DOSSIER
Marchés de travaux privés
entre professionnels
Faire respecter
les délais de paiement
Article L. 111-3-1 du CCH 1
La loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 a créé un article dans le CCH pour faire respecter les délais
de paiement dans les marchés de travaux privés entre professionnels.
Ce nouveau dispositif, adopté à la demande de la FFB, fait référence au délai maximal de
paiement inscrit dans le Code de commerce depuis 2009 (loi de modernisation de l’économie,
dite LME). L’objectif est de lutter contre les dépassements récurrents des délais de paiement
des clients privés. Le présent dossier commente ces textes et rappelle à cette occasion les règles
de paiement dans les contrats de travaux conclus entre professionnels privés.
1. Code de la construction et de l’habitation.
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Le DÉLAI MAXIMUM
POUR RÉGLER
LES SOMMES DUES
ne peut dépasser
45 jours fin de mois
ou 60 jours à
compter de la
date de la facture.
Ce délai de paiement s’impose au maître de l’ouvrage,
au maître d’œuvre et à l’entrepreneur principal.
Le dépassement est sanctionné par des pénalités
de retard de paiement et par la suspension
des travaux
45
L. 441-6 du code de commerce
L. 111-3-1 du code de la construction et de l’habitation
MARCHÉS
PRIvÉS
« Les délais de paiement convenus pour le règlement des
acomptes mensuels et du solde des marchés de travaux privés
mentionnés au 3° de l’article 1779 du Code civil ne peuvent
dépasser le délai prévu au neuvième alinéa du I de l’article
L. 441-6 du Code de commerce. Ce délai ne s’applique pas à
l’acompte à la commande, qui est payé selon les modalités
prévues au marché.
En cas de dépassement du délai de paiement mentionné au
premier alinéa du présent article, l’entrepreneur peut suspendre
l’exécution des travaux après mise en demeure de son créancier
restée infructueuse à l’issue d’un délai de quinze jours.
Le présent article est applicable aux marchés de travaux privés
conclus entre professionnels soumis au Code de commerce. »
Art. L. 111-3-1 du CCH
mars 2012
 faire respecter les délais de paiement
Les conditions de paiement
à respecter entre
professionnels privés
Dans les contrats conclus depuis le 1er janvier 2009, un délai maximal de paiement
de 45 jours n de mois ou de 60 jours calendaires (à compter de la date d’émission de la
facture) doit être respecté par le débiteur. C’est une obligation d’ordre public prévue
par le Code de commerce, précisée dans le secteur des travaux par l’article L.111-3-1
du Code de la construction et de l’habitation.
Quels sont les clients visés par ce dispositif ?
Tous les contrats de travaux pri-
vés conclus par les entreprises avec
des donneurs d’ordre soumis au
Code de commerce : industriels,
entreprises publiques, commer-
çants, promoteurs, contractants
généraux, entreprises principales,
etc. sont visés par ce dispositif.
Les marchés de travaux
conclus par des SCI
sont-ils régis par ces
dispositions ?
Oui. Les règles en matière de délai
de paiement instituées par le Code
de commerce s’appliquent à toutes
les activités de production, de
distribution et de services.
Les sociétés civiles immobilières
(SCI) ou de construction-vente
(SCCV), qui exercent une activité
économique en dépit de leur régime
de droit civil, sont soumises aux
dispositions du Code de commerce
encadrant les délais de paiement.
Et les marchés de
travaux conclus par
des sociétés d’HLM ?
Oui. Ces sociétés sont des maîtres
d’ouvrage professionnels privés
soumis au Code de commerce.
En revanche, les ofces publics
de l’habitat n’y sont pas soumis.
À noter : un protocole interpro-
fessionnel a été conclu le 30 juin
2010 pour accélérer les délais de
paiement dans les marchés privés
de travaux. Ce protocole concerne
les paiements des sociétés d’HLM
et des promoteurs.
Qu’en est-il des contrats
de sous-traitance ?
Un contrat de sous-traitance est
conclu entre professionnels sou-
mis au Code de commerce. Les
conditions de paiement prévues
au contrat doivent donc respecter
le délai maximal de paiement.
Les marchés de travaux
conclus avec des
consommateurs sont-ils
régis par ces dispositions ?
Non, puisque ceux-ci ne sont pas
soumis au Code de commerce.
Avec un consommateur, un artisan
ou un entrepreneur peut donc
librement xer ses conditions de
règlement. Accorder un délai de
paiement n’est pas obligatoire, c’est
une facilité donnée aux clients.
Négocier avec un particulier un
acompte à la commande et un
règlement de facture à 15 jours
est parfaitement légal.
Une question en matière de…
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dossier – mars 2012

faire respecter les délais de paiement
Comment doivent être payés les travaux ?
Les conditions de paiement sont
en principe déterminées par
l’entreprise dans ses conditions
générales, prévoyant par exemple
un délai de paiement à 30 jours.
Après négociation, l’entreprise
peut accepter un délai de paiement
plus long. Mais le délai convenu
par les parties ne peut excéder
45 jours n de mois ou 60 jours
calendaires, délai maximal qui
s’applique à toutes les demandes
de paiement : acomptes mensuels
et solde.
Art. L. 441-6, 9e alinéa, du Code de
commerce : Le délai convenu entre
les parties pour régler les sommes
dues ne peut dépasser 45 jours fin
de mois ou 60 jours à compter de
la date d’émission de la facture.
Art. L. 111-3-1 du Code de la
construction et de l’habitation :
Les délais de paiement convenus
pour le règlement des acomptes
mensuels et du solde des marchés
de travaux privés mentionnés au
3° de l’article 1779 du Code civil ne
peuvent dépasser le délai prévu
au neuvième alinéa du I de l’article
L. 441-6 du Code de commerce.
Si le contrat n’a pas prévu de
délai de paiement, un délai de
30 jours xé par le Code de com-
merce s’applique par défaut.
Art. L. 441-6, 8e alinéa, du Code
de commerce : Sauf dispositions
contraires figurant aux conditions
de vente ou convenues entre les
parties, le délai de règlement des
sommes dues est fixé au 30
e
jour
suivant la date de réception des
marchandises ou d’exécution de
la prestation demandée.
Par commodité, on compte 30 jours pour tous les mois de l’année.
Comment est compté le délai « 60 jours à compter
de la date d’émission de la facture » ?
Il suft d’ajouter 60 jours à la date d’émission de la facture pour
déterminer la date de paiement.
Lorsque, dans le marché, le délai de paiement court à compter
de la réception (et non de l’émission) des demandes de paiement
des entreprises, le marché doit fixer un délai contractuel de
règlement inférieur à 60 jours, permettant ainsi un règlement
effectif ne dépassant pas le délai légal de 60 jours calendaires
comptés à partir de l’émission de la facture.
À noter
60 jours calendaires
Situation datée
du 25 janvier
+ 60 jours
= 25 mars
Janvier Février Mars
45 jours + fin de mois
Situation datée
du 25 janvier + fin de mois
= 30 mars
45 jours
= 10 mars
Janvier Février Mars
Fin de mois + 45 jours
Situation datée
du 25 janvier
fin de mois
= 30 janvier
+ 45 jours :
15 mars
Janvier Février Mars
Lentreprise a-t-elle droit
à un acompte à la commande ?
Contrairement aux marchés publics,
un acompte à la commande (avance)
n’est pas obligatoire dans les mar-
chés privés. L’entreprise n’y aura
donc droit que si cet acompte est
prévu dans ses conditions générales
acceptées par le client ou dans le
contrat signé par les deux parties.
Lorsqu’un acompte à la
commande est prévu, dans
quel délai est-il versé ?
Lorsqu’il est prévu, l’acompte à la
commande doit être payé par le
client le plus vite possible.
Étant donné que cet acompte a
pour but de prénancer une par-
tie des achats et de la fabrication
des ouvrages, il doit être versé
à l’entrepreneur si possible dès
la conclusion du contrat. La loi
renvoie sur ce point aux modalités
prévues au marché.
Art. L. 111-3-1 du Code de la
construction et de l’habitation :
Ce délai ne s’applique pas à l’acompte
à la commande, qui est payé selon
les modalités prévues au marché.
Comment est compté le délai
« 45 jours fin de mois » ?
Le point de départ du délai maximal
de paiement est la date d’émis-
sion de la demande de paiement
(demande d’acompte mensuel ou
demande de solde).
Deux modes de computation du
délai de 45 jours n de mois sont
possibles. L’usage le plus répandu
consiste à aller à la n du mois
d’émission de la facture, puis
à comptabiliser 45 jours. Mais
un autre mode de computation
du délai est possible, il consiste
à comptabiliser les 45 jours à
compter de la date d’émission de
la facture, la limite de paiement
intervenant à la n du mois civil
au cours duquel expirent ces
45 jours.
dossier – mars 2012
 faire respecter les délais de paiement
Qui choisit entre 45 jours
fin de mois et 60 jours calendaires ?
C’est un choix qui relève de la liberté
contractuelle des opérateurs économiques.
Mais le contrat ne peut instaurer une
modalité de paiement plus tardive que
le délai légal.
Que faire si les conditions
de règlement figurant dans
le marché prévoient un délai
de paiement supérieur ?
Ces conditions de règlement sont illégales,
même si elles ont été acceptées par l’entre-
prise lors de la signature du marché.
L’entrepreneur doit dénoncer auprès de son
client (maître de l’ouvrage ou entreprise
principale) les conditions de paiement
contraires à la loi, pour qu’il rectie les
termes du contrat. A défaut, ces conditions
de règlement sont nulles et c’est le délai de
30 jours prévu par le Code de commerce
qui s’applique.
[Voir modèle de lettre n° 1]
Le délai de vérification
du maître d’œuvre est-il inclus
dans le délai de paiement ?
Oui. Si le maître de l’ouvrage charge
un maître d’œuvre de l’assister pour le
règlement des comptes, il doit veiller à
ce que le délai de vérication du maître
d’œuvre soit compatible avec le respect
du délai de paiement.
La norme Afnor NF P 03.001 (Cahier
des clauses administratives
générales applicable aux marchés de
travaux privés) prévoit un délai de
vérification maximal de 15 jours.
À noter
Que se passe-t-il si le maître d’œuvre
n’a pas transmis
la facture au maître de l’ouvrage ?
Le retard de paiement de la facture donne
droit à des pénalités de retard dues par
le client et à la suspension des travaux
en cours (dans des conditions précisées
plus loin).
En cas de retard de paiement imputable
au maître d’œuvre, le maître de l’ouvrage
doit se retourner contre le maître d’œuvre
responsable du retard.
Sous quelle forme l’entrepreneur
doit-il envoyer ses demandes
de paiement ?
Le contrat prévoit souvent les modalités de
transmission des situations mensuelles et
du mémoire dénitif. Quelles que soient
les stipulations du contrat, l’entrepreneur
doit être payé dans le respect du délai
contractuel (au plus tard 45 jours n de
mois ou 60 jours calendaires).
La remise des demandes de paiement
contre récépissé ou leur envoi par lettre
recommandée avec avis de réception ne
s’impose pas. Ce formalisme peut cepen-
dant être utile pour prouver la réception
de la facture par le maître de l’ouvrage
ou le maître d’œuvre.
Le client ou le maître d’œuvre
peut-il faire refaire la facture
par l’entreprise ?
Non. Le client, ou son maître d’œuvre,
doit accepter ou rectier la situation de
l’entreprise sans exiger qu’elle la refasse
en cas de correction. Cette demande est
incompatible avec le respect des délais
de paiement.
La mauvaise pratique consistant
à faire refaire les situations
des entreprises a été dénoncée
dans un protocole conclu par la
FFB en octobre 2009 avec tous
les représentants de la maîtrise
d’œuvre (architectes, économistes,
ingénieristes).
À noter
La retenue de garantie
est-elle compatible avec ces règles ?
Oui. Selon la loi du 16 juillet 1971 d’ordre
public, les paiements des acomptes peuvent
être amputés d’une retenue égale au plus à
5 % de leur montant. La retenue de garantie
n’est applicable que si elle est prévue au
contrat. Elle a pour seul objet de garantir
au client que l’entreprise procédera aux
travaux nécessaires à la levée des réserves
faites à la réception.
Si l’entreprise ne fournit pas de caution
bancaire pour remplacer la retenue de
garantie, celle-ci sera déduite au fur et à
mesure du paiement des acomptes. Dans
ce cas, le client devra consigner les sommes
correspondant à la retenue de garantie
auprès d’un tiers désigné par les parties.
Art. 1er, 2e alinéa, loi n° 71-584 du 16 juillet
1971, tendant à réglementer les retenues
de garantie en matière de marchés de
travaux définis par l’article 1779-3° du
Code civil :
Le maître de l’ouvrage [ou l’entreprise
principale en cas de sous-traitance]
doit consigner entre les mains d’un
consignataire, accepté par les deux
parties ou à défaut désigné par le
président du tribunal de grande instance
ou du tribunal de commerce, une somme
égale à la retenue effectuée.
Comment doivent être payés les travaux ? (suite)
dossier – mars 2012

faire respecter les délais de paiement
Les sanctions des retards de paiement
entre professionnels privés
Le marché de travaux ou le contrat de sous-traitance est un contrat prévoyant
des obligations réciproques pour les deux parties : pour l’essentiel, exécuter les travaux
convenus pour l’entrepreneur et payer les travaux exécutés pour le client.
Le non-respect de l’obligation de payer les travaux peut être sanctionné par l’entrepreneur
de plusieurs façons.
Les pénalités de retard de paiement
Qui fixe le taux d’intérêt
applicable en cas de retard
de paiement ?
Le taux d’intérêt des pénalités de
retard et les conditions d’application
doivent être xés par les parties
dans le contrat. Le taux ne peut
être inférieur à trois fois le taux
d’intérêt légal. À défaut d’indication
dans le contrat, le taux est égal
au taux appliqué par la Banque
centrale européenne majoré de
10 points de pourcentage.
Comment sont calculées
les pénalités de retard
de paiement ?
Les pénalités sont exigibles le
jour suivant la date de règlement
gurant sur la facture. Dans les
marchés publics, la réglementation
prévoit des « intérêts moratoires »
en fonction du nombre de jours
de retard. Dans les marchés privés
entre professionnels, la pénalité de
retard de paiement est due dès le
1er jour de retard.
La formule de calcul est donc la
suivante :
La pénalité de retard est
exigible sans qu’un rappel
soit nécessaire.
À noter
Le client peut-il déroger
à ces règles dans le contrat ?
Non. Ces règles sont d’ordre public,
elles sont donc obligatoires et les
clauses contraires sont nulles. Le
client qui soumet l’entreprise à des
conditions de règlement contraires
à la loi peut être condamné à des
dommages et intérêts, en plus des
pénalités dues en cas de retard de
paiement. Il existe dans le Code de
commerce un article spécique
pour sanctionner ces pratiques
abusives.
Art. L. 442-6 du Code de commerce :
I.- Engage la responsabilité de
son auteur et l’oblige à réparer le
préjudice causé le fait, par tout
producteur, commerçant, industriel
ou personne immatriculée au
répertoire des métiers : []
7° De soumettre un partenaire à
des conditions de règlement qui ne
respectent pas le plafond fixé au
neuvième alinéa de l’article L. 441-6
ou qui sont manifestement abusives,
compte tenu des bonnes pratiques
et usages commerciaux, et s’écartent
au détriment du créancier, sans
raison objective, du délai indiqué
au huitième alinéa de l’article
L. 441-6. Est notamment abusif le
fait, pour le débiteur, de demander
au créancier, sans raison objective,
de différer la date d’émission de la
facture []
P = M × T
où :
P est le montant de la pénalité
M est le montant des sommes TTC
payées avec retard
T est le taux de la pénalité
Taux applicable
• Taux prévu au marché, au minimum
égal à 3 fois le taux de l’intérêt légal
(soit 3 × 0,71 % = 2,13 % pour l’année 2012).
• Taux BCE + 10 si aucun taux prévu
au marché (soit 11 % en mars 2012).
• Taux applicable au marché se référant
à la norme Afnor NF P 03-001 : taux
de l’intérêt légal augmenté de sept points,
soit 7,71 % en 2012.
Art. L. 441-6, 12e alinéa, du Code
de commerce : Les conditions de
règlement doivent obligatoirement
préciser les conditions d’application
et le taux d’intérêt des pénalités de
retard exigibles le jour suivant la
date de règlement figurant sur la
facture dans le cas où les sommes
dues sont réglées après cette date.
Sauf disposition contraire qui ne
peut toutefois fixer un taux inférieur
à trois fois le taux d’intérêt légal,
ce taux est égal au taux d’intérêt
appliqué par la Banque centrale
européenne à son opération de
refinancement la plus récente
majoré de 10 points de pourcentage.
Les pénalités de retard sont exigibles
sans qu’un rappel soit nécessaire.
© Andre/Fotolia
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