentiste). Internet La publicité en ligne étant en très forte croissance (en Europe, 11 % des dépenses en 2006, 25% en 2012), nous constatons une multiplication des espaces et des supports. Outre les e-­‐mails promotionnels (spam) ou l’affichage de bannières, aisément identifiables, la publicité en ligne peut prendre des formes plus subtiles. Nous pouvons citer par exemple l’occupation des réseaux sociaux par les marques, les faux témoignages d’internautes (bien que théoriquement interdits en France) ou les bloggeurs rémunérés pour promouvoir un lieu ou un produit. Avant toutes choses, il est important de savoir que sur internet, « si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit », c’est-­‐à-­‐dire que ce sont vos informations personnelles, vos historiques d’achats ou de recherches qui sont vendus. Fort de ce constat, il convient d’être particulièrement attentif aux informations que vous diffusez en ligne. Ainsi lorsque cela est possible il est préférable de saisir de fausses informations et d’utiliser une ou plusieurs adresses e-­‐mail alternatives que vous consulterez de temps en temps. Il existe aussi des services spécialisés qui proposent des adresses « jetables » ; utilisables par exemple lorsque vous 6 avez simplement besoin de recevoir des identifiants de connexion à un site. Cela permet de limiter la quantité de messages promotionnels reçus. Intéressons-­‐nous maintenant aux techniques fréquemment mises en œuvre sur les sites de ventes en lignes : -­‐
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la norme sociale (« Ceux qui ont acheté ce produit ont aussi acheté… ») ; l’effet d’opportunité (« Plus que deux sièges disponibles à ce prix » -­‐ qui utilise d’ailleurs aussi la norme sociale). La norme sociale : la psyché humaine est prédisposée à obéir et à se conformer à l’autorité et au groupe (instinct grégaire). Dans des cas d’incertitude, de situation confuse ou ambiguë, le consommateur s’en remet aux autres pour savoir quelle conduite adopter, pour prendre une décision ou pour juger si un comportement est acceptable ou non. L’homme suit le troupeau, la majorité, pour se sentir plus sûr de lui. En élaborant la perception que de nombreuses personnes se sont orientées vers telle marque ou tel produit, il est possible de provoquer l’achat par émulation. Ceci est d’autant plus vrai lorsque le consommateur s’identifie à un groupe d’individus, il se reconnaît en eux. Extrait vidéo de l’expérience de Solomon Asch publiée en 1951 -­‐ 75% des sujets testés se sont conformés au moins une fois aux réponses du groupe. La pénurie : inconsciemment, la valeur d’un bien, sur la base des normes de la demande et de l’offre, est directement proportionnelle à sa pénurie. Ceci est surtout valable pour les symboles sociaux. La rareté d’un bien enrichit son possesseur. De là, le succès de rappels publicitaires tels que « édition limitée », « disponibilité limitée », « exclusivité », « offre limitée » ou « signez maintenant, sinon nous ne pouvons pas garantir l’offre »2. Capture d’un site utilisant « l’effet d’opportunité » et la « norme sociale » 7 Capture d’un site utilisant fortement « l’effet d’opportunité » …mais sont-­‐ce vraiment des opportunités ? 8 Nous pouvons aussi souligner le fait que la dématérialisation totale des paiements en ligne facilite l’acte d’achat en le fluidifiant (on peut acheter en un clic sans interrompre sa navigation). Cette dématérialisation a aussi pour effet de baisser le coût psychologique de la dépense, nous poussant à acheter plus (cela est aussi valable lors du paiement par cartes bancaires dans les boutiques non-­‐
virtuelles). Afin de limiter notre exposition à la publicité, nous pouvons recommander l’usage d’extensions qui s’adjoignent aux navigateurs afin d’en compléter les fonctionnalités. Certaines permettent de bloquer facilement la quasi-­‐totalité des publicités, d’autres de limiter les « traces » que vous laissez. Adresse e-­‐mails « jetables » : yopmail.fr, mailinator.com Extension de blocage de la publicité : adblock plus Extension de blocage des outils de « tracking » et des statistiques : ghostery Quelques outils pour se « protéger » sur internet Démonstration d’un article du monde.fr vu avec l’extension adblock plus active et inactive Il convient toutefois de garder à l’esprit que la publicité est aussi au cœur du modèle de gratuité des contenus sur internet. L'utilisation de ces outils pose donc de plus en plus de problèmes à ceux qui les produisent. Ainsi il est important, lorsque vous utilisez ces extensions, de placer les sites que vous souhaitez soutenir sur liste blanche afin de continuer à afficher la publicité. Vous pouvez aussi, lorsque cela est proposé, faire un don afin de soutenir l’indépendance financière d’un site que vous consultez régulièrement. La télévision La télévision est le premier secteur de dépenses publicitaires dans le monde. Cela s’explique par l’importance du public touché (97% des foyers français) et de la durée d’exposition. Evolution de la durée moyenne journalière de visionnage de la télévision en France – source : Médiamétrie / Médiamat 9 Sur une vie entière, cette moyenne c’est environ 20 ans (hors sommeil) passés assis devant la télévision (et donc environ 2 ans de publicité). La vidéo, de par la variété des mécanismes psycho-­‐cognitifs utilisables, est un support publicitaire extrêmement efficace, ce qui explique l’envahissement de notre quotidien par les écrans (salles d'attentes, boutiques, transports en commun…). Voyons comment cela fonctionne. Structure temporelle des programmes et des publicités (changements rapides de plans et de contenus) Les effets de ce mécanisme sont multiples : -­‐
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Chaque nouvelle confrontation à une image (ou à un logo) en renforce la mémorisation. Avec l’expérience, l’habitude, le cerveau la traite de plus en plus vite. Il la reconnaît, la lit, l’analyse rapidement. C’est ce que l’on appelle la fluidité cognitive. Traiter plus rapidement une information, comme un logo, le conduit à lui attribuer une valeur positive car le fait de s’habituer à une information, la rend plus familière, voire plus agréable3. Lorsque l’information est diffusée sur un mode rapide et en flux tendu, le cerveau humain tend à la considérer comme vraie, sans se poser la question de sa validité. Il semble en effet que ce présupposé de vérité aide à assimiler le contenu, l’articulation et le sens d’une information4. En mobilisant l'attention de notre cerveau, la fréquence des coupes et des changements de plans permet de capter l’attention du téléspectateur. En effet, le renouvellement permanent des images, produit à chaque fois une sorte de déclic lié à la nouveauté. La fréquence des changements de plan s’accompagne aussi d’une baisse du rythme cardiaque et d’un afflux de sang au cerveau, probablement lié à la mobilisation de l’attention vers la nouveauté. Cet effet est d’autant plus important que l’écran est grand. Ce mécanisme expliquerait l'état d’apparente relaxation (ou de torpeur) que l'on peut ressentir en regardant la télévision, et par là même la difficulté à s’en détacher5. Une publicité de 30 secondes pour Hertz – 2010 Extrait de 30 secondes d’un débat sur BFM TV – 2012 Extrait de 30 secondes d’un débat sur la R.T.F. – 1959 Utilisation de célébrités Il a été prouvé que l’association d’une célébrité à une marque, en générant un transfert inconscient d’un sentiment positif vers la marque, entraîne des préférences vis-­‐à-­‐vis des produits particulièrement persistantes (conditionnement évaluatif). Ce même mécanisme est déclenché par le petit bonhomme vert de la Cetelem (sympathique et inoffensif) ou par l’expert en blouse blanche (situation valorisante) qui nous explique que Colgate renforce l’email de nos dents. Le conditionnement évaluatif : il s'agit sans doute du mécanisme psychologique le plus utilisé par la publicité. Il consiste à associer un stimulus chargé émotionnellement (par exemple, la joie, la sympathie, une musique agréable ou une célébrité...) à un stimulus neutre (la marque du produit), 10 même si cette association est dénuée de toute logique. Le conditionnement évaluatif fonctionne car nous disposons d’un mécanisme de « mémoire émotionnelle » particulièrement efficace et durable. En effet les situations qui suscitent des émotions fortes sont les plus importantes pour notre survie, il s'agit donc de les mémoriser. Ainsi, la noradrénaline nous fait mémoriser tous les détails d'une rue où nous avons été agressés, pour ne plus jamais y mettre les pieds. Elle nous fait aussi mémoriser le contexte d'une rencontre amoureuse, sans doute pour nous pousser à recommencer l'acte reproductif et procurer le plus de chances de survie à nos gènes… et elle peut nous faire retenir le nom d'une marque de vêtements, si la photographie qui l'accompagne suscite en nous une vive émotion6. Ciblage des enfants En raison de la formation inachevée de leur système nerveux central et de l'extrême réceptivité et plasticité de leur cerveau, les enfants et adolescents sont beaucoup plus sensibles au conditionnement que les adultes, et ce, avec des effets beaucoup plus profonds et limitatifs de leur liberté. La recherche montre que jusqu'à l'âge de 8 ans, la plupart des enfants ne possèdent pas les capacités cognitives nécessaires pour comprendre que la publicité n'est pas simplement une source d'informations et présente un point de vue biaisé. Bien que les enfants plus âgés et les adolescents puissent comprendre l'intention de la publicité, cette information est sans effet sur leurs comportements et ils ne tentent pas de contrecarrer son influence. En effet, résister à la publicité exige aussi la capacité de peser les conséquences sanitaires à long terme d’une consommation contre une récompense à court terme, une capacité qui n'est pas entièrement développée avant l’âge de 20 ans. Au-­‐delà du fait que les enfants sont une excellente cible pour inciter les parents à débourser, la rectification d'idées acquises est plus difficile pour un individu que l'apprentissage d'idées nouvelles pour lesquelles il ne possède pas encore de modèle (dissonance cognitive). S’adresser aux enfants est donc une excellente opportunité pour une marque d’acquérir un consommateur « à vie », ce qui explique l’intérêt particulier que porte l’industrie agro-­‐alimentaire aux publicités dirigées vers les enfants. Ils sont aidés en cela par les politiques qui n’ont pas voté de textes interdisant la publicité dans les programmes pour enfants (comme c’est pourtant le cas dans d’autres pays). Des études estiment qu’à l’âge de trois ans, un enfant américain est capable de reconnaitre en moyenne 100 logos de marques. A l’âge de 10 ans, il aura mémorisé entre 300 et 400 marques. La dissonance cognitive : selon cette théorie, l'individu en présence de cognitions incompatibles entre elles (connaissances, opinions ou croyances sur l’environnement, sur soi ou sur son propre comportement), éprouve un état de tension désagréable : c'est l'état de « dissonance cognitive ». Dès lors, cet individu mettra en œuvre des stratégies inconscientes visant à restaurer un équilibre cognitif. L'une des stratégies pour réduire la dissonance cognitive consiste à modifier ses croyances, attitudes et connaissances pour les accorder avec la nouvelle cognition ; elle est appelée « processus de rationalisation ». Plus l'investissement et l'engagement de la personne lui ont coûté, moins elle est prête à y renoncer. Selon le psychologue américain, Gregory Bateson : 11 Plus un apprentissage a été difficile, malaisé, douloureux ou même humiliant, moins l'individu est prêt à remettre en cause la valeur de ce qui lui a été enseigné. Cela signifierait en effet qu'il a investi et souffert pour rien. Lors d'enquêtes, on observe que plus un choix s'est montré difficile et engagé (d'une grande école, d'un appartement, voire d'un conjoint), plus nous aurons ensuite tendance à estimer avoir effectué le bon, et donc à oublier certains éléments de l'environnement ayant peu de rapport avec ce choix. Les mécanismes des ventes pyramidales s'appuient fortement sur le refus irrationnel de faire marche arrière suite à un engagement7. Au regard de la variété et de l’efficacité des techniques de manipulation mises en œuvre, il est donc particulièrement recommandé de limiter notre exposition à la télévision. Nous veillerons aussi à éteindre la télévision lorsque nous ne la regardons pas (alors que cette dernière est allumée en permanence dans 4 foyers français sur 10) et à limiter au maximum l’exposition des enfants à la publicité (et à la télévision en général pour les plus jeunes). Quelques mots sur télévision et santé publique Au-­‐delà de l’influence des contenus (publicités ou programmes), qui impactent comme nous l’avons vu, nos comportements, toutes les études sur les effets de la télévision prouve la forte nocivité physiologique et psychologique du simple visionnage. Michel Desmurget, docteur en neurosciences et chercheur à l’INSERM a analysé et synthétisé les résultats de plusieurs publications scientifiques sur le sujet. Sophie, 2 ans, regarde la télé 1 heure par jour. Cela double ses chances de présenter des troubles attentionnels en grandissant. Lubin, 3 ans, regarde la télé 2 heures par jour. Cela triple ses chances d'être en surpoids. Kevin, 4 ans, regarde des programmes jeunesse violents comme DragonBall Z. Cela quadruple ses chances de présenter des troubles du comportement quand il sera à l'école primaire. Silvia, 7 ans, regarde la télé 1 heure par jour. Cela augmente de plus d'un tiers ses chances de devenir une adulte sans diplôme. Entre 40 et 60 ans, Yves a regardé la télé 1 heure par jour. Cela augmente d'un tiers ses chances de développer la maladie d'Alzheimer. Henri, 60 ans, regarde la télé 4 heures par jour. René, son jumeau, se contente de la moitié. Henri a 2 fois plus de chances de mourir d'un infarctus que René. Extrait de la quatrième de couverture de l’ouvrage « TV lobotomie » de Michel Desmurget qui résume quelques-­‐uns des résultats d’études les plus marquants Ce qui peut sembler assez ironique au regard de la multiplication des émissions ou des chaines santé (« MCS Bien-­‐être, la 1ère chaîne qui prend soin de vous ») 12 Résultat représentatif d’une étude allemande de Peter Winterstein sur 2000 élèves de 5-­‐6 ans, à qui il était simplement demandé de dessiner un bonhomme. En haut, moins d’une heure de télévision par jour. En bas, 8
plus de trois heures de télévision par jour . Comme vous pouvez le constater, l’excès de télévision a des effets très négatifs sur le développement des enfants. En effet pour les enfants en bas âge, la télévision est une boîte qui accapare l’attention par le changement perpétuel à travers des mécanismes-­‐réflexes, sans produire des signes intelligibles, donc sans leurs profiter de quelque manière que ce soit. Les enfants qui jouent lorsque qu'une télévision est allumée en arrière-­‐plan vont être fréquemment détournés de leurs activités par un flash lumineux, un cri ou un son brusque. Sur le long terme, ces interruptions affectent la capacité d'attention et limite fortement la complexité des jeux imaginés. D’autre part, en limitant les interactions avec un locuteur, la télévision ralentit l’apprentissage de la langue (c’est aussi valable pour les autres activités cérébrales). A cela s’ajoute le fait qu’une télévision allumée réduit de 30 % le nombre de mots échangés entre les parents, autant de mots que l'enfant n'entendra pas et avec lesquels il ne se familiarisera pas. Conclusion Dans ce contexte, compte tenu de la complexité des phénomènes que nous venons de décrire, nous pourrions nous interroger sur les responsabilités, notamment de l’Etat et des citoyens. J'ai retenu pour ce faire deux citations. La première est d'André Gandillon, rédacteur en chef de revue "Militant". Il nous dit : « L'État doit retrouver un rôle directeur dans l'orientation de l'activité économique. Celle-­‐ci doit être soumise à l'intérêt national, au bien commun et non pas à l'intérêt de puissances privées comme c'est le cas actuellement, avec des institutions financières aux capitaux anonymes et divers groupes de pression idéologiques et autres officines plus ou moins occultes. Le maintien d’un secteur public, d’un 13 contrôle des pratiques des entreprises et de la publicité, permet une meilleure protection des individus ». La seconde est un extrait de discours de Noam Chomsky, un intellectuel américain qui évoque nos responsabilités en tant que citoyens. « (…) Quand vous avez des activistes, des gens politisés, des gens qui consacrent leur vie à promouvoir des changements sociaux, alors des gens comme moi peuvent émerger. Notre importance est attribuable aux autres. Mon travail, que ce soit de donner des conférences, ou d’écrire 20 heures par semaine ne s’adresse pas aux intellectuels ou aux politiciens ; il s’adresse à ces gens que l'on dit ordinaires. Et ce que j’attends d’eux c’est exactement ce qu’ils sont. Ils devraient être fidèles à eux-­‐mêmes et essayer d’améliorer le monde. Pour cela il faut le comprendre. Mon rôle est de donner des cours d’autodéfense intellectuelle. (…) On n’apprend pas ça à l’école. Il s’agit d’acquérir une indépendance d’esprit. D’y travailler. On y arrive rarement seul. La « beauté » du système, c’est qu’il isole. Chacun seul en face de la télé. C’est difficile de penser dans ces conditions. On ne peut pas lutter seul. Très peu le peuvent. (…) Il faut voir ce que les institutions tentent de faire car c’est la clé, c’est ce que l'on doit combattre. Si elles essaient d’isoler les gens, de les séparer, notre rôle est de les réunir. Vous devez chercher des moyens d’actions alternatifs et vous réunir avec des gens aux préoccupations semblables, aux valeurs similaires, désireux d’en entraider d’autres à se prémunir contre le pouvoir, à se prendre en main et aller au-­‐devant d'eux. C'est un ensemble d'intérêts. Vous apprendrez à vous défendre conjointement avec d’autres. (…) Très peu de gens ont le temps et l’énergie de mener ce perpétuel combat qui les fera aller au-­‐delà de ce qui nous est imposé par les médias ; les illusions nécessaires sont faites pour tromper et tenir à l’écart la majorité. » C'est là tout l'intérêt d'une organisation comme Polémia et en assistant à cette journée de « réinformation », nous avons déjà fait un grand pas dans cette direction. Merci pour votre attention. 1
150 petites expériences de psychologie des médias -­‐ Sébastien Bohler MARCO DELLA LUNA et PAOLO CIONI -­‐ NEURO-­‐ESCLAVES, Manuel scientifique d’auto-­‐défense 3
SCIENCES ET AVENIR (septembre 2009) & http://blog-­‐idrac.com/members/sactp/ 4
150 petites expériences de psychologie des médias -­‐ Sébastien Bohler 5
Ibid. 6
Ibid. 7
http://fr.wikipedia.org/wiki/Dissonance_cognitive 8
http://ddata.over-­‐blog.com/xxxyyy/0/05/94/19/courrier-­‐international-­‐-­‐pediatrie_-­‐_l-­‐abus-­‐de-­‐tele-­‐tue-­‐la-­‐
creativite.pdf 2
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