théâtre - Scènes Magazine

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scènes
seula la mer
au théâtre forum meyrin
et en tournée
magazine
photo Catherine Monney
ISSN 1016-9415
260 / mars 2014
CHF. 10.-- 7 €
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6 cinéma
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cine die : livres de cinéma / raymond scholer
cinémas du grütli / christian bernard
sous la loupe : abus de faiblesse / christian bernard
cinémathèque suisse en mars / raymond scholer
gérardmer : festival de films fantastiques / d. leroy, c. fry
les films du mois / christian bernard, serge lachat
brèves : décès de miklos jancso & l’orgue fait son cinéma / s. lachat
brève : le manuscrit trouvé à saragosse / christian bernard
brèves : les sorties dvd / christian bernard
les journées de soleure / emmanuèle rüegger
fifdh, festival des droits humains / christian bernard
brève : festival de film de fribourg / tuana gökçim toksöz
entretien : edwy plenel / tuana gökçim toksöz
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en tournée : voyage au bout de la nuit / pierre-rené serna
comédie de genève : oh les beaux jours / rosine schautz
poche-genève : irrésistible / laurence tièche
théâtre forum meyrin : seule la mer / laurence tièche
saint-gervais genève : mademoiselle else / julien roche
le galpon : quartett / laurent darbellay
la parfumerie : les larmes des hommes / maya schautz
kléber-méleau lausanne : la double inconstance / n. bruchez
théâtre de carouge : guerre et paix selon fomenko
en tournée : andré / bertrand tappolet
grütli : bientôt viendra le temps / claudia cerretelli
encarts : rideau ! en tournée / une société de services à sion
encarts : yvonne princesse de bourgogne à dorigny / andromaque 10 - 43 au grütli / le bruit du monde au théâtre des
amis / le chat du rabbin à l’alchimic
plan-les-ouates : la compagnie des spectres / rosine schautz
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grand théâtre de genève : nabucco / éric pousaz
opéra de lausanne : luisa miller / éric pousaz
portrait : jonas kaufmann / françois lesueur
bfm : delusion of the fury / martine duruz
strasbourg : rigoletto & la cenerentola / éric pousaz
zurich : les pêcheurs de perles & alcina / éric pousaz
bâle : eugène onéguine / éric pousaz
marseille : lucia di lammermoor / françois jestin
avignon : l’italiana in algeri / françois jestin
monte-carlo : rusalka / françois jestin
montpellier : eugène onéguine / françois jestin
lyon : cœur de chien & the tender land / françois jestin
mémento
bologne : parsifal / frank fredenrich
barcelone : la sonnambula / françois lesueur
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hommage à claudio abbado / régine kopp
portrait : kent nagano / beata zakes
portrait : quatuor brentano / pierre jaquet
portrait : menahem pressler / martine duruz
portrait : karl anton rickenbacher / yves allaz
agenda genevois / martina diaz
portrait : bertrand de billy / yves allaz
victoria hall : orchestre de lyon / frank langlois
agenda romand / yves allaz
gstaad : sommets musicaux / martina diaz
encarts : elisso bolkvadze / maurizio baglini et silvia chiesa /
quatuor schumann / musicales de compesières
encarts : philippe béran / joshua redman / geneva camerata
/ hiromi
64 danse
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festival de lausanne / emmanuèle rüegger
espace nuithonie : angelin preljocaj / bertrand tappolet
66 spectacles
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spectacles onésiens / firouz-elisabeth pillet
théâtre am stram gram / firouz-elisabeth pillet
bonlieu annecy / firouz-elisabeth pillet
marionnettes de genève / firouz-elisabeth pillet
69 expositions
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musée de l’élysée : philippe halsman / catherine graf
fondation beyeler : odilon redon / régine kopp
mémento beaux-arts : france
centre pompidou-metz : paparazzi !
mémento beaux-arts : ailleurs
albertina, vienne : de dürer à napoléon
mémento beaux-arts : suisse romande
musée jenisch, vevey : manon bellet
mémento beaux-arts : suisse alémanique
kunstmuseum, winterthur : gerhard richter
lausanne : giacometti, marini, richier / françoise-hélène brou
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fondation henri cartier-bresson : guido guidi / christine pictet
opéra : fanciulla sans western / pierre-rené serna
maison de la poésie : natalie dessay / pierre-rené serna
aux gémeaux : lux & glory / stéphanie nègre
théâtre du rond-point : érection / stéphanie nègre
sélection musicale de mars / françois lesueur
chronique des concerts / david verdier
mémento théâtre
théâtre du vieux-colombier : la visite de la vieille dame
mémento expositions
musée maillol : le trésor de naples
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Signature
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Jérôme Zanetta
comité de rédaction
Christian Bernard, Serge Bimpage,
Françoise-Hélène Brou, Laurent
Darbellay, Frank Dayen, Martine
Duruz, Frank Fredenrich, FirouzElisabeth Pillet, Jérôme Zanetta
éditeur responsable
Frank Fredenrich
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secrétaire de rédaction
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Julie Bauer, James Berclaz-Lewis,
Nancy Bruchez, Gabriele Bucchi,
Claudia Cerretelli, Romeo Cini,
Sarah Clar-Boson, Martina Diaz,
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Christophe Imperiali, Pierre Jaquet,
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Rosine Schautz, Raymond Scholer,
Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet,
Laurence Tièche Chavier,
Tuana Gökçim Toksöz, David Verdier,
Christian Wasselin, Beata Zakes,
François Zanetta, Valérie Zuchuat
maquette : Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
De la musique avant toute chose…
D
eux disparitions ont endeuillé le monde de la musique à la fin du mois
de janvier. Le maestro et le folksinger : Claudio Abbado et Pete Seeger.
Si l’on s’en tient aux stéréotypes, les univers musicaux de ces deux
interprètes semblent bien éloignés.
Et il ne fait guère de doute que les deux hommes ne se sont certainement
jamais croisés. Pourtant si l’on considère leur carrière en rapport avec l’histoire
contemporaine et leurs engagements respectifs, on pourra revenir sur un jugement
superficiel qui ferait du chanteur un marginal un peu folklorique et du chef d’orchestre un artiste plongé dans un univers d’un autre temps. Car pour l’héritier de
la tradition des chanteurs populaires américains (Woody Guthrie et les bluesmen
tels Leadbelly ou Big Bill Broonzy) comme pour l’élève de Carlo Maria Giulini
et l’admirateur de Wilhelm Furtwängler, le mot « artiste engagé » avait tout son
sens. Certes, cela a marqué la carrière de Pete Seeger de façon plus évidente : marches de protestation, notamment à l’époque de la lutte pour la fin de la ségrégation qui le rapprocha de Martin Luther King, ou encore participation à des rassemblements contestataires, sans parler des festivals dont la portée politique était rarement absente, souvent dans le but de lutter pour les droits civiques des minorités.
Moins spectaculaire, mais tout aussi utile, l’action de Claudio Abbado, durant
notamment ses années milanaises à la Scala, a été marquée par la volonté de sortir la musique dite « classique » des ors de la scène milanaise en allant se produire à la tête de formations diverses dans des usines, collèges ou à l’université en
Lombardie et en Emilie-Romagne, fréquemment accompagné par Maurizio
Pollini et ce, sans craindre de faire découvrir des compositeurs contemporains
dont il se sentait proche, tels Luigi Nono ou Luciano Berio. Contester un gouvernement trop longtemps favorable à la ségrégation outre-Atlantique était un des
objets de la lutte de Pete Seeger, mais il est évident que de son côté Claudio
Abbado a également tenté avec ses moyens d’interprète de faire passer un message contestataire contre l’emprise des mafias de privilégiés qui ont dominé l’Italie
sous le régime de la Démocratie Chrétienne (sic ?) dont Sylvio Berlusconi est par
ailleurs le digne héritier. Et à titre d’anecdote, on signalera que le maestro était
surnommé la « baguette rouge » par Il Giornale, le quotidien d’Il Cavaliere, allusion au fait qu’on a pu le considérer comme un compagnon de route du Parti
Communiste Italien (jusqu’à l’occupation de la Tchécoslovaquie en 1968). De son
côté, Pete Seeger fut inévitablement une des cibles du maccarthysme en raison de
son appartenance au Parti communiste des Etats-Unis. Autre engagement commun, celui consistant à s’opposer à la violence et plus particulièrement à la guerre du Viêt-nam. Claudio Abbado a-t-un jour fredonné We shall overcome lors
d’une manifestation ? Pete Seeger fredonnait-il l’Hymne à la joie ?
On l’ignore…
Mais l’un comme l’autre, chacun à sa façon a exprimé la volonté d’être un
musicien à l’écoute de l’histoire et du monde qui l’entoure. Et si cela semble naturel pour un chanteur « populaire » tel que Pete Seeger, on remarquera que Claudio
Abbado a su se distinguer de certains de ses collègues par une ouverture d’esprit
peu fréquente dans son milieu artistique.
Alors il n’est pas interdit de penser que si le folksinger avait un jour rencontré le maestro, celui-ci l’aurait sans doute accueilli en s’exclamant : appelez-moi
Claudio !
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le cinéma au jour le jour
Cine Die
Livres de cinéma
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Trois pavés monumentaux français ont paru
en 2013.
Le plus exigeant est sans conteste
Hollywood : Le Temps des Mutants de Pierre
BERTHOMIEU (aux éditions Rouge profond)
dont les 729 pages de texte ne se lisent pas
comme un roman, culture universitaire oblige. Il
fait suite à deux précédents volumes, Hollywood
Classique : Le Temps des Géants (2009, 582 p.)
et Hollywood Moderne : Le Temps des Voyants
(2011, 715 p.), où l’auteur, maître de conférences
en études cinématographiques à l’université
Paris-Diderot (Paris VII) et manifestement
connaisseur hors pair en matière d’arts visuels,
passe le cinéma commercial le plus décrié du
monde, c’est-à-dire le cinéma hollywoodien au
crible de la théorie hégélienne de l’art. « Tout art
classique, comme l’est l’art hollywoodien, vise
l’universel et propose une lecture universelle du
singulier. Hollywood brasse des mythes primordiaux et brasse à même le mythe pour se gagner
le public le plus large. » (Introduction au premier
volume) Le philosophe cinéphile ne peut admettre qu’il soit légitime d’admirer Stagecoach ou
Vertigo, et qu’aimer The Sound of Music ou
Doctor Zhivago soit suspect. Culture noble, culture populaire : triste manichéisme. Hollywood,
c’est la poignée de mains de Mickey Mouse et du
grand chef d’orchestre Leopold Stokowski dans
Fantasia. Foin donc de la hiérarchie des formes
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d’art ! Sur 2000 pages, Berthomieu opère des
renvois, des rapprochements, compare des repères iconiques, décèle des éléments de style et
d’esprit à l’aide d’une myriade de photogrammes, qui, pour mesurer à peine quelques centimètres, constituent quand même un appui indispensable au texte. La mutation dont il est question
dans le dernier volume concerne la fin de la pellicule, qui avait encore une existence physique, et
l’essor du numérique, qui traduit la matière en
chiffres et crée paradoxalement des corps qui
n’existent pas en réalité. Les 64 pages que l’auteur consacre à « Spielberg, War Horse et le cinéma romantique » valent à elles seules le prix d’achat (€ 50.-).
Le plus gros des pavés est Annales du
Cinéma Français : Les Voies du Silence 18951929 de Pierre LHERMINIER (éd. Nouveau
Monde) : format A4, 1060 pages de texte, 60
pages de références et index, € 89.-. Le livre suit
« pas à pas, presque au jour le jour, l’actualité de
la vie professionnelle du cinéma sous ses divers
aspects, avec ses aléas, ses crises, ses débats, en
mettant l’accent sur la vie et le travail de ceux qui
l’ont fait, et les œuvres majeures qui en sont
nées. Il en résulte un récit vivant, richement
documenté et abondamment illustré, grâce
auquel c’est au cœur même de l’histoire du cinéma français en train de se faire, et dans le contexte de son temps, que le lecteur est invité à pénétrer. » L’année 1895 est introduite par la phrase
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géniale : « Au commencement était Lumière. »
La suite vérifie ce qu’on suppute :
Lherminier est un véritable écrivain : le style est
alerte et ce « Journal du cinéma » se lit comme
un roman. Parallèlement au texte principal courent en filigrane un autre qui périodiquement
relie le cours des affaires cinématographiques à
celui de la politique et de la société dans son
ensemble et un troisième qui donne la chronologie de faits marquants. Des « Plans rapprochés »
éclairent en outre de manière complémentaire
certains sujets ou moments, comme l’incendie du
Bazar de la Charité qui fit « passer le cinéma,
durant quelques mois, pour un engin plus meurtrier que le canon de 75, entouré pourtant depuis
l’affaire Dreyfus d’une terrifiante réputation »
selon les mots de Henri Fescourt. Grâce à tous
ces apports et aux citations nombreuses, le livre
fourmille d’informations précises et précieuses.
Un exemple : l’année 1902 correspond pour
Georges Sadoul aux débuts de l’art du film, car
« Voyage dans la Lune de Georges Méliès impose universellement la pratique de la mise en
scène. Il est symbolique que ce film ait permis en
octobre 1902 aux frères Tally de fonder le premier cinéma non forain, à quatre murs, ayant
jamais existé à Los Angeles, et qu’il ait ainsi
imposé l’art du film à cinq ou six lieues d’une
bourgade nommée Hollywood ». Et en 1903,
Méliès installe des bureaux à New York, déterminé à s’opposer aux contrefaçons américaines.
Mais je ne vais pas vous raconter la suite : il y en
a encore pour 800 pages.
Le troisième pavé est un peu le résumé
d’une vie. Jean-Pierre ANDREVON, écrivain de
science-fiction et collaborateur, depuis sa création en 1969, de la revue L’Ecran Fantastique,
recense de la manière la plus complète possible
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ce qu’on peut imaginer trouver dans un ouvrage
intitulé 100 Ans et plus de Cinéma Fantastique
et de Science-Fiction (éd. Rouge Profond, 1074
pages de texte, mais un peu plus large et un rien
moins lourd que le précédent). Pas d’index, car
l’organisation est simplement lexicale : ordre
alphabétique des titres (d’ordinaire français) des
films, des noms propres et des sujets confondus.
Plus de 17’000 films sont mentionnés, 4’000 ont
leur propre notice critique. Cela commence avec
À des millions de kilomètres de la Terre / 20
million Miles to Earth (Nathan Juran, 1957) –
film célèbre pour la créature gigantesque mi-gargouille médiévale, mi-tyrannosaure de feu Ray
Harryhausen - et se termine sur Zucco, George,
acteur britannique spécialisé dans les savants
fous. Chaque notice est signée, car plusieurs
rédacteurs de L’Ecran Fantastique, notamment
Pierre Gires, ont assisté Andrevon dans l’élaboration de cette Bible qui est à recommander à tout
amateur éclairé du genre. Le prix de € 142.- n’est
pas excessif, car 2300 images de bonne tenue
agrémentent le papier glacé.
Les amateurs de cinéma populaire liront
avec profit la synthèse pertinente de Florent
FOUCART sur Le Péplum Italien (1946-1966) :
Grandeur et Décadence d’une Antiquité
Populaire (coll. CinExploitation, éd.imho). « Si
l’époque mentionnée est aussi celle du néoréalisme, les spectateurs, traumatisés par cinq ans de
misère, sont plus enclins à suivre les exploits de
Maciste ou les dérèglements de Néron que les tribulations d’un voleur de bicyclettes ou les souffrances des pêcheurs siciliens » rappelle Jean A.
Gili dans sa préface. Genre spectaculaire par
excellence, le péplum produit 185 films au cours
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de la période considérée avant de disparaître brutalement, remplacé dans sa fonction de pur divertissement par le western spaghetti. Le livre de
Fourcart a le mérite de mettre sur le même plan
analytique les besognes alimentaires et les œuvres de prestige. Les films fondateurs sont « des
œuvres sérieuses, pour ne pas dire empesées » :
Fabiola (1947) d’Alessandro Blasetti et Les
Derniers Jours de Pompéi (1948) de Marcel
L’Herbier. Au cours des années cinquante, les
films deviennent plus inventifs, moins soucieux
de fidélité historique. En 1958, Le Fatiche di
Ercole de Pietro Francisci se place en tête du
box-office. En 1964, le genre atteint son point
culminant avec 31 films. C’est aussi l’année où
sort le film qui sonne le glas pour le péplum : Per
un Pugno di Dollari (1964) de Sergio Leone,
dont le premier film fut, 3 ans plus tôt, Il Colosso
di Rodi ! N’empêche : à l’heure où les techniciens de Cinecittà construisent à nouveau des
temples et des palais (cf. la série Rome), le film
à l’Antique a encore de beaux jours devant lui :
c’est aussi de cette survie que parle ce livre
indispensable.
Côté suisse, deux monographies à signaler.
Le Lucernois Leonhard H. GMUER, location
scout de tant de films de James Bond, est aussi un
chercheur passionné et nous livre avec Rex
Ingram : Hollywood’s Rebel of the Silver
Screen (éd. epubli, Berlin, 556 p.) le dossier le
plus complet jamais publié sur le cinéaste irlandais, auteur de The Four Horsemen of the
Apocalypse (1921) et The Garden of Allah
(1927), dont la conversion à l’islam en 1932 avait
créé des remous dans la presse américaine, mais
qui fut enterré selon le rite chrétien à Glendale en
1950. Un cas d’apostasie qui a échappé aux
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imams ? Rédigé en anglais, sur papier glacé et
richement illustré de photos rarissimes, le livre
peut se commander directement auprès de l’auteur sur www.unicorn.ch.
Hervé DUMONT a publié sous le titre
Frank Borzage : Un Romantique à Hollywood
(Institut Lumière/Actes Sud) un texte revu, corrigé et augmenté de sa célèbre monographie de
1993. Si entretemps bien des films de Borzage
ont paru sur DVD, il manque toujours à l’appel
son dernier film, le très lyrique The Big
Fisherman (1959), dont la séquence du vent
ruinant le palais d’Hérode (incarné par Herbert
Lom) au moment de la décollation de saint
Jean-Baptiste est restée dans les mémoires des
privilégiés qui ont vu le film. Signalons en passant, pour ceux qui ne seraient pas au courant,
que Dumont a prolongé son opus L’Antiquité
au Cinéma : Vérités, Légendes et
Manipulations (éd. Nouveau Monde, 2009) par
un site internet dédié au films historique, une
encyclopédie inégalée à ce jour (www.hervedumont.ch) et déclinée en 4 parties : L’Antiquité
(le livre corrigé et augmenté : y figure déjà
Pompeii (2014) de Paul W. S. Anderson),
Moyen-Âge et Renaissance (dont la partie
Royaume de France devrait devenir accessible à
la fin du mois), L’Absolutisme (accessible en
entier) et Le XIXe siècle (dont certaines parties,
comme Napoléon, sont encore en gestation). La
prodigieuse somme d’informations donne tout
simplement le vertige et devrait susciter des
vocations de collectionneur.
Au mois prochain
Raymond Scholer
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les cinémas du grütli
Clio Barnard,
la Semaine des nominés
A découvrir absolument, The Selfish Giant, de Clio Barnard, primé dans de
nombreux festival en 2013 dont La Quinzaine des réalisateurs à Cannes,
est un choc comparable à celui créé en son temps par Kes de Ken Loach.
Il est projeté en mars dans la foulée du FIFDH, pour 10 séances
exceptionnelles.
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Ça commence par un ciel étoilé avec des
animaux qui se détachent sur la ligne d’horizon:
j’ai immédiatement pensé à La Nuit du chasseur, unique film (et chef-d’œuvre ) de Charles
Laughton. Ce très probable hommage se révèle
pleinement justifié: ici comme là, un conte,
deux enfants, un ogre et des animaux. Sauf qu’ici dès le deuxième plan on se trouve brutalement projeté dans la réalité sociale la plus violente, celle de la survie dans l’Angleterre postthatchérienne, dans un néo-réalisme proche du
Ken Loach de Kes et de Riff Raff et des frères
Dardenne.
à employer des mineurs d’âge scolaire, se laisse
convaincre par la détermination d’Arbor, d’autant qu’il leur fait payer l’utilisation d’une charrette et d’un cheval lui appartenant. La récupération est avant tout l’affaire d’Arbor, ce qui les
conduit à passer rapidement des casseroles, cuisinières et autres épaves domestiques, au vol
des câbles de lignes à haute tension, autrement
risqué tant pénalement (encore qu’ils soient
mineurs) que physiquement. Tandis que Swifty
se découvre un don naturel avec le cheval au
contact duquel il s’épanouit. Ce don n’échappe
pas à Kitten, qui en fera son jockey dans des
courses de trotteurs
clandestines pouvant
rapporter gros (scène
incroyable de la course des trotteurs sur
routes, à l’aube, suivis
par l’armada klaxonnante des voitures des
parieurs). La voie
divergeante suivie par
Swifty sera ressentie
comme une trahison
par un Arbor devenu
jaloux. Leur amitié
n’y résistera apparemment pas. Au bout du
«The Selfish Giant», photo Agatha A. Nitecka
chemin la tragédie,
mais aussi une forme
Arbor et Swifty sont deux copains plus de rédemption.
intéressés par la récupération de métaux pour le
“Tu ne t’intéresses qu’au métal!”. “Tu ne
compte du ferrailleur Kitten, que par l’école. t’intéresses qu’aux chevaux. Tu es trop tendre,
Arbor est un hyperactif sous médicament, tu dois t’endurcir!” Cette opposition entre les
caractériel intenable, tandis que Swifty, plus deux garçons sera vue par le spectateur sensible
lent et plus doux, est la victime toute désignée à la dimension de conte du film, comme symbodes bizutages. Suite à une énième bagarre pro- lisant deux visions de la société. Comme il verra
voquée par Arbor venu à la rescousse de Swifty, le Géant égoïste du titre à la fois dans Kitten
ils sont renvoyés de l’école, libres désormais de mais aussi dans tout le système d’exploitation
travailler pour Kitten. Celui-ci d’abord réticent dont celui-ci n’est qu’un rouage. De fait, c’est le
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réalisme implacable de la description des effets
de la précarité dans les comportements qui
impressionne: l’agressivité générale des
enfants, le chaos familial que tente de contenir
des mères dépassées et épuisées, seules ou flanquées d’un mari chômeur, les meubles qu’il faut
vendre à cause des huissiers, l’exploitation des
plus faibles… Ce contre quoi luttent, au prix de
leur avenir, Arbor et Swifty, qui redonnent l’argent gagné à leur parents. Ce que nous dit Clio
Barnard en adaptant cette histoire d’Oscar
Wilde, c’est que le monde de Dickens est de
retour pour une frange des Britanniques aujourd’hui. Mais aussi que le chacun pour soi n’est
pas une fatalité.
On aura compris la forte valeur documentaire de cette fiction (on apprend tout en passant
du monde des ferrailleurs et ses trafics). Le filmage caméra à l’épaule, le montage court,
fixant la moindre réaction des deux garçons,
appartient au genre. En contraste total, de longs
plans fixes de ciels, de pylônes, de tours de
refroidissement de centrale nucléaire, et bien
sûr d’animaux, ménagent des pauses qui sont
autant de respirations. On peut voir dans de tels
plans typiques de sa manière un hommage
rendu à Ozu…
La Semaine des nominés
En janvier à Soleure ont été nominés les
films concourant pour les Prix du cinéma suisse
dont la remise aura lieu à Zurich le 21 mars. Du
17 au 23 mars, seront projetés aux Cinémas du
Grütli tous les longs-métrages nominés dans
toutes les catégories (soit 13 films) complétés
par deux programmes de courts- métrages de 70
minutes chacun.
L’occasion de voir, dans la catégorie
«Meilleur film de fiction» : Der Goalie bin ig de
Sabine Boss ; Left Foot Right Foot de Germinal
Roaux ; Les grandes ondes (à l'ouest) de Lionel
Baier ; Mary Queen of Scots de Thomas
Imbach ; Traumland de Petra Volpe. Dans la
catégorie « Meilleur documentaire » : Der
Imker de Mano Khalil ; L'escale de Kaveh
Bakhtiari ; L'expérience Blocher de JeanStéphane Bron ; Neuland d’Anna Thommen ;
Vaters Garten - die Liebe meiner Eltern de Peter
Liechti. Dans la catégorie « Meilleur film d’animation » : Hasta Santiago de Mauro Carraro ;
The Kiosk d’Anete Melece et Vigia de Marcel
Barelli.
Christian Bernard
Plus d’informations sur : www.cinemas-du-grutli.ch/
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sous la loupe
Abus de faiblesse
Il est des films que l’on regarde différemment selon que l’on est ou non
renseigné sur le contexte de leur production. Abus de faiblesse est
du nombre.
«Abus de faiblesse»
Tout ignorer de ce contexte, serait déjà voir
un excellent film dont on ne peut que louer la
maîtrise du récit et de la direction d’acteurs.
Mais savoir que cette histoire d’une cinéaste
sous influence a été vécue par Catherine
Breillat, que la dimension autobiographique est
omniprésente avec les risques qu’elle comporte,
modifie notre regard sur ce qui est dès lors
perçu comme un audacieux exercice de conjuration des épreuves subies associé à une
introspection d’une lucidité sidérante sur le psychisme clivé de l’artiste engagée dans l’exercice de l’autobiographie.
Soit l’histoire de Maud (Isabelle Huppert),
une cinéaste ayant fait une attaque cérébrale
avec séquelles lourdes, sa lutte pour vivre quand
même. A force de rééducation, elle retrouve la
parole mais pas toute sa mobilité.
Hémiplégique, elle se déplace difficilement
avec une canne et son bras gauche est incontrôlable. Une nuit, elle aperçoit à la télévision où il
est interviewé, le type d’homme qu’elle recherche pour être le héros de son prochain film : un
bad boy, détaché, au regard froid. Vilko (Kool
a
c
t
u
Shen) a fait de la prison pour escroquerie. Dès
leur première rencontre un pacte est scellé.
Alors qu’elle ne voit jamais ses comédiens
avant le début du tournage, ils ne vont plus se
quitter. La nature de leur lien n’est pas claire.
Une dépendance sans rapport sexuel s’installe.
Qui dépend de qui ? Elle, l’handicapée, l’esthète, la fantasque, l’autoritaire, va se mettre à
signer des chèques de plus en plus importants
pour celui qui n’est jamais à court de bons plans
garantissant leur remboursement. L’argent,
envahissant tout, aura raison des sentiments
amoureux et d’une relation de plus en plus
mortifère.
Maud / Vilko, Huppert / Kool
Shen, Breillat / Rocancourt
Cette ronde de l’amour, de l’argent et de la
mort, déjà parfaitement fascinante en soi l’est
davantage encore dès lors que l’on sait que
Catherine Breillat a effectivement été foudroyée
par un AVC en 2004 qui l'a rendue hémiplégique, qu’elle devait tourner un film Bad Love
avec Naomi Campbell et Christophe
a
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Rocancourt, l’escroc dont on se souvient qu’il
avait publiquement annoncé son repentir. Le
film ne se fera pas mais Rocancourt saura se
rendre indispensable. Profitant de la faiblesse de
la cinéaste, il lui soutirera près de 800’000
euros, faits pour lesquels il sera condamné en
2012. Le film Abus de faiblesse est l’adaptation
du livre du même titre de Catherine Breillat,
paru en 2009.
« Écrire un livre permet de développer un
récit complexe, mais plus
linéaire que dans un film. Au
cinéma, le recours à l'image
offre la possibilité de raconter au même moment une
chose et son contraire »
déclare Catherine Breillat. Le
fait est que les ambiguïtés
délibérées ne manquent pas
dans cette narration elliptique
où rien n’est développé.
Wilko ne développe pas de
vraie stratégie, tandis que
Maud, tour à tour demanderesse et protectrice, déprimée
et autoritaire, combative et
revenue de tout, offre un portrait complexe. Elle est moins
au clair qu’elle le pense sur
les sentiments qui l’animent,
en particulier à l’égard de ses
proches, rendus par elle
impuissants dans leur volonté de l’aider, ce qui
l’ouvre à l’influence exercée par Wilko, acceptée avec légèreté.
Face à une Isabelle Huppert jouant dans
tous les registres, tantôt engagée âme et corps
telle une sacrifiante, tantôt comme absente à
elle-même, Kool Shen (l’autre moitié de NTM
avec Joey Starr) tient le choc.
Le plus admirable du film est l’absence de
complaisance dans le regard que Catherine
Breillat porte sur elle-même. Regard frontal sur
son handicap, sa dépendance physique, ses tendances sado-masochistes, toutes choses l’ayant
amenée à signer ces chèques en sachant bien
que c’était un escroc, mais à signer quand
même. « C’était moi et ce n’était pas moi »,
ainsi se conclut cette belle exploration de la
dénégation.
Christian Bernard
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prétexte fallacieux d’une conspiration sioniste
en 1953. Blumenthal (2013) de Seth Fisher
s’annonce comme une comédie satirique new
yorkaise à la Woody Allen.
mars à la
Cinémathèque suisse
Intégrale des frères Coen
Last, but not least, vous aurez l’occasion
mentaire du cinéaste Gianfranco Rosi (aucun d’attraper enfin ou de revoir l’un ou l’autre des
lien de parenté avec l’immense Francesco films de Joel et Ethan Coen, la seule fratrie du
Le samedi 8 mars, les membres de LACS Rosi). La Cinémathèque nous donne l’occasion cinéma dont l’œuvre soit d’une tenue pareilleet ceux qui veulent le devenir sont conviés à de rencontrer ce nouveau venu (qui n’en est pas ment exemplaire. Il n’y a tout simplement rien à
l’assemblée annuelle qui se tiendra à 11h00 à la un, puisque son premier film date de 1993) le 18 jeter ! De Blood Simple (1984) à Inside Llewyn
salle du Cinématographe au Casino de mars et de l’accompagner
Montbenon. A 13h30 commence, dans la même dans sa découverte des marsalle, le marathon de quatre films achetés grâce ginaux qui ont trouvé domiaux contributions des membres, qui ont de ce cile le long du Grande
fait accès libre : Roma città aperta (Roberto Raccordo Anulare, ou
Rossellini, 1945), Ma Nuit chez Maud (Eric Grand Contournement de
Rohmer, 1969), North by Northwest (Alfred Rome. Deux autres docuHitchcock, 1959) et Il Dono (Michelangelo mentaires de Rosi sont monFrammartino, 2003). Les trois premiers sont trés la même semaine, son
bien sûr des classiques vus, revus et à revoir. Le premier, Boatman (1993)
quatrième est le premier long métrage du réali- sur un conducteur de pirosateur de Le Quattro Volte (2010), paradigme gue sur le Gange à Bénarès,
Frances McDormand dans «Fargo» des freres Coen
du cinéma de contemplation qui a remporté là où les pieux Hindous
viennent
entamer
leur
voyal’adhésion critique lors de son passage sur nos
écrans. Il Dono, que je ne connais pas, se dérou- ge vers l’éternité, et El Sicario, Room 164 Davis (2013), en 16 longs métrages, les frères
le (selon le Web) dans un village calabrais avec, (2010), où un authentique tueur professionnel ont échappé constamment aux formules et aux
dans le rôle principal, le grand-père nonagénai- d’un gang de narcotrafiquants mexicains nous clichés, trouvant pour chaque sujet une consre de l’auteur. Un autre rôle est tenu par une fait le récit, le visage masqué, bien sûr, de son truction, une écriture et un climat propres, avec
comme seules constantes une photo cadrée au
jeune femme vaguement handicapée mentale, itinéraire barbare.
cordeau
(due à Roger Deakins dans 11 cas) et
qui couche avec tout le monde. Ceux qui ont vu
une
direction
d’acteurs d’une assurance phénole film le résumeront sans doute d’une façon Geneva International Jewish
ménale.
On
se
souvient des « gueules » chez les
plus mystérieuse et lyrique, mais si vous voulez Film Festival (GIJFF)
Dans
la
dernière
semaine
du
mois,
trois
Coen
:
M.Emmet
Walsh en détective pervers et
savoir ce qui se passe quand les deux personnalongs
métrages
du
GIJFF
sont
montrés
à
la
pourri
dans
Blood
Simple, Javier Bardem en
ges se rencontrent, soyez à 21h00 au
Cinémathèque.
Orchestra
of
Exiles
(2012)
de
tueur
psychopathe
dans
No Country for Old
Cinématographe !
Josh Aronson, est un documentaire sur les ori- Men (2007), Jon Polito en gangster moraliste
gines de l’Orchestre philharmonique d’Israël, dans Miller’s Crossing (1990), pour ne citer
Gianfranco Rosi
À la dernière Mostra de Venise, le Lion composé initialement de musiciens ayant survé- que 3 exemples, alors qu’on les confond faciled’or fut remporté par Sacro GRA, un film docu- cu à l’Holocauste. Tous doivent une fière chan- ment chez les Dardenne (normal, car les
delle au violoniste Dardenne sont toujours dans le même sujet
polonais Bronislaw qu’ils s’obligent de traiter en mode « réalisme
Huberman dont les pur et dur »). Il est juste dommage que la
efforts prodigieux ont Cinémathèque n’ait pas déniché une copie du
sauvé des centaines remake chinois hilarant de Blood Simple : A
de familles juives. Ve Woman, a Gun and a Noodle Shop (Zhang
Stinu/In the Shadow Yimou, 2009). De même, le travail d’Ethan
(2012) de David Coen sur le scénario de The Naked Man
Ondricek est un film (1998), film très obscur de J.Todd Anderson, ne
noir politique qui pourra être apprécié, rendant caduque la désidévoile comment le gnation d’ « intégrale des frères Coen »
régime communiste
Raymond Scholer
tchèque voulait se
débarrasser de ses
Gianfranco Rosi et son Lion d'Or
citoyens juifs sous le
Assemblée Générale des Amis de
la Cinémathèque Suisse (LACS)
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Mais au lieu d’opter pour l’ironie ou d’intégrer leur démarche à une narration, le couple
préfère rester dans le champ expérimental,
renonçant à toute intrigue et perdant le spectateur en cours de route, soumis aux courts termes
de l’effet son et lumière.
festival de gérardmer
Films fantastiques
Vingt-et-un ! Le Festival du Film Fantastique de Gérardmer a réussi à
durer aussi longtemps que le festival d’Avoriaz, dont il fut le successeur.
Même s’il reste peu connu, il fédère un public de connaisseurs de plus en
plus nombreux autour d’une sélection passionnante, cohérente et
représentative de la diversité des films de genre.
L’absence des gros budgets (Gérardmer ne
représente plus d’intérêt médiatique significatif
pour les majors) laissent la place aux moyens
budgets, souvent des premiers films, qui permettent aux festivaliers de découvrir des univers où les auteurs cherchent, sinon trouvent, un
ton unique, exploratoire et intriguant.
Zombi pasolinien
Le grand prix, Miss Zombie fait résolument partie de cette catégorie.
Handicapé par un titre un peu
ridicule qui présage à tort une
comédie, le film de Sabu (de
son vrai nom Hiroyuki
Tanaka) joue la carte de l’élément perturbateur qui
exp(l)osera la famille nucléaire japonaise. La demoiselle
zombie du titre étant offerte à
la famille pour exécuter les
tâches ménagères, sa totale
docilité est idéale dans la
structure hiérarchique nippone.
Suivant la tradition de
Romero, le zombi n’est ici ni armée funeste, ni
fléau, mais un révélateur politique ou sociologique. On pense ici aux perturbations créées par
l’élément étranger de Théorème de Pasolini. La
docilité de la jeune zombie renvoie à la docilité
des classes dites inférieures, bonnes à exécuter
des tâches absurdes et répétitives. Corps de
femme soumis à l’exploitation par les mâles (ici
plus piteux les uns que les autres), force de travail soumise à l’exploitation des riches, la force
symbolique du zombi est dans cette réification
de l’humain, objet de tous les commerces, ce
qui renvoie au devenir de notre condition
humaine qui connaît aussi sa zombification. Le
scénario développe de manière subtile la lente
conscientisation du mort-vivant par l’étincelle
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émotionnelle d’un report d’affection sur le fils
de famille, mort à son tour dans un accident.
Les choix esthétique de Sabu (plans lents,
noir et blanc) poussent à l’abstraction et à l’allégorie. Il termine son film en couleurs lorsque
le personnage se suicide, mélangeant ainsi une
connotation marxiste, sentimentale et sacrificielle. Ce syncrétisme rend ce film plus authentiquement japonais que beaucoup d’autres œuvres nippones récentes.
«The Babadook» de Jennifer Kent © Matt Nettheim
Giallo Postmoderniste
Autre travail sur la forme, L’étrange couleur des larmes de ton corps, d’Hélène Cattet et
Bruno Forzani, pousse vers davantage d’abstraction les recherches que ce couple avait précédemment entamées dans Amer. Ce dernier
opus est tellement postmoderniste qu’il pourrait
tenir à lui seul de manifeste. Les auteurs procèdent par utilisation extensive des codes visuels
du Giallo (film policier horrifique et baroque
italien codifié par Dario Argento), par fragmentation, collage, recyclage d’œuvres d’autres
champs culturels (Art nouveau de Nancy,
musiques de Morricone) au service d’une œuvre
sur le genre.
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A croire qu’on peut filmer la « Giallitude »,
au lieu de filmer un giallo, le film finit par s’autodétruire et réduire le genre à un effet purement
visuel au lieu d’interroger ce qui constitue la
véritable valeur des œuvres de référence: le sentiment qu’à tout moment, le familier peut basculer et se dérober et que cette angoisse, exacerbée, peut transformer le monde en expérience
esthétique. Pour cela, il faudrait, pas même une
histoire, mais juste une intrigue lisible. Ce que
ce film, par ailleurs passionnant, ne prend pas la
peine de donner.
Quant au film australien The Babadook,
déjà remarqué à Sundance et lauréat de nombreux prix, il traite des terreurs enfantines, tout
comme Mama, grand prix de l’année passée. Si
Mama développait une intrigue basée sur le « devenir
mère » d’une femme, au
départ dépourvue et de l’aptitude et du sentiment,
Babadook interroge les limites de l’amour maternel face à
un enfant perçu comme difficile. Le monstre s’insinuant
pour pousser l’héroïne à tuer
son enfant. Shining a été cité
en exemple, bien que le film,
par son traitement plus
psychologique, entre dans des
eaux
plus
subtiles
du Possession de Polanski.
Nous reviendrons plus en détails sur ce
film complexe lorsqu’il sortira en salles. Mais il
témoigne, s’il le fallait encore, que l’originalité
vient moins des sujets que du traitement et du
propos.
David Leroy et Colette Fry
Grand Prix: MISS ZOMBIE de SABU (Japon) ; Prix du
public, de la critique, THE BABADOOK de Jennifer
KENT (Australie), également prix du jury ex aequo avec
RIGOR MORTIS de Juno MAK (Hongkong)
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En évitant tout pathos et tout excès mélodramatique, en soignant ses décors et ses costumes
et en témoignant d’un véritable travail de recherche documentaire dans le traitement de son sujet,
Jean-Marc Vallée offre un film qui montre la
complexité de ce qui se joue sur le plan scientifique, économique et social avec l’irruption du
sida au milieu des années 80.
Les films du mois
Serge Lachat
NYMPH()MANIAC (VOL. 2)
de Lars von Trier. Danemark 2013
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«Dallas Buyers Club» avec Rayon (Jared Leto), Ron (Matthew McConaughey) © Ascot Elite
DALLAS BUYERS CLUB
de Jean-Marc Vallée (USA, 2013) avec
Matthew McConaughey, Jared Leto, Jennifer
Garner…
Je le dis sans ambages : j’ai beaucoup aimé
ce film ! Et c’est avec pas mal d’irritation que j’ai
lu de nombreuses critiques qui voyaient dans son
sujet, dans son inscription dans le genre « biopic », dans les performances de ses acteurs principaux et dans sa sélection pour de multiples
Oscars le signe même de son appartenance au
cinéma le plus « commercial » (épithète qui
signale toujours le mépris du critique) !
Alors oui, Dallas Buyers Club est un biopic
qui raconte l’histoire de Ron Woodroof, 35 ans,
un « redneck » de Dallas, électricien sur des
chantiers, fanatique de rodéos, baiseur à tout crin,
macho homophobe, alcoolique et drogué à qui on
annonce, lorsqu’il passe à l’hôpital à la suite d’un
accident professionnel, qu’il a le sida. On est au
milieu des années 80, Ron est incrédule (il
« sait » que le sida ne touche que les pédés
comme en témoigne le récent coming out de
Rock Hudson…). Tout change lorsqu’on lui
annonce qu’il n’a plus qu’une trentaine de jours
à vivre : après s’être effondré, Ron décide de se
battre pour survivre, comprend qu’il doit faire fi
des consignes de la FDA complètement à la botte
des grands laboratoires pharmaceutiques qui
cherchent des cobayes pour mettre au point leur
a
vaccin. Il découvre qu’il peut se procurer au
Mexique des médicaments interdits aux USA et,
aidé par Rayon, un transsexuel victime du sida
lui-aussi, il réussit à contourner les règles américaines au grand dam des laboratoires : des
malades lui donnent de l’argent pour qu’il puisse
acheter à l’étranger des médicaments en grande
quantité (d’où le titre du film qui désigne ce
« club » dont les clients paient leur adhésion,
donc leur traitement à l’avance). Il meurt 7 ans
plus tard, non sans avoir obtenu gain de cause
contre les Autorités fédérales et les laboratoires
pharmaceutiques devant les tribunaux.
Alors oui, ce film appartient à la veine américaine de films de la deuxième chance ou de la
rédemption. Mais même si, ostracisé par ses
vieux copains machos, son protagoniste s’ouvre
aux autres et perd ses préjugés homophobes, le
cinéaste refuse à son histoire toute dimension
religieuse au profit d’une approche politico-économique de son sujet, approche plutôt rare dans
le cinéma hollywoodien !
Alors oui, le cinéaste réussit son film en
grande partie parce qu’il dispose d’acteurs
exceptionnels (Matthew McConaughey et Jared
Leto en tête, dont la performance va bien au-delà
de la vingtaine de kilos perdus dont on nous rebat
les oreilles). Mais en quoi le fait d’avoir des
acteurs pareillement investis permet-il de dire
que le cinéaste a fait son film en visant les
Oscars ?
c
t
u
a
La question se pose évidemment à la vision
du « Volume 2 » de ce film de Lars von Trier :
qu’est-ce qui fait que j’aime plus ou que j’aime
moins ce deuxième volet ? Séduit par le dispositif narratif surprenant du « Volume 1 », sa reprise dans la deuxième partie rendant le dispositif
moins surprenant, suis-je encore sous le charme ?
La réduction du nombre de chapitres de 5 à 3 at-elle un sens et change-t-elle ma réception du
film ? Suis-je plus réservé devant les thèmes traités (même si le thème central reste en gros identique, on note une nette focalisation sur la question de la culpabilité, par exemple).
Et ces questions, qui se posaient à partir de
la prétendue volonté du cinéaste d’offrir son film
en deux parties distinctes, sont-elles encore pertinentes depuis que l’on sait que le film doit être
présenté à Berlin en une seule partie encore augmentée de plus d’une heure ?!
Faute de pouvoir accéder à cette version longue pour le moment, essayons de voir ce qui se
modifie et ce qui subsiste du « Volume 1 » au
« Volume 2 ». Dans les deux parties, Lars von
Trier met en scène une réflexion morale à partir
du récit de sa vie sexuelle par une jeune femme.
A la fin de la première partie, la très jeune Joe
découvrait avec effroi son incapacité à jouir.
Dans la deuxième partie, plus âgée, Joe est devenue mère d’un petit garçon. Par amour, son mari
qui se croit responsable de l’absence de plaisir de
sa femme, encourage celle-ci à coucher avec
d’autres hommes, à vivre des aventures de plus
en plus extrêmes. Qui la laisseront insatisfaite
jusqu’à ce qu’elle découvre le masochisme. A
partir de là, elle va tous les soirs retrouver son
tortionnaire, négligeant dangereusement son fils,
ce qui pousse Jérôme, le mari, à la menacer de
partir avec l’enfant si elle ne renonce pas. Le soir
où il formule sa menace, elle retrouve la jouissance sous les coups de cravache !
Forcée par sa patronne à entreprendre une
thérapie, Joe constate l’échec de celle-ci, abandonne tout espoir de guérison et part. Refusant la
l
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«Nymphomaniac-Part 2» avec Joe (Charlotte Gainsbourg), Seligman (Stellan Skarsgard)
© Ascot Elite
norme que les autres veulent lui imposer et
acceptant sa pulsion, elle poursuit ses expériences sexuelles (plus ou moins drôles – l’expérience avec les deux étalons noirs -, mais toujours
frustrantes). Elle devient « recouvreuse de dettes » et par sa froideur même excelle dans cette
profession. L’âge venant, on lui demande de former une jeune assistante qui ne tarde pas à devenir sa maîtresse. Jusqu’au jour où Joe découvre
que l’assistante a une liaison avec un client. Ce
client n’est autre que Jérôme, son ex-mari. Elle
veut le tuer, son pistolet s’enraye et Jérôme la
tabasse. Nous revoilà au point de départ du film,
au moment où elle est trouvée et recueillie par
Seligman. Seligman qui a continué, au gré du
récit qui lui était fait, à apporter ses commentaires philosophiques et ses références culturelles.
Seligman qui finit aussi par découvrir pour son
malheur qu’il n’est pas qu’esprit !
On voit bien ce qui rapproche Joe des autres
personnages des films de Lars von Trier : une
solitude irrémédiable, une incapacité à accepter
les normes sociales et morales, une incapacité
aussi à jouir de cette différence malgré tous les
efforts de son auditeur pour lui montrer qu’elle
s’inscrit dans une lignée de héros, de mythes et
de récits symboliques !
Et pourtant je suis sorti de ce « Volume 2 »
déçu. Ce qui m’avait séduit dans la première partie, ce dialogue philosophique très « XVIIIème
siècle » entre une Shéhérazade nordique et un
vieux philosophe me semble tout à coup comme
déséquilibré. Est-ce ma difficulté à regarder l’effet des coups de cravache sur un corps de femme,
est-ce l’accent mis sur la culpabilité de la mère,
est-ce la haine du corps qui semble tenailler le
cinéaste ? Est-ce la mélancolie ou plutôt le pessimisme radical du cinéaste qui, loin de partager
les analyses de Seligman, ne cesse de dire la mi-
a
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u
sère de l’homme et de la femme ? Est-ce sa complaisance perverse devant son propre pessimisme, complaisance qui l’amène à s’autociter (« Antichrist » avec l’utilisation de la
musique de Haendel) ? Est-ce mon irritation à
voir Lars von Trier resservir de vieux clichés sur
les Noirs hypersexués et noyés dans leurs palabres sans fin, est-ce l’humour douteux qui fait de
Joe une sorte de James Bond des recouvreurs de
dettes ? Est-ce la vanité de faire apparaître pour
rien des stars comme Willem Dafoe ou JeanMarc Barr ? Je ne sais pas, mais je suis sorti de la
vision de ce « Volume 2 » de fort méchante
humeur malgré la performance tout à fait remarquable de Charlotte Gainsbourg.
La version berlinoise du film (plus de 5 heures en une fois !) pourrait-elle me rendre le plaisir que j’ai eu avec le « Volume Un » ?
Serge Lachat
ONLY LOVERS LEFT ALIVE
de de Jim Jarmush (USA, 2013) avec Tilda
Swinton, Tom Hiddleston, John Hurt…
Jim Jarmush réalisant un film de vampires ?
Voilà qui, dans un premier temps, peut paraître
incongru. Mais la surprise laisse place à l’évidence lorsque le spectateur découvre que ces vampires ressemblent fort aux personnages du monde
artistique et nocturne qui peuplent les films du
cinéaste. Précisons que dans le cas présent,
même s’ils boivent du sang et se réveillent la
nuit, les vampires de Jarmush ne hantent ni les
châteaux anglais, ni les demeures d’Europe centrale (malgré l’écriture gothique du générique !).
En effet, s’ils ont bien traversé les siècles
(ils semblent être là depuis la nuit des temps,
puisqu’elle s’appelle Eve et lui Adam !), ils forment toujours un couple romantiquement amou-
a
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t
reux, mais à la façon des couples modernes : ils
habitent aujourd’hui elle à Tanger, lui à Détroit.
Si l’on peut s’étonner du choix d’une ville solaire comme Tanger (peut-être à cause de son cosmopolitisme et son attrait mythique pour les
artistes depuis bien longtemps), il faut reconnaître que le choix de Détroit est une excellente
idée. On peut même s’imaginer que le désir de
faire ce film est né du désir de Jarmush de garder
une trace visible de cette ville en état de ruine
avancée (ce qui n’exclut en rien une potentielle
renaissance évoquée dans le film et peut-être déjà
commencée dans la réalité). Soyons clairs : le
décor de l’ancienne très grande salle de cinéma
transformée en parking restera dans les mémoires. Par ailleurs, cette ruine urbano-industrielle
devient comme le signe d’une fin de la civilisation (occidentale ?). Dans cet univers moribond,
les vampires de Jarmush se tournent vers le passé
et peuvent donner libre cours à leur nostalgie et à
leur détestation de la modernité qu’ils jugent
grossière et uniquement peuplée de ce qu’ils
appellent des « zombies » ! Il faut dire qu’ils ne
peuvent plus prendre le risque de boire du sang
frais au cou de leurs victimes, sang tellement
contaminé qu’il pourrait les faire mourir pour de
bon (!), et ils sont donc « condamnés » à boire du
sang de conservation ou à le sucer en sorbets…
Dans ce contexte, Adam n’a plus qu’une
passion : collectionner, en vieux rocker, les vieux
disques vinyles, les électrophones et les instruments à cordes, particulièrement les guitares
électriques (ce qui permet à Jarmush de glisser
dans son film un petit cours d’histoire de la
musique à partir de ses propres goûts. Premier
degré, auto-ironie, difficile de se prononcer !)
Eve, quant à elle, vit à Tanger, ville aimée
des auteurs littéraires, où son vieil ami du 16ème
siècle Christopher Marlowe se meurt (pour avoir
bu du sang mal conservé à l’hôpital !) en maudissant une dernière fois ce voyou de Shakespeare
qui a pillé son œuvre et lui a volé sa place au panthéon ! Ce couple de dandys romantiques
effrayés par le présent vit donc tourné vers le
passé lorsqu’il voit surgir Ava, la jeune sœur
d’Eve, pleine de fougue, de désirs de vivre et de
mordre le cou de jeune gens désirables ! Moment
qui aurait pu donner un élan au film languissant
de Jarmush, mais comme Eve et surtout Adam, le
cinéaste s’empresse d’expulser la jeune fille qui
avait semé le désordre et laissé le « dealer »
d’Adam vidé de son sang.
A la fin de ce film plane un indéniable sentiment de tristesse, de taedium vitae. Peut naître
alors chez le spectateur le sentiment d’avoir
assisté à une succession de clins d’œil et de réfé-
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«Only Lovers Left Alive» avec Mia Wasikowska, Anton Yelchin, Tilda Swinton © Filmcoopi
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rences culturelles pour happy few, ce qui peut
provoquer une réaction de rejet. En même temps,
dans sa posture décalée et sur une bande-son
remarquable, le film distille un humour très fin
et, toujours au bord de l’autodérision, évite toute
lourdeur. Et sa fin est ouverte à toutes sortes d’interprétations…
Serge Lachat
LA COUR DE BABEL
de Julie Bertucelli (France, 2013)
Etre et avoir de Nicolas Philibert (2002)
inaugurait sans le savoir ce qui est en passe de
devenir un genre en soi: le documentaire ayant
pour cadre une classe d’école. En choisissant de
suivre pendant une année une classe d’accueil
d’un collège du 10e arrondissement de Paris,
Julie Bertucelli donne la parole à ceux qui ne
l’ont pas, ou très peu, médiatiquement s’entend.
La démarche est ici d’autant plus intéressante
que ces élèves invités à s’exprimer, sont là parce
qu’ils n’ont pas (encore) une maîtrise suffisante
du français, condition de leur intégration future
dans une classe “normale”.
Premier étonnement: cette absence de maîtrise est loin d’être un handicap dès lors qu’il s’agit d’exprimer leurs sentiments profonds. Qu’ils
soient Brésilien, Sénégalais, Chinois, Biélorusse,
Serbe, ou de façon plus inattendue, Anglais ou
Irlandais, tous ont en commun le déracinement et
l’apprentissage forcément difficile d’une vie
toute autre dans des conditions précaires. Mais
chaque histoire est différente pour ces 24 élèves
représentant une vingtaine de nationalités et
autant de langues. C’est en effet le partage des
expériences qui est suscité par la professeure en
a
charge de cette classe pas comme les autres dans
laquelle Julie Bertucelli s’est rendue en moyenne
deux fois par jour pendant toute l’année scolaire.
« C’est sur la durée qu’ils m’ont acceptée,
et m’ont laissée faire partie de leur classe.
J’étais face à eux, à côté de la prof, avec ma petite chaise à roulettes, ils me voyaient bien, ils ne
m’oubliaient pas. Mais il n’y a aucun regard
caméra dans le film. » Le fait est que le spectateur n’a jamais l’impression d’une réalité “pour
la caméra”. En résulteront des dizaines d’heures
d’image et de son ramenées à une heure et demie
par le montage. La cinéaste a donc dû choisir:
seuls une huitaine d’élèves seront suivis, non
seulement en classe mais aussi lors de leurs
entretiens avec la prof, seuls ou accompagnés
d’un parent (rarement deux et pas nécessairement
biologique, parlant ou non le français). Autant
d’histoires mêlant souffrances, ambitions,
espoirs, venues de tous les continents et exprimées selon les codes propres à chaque culture.
De l’Africaine ayant deux
religions et venue en France
pour être libre au violoncelliste argentin, du Serbe persécuté chez lui parce que juif à
la Roumaine recevant les
félicitations du conseil de
classe, une plongée souvent
bouleversante dans la commune humanité des occupants de la Tour de Babel.
Au détour d’une phrase,
d’un regard, d’un silence, on
a le sentiment que tout est dit.
On n’oubliera pas le moment
où l’une des jeunes
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a
Ukrainiennes commence à chanter pour la classe,
l’évidence immédiate du chant slave, sa force,
son naturel. Il faut observer le changement à vue
des trois camarades au second plan: ne venant
pas d’une culture où le chant a une aussi grande
place, ils sont d’abord prêts à rire, mais pas longtemps, et la sincérité de leurs applaudissements
touche. Parfaitement captée également, l’importance pour ces adolescent(e)s du travail partagé:
ils tourneront un film sur eux-mêmes parlant face
à la caméra (jolie mise en abyme) qui sera projeté dans le cadre d’un festival du film scolaire à
Chartres où la classe s’est transportée. Il faut voir
leur joie à l’annonce que le film a reçu un prix.
Les liens progressivement créés mèneront à
la grande séparation de fin d’année entre embrassades et larmes. Peu importe si les cyniques de
service écriront, comme on peut le prévoir, qu’on
ne fait pas de bon cinéma avec de bons sentiments, ou qu’il ne s’agit que d’un hommage
déguisé à l’Education nationale. Ils passeront à
côté de ce que Julie Bertucelli prouve si tranquillement: qu’on ne voit bien qu’avec le coeur.
Christian Bernard
IDA
de Pawel Pawlikowski, avec Agata Kulesza,
Agata Trzebuchowska (Pologne, 2012)
Pawel Pawlikowski est un cinéaste polonais
âgé de 57 ans vivant en Grande-Bretagne. Il a
quitté sa Pologne natale à l’âge de 14 ans, en
1971. Après trois longs-métrages, Transit Palace
(2000) et My Summer of Love (2004) tournés en
Grande-Bretagne, et La Femme du Vème (2011)
tourné à Paris, il éprouve le besoin de revenir en
Pologne pour y réaliser cet admirable Ida.
En racontant l’histoire située dans la
Pologne de 1962 d’Ida, jeune novice à la veille
de ses vœux, et de sa tante Wanda, juge dans un
«La cour de Babel» © Agora Films
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petit tribunal, Pawlikowski
créer des conflits !). Dans le
revisite l’histoire de la Pologne
village, elle retrouve un ami un
d’après-guerre, entre catholipeu plus âgé (James Thierrée)
cisme, communisme et - thème
avec lequel elle avait un peu
plus rarement exploré par le
flirté. A la suite d’une nuit d’acinéma polonais - antisémitismour ratée, ils avaient rompu.
me. Il dresse en même temps
Leurs retrouvailles vont d’aun portrait sans caricature de la
bord relancer un dialogue pour
Pologne de l’époque. Ida,
se renvoyer la responsabilité
séparée tout enfant de ses
de cet échec.
parents dont elle ignore ce
On connaît le talent de
qu’ils sont devenus, a été éledialoguiste de Doillon (certaivée dans un couvent. Elle ne
nes répliques restent en
connaît rien du monde. Son
mémoire comme des vers),
seul horizon est le couvent et
mais aussi sa façon de faire
ses rites, sa seule force, sa foi.
souffler, chuchoter, proférer,
Sa mère avait une sœur, mais
crier ses dialogues. Et de les
Agata Kulesza et Agata Trzebuchowska dans «Ida» © Frenetic Films
elle n’a jamais reçu la visite de
rythmer comme de la musique.
cette tante, malgré ses demandes. Pourtant la recréer l’ambiance unique de ces dancings où se Il sait aussi tout le mal que peuvent faire les
Mère supérieure, estimant indispensable qu’elle produisaient d’excellents musiciens n’ignorant ni mots, surtout quand ceux qui les utilisent
connaisse le monde avant de prononcer ses vœux John Coltrane, ni Adriano Celentano. Lorsqu’Ida connaissent fort bien leur petit Freud ! C’est dire
définitifs, lui annonce qu’elle va séjourner chez après s’être laissée séduire par un beau saxopho- que, dans un premier temps, les personnages
cette tante Wanda inconnue. Tout semble devoir niste, deuxième temps de son initiation, danse devront (elle surtout, avec ses histoires de
séparer Ida l’ignorante vivant hors du temps et avec lui, on pense à Viridiana. Mais elle ne le sui- famille) se débarrasser de leurs fantômes pour
Wanda porteuse d’un poids d’histoire trop lourd, vra pas, et le film s’achève sur Ida en route vers arriver à lutter vraiment seul à seul !
Ida l’innocente spectatrice muette et Wanda, la le couvent, sans que l’on sache si elle va prononTrès vite d’ailleurs la lutte verbale ne suffit
sensuelle, la lucide jusqu’à la dureté, la secrète- cer ses vœux.
plus aux deux protagonistes qui vont peu à peu la
ment désespérée. Pourtant elles se rapprocheront
Je ne sais ce qu’il faut le plus admirer dans transformer en lutte physique. Ils vont se humer,
jusqu’à devenir miroir l’une de l’autre au fil de cet Ida: la sécheresse d’une narration concise et se frôler, s’enlacer, se repousser, se frapper, se
l’initiation conduite par Wanda.
elliptique enchaînant des scènes allant tout de rouler dans la boue… Une danse qui constitue un
Initiation à quoi ? Au monde, on l’a dit, suite à l’essentiel et coupées dès que ce qui curieux oxymore : douce violence, violente douc’est-à-dire, dans un premier temps, à la connais- devait être dit est dit ? Une superbe image en noir ceur. Je parle de danse car les protagonistes ne
sance par Ida de ses origines. “Tu es juive” seront et blanc au format carré 1,33 comme à l’époque? luttent pas tant l’un contre l’autre que l’un avec
les premières paroles adressées par Wanda à sa La science et l’originalité des cadrages (prédilec- l’autre. On peut distinguer plusieurs temps dans
nièce. La quête des origines prendra la forme tion pour les gros plans de visages décentrés et la progression dramaturgique, mais disons pour
d’une enquête: retrouver la maison familiale, coupés au ras du cadre)? L’oreille d’un cinéaste simplifier que les passes de lutte, après le
retrouver les traces des disparus. Non sans peine, musicien attentif tant au rythme du montage, moment de paroxysme à nu dans la boue, se
“la maison des juifs” sera retrouvée dans un qu’aux bruits, qu’aux musiques (presque tou- transforment de plus en plus en étreintes érovillage, occupée par un paysan polonais. Contre jours écoutées par les personnages; pas de tiques qui entraînent les deux personnages dans
la promesse qu’il pourra rester, il conduira les musique d’accompagnement) ? Avec cet Ida de une sorte de dépendance. Ils semblent succomber
deux femmes dans une forêt à l’endroit où il a grande tenue, on se dit que le grand cinéma polo- à l’empire de la passion.
enseveli les corps et exhumera les restes; du fond nais (projeté au Ciné-club universitaire ce trimesDe même que Doillon est un maître de la
du trou qu’il a creusé, il leur avoue son crime. tre, voir ci-contre) continue.
captation de la parole dans tous ses états, il se
Christian Bernard révèle magistral dans sa façon d’accompagner
Les restes seront ensevelis dans un cimetière juif
par sa caméra ces luttes amoureuses.
à l’abandon… En parlant de Polonais tuant des
Accompagner de tout près de sorte que le spectaJuifs, Warlikowski s’inscrit dans un débat qui n’a MES SEANCES DE LUTTE
pu que récemment émerger en Pologne, levant un de Jacques Doillon (France, 2013) avec Sara teur est comme aspiré par ce jeu de pouvoir et de
Forestier, James Thierrée, Louise Szpindel
séduction violent! Entraîné dans tous les recoins
véritable tabou.
de la maison, derrière les meubles, dans les escaL’inscription de l’histoire polonaise à traUn scénario qui tient sur une carte postale : liers les plus sombres. Emporté par l’énergie et
vers le personnage de Wanda ne s’arrête pas là.
Son alcoolisme et ses aventures sans lendemain une jeune femme (Sara Forestier) revient sur les l’élan des acteurs : Sara Forestier comme James
sont le symptôme d’une autre fêlure: elle a été lieux de son enfance et de son adolescence pour Thierrée sont absolument prodigieux de subtilité
avant 1956 un procureur général impitoyable l’enterrement de son père (qui ne lui a pas donné et débordant d’une énergie sexuelle (sans que le
(“Wanda la Rouge”) que la déstalinisation a éloi- d’amour et qu’elle détestait) et le difficile partage film soit jamais pornographique) vertigineuse.
Serge Lachat
gné du pouvoir. Elle entraînera Ida dans ses sor- de l’héritage avec son frère et sa sœur (en fait,
ties nocturnes, l’occasion pour Warlikowski de elle ne voudrait que le piano, mais cela suffit à
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paraît-il, continué à tourner des films jusqu’en
2010, mais dès les années 80, ceux-ci n’ont plus
trouvé le chemin de nos écrans.
NéCROLOGIE : DéCèS
DE MIKLOS JANCSO
16
Pour tous ceux qui aiment le cinéma, même
et surtout dans ses manifestations les plus formellement audacieuses, la mort du cinéaste hongrois
Miklos Jancso doit faire remonter des images et
des séquences de films qui les ont marqués à
jamais. Mais il est vrai que ces dernières années,
Jancso avait presque totalement disparu des
écrans et que très peu parmi les plus jeunes ont
entendu parler de lui. Pourtant, dans les années
60-70, alors que nous découvrions un cinéma
venus d’autres continents ou régions du monde
(Amérique latine, Europe de l’Est…), Miklos
Jancso occupait une place tout à fait importante.
Non seulement son cinéma parlait de l’histoire peu connue de la Hongrie en évoquant par
exemple l’écrasement de la révolution hongroise
de 1848 par une coalition austro-russe (Les Sans
Espoir, 1965), ou encore les atrocités de la guerre civile entre partisans et opposants de la
Révolution bolchévique (Rouges et Blancs,
1967), mais il le faisait dans une forme absolument nouvelle. Tous ceux qui ont vu ses films se
souviendront de son goût pour les plans-séquences interminables (parfois plus de 12 minutes !)
qui donnaient à ses œuvres une dimension lyrique
et graphique loin de tout naturalisme. Cette stylisation extrême, ce lyrisme épique seront reconnus
et récompensés avec un prix de la mise en scène
à Cannes en 1972 pour son chef-d’œuvre Psaume
rouge qui parle des révoltes paysannes dans la
Hongrie de la fin du 19ème siècle. Jancso a,
En DVD
Serge Lachat
LE MANUSCRIT TROUVé
à SARAGOSSE
Christian Bernard
Rens. : www.a-c.ch/ccu
de Wojciech Jerzy Has, Pologne, 1964
C’est par ce chef-d’œuvre dont la sélection à
Cannes en 1965 contribua à faire connaître son
auteur, que se clôt, le 31 mars, le cycle que le
Ciné-club universitaire de Genève a consacré
durant trois mois au cinéma polonais. Tiré du
roman de Jan Potocki publié en 1810 dont il reprend la structure, ce récit picaresque contant le
voyage initiatique du capitaine Alfonse van
Worden tel qu’il est consigné dans un manuscrit
retrouvé par deux soldats lors du siège de
Saragosse en 1809 est une suite d’histoires dans
l’histoire, donnant elle-même lieu à d’autres histoires, plusieurs dizaines en tout. Une structure
encore plus ramifiée que celle suggérée par l’image des poupées russes ou des récits gigogne.
On se perdra avec délices dans cet univers de
contes aussi surréaliste qu’érotique, ou tout n’est
qu’illusions, fantasmes, rêves.
Plus tôt dans le mois sont proposés Haut les
mains (1967) de Jerzy Skolimowski, critique trop
transparente du régime communiste qui fut donc
censurée pendant 14 ans et mena Skolimovski à
l’exil (3 mars); également interdit mais pour
d’autres raisons, Le Diable (1972) d’Andrzej
Zuławski manifeste déjà les penchants du cinéaste pour l’hystérisation et l’esthétisation des rapre de Vol au dessus d’un nid de coucou,
Desplechin émeut profondément.
JIMMY P. (Psychothérapie d'un
MISSING
Indien des Plaines)
d’Arnaud Desplechin (france tv)
Passé trop brièvement sur nos écrans, Jimmy
P. se voit offrir une session de rattrapage en DVD
ou en Blu-ray. Dans ce film américain à la simplicité fordienne mais tournant le dos aux grands
espaces, Desplechin s’offre le luxe d’avancer au
rythme lent des séances d’analyse de Jimmy
Picard (Benicio Del Toro), un soldat Indien
Blackfoot revenu traumatisé par les combats
menés en France en 1944, séances retranscrites
par l'ethnopsychiatre Georges Devereux
(Mathieu Amalric). Entre l’Indien tenu pour fou
et le pionnier d’une discipline encore marginalisée, s’établira une confiance menant à la guérison. Confiance souterrainement renforcée par
leur commun statut de survivant (Devereux est un
juif hongrois). Refusant de dramatiser à la maniè-
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de Costa Gavras, DVD (Universal Classics)
Sa longévité et le nombre relativement réduit
de ses films pourraient conduire à le négliger.
Costa Gavras, rapidement etiqueté cinéaste politique (ce qu’il est certainement) est aussi un
grand connaisseur du cinéma tout court. On s’en
convaincra avec ce thriller politique, Palme d’Or
à Cannes en 1982, racontant la quête initiatique
d’un homme d’affaires new-yorkais parti à la
recherche de son fils journaliste, disparu suite à
un coup d’état militaire dans un pays d’Amérique
latine. Une preuve de plus que Jack Lemmon est
aussi un grand acteur tragique. Il atteint ici des
sommets dignes de son rôle d’alcoolique dans
The days of Wine and Roses de Blake Edwards.
Excellente Sissy Spacek dans le rôle de sa bellefille.
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ports de force ; quant à Sans fin (1985) de
Krzysztof Kieślowski, il inscrit avec finesse deux
drames personnels dans la Pologne de 1982, celle
de l’interdiction de Solidarnosc et la proclamation de l’état de guerre (24 mars).
a
L’ORGUE FAIT SON CINEMA
Certains lecteurs le savent peut-être déjà, le
Collège Claparède de Genève a la chance de posséder un orgue de cinéma. Construit dans les
années 1920 par la société Wurlitzer pour un
cinéma londonien, cet orgue a été racheté en fort
mauvais état par un amateur genevois qui a trouvé en Monsieur Raymond Jourdan un directeur
prêt à accueillir l’instrument dans son établissement qui disposait d’une salle de projection pour
son ciné-club et autres manifestations.
Mais un orgue de cinéma, surtout s’il est peu
joué, se dégrade très vite et l’orgue de Claparède
a fait l’objet de plusieurs remises en état. La dernière, la plus importante a été permise par la création d’une association : « Les Amis de l’Orgue de
Cinéma du Collège Claparède » (www.orguedecinema.ch). Et c’est pour permet-tre de
(re)découvrir ce merveilleux instrument en parfait état que cette association organise du 19 au
29 mars un premier festival « L’Orgue fait son
cinéma », dont le programme figure sur le site
sus-mentionné. Une occasion à ne pas manquer !
Serge Lachat
BLUE JASMINE
de Woody Allen, DVD ou Blu-ray (TF1)
On s’en voudrait de ne pas signaler la sortie
en DVD de cette réussite dans la veine sombre du
cinéaste, celle de Crimes and Misdemeanors.
Pour voir ou revoir la performance de Kate
Blanchett incarnant cette Jasmine à la dérive,
riche new-yorkaise désormais sans le sou à la
recherche d’un nouveau départ en Californie
auprès de sa sœur d’adoption, la très vivante et
tonique Ginger (excellente Sally Hawkins).
En suivant Jasmine dans ses rencontres californiennes, sa séduction, sa fragilité, ses névroses, on rit beaucoup (on est chez Woody Allen),
mais le constat est sans appel: elle ne pourra que
rejouer ses rêves et revivre son monde. Les crises
ne servent à rien, aucun nouveau départ n’est possible car nul n’échappe à soi: le pessimisme de
Woody Allen atteint ici un sommet.
Christian Bernard
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tous les suffrages. Ce film historique, inspiré de
l’œuvre de Stephan Zweig, est cependant un
film d’auteur aussi bien pour la subjectivité de
la narration que pour la sobriété de la photographie. En plus, il est animé par une musique
envoûtante d’excellent niveau, de la compositrice russe Sophia Goubaïdoulina.
à soleure
Le film suisse
se porte bien
Palmarès
Les journées de Soleure qui font chaque année le point sur la production des
films suisses se sont déroulées fin janvier. On a pu y voir du très bon cinéma
(en tout 35 premières), aussi bien des documentaires que de la fiction.
a enflammé les esprits :
la fiction Puppy Love,
premier long métrage de
la Lausannoise Sabine
Lehericey. Il s’agit de
l’éveil de la sexualité
chez deux adolescentes,
l’une ne cherchant que
le plaisir, l’autre étant
plus exigeante.
Et bien, cette œuvre
« sent encore l’école »
(Les Cahiers du cinéma), elle est « bien supérieure à La vie d’Adèle»
(Le Monde), sur quoi
«Puppy Love» de Sabine Lehericey
Parmi la sélection pour le prix principal, le
prix de Soleure, il y a eu de très bons films mais
aussi une déception. On attendait beaucoup de
Akte Grüninger, d’Alain Gsponer le film sur ce
juste Suisse qui a sauvé plusieurs centaines de
juifs pendant la seconde guerre mondiale. Et
bien le résultat est loin d’être un chef-d’œuvre,
aussi bien techniquement qu’en ce qui concerne
la structure narrative. Il vaut mieux revoir l’excellent documentaire de Richard Dindo (de
1997). On a par contre été captivé par L’escale
de Kaveh Bakthiari, un Genevois avec des racines iraniennes. Pendant une durée de plus d’une
heure et demie, on est enfermé dans un appartement à Athènes dans lequel se cachent des
Iraniens clandestins. Le film, qui a été présenté
à la quinzaine des réalisateurs au Festival de
Cannes, est un plaidoyer humaniste. On vit avec
les clandestins et on espère avec eux qu’ils réussiront à continuer leur périple en Europe.
Parmi les tables rondes organisées par le
Festival celle des critiques français était particulièrement animée. Ainsi la discussion sur le
documentaire L’expérience Blocher de JeanStéphane Bron, fut qualifié tour à tour de génial
(Les Cahiers du cinéma), d’horrifiant (Le
Monde) de mou (France Culture). Un autre film
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Deux films romands qui relatent la vie de
personnes en marge de la société ont impressionné l’audience : Left Foot Right Foot, du
Lausannois Germinal Roaux, raconte la vie
d’un jeune homme qui s’occupe de son frère
autiste. Le film qui contient des citations du
célèbre What’s Eating Gilbert Grape de Lasse
Hallström, convainc, notamment grâce à la performance d’acteur de Dimitri Stapfer. Milky
Way, du Neuchâtelois Cyril Bon et du Français
Joseph Incardona, raconte avec empathie la vie
de trois personnes au chômage, (un adulte, un
jeune homme et une jeune femme) qui vivent
dans une colocation et qui s’en sortiront en
gagnant le gros lot lors d’une course… d’escargots ! Un mélo avec donc une prise comique.
Les deux prix du Festival ont récompensé
des films en rapport avec l’immigration : le Prix
de Soleure a été attribué à L’escale et le public
a plébiscité Neuland, un film documentaire de
«Milky Way» de Cyril Bon et Joseph Incardona
Corinne Rondeau (France Culture) s’exclame
qu’elle ne veut plus entendre parler de ce dernier film (palme d’or à Cannes) totalement surestimé. Tous les critiques étaient d’accord pour
louer les acteurs : Solène Rigot, Audrey Bastien
et Vincent Perez.
Les films de fiction alémaniques comprenaient le pire (Achtung, fertig, WK! De Oliver
Rihs) et le meilleur (Der Goalie bin ig, de
Sabine Boss) en dialecte bernois. Mary Queen
of Scots, du Lucernois Thomas Imbach, une
production franco-suisse, a également rallié
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la Bâloise Anna Thommen, qui a suivi pendant
deux ans avec sa caméra la vie quotidienne
d’une classe d’intégration dans une école de la
ville rhénane.
L’atmosphère du Festival qui se déroule
dans la belle vieille ville de Soleure est très
agréable. La manifestation est bilingue, les francophones s’y sentent tout à fait à l’aise. Car si le
film suisse se porte bien, c’est aussi grâce aux
réalisateurs romands!
Emmanuèle Rüegger
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Retour en Syrie avec le grand réalisateur
Mohamad Malas et son Ladder to Damascus,
qui interroge la possibilité de vivre « normalement » une paix séparée pour de jeunes artistes
dans leur pays en guerre. On attend aussi beaucoup de A Stranger du Croate Bobo Jelcic revisitant Mostar 20 ans après, entre humour noir et
réalité kafkaïenne.
maison des arts du grütli
Le 7e art révélateur de
l’état du monde
La 12e édition du Festival du Film et Forum International sur les Droits
Humains (FIFDH) se tiendra du 7 au 16 mars en marge de la réunion du
Conseil des droits de l’homme. Outre une quarantaine de films,
documentaires de création ou fictions, pour certains inédits, sont proposées
des rencontres avec des personnalités de premier plan.
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Avec 25’000 spectateurs en 2013, le
FIFDH a battu un record d’audience. Un succès
qui devrait être au rendez-vous de l’édition
2014 à en juger par sa qualité. Large sélection.
Au chapitre des documentaires de création la projection en première suisse du bouleversant L’image manquante de Rithy Pahn,
primé à Cannes et nominé aux Oscars, sera un
moment fort. Autre première suisse, Return to
Homs du réalisateur syrien Talal Derki, suit sur
trois ans la descente aux enfers de deux jeunes
gens que rien ne prédisposait à devoir prendre
les armes contre la répression du régime.
Production suisse, Watermarks - Three Letters
from China est le portrait entre passé, présent et
futur, de trois habitants pris dans les bouleversements économiques et sociaux que connaît la
Chine. Il est signé Luc Schaedler.
Autour de la Journée internationale des
Femmes le 8 mars, projection de Light Fly, Fly
High de Beathe Hofseth et Susann Østigaard
qui suit une jeune boxeuse indienne de caste
inférieure dans son vain combat pour s’élever
socialement. Quant à la réalisatrice et journaliste Mimi Chakarova, elle enquête sur la traite des
jeunes femmes en Europe de l’Est avec The
Price of Sex, un éclairage cru sur l’enfer quotidien vécu par ces esclaves sexuelles. Retour sur
Angela Davis, figure majeure de la contestation
de l’Amérique des années 60, qui se confie dans
Free Angela and All Political Prisoners, véritable thriller politique que lui consacre Shola
Lynch.
La section « Fiction et droits humains »
regroupe huit films en compétition. On distinguera la révélation que constitue The Selfish
Giant de Clio Barnard (voir critique p. 8).
Egalement inédit en Suisse, Red Family, écrit et
produit par Kim Ki-duk et réalisé par Lee Juhyoung aborde le thème des relations entre les
deux Corées, avec la saga, entre humour et
drame, d’espions du Nord infiltrés au Sud.
Clio Barnard, la réalisatrice de «The Selfish Giant». Photo Nick Wall
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Parmi les invités de marque de cette édition, on mentionnera l’actrice française Rachida
Brakni ainsi que l’écrivaine et journaliste
Joumana Haddad, figure du féminisme dans le
monde arabe, ainsi que trois personnalités que
l’on ne présente plus : Robert Badinter,
Navanethem Pillay, Haut-Commissaire des
Nations-Unie aux droits de l’Homme, et Edgar
Morin. Signalons pour terminer la soirée « Yes
We Scan » consacrée au thème de la cybersurveillance avec la participation notamment de
Me Baltasar Garzon, avocat de Julian Assange,
fondateur de Wikileaks.
Christian Bernard
Renseignements sur www.fifdh.org/
FIFF
Le Festival International de Film de
Fribourg change de cape. Thierry Jobin, le
directeur artistique a dévoilé les grandes lignes
de sa programmation. Dans cette 28ème édition,
le sport et l’enfance laissent place à des sujets
plus durs. Des films sur les catastrophes et la
crise seront à l’honneur, notamment avec le
documentaire Finding Vivian Maier de John
Maloof et Charlie Siskel.
Cette année est aussi celle des cartes blanches. Les cinéastes belges, les frères Dardenne,
présenteront une face méconnue de leur travail :
leurs productions. La légende du hockey Slava
Bykov nous fera une visiter la Russie des films
populaires. Est prévue aussi une rétrospective
des œuvres marquantes du cinéma Iraniens. Et
pour cela, quatorze des plus importants réalisateurs iraniens, dont Asghar Farhadi, Jafar
Panahi, Mohsen Makhmalbaf, Sepideh Farsi,
Mahmoud Ghaffari et Shirin Neshat, ont choisi
pour le festival, 27 films allant de 1933 à 2006.
Cette collection voyagera vers d’autres festivals
comme en juin au Festival international du film
d'Édimbourg et s’étoffera au fil de son parcours.
En somme, une édition qui permettra de
parfaire sa culture du cinéma d’ailleurs. Et pour
la programmation complète : suspense… Il faudra attendre la mi-mars.
Tuana Gökçim Toksöz
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En juillet dernier, Médiapart a fait
l’expérience de la censure suite à un arrêt
surprenant de la cour d’appel de Versailles
imposant le retrait des enregistrements fait
par le majordome de Liliane Bettencourt et
les textes qui les relatent.
entretien
Edwy Plenel
Directeur du quotidien numérique Médiapart, le journaliste français
Edwy Plenel est connu pour être un défenseur de la liberté d’expression, de la
protection des citoyens lanceurs d’alerte et des journalistes. Edwy Plenel
rejoindra donc Me Baltasar Garzon, l’avocat en charge de la défense de
Wikileaks, pour apporter sa lecture d’Internet et celle du droit à l’information
lors du débat sur la cybersurveillance orchestré par le Festival du Film et
Forum International sur les Droits Humains. Entretien téléphonique
avec Edwy Plenel.
Doit-on rejeter en block la cybersurveillance ?
Le numérique n’a pas de frontières, c’est une
immense forêt vierge et on a deux attitudes par
rapport à elle. Soit on se dit qu’il y a des bêtes
sauvages, on peut s’y égarer, c’est dangereux,
c’est menaçant. Et dans ce cas là, on va mettre
des barbelés, du goudron. Soit on se dit qu’il y
a effectivement des bêtes sauvages dans la forêt
vierge mais que c’est le poumon de notre écosystème. C’est un lieu où il y a des merveilles
de la nature, où il y a tous les jours des nouvelles fleurs et des moments de grâce, des espèces
très rares qu’il faut protéger et qu’il faut respecter cet écosystème. Nous [Médiapart], nous
sommes partisans en clair de faire confiance à la
liberté et de ne pas faire confiance au contrôle
par les États, par les fournisseurs d’accès ou par
les grandes entreprises du numérique.
Vous partagez donc le même point de
vue que Julian Assange et autres “hacktivistes“.
Nous sommes partenaires de Wikileaks et nous
avons d’ailleurs créé Frenchleaks. Et tout
comme Wikileaks, nous défendons le développement et le renforcement du droit de savoir.
Qui signifie que tout ce qui doit être d’intérêt
public, doit être public. Et dans le cadre de la
révolution numérique qui permet une diffusion
horizontale, sans frontière, des informations, il
faut conforter, consolider, développer et étendre
ce droit. Ce droit est, effectivement, actuellement combattu par les moyens que se donnent
les États, parfois aussi les grandes entreprises
pour entraver cette liberté.
Ces moyens passent par la surveillance accrue de notre utilisation d’internet, en
quoi est-ce inquiétant ?
Eh bien, en l’occurrence, c’est la question de la
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neutralité du numérique qui est en jeu. C’est-àdire, du droit d’accès de tous sans que ce soit
des puissances extérieures qui contrôlent.
Après, je rends des comptes si je publie des diffamations ou des insultes. Mais ce n’est ni à l’État, ni à des entreprises privées de contrôler ce à
quoi j’ai accès sur mon ordinateur. Il faut faire
le pari de la liberté et que cette liberté soit régulatrice. Il y a eu d’autres révolutions industrielles. Et l’une d’elles a donné tout bêtement naissance aux médias de masse à travers la presse
démocratisée. À cette époque-là, au XIXème
siècle, certains États ont considéré qu’il fallait
demander une autorisation préalable pour faire
un journal, qu’il fallait le cautionnement, qu’il
fallait la censure, qu’il fallait contrôler son
contenu. En bref, c’était un danger cette liberté
de l’information. Ça a été une bataille de la
société pour obtenir des lois libérales, au sens
politique du terme, qui permettent à cette liberté de l’information de s’épanouir. Et bien, nous
sommes dans le même moment, aujourd’hui,
avec le numérique.
L’ex-président Nicolas Sarkozy voulait encadrer les activités du Net, où se situe
la France actuellement en matière de surveillance ?
Il y a un combat entre les défenseurs des libertés dans le cadre d’Internet notamment au travers de l’association française, la Quadrature du
Net, et ceux qui voudraient augmenter cette surveillance étatique ou économique du numérique. Mais cette question n’est pas propre à la
France, le numérique n’ayant pas de frontières.
L’arrivée du numérique traduit un nouveau rapport dans nos sociétés. Nous ne sommes plus
dans des sociétés de groupes, de castes. Et cette
évolution culturelle de nos sociétés provoque
des tensions et des crispations d’un certain
conservatisme qui veut nous fixer au groupe.
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Dans la période de transition que nous vivons, il
y a des régressions qui sont possibles au niveau
du droit à l’information. C’est ce que montrent
les décisions qui ont été prises hors du droit de
la presse, de manière non-justifiée d’une protection de la vie privée, contre les informations que
nous avons publiées qui concernaient des faits
d’intérêt public dans le cadre de l’affaire
Bettencourt.
Alors, que pronostiquez-vous comme
avenir à la cybersurveillance?
Vous en avez d’une certaine manière une image
avec le blockbuster que fut le film Avatar. Et
comme vous le savez, le scénario d’Avatar,
c’est l’idée d’une libération. Au fond, celui qui
est du côté de la puissance, de ceux qui détruisent la forêt vierge et l’écosystème, en l’exploitant, décide par le lien, par la relation – et l’univers du net, c’est l’univers de la relation – de se
déplacer. De passer du camp des puissants qui
sont en fait très fragiles, du côté des opprimés,
du côté de la liberté. Et bien, vous avez là un
peu l’exemple des questions que nous pose le
numérique. Comment nous-mêmes, individuellement, devons défendre nos libertés.
La surveillance globale est un phénomène connu depuis les années 1990 et validée
par plusieurs états dont les états-Unis et
l’Angleterre, à la suite des attentats du 11
septembre. Pourquoi avoir attendu les révélations de Snowden pour s’y consacrer ?
Dans le journalisme une chose est de savoir que
quelque chose existe. Une chose est de le prouver et de faire un événement auprès de l’opinion. Le fait qu’il y a de l’évasion et de la fraude fiscale, on le sait depuis des décennies mais
c’est autre chose d’en révéler l’ampleur avec
des noms, avec des chiffres et des montants,
comme le scandale Cahuzac en France. Tout
d’un coup, les gens prennent conscience en
temps de crise qu’avec l’évasion et la fraude fiscale, c’est une richesse des nations qui est
détournée et les choses bougent.
Propos recueillis par
Tuana Gökçim Toksöz
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tournée en suisse romande
Voyage au bout
de la nuit
Jean-François Balmer s’est attaqué au louable projet de mettre en théâtre
le Voyage au bout de la nuit, le célèbre roman de Céline. L’acteur accomplit
une prouesse et le public fait un triomphe mérité. Comme nous l’avons
pu constater au Théâtre Montansier de Versailles, où nous avons
vu le spectacle.
Balmer est donc seul en scène, captivant
l’attention au cours d’un soliloque de plus d’une
heure et demie. Il s’agit presque d’un défi.
D’autant que le plateau se résume à un arrièrefond de nuages ténébreux projetés et variant
imperceptiblement, que les lumières restent
obstinément en clair-obscur, sauf pour le prota-
goniste principal sous des projecteurs changeants, que les costumes, portés successivement
par le héros solitaire, vont de la simple gabardine ou redingote vert-de-gris (agrémentée, si l’on
peut dire, d’un fusil en bandoulière), de la saharienne avec casque colonial, du manteau très
urbain (avec Borsalino) jusqu’à la robe d’inté-
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rieur. Le décor, quant à lui, se simplifie entre un
attirail de campagne (caisson et pelisse), un lit
en forme de paillasse, un banc public et enfin
une petite table pourvue de sa chaise. Soit, côtés
costumes et décors (?), l’illustration des quatre
épisodes des mésaventures de Bardamu, Pied
Nickelé égaré dans la guerre en Europe (la grande, celle de 14-18) et son cortège d’horreurs,
l’Afrique, comme un paradis promis qui s’avère infernal, New York, autre miroir aux alouettes, et enfin Paris (la place Clichy) et sa banlieue, la triste réalité des jours ordinaires. Un
voyage, dans des ténèbres sans espoir, “ au bout
de la nuit ” dit l’auteur (fameux au plan littéraire mais contesté sur d’autres plans, à juste titre
et par Balmer lui-même dans une de ses déclarations).
Le texte, adapté et raccourci par les soins
de Nicolas Massadau, est déclamé dans un débit
saccadé, vif, angoissé, avec de fugaces élans de
fureur et de larmes. Le comédien d’origine suisse est un beau diseur et un acteur d’une présence
saisissante.
Mais
Bardamu/Balmer ne se contente pas
d’être un personnage, il semble porter en lui tout une morale, toute l’humanité entière. Il est parfaitement
soutenu dans sa tâche par la mise en
scène et scénographie de Françoise
Petit, les images de Tristan Sebenne,
les lumières de Nathalie Brun, la
régie sonore de Thibault Hédouin.
Avec, pour cette dernière, la diffusion de quelques discrets extraits
musicaux et passages parlés enregistrés, formant césures entre les scènes, et qui découpent la soirée
comme autant de séquences et de
rêves liés insaisissables.
Pierre-René Serna
Voyage au bout de la nuit d'après LouisFerdinand Céline, par Jean-François
Balmer, m.e.s. Françoise Petit
- Le 13 mars, Fribourg, Théâtre Equilibre à
20h (billetterie : Fribourg Tourisme
026/350.11.00 / [email protected])
- Le 18 mars, L’Octogone, Pully, à 20h30
(loc. 021/721.36.20)
- Le 20 mars, Forum Meyrin à 20h30 sauf
mention contraire (loc. 022/989.34.34)
Jean-François Balmer dans «Voyage au bout de la nuit»
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création de la
pièce dans les
années 60, et qui
apparaissent
aujourd'hui plutôt
datés.
comédie de genève
Oh les beaux jours
Dans un morceau de désert, une femme s’enlise à bas bruit. Autour de ce
naufrage, des vestiges : un conjoint muet, une brosse à dents, un miroir, une
fourmi, des raisonnements, des souvenirs éboulés, des tics, quelques élans.
Comme le disait Jean-Louis Barrault en
1963 dans L’Avant-Scène (n° 313) : « En général
dans les pièces de théâtre, il y a quelque chose :
une action qui arrive, passe et s’en va. Ici, dans
Oh les beaux jours de Samuel Beckett, il y a quelqu’un ; une femme qui est là. Il semble que les
choses soient déjà passées ou disparues. Nous
sommes au terme de la Vie. Au terme de Tout. Et
pourtant cette femme qui est là, est gaie et reconnaissante. Elle remercie. Elle comprend tout. Sa
nature est obstinément braquée vers l’optimisme.
C’est une damnée de l’espérance... »
Comment ça commence
Etendue d’herbe brûlée s’enflant au centre
en petit mamelon. Pentes douces à gauche et à
droite, et côté avant-scène. Derrière, une chute
plus abrupte au niveau de la scène. Maximum
de simplicité et de symétrie. Lumière aveuglante. Une toile de fond en trompe-l’œil, très pompier, représente la fuite et la rencontre au loin
d’un ciel sans nuages et d’une plaine dénudée.
Enterrée jusqu’au-dessus de la taille dans le
mamelon au centre précis de celui-ci, Winnie, la
cinquantaine, de beaux restes…
Winnie fixant le zénith : « Encore une journée divine ! »
Que nous dit cette phrase liminaire ?
Où marquer la césure, la respiration ?
Avant ‘encore’ ? Après ‘encore une’?
Et au fait, qu’est-ce qu’une journée divine ?
Rosine Schautz
Entretien : Anne Bisang
détacher de l’autre, précisément des liens tissés
avec cet autre-là au cours des années.
Ce texte en 2 actes, est-ce du théâtre
finalement, ou de la poésie proférée, monologuée ?
C’est du théâtre, avec un dépouillement maximal certes, qui met le focus sur la pensée d’une
femme. Beckett aime aller à l’essence des choses avec force et dérision, avec une pointe de
grotesque. Il ne s'agit pas d'un monologue car
Winnie s'adresse concrètement à Willie, son
partenaire de vie, durant toute la pièce. Ce qui
me touche dans cette pièce, c’est cette femme
qui parle au nom de l’humanité, qui représente
l’humanité dans toute son amplitude, sa faiblesse et sa force.
Comme Job le patriarche qui supporte et se résigne ?
En effet, il y a des correspondances. Mais
contrairement à Job qui maudit son existence du
haut de son tas de fumier, il n'y a aucune lamentation chez Winnie. A peine un peu de révolte
parfois, et ce paradoxe: à mesure qu'elle s'enfonce dans le sol, elle exprime surtout une force
de vie, de créativité et de gratitude inédite.
Comment avez-vous abordé ce texte?
On a procédé à un travail à la table, traditionnel,
pour faire surgir la compréhension du texte formellement et d’une pensée. On a recherché les
trames, les leitmotive. Un travail d’archéologie
dramaturgique. D’autant plus nécessaire que
pour moi, Winnie, c’est l’Actrice, l’actrice des
actrices. Christiane Cohendy représente le théâtre, incarne une page marquante de l’histoire du
théâtre. L’interprétation devait jouer là-dessus
aussi.
Est-ce une pièce sur le couple ?
Dans le texte, beaucoup de didascalies : comment les traiter ?
Oui, indéniablement. C’est une pièce sur le couple qui raconte une érosion humaine.
Mais ce n’est pas une pièce désespérée! C’est
un texte qui parle de délivrance et d’attachement, qui parle d’amour aussi, qui propose une
vision de l’amour vécu comme une ‘damnation’
dont on ne se libérerait pas. Enfin, c’est une
pièce qui montre combien il est difficile de se
Les didascalies appartiennent au corps du texte,
et nous sommes tenus, même contractuellement, de les suivre à la lettre. Il s’agit ici d’une
partition musicale et chorégraphique, et dès que
l’on s’en éloigne, le texte se banalise. Pour rendre toute cette matière vivante, nous avons
retravaillé quelques formalismes qui ne parlent
plus de la même manière qu’au moment de la
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décor et quel uniAnne Bisang
vers sonore avezvous choisi ? Le
mamelon est-il suggéré ou figuré sur le plateau ?
Le mamelon, nous l’avons voulu comme une
installation artistique plutôt qu’une construction
scénique proprement dite. Il nous a semblé que la
proposition de Beckett lorgne clairement du côté
des arts plastiques. Le mamelon n’est pas suggéré mais bien présent sur scène. La scénographie
étant assez colorée, nous avons privilégié un univers sonore qui apporte une dissonance et de l'inquiétude à cette harmonie esthétique.
Qu’est-ce que ‘s’enliser’ pour vous ?
S’enliser… C’est s’aveugler, renoncer à modifier l'ordre des choses tout en croyant les dominer. C'est aussi accepter son inéluctable disparition sans combattre. Comme rien n'est jamais
univoque chez Beckett, l'enlisement de Winnie
lui confère aussi un détachement et une libération insoupçonnés. Comme si à mesure qu'elle
s'enfonçait, qu'elle perdait le contrôle, elle se
libérait aussi de ses certitudes et de ses carcans
intérieurs pour mieux redécouvrir la complexité
de l'existence.
Vous dites-vous le soir « oh ! le beau
jour encore que ça aura été ! Encore un ! »
C’est surtout le matin que je me dis que j’ai un
beau jour encore à vivre!
Au futur donc, plutôt qu’au futur
antérieur ?
Oui, effectivement. Signe d'une probable
dépendance au futur! A la différence de Winnie
pour laquelle ce qui distingue le passé du futur
importe peu, ou n'a plus de pertinence.
A la fin de la pièce, Willie dit ‘Win’ à
Winnie. Est-ce un jeu de mot ? Est-ce un
petit nom ?
C’est un jeu de mot pour moi. Je crois qu’il pose
la question de savoir ce qui est gagné, et contre
qui, contre quoi. Contre le désert? Contre la
disparition ? Et c'est aussi un diminutif amoureux, un ultime mot d'amour sans doute.
Propos recueillis par Rosine Schautz
Du 4 au 22 mars. Avec Vincent Aubert et Christiane
Cohendy. La Comédie de Genève, Location. :
022/320.50.01 / [email protected]
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Qu’est-ce qui est irrésistible ?
le poche genève
Irrésistible
La tentation de l’amour absolu peut-elle conduire au
désir de tuer l’autre pour le posséder ? Qu’est-ce qui
est irrésistible ? La pulsion d’amour ? La pulsion de
mort ? Le couple formé par Eros et Thanatos interroge
encore et toujours le spectateur et c’est ici le petit-fils
de Jacques Lacan, le dramaturge Fabrice Roger-Lacan,
qui explore les mystères des relations de couple.
Entretien avec Claude Vuillemin, le metteur en scène
de cette création.
Votre parcours de metteur en scène est éclectique ; comment
êtes-vous arrivé à ce texte ?
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Claude Vuillemin : Je lis beaucoup, sans a priori particulier mais en privilégiant les textes avec un nombre restreint de personnages. J’ai découvert Irrésistible par hasard et le thème de l’amour m’intéresse car il suscite débat sans apporter de réponse. Il faut avant tout qu’un texte me touche pour que j’aie envie de le porter à la scène, que je re-connaisse ce que
je connais.
Les pulsions d’amour et de mort, le désir de tuer sa femme pour pouvoir
la posséder, la notion même de désir. La littérature nous a conditionnés à
appréhender l’amour de manière métaphysique, à l’envisager comme une
pulsion vers l’absolu. Mais en réalité, qu’est-ce que l’amour ? La
Renaissance a mis l’individu au centre et prôné le développement du moi.
Puis les Lumières ont glorifié la quête du bonheur individuel.
Parallèlement, les religions ont cherché à canaliser le sentiment amoureux,
à le codifier. Enfin, aujourd’hui on veut tout, la fidélité et l’aventure, l’érotisme et la pornographie, la transparence et la liberté. Nier que le caché,
le voilé sont essentiels, c’est s’exposer à la frustration. Le conflit se produit au point de rencontre de la norme et de la transgression.
Vous comparez le personnage masculin à Alceste le
misanthrope.
Alceste et le personnage masculin de Irrésistible sont attirés par l’amour
absolu, par la possession intégrale. Ils ne conçoivent l’amour que dans la
fusion, ce qui les conduit à la tyrannie. Tout naît de la haine de soi, du
manque jamais comblé et de cette quête sans fin de la complétude. Alceste
propose à Célimène un enterrement symbolique dans un désert social,
pour l’avoir toute à soi. Trois cents ans plus tard, c’est toujours actuel.
C’est une pièce à trois personnages, dont un absent. Le trio est
donc un mythe éternel…
Absolument, et c’est de l’absent que va naître le conflit. Quand la femme
rentre en retard de l’interview de l’écrivain supposé « irrésistible » car
admiré par elle depuis toujours, les ingrédients sont prêts pour que jaillisse le conflit dans le couple. Lui est avocat, du côté de la loi, de la règle,
elle est éditrice, du côté de la littérature, de l’imaginaire. Il prépare une
plaidoirie sur un assassin cannibale, preuve selon lui de l’amour suprême.
- Que faisais-tu quand tu étais hors de ma vue, hors de portée de moi ? Je
te veux esclave pour te posséder. Je te tue et je te mange pour que tu restes éternellement mienne et en moi. Il fait donc un procès impitoyable à
tout ce qu’elle raconte, met tout en doute, lui reproche sa lâcheté pour ne
pas avoir assumé son attirance envers l’autre homme, puis d’en avoir
éprouvé la tentation. Il s’arrête aux apparences d’infidélité sexuelle, sans
comprendre que les affinités intellectuelles ou spirituelles sont bien plus
menaçantes. Mais à vouloir faire de sa femme une esclave, il la perd. Et la
pièce n’apporte pas de réponse.
Quelle mise en scène avez-vous imaginée ?
C’est avant tout un travail collectif qui tient compte des apports de chacun
sans aucun a priori, une sorte de plat minute dont je suis le chef. Cela reste
une comédie, bien que grinçante car nous voyons un tueur en action. On
rit, parfois jaune, comme on riait d’Alceste à l’époque de Molière.
Personnage emblématique qui a créé un type, Alceste a été revisité par les
Romantiques qui en ont fait un être authentique et blessé, puis par notre
époque qui voit en lui un anti-consumériste. Il n’en demeure pas moins un
fasciste en puissance.
Propos recueillis par Laurence Tièche
Du 24 mars au 13 avril : Irrésistible de Fabrice Roger-Lacan, m.e.s. Claude Vuillemin.
Le Poche-Genève, lun et ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim à 17h, mardi relâche
(rens./rés. /loc. 022/310.37.59)
«Irresistible» © Augustin Rebetez
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part des acteurs beaucoup de finesse pour éviter
de tomber dans les clichés et la mièvrerie.
L’univers d’Amos Oz est sincère, intime, sans
maniement de la provocation, sans effet de
mode, sans ironie décalée. Le titre évoque le
temps qui passe, comme le ressac.
théâtre forum meyrin
Seule la mer
Le très grand écrivain israélien Amos Oz est adapté par Denis Maillefer et
sa compagnie Théâtre en Flammes. Seule la mer, roman atypique constitué
de petits tableaux ou poèmes en prose ou en vers dont le metteur en scène a
fait une sélection, donne à voir des petites gens ordinaires confrontées à la
solitude, à l’angoisse et au questionnement sur le sens de la vie. Ponctué
par la chanteuse folk Billie Bird, le spectacle abordera ces thèmes avec
délicatesse et sensualité. Après La Cerisaie mise en scène en 2012, Denis
Maillefer retrouve des thèmes de prédilection chez un auteur très
tchékhovien. Entretien avec Denis Maillefer, metteur en scène.
Quelles ont été vos options de mise en
scène ?
La mise en scène insiste sur le thème de la solitude : les personnages vivent seuls, le narrateur
est seul avec son histoire. Tous sont dans une
boîte constituée de panneaux coulissants, sur
fond de mer ou de paysage. Amos Oz lui-même
est présent sur scène, du moins son avatar
acteur. La difficulté était de créer une unité
d’ensemble pour ces soixante à septante tableaux qui durent entre trente
secondes et quinze minutes.
D’autre part, j’ai fait appel à Billie
Bird (de son vrai nom Elodie
Romain), une chanteuse folk lausannoise qui a composé les textes –
inspirés de poèmes d’Amos Oz - et
la musique du spectacle. Elle a une
voix splendide et s’accompagne à la
guitare et au piano. Sorte de double
du narrateur, toujours présente sur
scène, en contrepoint aux acteurs qui
sont eux dans la boîte, elle rythme
certains tableaux, les ponctue, leur
apporte de la profondeur par son
lyrisme et sa mélodie.
Le tout crée une impression de jeu,
avec ces boîtes qui s’articulent de
façon un peu magique.
«Seule la mer» © Catherine Monney
Connaissiez-vous l’écrivain israélien
Amos Oz auparavant ?
Non, pas du tout, on me l’a fait connaître. J’ai
par la suite lu d’autres textes de lui et découvert
un auteur magnifique, très engagé pour la paix,
mais ce n’est pas cet aspect-là que je voulais
montrer. Seule la mer est de forme chorale, poétique, composé de minuscules petits chapitres,
très tchékhovien. J’ai immédiatement été fasciné par l’écriture et les thèmes. C’est très intimiste et particulièrement propice à l’adaptation
théâtrale. Surtout, j’aime les mots, la langue et
ce texte conjugue la rigueur esthétique et la poésie intimiste.
Quels sont les thèmes qui vous ont
attiré ?
La confession intime, la solitude, la perte de
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l’innocence de la jeunesse, le temps qui passe…
On peut parler d’autobiographie de soi-même.
Sur scène, un narrateur, qui existe aussi dans le
roman, élément essentiel autour duquel gravitent les personnages qui l’appellent parfois pour
entrer dans leur histoire. Les histoires sont celles de gens simples, petits personnages qui se
croisent, se ratent, s’arrangent de leur angoisse
et des autres. Mais ce sont des histoires universelles, transfigurées, qui racontent les drames et
les joies dont est faite l’existence humaine, insignifiante et pourtant essentielle. C’est désespéré, tendre et malicieux, très sensuel aussi, avec
un désir et une sexualité très présents. Par
exemple la rencontre entre l’homme mûr et la
très jeune femme : ce doit être sexy et troublant,
on doit sentir les personnages qui se désirent, la
sensualité qui les anime. Cela demande de la
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Propos recueillis par
Laurence Tièche
Seule la mer»
- au théâtre Forum Meyrin les 10 et 11 mars (loc.
022/989.34.34)
- à Vidy-Lausanne du 18 au 23 mars (rés. 021/619.45.45,
www.billetterie-vidy.ch
- à l’Espace Nuithonie, Villars-sur-Glâne, les 27 et 28
mars (loc. Fribourg Tourisme 026/350.11.00) ou
Nuithonie o26/407.51.51
- au TPR de La Chaux-de-Fonds le 29 avril (loc.
032/967.60.50, www.arcenscenes.ch)
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cié, « l’air de ne pas y toucher », épouse et éloigne dans le même temps la pensée méandreuse
de l’héroïne, enfant gâtée prise au piège d’une
situation inextricable, faisant ressortir la complexité du personnage et rendant possible une
sympathie véritable. Comme les jeunes filles de
Rohmer, Else est comique malgré elle et légèrement irritante, mais jamais notre rire ne dégénère en moquerie. Que sa situation manque tragiquement de tragique est le paradoxe qui nous
touche. Belle réussite, donc, que cette mise en
théâtre saint-gervais genève
Mademoiselle Else
Le Théâtre Saint-Gervais accueille en février et mars la compagnie
tg STAN pour plusieurs réalisations. Parmi celles-ci, Mademoiselle Else
de Arthur Schnitzler.
24
Mademoiselle Else est
une nouvelle de l’écrivain
autrichien Arthur Schnitzler,
un des premiers textes de
langue allemande à reposer
sur le procédé du monologue
intérieur. Ce n’est pas uniquement en raison de la nature discursive de ce procédé,
rendant aisée la mise en bouche du texte, que l’idée de
mettre en scène cette nouvelle paraît lumineuse ; le personnage lui-même, jeune
fille de bonne famille séjournant dans une station thermale, semble traverser le monde
en spectatrice, point central
autour
duquel
tout
s’organise.
Le petit théâtre personnel de la jeune fille sera bouleversé lorsqu’elle recevra de
sa mère une lettre urgente,
l’enjoignant à sortir de sa
passivité pour venir en aide à
son père, avocat criblé de dettes dont elle est
l’unique recours. L’intelligence de la mise en
scène est de rendre sensible ce narcissisme
contraint de sortir de soi: la comédienne (Alma
Palacios) évolue, tout au long de la pièce, sur
une étroite surface, disposée au centre de la
scène, tandis qu’autour d’elle gravite Frank
Vercruyssen, interprétant les autres personnages
et matérialisant l’environnement de la jeune
fille au moyen d’accessoires sommaires, dont
l’apparition fugace indique bien le peu de
consistance que la réalité extérieure, réfractée
cependant par une conscience aux abois, revêt
pour Else. Seul à gagner en épaisseur, Dorsday,
le marchand d’art à qui Else demande de secourir son père ruiné, et qui exige en échange de
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«Mademoiselle Else» © Tim Wouters
son aide une faveur dont la jeune femme s’offusque avant de se résoudre à la lui accorder, la
fera vaciller sur son assise, délogeant la comédienne de son confinement scénique.
scène qui rend intelligemment les mille nuances
d’un grand texte.
Julien Roche
Brillante prestation
jusqu’au 1er mars
Théâtre Saint-Gervais, Genève
Le texte de Schnitzler est donc mis en espace de manière fort intelligente, malgré quelques
trucs et astuces visant à détruire l’illusion théâtrale, pacotille chiquement contemporaine dont
l’usage, heureusement modeste, ne nuit pas à la
desserte du texte et des personnages. Mais la
compagnie tg STAN fait plus : l’interprétation
des deux comédiens est brillante, et met en
lumière des aspects du texte qui ne sautent pas
aux yeux à la lecture. Le jeu légèrement distan-
Autres spectacles de tg STAN :
- 1er mars : Après la répétition - Ingmar Bergmann.
Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, marjeu-sam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc. 022/908.20.20 ou
www.saint-gervais.ch)
- Du 4 au 8 mars : Scène de la vie conjugale - Ingmar
Bergmann.
Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser
(loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
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au galpon
Un Quartett turinois
Le Théâtre du Galpon a placé l’année 2014 sous le signe des «Carrefours
transalpins», et cette dimension transversale est parfaitement illustrée par
le Quartett qui va y être monté les 5 et 6 mars prochains.
Jugez plutôt : une pièce écrite par un des
plus grands dramaturges allemands du XXème
siècle, qui revisite avec humour noir et cruauté
un célèbre roman libertin du XVIIIème (Les
Liaisons dangereuses de Pierre Choderlos de
Laclos), et qui sera jouée au Galpon en italien
par des comédiens du célèbre Teatro Stabile de
Turin, Laura Marinoni et Valter Malosti – ce
dernier réalisant également la mise en scène.
Un peu d’histoire
Le Teatro Stabile, créé en 1955, est une véritable institution à Turin. Aujourd’hui dirigé par
Mario Martone, il se déploie dans plusieurs espaces de la ville, propose une vaste programmation
(plus de 45 spectacles cette année), et fonctionne
également comme école de théâtre. Il va donc
être très intéressant de voir
comment Valter Malosti abordera Quartett, cette courte pièce
qui reprend un des mythes les
plus fascinants de la littérature
européenne: le combat « à
mort » entre le vicomte de
Valmont et la marquise de
Merteuil imaginé par Laclos
dans le chef-d’œuvre de narration épistolaire que constitue
Les Liaisons dangereuses. Au
gré de nombreux épisodes, les
deux libertins rivalisent d’inventivité pour corrompre ceux
qui les côtoient, en particulier la
Présidente de Tourvel et la jeune Cécile de
Volanges.
Lorsque Stephen Frears et Milos Forman
ont envisagé dans les années 80 une transposition
cinématographique du roman de Laclos, ils ont
globalement privilégié le respect de l’original
(trame, personnages, dialogues, contexte d’époque, etc.), et ce qui a été enlevé ne l’a pas forcément été à bon escient – Forman ôtant ainsi à
son récit toute dimension épistolaire. En revanche, dans sa pièce de 1980, Heiner Müller propose une véritable réécriture des Liaisons dange-
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reuses, à la fois personnelle et radicale, qui tend
plus vers une destruction du texte originel que
vers une simple réduction théâtrale (c’est-à-dire
ce qu’a fait Christopher Hampton en 1985 dans
son adaptation théâtrale, qui servira de base à
Frears pour son long-métrage).
Travestissements
Le dramaturge berlinois conçoit son œuvre
comme un spectaculaire duel entre Valmont et
Merteuil, duel situé, ainsi que le signale la didascalie inaugurale, à la fois dans un salon d’avant
la Révolution française et dans un bunker d’après
la Troisième Guerre mondiale. Dans ce cadre, le
duel devient progressivement quartet, puisque les
deux protagonistes endossent tour à tour d’autres
rôles : Merteuil devient Valmont et ce dernier
Allemagne, violence langagière et violence
concrète, entremêlant l’univers Ancien Régime
de Laclos et le monde traumatisé du XXe siècle.
Dans ce cadre, il élabore une véritable guerre des
sexes, comme il l’explique bien dans un entretien
avec Matthias Matussek : « Ce qui m’a intéressé
avec Quartett, c’est de dégager la structure des
relations entre les sexes, de les montrer telles
qu’elles me semblent vraies, et de détruire les clichés, les refoulements. Même si je vis moi-même
d’illusions dans ma vie sexuelle, je peux ne pas
faire entrer ces illusions en ligne de compte
quand j’écris. Mon impulsion fondamentale dans
le travail est la destruction. Casser aux autres
leur jouet. Je crois à la nécessité d’impulsions
négatives. »
Ce texte serré et fragmentaire, à la fois caustique et cruel, fait donc résonner plusieurs voix,
plusieurs époques et plusieurs enjeux (littéraires,
sexuels, historiques, de genre). Nul doute que la
polyphonie supplémentaire apportée par la langue italienne des comédiens du Teatro Stabile
donnera encore plus de complexité, de force et de
trouble à ce texte qui, sans doute encore plus que
l’original de Laclos, « s'il brûle, ne peut brûler
qu'à la manière de la glace.» (Charles
Baudelaire).
Laurent Darbellay
Heiner Müller, Quartett. Mise en scène
Valter Malosti, jeu Valter Malosti et
Laura Marinoni; assistante à la mise en
scène Elena Serra, scénographie Nicolas
Bovey, son et live electronics G.u.p.
Alcaro, lumières Francesco Dell’Elba,
costumes Gianluca Falaschi.
«Quartet» par le Teatro Stabile
joue Tourvel, plus tard Merteuil contrefait l’innocente Cécile tandis que Valmont rejoue son propre personnage de séducteur envoûtant la jeune
fille. Ces jeux de travestissements ne peuvent
prendre fin que tragiquement, avec la mort de
Valmont (comme dans l’œuvre de Laclos), et une
ultime et énigmatique remarque de Merteuil.
Tout au long de son œuvre dramaturgique,
Heiner Müller a puisé son inspiration aussi bien
dans l’Histoire contemporaine que dans les
mythes antiques et les textes littéraires. Avec
Quartett, il navigue ainsi entre France et
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A NOTER que les «Carrefours transalpins» se déroulent du 5 au 23 mars. Au
menu, outre Quartett :
Les 8 à 20h et 9 mars à 18h : Merci de ne
pas donner à manger aux animaux de
Florent Otello, par la Coe La Galerie. /
Les 15 et 16 mars : Viento mucho viento. Par La cabra compagnie; chor., textes et dir. Valeria
Alonso / Du 17 au 21 mars : Atelier de création, La cabra
cia / Les 18 et 19 : Line d’Israël Horovitz, par le Teatro
Due Parma, m.e.s. Walter Le Moli, pièce jouée en italien.
/ Les 22 et 23 mars : Peso Piuma / Poids Plume.
Conception, m.e.s. et interprétation Michela Lucenti.
Théâtre du Galpon, au pied du Bois de la Bâtie, sur les
bords de l’Arve 2, route des Péniches. Réservation :
www.galpon.ch, [email protected], 022/321.21.76
(rés. par tél. au plus tard 2 heures avant le début de l’événement - mail : [email protected])
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théâtre la parfumerie
Les larmes des hommes
Après une résidence en 2013 à Cuba, en collaboration avec la compagnie
cubaine Teatrito, Patrick Mohr revient trois semaines à La Parfumerie à
Genève, son lieu de base, créé en 1990.
Son nouveau spectacle est adapté de six
nouvelles de Mia Coutau, auteur mozambicain
qui écrit en portugais et dont le metteur en scène
continue l’exploration pour la troisième fois.
Commencée déjà en 2005 avec le monologue de
La Femme en moi, elle fut poursuivie en 2008
avec Chaque Homme est une race, qui voyagea
beaucoup et qui revint l’an dernier à Genève et
en France voisine.
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Le voyage à travers le monde, les ethnies
différentes, les musiques, les langues différentes, les approches théâtrales différentes représentent la marque fondamentale du Théâtre
Spirale. A Cuba, le spectacle fut donné en portugais à La Havane et à Santa Clara, avec les
musiciens acteurs de la compagnie cubaine.
C’est à notre tour d’être embarqués avec
les musiciens, les conteurs, et tous les protagonistes de la création, qui nous entraîneront à travers le métissage de leurs cultures. Le spectateur fait partie du voyage…
Réalisme magique
Le choix de Mia Coutau correspond parfaitement à l’ambition de Spirale : aller à la rencontre de tous les publics grâce à l’art d’un théâtre, lui aussi métissé de langages divers, de
chants, de danses, de musiques. L’univers de
Mia Coutau, l’un des auteurs contemporains les
plus importants du monde lusophone d’Afrique,
est d’une richesse et d’une musicalité exceptionnelles. Il est parfois comparé au réalisme
magique d’un Garcia Marques. Ses histoires, où
les personnages semblent s’adresser directement à nous, sont typiques de la littérature orale
et se prêtent particulièrement à une adaptation
théâtrale.
Réalisme magique donc, où les vivants et
les morts se mêlent, où l’inventivité des imagestriomphe. Ce qui permet de laisser place à l’imagination et à la réflexion du spectateur.
Coutau donne une voix aux sans voix, à
ceux d’en bas, que l’on n’entend pas, mais dont
au théâtre on entendra le silence, le drame, mais
aussi la joie et la légèreté!
Dans ses nouvelles, l’auteur donne vie justement à des personnages abandonnés, à la
recherche des autres et qui réinventent le réel en
revisitant leurs rêves.
Les larmes sont chez l’auteur un thème
fondamental, comme une eau première :
Pleurer c’est ouvrir son Cœur,
Les pleurs sont la concrétisation de deux
voyages :
De la larme vers la lumière et de l’homme
vers une plus grande humanité.
Finalement, ne vient-on pas à la lumière en
pleurs ?
Les pleurs ne sont-ils pas notre première
voix ?
Dans sa mise en scène, Patrick Mohr utilise plusieurs langages et notamment le langage
des signes qui exprime si bien le silence, tout en
laissant leur voix aux guitares, percussions, violoncelle, tres cubano, hang, bande son…
Les trois musiciens cubains - le duo Lien y
Rey et Roly Berrio, guitariste - sont à la fois
compositeurs, chanteurs, poly-instrumentistes
et comptent parmi les représentants les plus en
vue de la Nueva trova Cubana. Amanda Cepera
est chanteuse et guitariste et les autres comédiennes chantent et font de la percussion.
Avec les Ateliers d’ethnomusicologie, le
Grand Café de La Parfumerie accueillera les
musiciens cubains au Cabaret latino du 7 au 22
mars. Après le 23 mars commencera une grande tournée, du 25 mars au 10 avril : Evian (25
mars), Meyrin (27 mars), Monthey (29 mars),
Yverdon (2 avril), Mies (4 avril), Belfort (9
avril).
Maya Schautz
Du 4 au 23.3. : Les Larmes des hommes de Mia Couto,
d’après Le Fil des missangas, m.e.s. Patrick Mohr.
Théâtre de La Parfumerie, ma-mer-je à 20h, ve-sa à 19h,
di à 17h (rés. 022/341.21.21)
Réservation : 022 341 21 21, www.la parfumerie.ch
CABARET LATINO programme complet : www.adem.ch
- 7.3. : Clube do Choro (Brésil) - Ivonne Gonzalez (Cuba)
- 8.3. : Michele Millner (Chili) - Palenque La Papayera
(Colombie)
- 14.3. : Lien y Rey (Cuba) - Narciso Saúl Quinteto
(Argentine)
- 15.3. : Orisha Oko (Cuba) - Michelangelo4tet (Brésil)
- 21.3. : El vinal (Argentine) - Luna Luna (Chili)
- 22.3. : Roly Berrio (Cuba) - Barrio Oscuro
(Argentine/Espagne)
«Les larmes des hommes» © Patrick Mohr
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Théâtre des Marionnettes de Genève
VOYAGE EN POLYGONIE
CHAPERON ROUGE
CARTOON
Dès 3 ans
29 mars au 13 avril 2014
Périple au pays des formes
pour une remise en forme.
Dès 5 ans
5 au 26 mars 2014
Le célèbre conte à la sauce
dessin animé loufoque.
L’APPRENTI
MAGICIEN
FRANCISCO SEPULVEDA
SERGE CANTERO
COMÉDIE MAGIQUE & FAMILIALE
SÉBASTIEN MOSSIÈRE
GALERIE LA FERME DE LA CHAPELLE
39, ROUTE DE LA CHAPELLE | CH -1212 GRAND-LANCY
WWW.FERMEDELACHAPELLE.CH
Du 1er au 30 mars 2014
L’ENVERS DU MIROIR
laFERME
de laCHAPELLE
!
nnett
mario
Ville de Lancy
République et canton de Genève
es
Rue Rodo 3 – Genève
022 807 31 07
www.marionnettes.ch
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T 021 315 40 20
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Tout public, dès 5 ans
DIMANCHE 30 MARS — 16h30
SALLE DES FÊTES
DU LIGNON
Place du Lignon 16 — Vernier
Service de la culture — 022 306 07 80
www.vernier.ch/billetterie
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de kléber-méleau au théâtre de carouge
La double
inconstance
Ce qu’il y a de magnifique chez Marivaux, c’est qu’il dit déjà au tout
début du XVIIIème siècle : « Presque tout le monde commence à croire
qu’on peut être honnête sans être absurde. » On pense qu’on peut être de
bonne foi, on se ment à soi-même, on ment aux autres, on s’aperçoit a posteriori qu’on rusait avec soi-même. Alors se prétendre honnête est une
absurdité. Quelle modernité !
Comment abordez-vous la mise en scène des deux mondes en
présence dans La double inconstance : la campagne et la Cour ?
L'œuvre de Marivaux ne se réduit pas au marivaudage
qui a conduit à le considérer comme un auteur
intéressant mais quelque peu précieux et maniéré.
Il y a dans l'écriture de Marivaux une peinture
extraordinairement fine, précise, nuancée, caustique,
cruelle, bref intelligente des méandres de l'amour.
Philippe Mentha met en scène La double inconstance,
d’abord au Théâtre Kléber-Méleau, puis au Théâtre de
Carouge. Entretien.
L’action se passe dans le monde de la Cour. On y a emmené une paysanne qu’on a enlevée. Le départ de la pièce est un rapt qui provoque l’indignation. C’était une chose déjà scandaleuse et qui le reste aujourd’hui. Il
s’agit de montrer l’hypocrisie de ce Prince qui, parce qu’il est très amoureux, fait une entorse à la loi qui lui interdit de recourir à la violence et
enlève une jeune fille. Ensuite, il tâche, grâce à une femme en particulier,
de faire oublier cette violence initiale pour que d’autres choses l’emportent sur ce premier contact déplaisant. Il se cache d’ailleurs constamment
de Silvia qui le fascine.
On a fait parfois une lecture pessimiste de la pièce de par sa
violence morale et physique et son injustice.
Qu’en pensez-vous ?
Pourquoi avoir arrêté votre choix sur
cette pièce en particulier parmi toutes celles de
Marivaux ?
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Marivaux l’appelle comédie et je suis d’accord. Le
jugement moral est enquiquinant et n’a rien à voir
avec le théâtre. Nous sommes tous ambigus. On
voudrait être plus propres qu’on ne l’est en réalité,
puis le naturel reprend le dessus. Est-ce que trahir
est un crime? Dans La répétition ou L’amour puni,
Anouilh part de La double inconstance pour en faire
l’histoire d’un crime. Or c’est la vie de tomber
amoureux puis de se détacher, ce n’est pas un délit.
Il y a des choses qui me plaisent depuis 30-40 ans
et qui reviennent régulièrement. Puis il arrive un
moment plus favorable où une pièce s’impose de
manière insidieuse et plaisante à la fois. C’est
davantage cela que le résultat d’un véritable choix.
Parmi toutes les pièces de Marivaux, il est effectivement difficile de choisir, mais certaines, depuis
l’époque où elles ont été écrites, ont plus ou moins
bien vieilli et gardent plus ou moins de saveur. J’ai
une petite préférence pour La double inconstance
qui offre deux mésalliances et pas mal de surprises,
alors que le coeur marche en principe selon les
classes dans le jeu de l’amour.
La comédienne Alexandra Tiedemann
Le déguisement, le changement d’identité et la notion de jeu
sont des thèmes récurrents chez Marivaux…
Il y a bien sûr des déguisements puisque le Prince apparaît d’abord en simple domestique. C’est une tradition : les grands de ce monde, voulant être
aimés pour eux-mêmes, taisent leur titre. Cela
n’est pas très nouveau. Ce qui est original ici en
revanche, c’est la grande ambiguïté et la quantité
incroyable de mensonges pour arriver à la vérité
d’un personnage masqué ! Marivaux prend toujours un grand plaisir à masquer ses personnages
pour qu’ils finissent pas découvrir qui ils sont vraiment.
Dans la vie de tous les jours, on regarde avec d’autres yeux les puissants ou les bourgeois quand
tombe le masque de l’apparence. Et cela nous étonne encore.
Marivaux est un auteur résolument
moderne aujourd’hui, alors qu’au XVIIIème il
était souvent critiqué pour ses marivaudages.
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Dans cette pièce, la transgression sociale
est exprimée par l’ambiguïté de la relation maîtres-serviteurs. Les paysans sortent-ils réellement vainqueurs ?
Il y a une scène magnifique entre le Prince et
Arlequin qui parle de la justice et des abus qui pourraient se produire. Je
suis pour les ambiguïtés. On parle souvent à propos de cette pièce de la
manipulation des petits par les grands. Mais Silvia et Arlequin font eux
aussi des calculs. Arlequin se dit que si Silvia épousait le Prince, il serait
plus libre pour courir de son côté. Ils sont tous deux tentés et mettent une
bonne volonté à se manipuler et à se laisser
manipuler.
Propos recueillis par Nancy Bruchez
La Double inconstance de Marivaux, m.e.s. Philippe
Mentha – décor Audrey Vuong – avec Alexandra
Tiedemann, Barbara Tobola, Céline Nidegger, Lise
Ramu, Darius Kehtari, David Pion, Christian RobertCharrue et Philippe Mentha.
- du 4 au 16 mars au Théâtre Kléber-Méleau, Lausanne, mame-je 19h – ve 20h30 – sa 19h – di 17h30 – lu relâche (rés. au
021/625.84.29)
- du 21 mars au 6 avril au Théâtre de Carouge, Salle FrançoisSimon, mar, mer, jeu et sam à 19h / ven à 20h / dim à 17h
(billetterie : 022/343.43.43 - [email protected])
La comédienne Barbaro Tobola
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Théâtre de Carouge
« Guerre et Paix » d’après Léon Tolstoï - mise en scène de Piotr Fomenko
Du mercredi 26 février au mercredi 5 mars 2014
photo A.Kharitonov
photo A.Bobrovsky
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en tournée : le corps souffrant du champion
André
Héros grunge adoptant la chevelure décolorée et les
tenues bariolées flashy de Kurt Cobain, leader du
groupe Nirvana suicidé à 26 ans, le tennisman malgré
lui, André Agassi, fit des courts son théâtre anatomique
en douleurs. Cette icône fragile et haïssant le tennis est
habilement déconstruite et interprétée par Marie
Rémond.
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Dans la peau d’un ressenti
Le Kid de Las Vegas, lui, se livre en une manière bien américaine de
quêter l’improbable rédemption. Sa théodicée de la souffrance, ses addictions aux psychotropes, son caractère anxiogène se révèlent au fil de son
autobiographie mélodramatique, Open. Agassi joue donc en 2006 un
avant-dernier match contre le jeune allemand Benjamin Becker à l’Open
des Etats-Unis. Il ne maîtrise plus son corps. Marie Rémond précise : « Ce
qu’il peut y avoir à l’intérieur de la tête d’Agassi et dont il témoigne, ce
qui n’est pas immédiatement perceptible, fait aussi l’intérêt de cette plongée dans la vie d’un tennisman. Lui souffrant, étant bloqué et ne pouvant
bouger, comme avec un cadenas à vélo fiché dans le dos. Ce fait a des incidences énormes et le désoriente. La situation doloriste a été développée,
sans tenter de se situer dans la vérité objective de ce match. Mais davantage dans la tentative d’en avoir l’âme, l’élan intérieure. Et partant, de
distordre cette partie jusqu’à en faire quelque chose de cauchemardesque,
où le joueur ne saurait plus où sont la balle et la raquette. Ce qui évidemment n’est pas le cas d’Agassi dans la réalité. »
A trente-six ans, l'Américain a été plusieurs fois numéro un, remportant des tournois prestigieux, loin pourtant derrière celui qui est considéré
comme le plus grand joueur de tous les temps, Roger Federer, auquel
Denis Maillefer consacra une ode sensorielle, méditative et cosmique aux
Forte de n'avoir pas obtenu les droits d’Open, ce pensum saint-sulpilisières de l’hagiogracien, la metteure en
phie, In Love with
scène et comédienne
Federer.
place son travail scéA la fois hors de
nique dans le sillage
son espace intérieur et
d'une théâtralité décaen apnée au cœur de
lée façon Tg Stan. Soit,
son ressenti corporel,
le désir d’arpenter ce
il faut voir, buste penqui pourrait être un
ché, jambes écartées,
« degré zéro » du rôle,
la comédienne françaice moment furtif et frase Marie Rémond faire
gile où le personnage
le récit d’un match
naît. Il s’agit là d’éclaihomérique, épique, au
rer d’une autre manière
gré d'une carrière en
(complémentaire à la
dents de scie, alors que
permanence du jeu disle champion connaît
tancié) l’intersection
d'hallucinantes lancées
entre réel et fiction,
dorsales. Une maladie
quête essentielle de la
« André » © Mario Del Curto
Française. Elle incarne
dégénérative de naisainsi une « hypothèse
sance qui le fit souvent
souffrir secrètement le martyr sur les surfaces d'ici et d'ailleurs. La négo- Agassi ». D’où, dès l’entame, une façon de se présenter en adresse au
ciation avec son corps qui se délite, le chantre du retour gagnant sur court public en biographie succincte ou storytelling à la wikipedia. « Il s’agit
d’interrogations relativement au comédien mais aussi propre à chaque
« la mène souvent avec une piqure de cortisone ».
être humain sur les contradictions internes, les difficultés de faire des
En 2006, il est à bout, car son corps-prison ne peut plus suivre, choix. L’histoire d’Agassi incarne ses questions à un niveau impressioncomme en fera l’aveu public en août 2013, la Française Marion Bartoli nant. Car elle est une personne publique mondialement connue. Ce début
mettant un terme à sa carrière tennistique après avoir remporté le rêve vient de la découverte de son autobiographie. On en ressort avec la send’une vie, Wimbledon. « Mon corps ne plus assumer ce qu’il doit assumer sation de quelqu’un qui voulait parler depuis trente ans et ne l’avais
pour être au plus haut niveau. Quand au bout de 45 minutes, vous avez jamais fait au préalable. En le lisant, c’est ce mouvement de dévoilement
mal de partout, ce n’est plus vraiment un plaisir de jouer », confie alors et d’adresse frontale, qui m’avait paru possiblement théâtral. »
au fil d’un entretien poignant, une jeune femme épuisée et lasse qui ajouBertrand Tappolet
te : « Mon corps a été poussé jusqu’à ses limites ». A l’image de celui
d’Agassi, son destin est profondément lié à la figure paternelle. Deux
comédiens, Sébastien Pouderoux et Clément Bresson, se passent le témoin La Grange, le Locle. 28 mars 2014. Réservations : 032/931.53.31
avec drôlerie pour incarner le père, le coach Bolletieri, et le frère qui Théâtre du Passage, Neuchâtel. Du 1er au 5 avril 2014. Location : 032/717.79.07
demeurera une balise.
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En tournée
théâtre du grütli : bientôt viendra le temps
Rideau !
Création
La pièce de Line Knutzon proposée au Grütli est une
première création en français. Cette écrivaine très
connue au Danemark où elle a été sacrée meilleure
écrivaine de pièces de théâtre, a été retenue par Sophie
Kandaouroff pour sa folie et son extrême richesse.
Le temps, qui est dans de nombreuses créations de Line Knutzon,
sera l'élément du vertige : sa perte, son impalpabilité, et néanmoins son
existence tangible sur tous les vivants et particulièrement les couples...
« Bientôt viendra le temps » est aussi d'une création en termes existentiels
et métaphysiques...Deux couples se retrouvent dans un canevas de vaudeville, mais on comprend vite que l'enjeu est ailleurs : dans le temps qui
échappe aux personnages comme s'il dépendait d'un très long sommeil,
comme si les vies étaient détachées de cette dimension qui les rattrapait,
pourtant . Que dire de plus de cette pièce, de ce qu'on ne peut appeler
autrement, selon les mots du moment, d'OVNI ? Au spectateur de sombrer dans cette histoire absurde, drôle et si proche de nous.
L’action se déroule au cours d’une répétition. Les actrices, les acteurs
sont prêts, mais un incident technique diffère le début du spectacle. La metteure en scène explique au
public que l’imprévu vient
d'entrer en jeu et qu'il fait
partie du travail théâtral.
La répétition va dès
lors suivre une logique à
elle et échapper en partie
à la metteure en scène, qui
laisse surgir ce qu’elle
n’attendait pas.
Dans ce contexte, les
actrices et acteurs vont
jouer, improviser, danser,
chanter, aimer, rêver et,
Gisèle Sallin
bien sûr, mourir.
« Rideau ! » est un hommage au théâtre.
. 3 mars Théâtre Palace, Bienne
. 10 mars Stadttheater, Berne
. 11 mars Théâtre de Beausobre, Morges
. 26 mars Théâtre Benno Besson, Yverdon-les-Bains
. 28 mars Salle CO2, Bulle-La Tour-de-Trême
. 30 mars Théâtre de Vevey, Vevey
Comment pensez-vous mettre en scène – et donc matérialiser un spectacle qui est à la fois si réel et si abstrait ?
L'histoire ressemble à la fois à un vaudeville et à la fameuse histoire du
personnage qui se réveille après vingt ans d'absence, reprise par de nombreux cinéastes et écrivains. Les ficelles connues emmènent dans une
autre dimension, en somme...C'est une histoire assez commune qui devient vite vertigineuse. Nous avons pensé créer un lieu très
concret, dans lequel des personnages vivent
leur quotidien, mais où on travaille avec le
moins de murs possibles. Il s'agit d'une sorte
d'aquarium expérimental où le spectateur ne
peut faire autrement que d'être impliqué. Car
cette histoire est forcément aussi la sienne.
Théâtre de Valère, Sion
Une Société de services
Dans cette pièce, Françoise Bloch creuse la question du monde du travail aujourd’hui. Nourrie de documentaires et de l’expérience vécue de l’un
des acteurs qui y joue son propre rôle, l’équipe explore le milieu du télémarketing et pointe avec un esprit ludique la réalité de ces larges plateaux où de
jeunes gens aux salaires précaires et aux conditions de travail résolument
cadencées appellent le monde entier pour vendre à tout prix.
Est-ce un drame ?
C'est un drame mais aussi une comédie.
Dans une tragédie grecque, le drame vient
aux personnages : ils ne se déplacent pas.
C'est ainsi que je vois aussi cette pièce. Qui
a au fond comme personnage principal le
temps et sa dissolution absurde, comme c'est
Sophie Kandaouroff
la cas dans toute condition humaine. Mais
c'est aussi une comédie, car l'absurde mène au comique. En ce moment on
est encore dans la phase de laboratoire, qui est la plus passionnante. On
finit tous, les comédiens y compris, par être emportés par le vertige proposé par la pièce, et on espère que le spectateur sentira cela aussi bien que
nous !
Propos recueillis par Claudia Cerretelli
Du 18 mars au 6 avril : Bientôt viendra le temps de Line Knutzon, m.e.s. Sophie
Kandaouroff. Le Grütli, Petite Salle (2ème étage), à 20h, dim à 18h. Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88)
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«Une Société de services» © Antonio Gomez Garcia
Dans un portrait scénique volontairement fragmenté où s’entremêlent
jeu, son et vidéo, les acteurs questionnent, non sans humour, l’intimité fragilisée de ces voix de la vente.
Pour une critique, jusqu’à l’absurde, des conséquences sur l’individu
d’un système fondé sur la croyance illusoire en une “croissance constante
de la rentabilité”, voire en un “progrès sans fin”.
Dans une telle perspective, quelle(s) valeur(s), quel(s) rêve(s) peut
encore renfermer le mot travail ?
. 25 mars, Théâtre de Valère, Sion
Réservation : 027 / 323.45.61
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La Grange de Dorigny
Théâtre du Grütli
Yvonne Princesse de
Bourgogne
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Andromaque 10 - 43
Farce grotesque, «Yvonne, princesse de Bourgogne» est une sorte de
parodie shakespearienne. Héritier du trône, le prince Philippe projette
d’épouser par défi des conventions, Yvonne, une fille dépourvue de charme,
insignifiante et ennuyeuse. L’arrivée de cette princesse « hors norme » va
bouleverser
les codes et
les valeurs de
la cour.
Par sa
seule présence, elle
éveille au sein
du royaume,
agressivité et
haine en mettant à nu les
«Yvonne, Princesse de Bourgogne» © Debaye-Guhl
failles et les
vices de tout
en chacun. Même l’élite tremble, personne n’est plus à l’abri de « l’effet »
Yvonne….
Écrite en 1938, c’est la première pièce de Gombrowicz. Comme un
geste de rébellion, joyeux et vivifiant, qui revendique son immaturité et sa
jeunesse, elle se joue des formes, flirte avec plusieurs styles, le clown, l’absurde, la comédie de mœurs, la tragédie.
Le metteur en scène Kristian Frédric propose une adaptation libre et
audacieuse d' «Andromaque» de Racine, contraignant pour ce faire le comédien français Denis Lavant à l’alexandrin. Sur scène, le comédien incarne
Pyrrhus aux côtés d'une distribution romande qui réunit Monica Budde,
Jeanne de Mont et Frédéric Landenberg.
«Andromaque10 - 43» avec Denis Lavant © Laillier
A la suite de Racine, qui s'était émancipé des dieux et des chœurs, cette
adaptation interroge le silence des sphères auquel s'oppose désormais le fracas des écrans. Déchirés entre deux cultures, résignés aux lois du sang mais
débordés par la violence du monde, les personnages de la tragédie n'ont
d'autre choix que de se soumettre. Jusqu'à l'hécatombe finale, qui solde
aussi bien les comptes de la fable que ceux de notre époque.
. jusqu’au 8 mars à Dorigny
. puis à la Comédie de Genève, du 8 au 11 avril 2014
. Jusqu’au 15 mars
Réservation : 022/888.44.88 ou [email protected]
Théâtre Alchimic
Théâtre des Amis
Le Chat du rabbin
Le bruit du monde
Si vous avez adoré le précédent spectacle de la Compagnie Paradoxe
intitulé «Tranches de Vian», vous serez heureux d’apprendre que cette compagnie revient avec une nouvelle création.
En coproduction avec le Théâtre des Amis, cette compagnie vous offrira
un voyage théâtral et musical, tout autant que burlesque, extravagant et
déroutant : «Le bruit du monde». Le bruit des autres si proches et si différents qui nous dérangent continuellement...
Vous découvrirez sur la scène
des voyageurs fantasques, imprévisibles, entraînés dans
des
situations
étranges, poétiques,
Le comédien Antonio Buil participe à la création
absurdes, comiques
du «Bruit du monde»
ou dérangeantes. Des
voyageurs mis en mouvement par Yves Pinguely... des voyageurs qui ont
pour nom Nadèle Allaki, Antonio Buil, Pascal Chenu, Isabel Mayor et
Sophie Solo
Sous la houlette de Sarah et Xénia Marcuse, la Compagnie La
Fourmilière s’est attelée à l’adaptation de la bande dessinée de Joann Sfar,
qui, comme on le sait, a fait l’objet en 2011 d’une adaptation en long
métrage d’animation, par Joann Sfar lui-même aidé de plusieurs artistes.
Sur la scène de l’Alchimic, la création prendra la forme d’un spectacle
philosophico-humoristique et musical, durant lequel on pourra apprécier
l’humour féroce et succulent dont Joan Sfar a affublé le Chat. Ce chat
impertinent, malin et subversif qui pose au Rabbin toutes les questions qu’un
esprit sain et amusé peut se poser face à tous les dogmatismes. Ce Rabbin
qui se fixe pour but d’instruire le Chat pour qu’il puisse passer sa BarMitsva.....
Voilà un spectacle qui promet d’être transgressif, jubilatoire et sonore...
. Jusqu’au 23 mars 2014
Supplémentaire : lundi 17 mars à 19 h 00
Une image tirée du film d’animation «Le Chat du Rabbin»
mardis et vendredis à 20 h. Mercredis, jeudis, samedis à 19 h. Dimanches à 17 h
. du 4 au 23 mars
Réservation : 022 /342.28.74.
mardi et vendredi à 20h30, mercredi, jeudi, samedi et dimanche à 19h
Réservation : 022 / 301 68.38
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espace vélodrome, plan-les-ouates
La Compagnie
des spectres
Les spectres du roman de Lydie Salvayre dont cette
pièce est l’adaptation, ce sont les souvenirs de sales
individus des années quarante, avec un fantôme
principal, le maréchal Pétain, ici maréchal ‘Putain’ ...
Le héros de Verdun et traître de Vichy constitue le personnage principal du spectacle. L'action se passe en fait bien après la guerre. Une femme
très âgée, Rose, et sa fille partagent un petit appartement dans lequel surgit un huissier chargé de saisir les biens des locataires. Pour ensuite procéder à leur expulsion.
Rose qui perd un peu la boule prend cette irruption impromptue pour
une piqûre de rappel des humiliations qu'elle a connues durant
l'Occupation. Elle qui jadis avait cru au Maréchal, qui avait même souhaité le rencontrer, se souvient que sa franchise lui avait valu nombre de sanctions allant jusqu'à la mise à nu annonciatrice d’une fouille au corps consécutive. Au bord de la crise de nerf, elle se souvient aussi que son fils avait
été torturé à mort par la Gestapo. La vieille femme, égarée, s’en prend dès
lors à l'huissier, le confondant avec le sordide Darnand, figure majeure de
la collaboration de sinistre réputation. L'homme de loi n’en a cure : il
poursuit son état des lieux sous les invectives. La fille essaie de temporiser, mais se laisse, elle aussi, emporter par des souvenirs douloureux, ceux
des petites gens que tout accable.
Spectacle fait de fureur à deux voix, empli de tristesse et de rage, mais également de drôlerie, spectacle
peuplé de spectres ‘de compagnie’, spectacle qui in fine
dit la vie des miséreux embourbés, engloutis dans une
mémoire qui ne cesse de sourdre.
Zabou Breitman a adapté le roman de Lydie
Salvayre sorti en 1997, l'a mis en scène et le joue. Le
regretté Jean-Marc Stehlé avait conçu pour elle un de
ces décors dont il avait la maîtrise absolue, ajoutant
pour dire au mieux la réalité des humbles quelques
objets banals et bibelots des plus quotidiens, ceux
qu’on trouve chez les gens modestes qui collectionnent
les riens pour mieux s’y rattacher.
Dans un entretien donné au journal L’Humanité du
13 septembre 1997, la romancière - par ailleurs psychiatre d’enfants - expliquait : « La question est : que
transmet-on de notre fardeau ? Comment transmettre
aux enfants d'aujourd'hui, dans leur corps, dans leur
âme, ce que fut 1943, et dont ils subissent, à leur insu,
les effets... Cette transmission, ici, ne prend pas les
voies de la connaissance historique, mais celle du
roman familial. Mais que faire quand un parent vous en
accable ? On se bouche les oreilles ? Il y a, avec des
circonstances différentes, un peu de mon histoire.
Pendant longtemps je n'ai rien voulu savoir des histoires dont on me rebattait les oreilles, au point de développer ce que Freud appelait 'une passion pour l'ignorance'. »
Et si pour ne pas finir totalement névrosé l’on faisait mentir cette passion-là ?
Rosine Schautz
Espace Vélodrome, Plan-les-Ouates
Les 6 et 7 mars 2014 à 20h00. Location : 022/888.64.60
Durée : 1h30 / Tarif(s) : de CHF 18 à 35.Zabou Breitman dans «La compagnie des spectres»
© Chantal Depagne Palazon
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Texte disponible aux éditions du Seuil, collection "Points"
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grand théâtre de genève : nabucco
Un colosse fragile
Nabucco compte au nombre des opéras les plus connus de Verdi. Sa musique
entraînante, ses rythmes martiaux, ses choeurs somptueux et ses effets de mise
en scène spectaculaires lui assurent une place de choix dans les festivals
lyriques de plein air comme Vérone ou Avenches, alors que dans les théâtres
traditionnels, on affiche assez systématiquement ce titre lorsqu'il s'agit
de renflouer les finances...
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Les détracteurs de Nabucco sont pourtant
nombreux : pour eux, la musique de cet opéra
est trop axée sur la recherche d'effets, l'intrigue
en est banale et peu logique alors que la psychologie des personnages principaux reste désespérément sommaire. La situation paradoxale de ce
titre adoré des foules mais souvent décrié par
les spécialistes m'a incité à demander à John
Fiore, le chef de la nouvelle production genevoise, ce qu'il pensait de cette partition qu'il a
déjà souvent dirigée.
«J'aime vraiment Nabucco, je n'ai pas honte à
l'avouer. D'abord parce qu'il me plaît de travailler avec des chanteurs, et Verdi offre aux
trois protagonistes, et même aux deux emplois
secondaires que sont Ismaele et Fenena, des
moments de musique que tout artiste rêve d'interpréter sur les planches. Et puis, je ne suis pas
du tout d'accord avec ceux qui font la fine bouche devant le langage utilisé ici. Il serait bien
sûr vain de le mesurer à l'aune de ces réussites
que sont Rigoletto, Un bal masqué ou Otello,
mais il n'en reste pas moins que
le musicien, dans ce troisième
opus, trace déjà sa voie d'une
main sûre car théâtre et musique
parviennent ici à un degré d'harmonie auquel plusieurs titres
postérieurs ne pourront plus prétendre.
mémoriser pour que les applaudissement crépitent immédiatement. En outre, bien des tournures orchestrales semblent rappeler celles des
musiques militaires ou des flonflons de fêtes
populaires. Mais il serait faux d'en rester là. Car
se limiter à la recherche du succès facile, c'est
ne pas rendre justice aux beautés cachées d'une
partition dont la grandeur dissimule efficacement les fragilités. Si chef et chanteurs ne prennent pas la peine de mettre en exergue ces brefs
instants où Verdi semble tout à coup vouloir
donner corps à des sentiments plus subtils, alors
on justifie le dédain de ceux qui ne veulent voir
en Nabucco qu'une œuvre mineure .
Pouvez-vous donner un exemple de
ces moments d'exception ?
Prenez l'air de Zaccharia. Il est accompagné de
six violoncelles, ce qui pourrait bien être une
première dans l'histoire de l'opéra romantique
italien. La couleur sombre des instruments est
atténuée par le fait que cette pièce est écrite
dans une tonalité relativement claire qui fait de
Quelle difficulté présente pour le chef le langage en
apparence un peu fruste de
Nabucco ?
Avec ses effets de masse colossaux, l'opéra semble s'imposer
tout seul: l'orchestration, monolithique, vise à l'effet sans trop
de raffinements et les mélodies
sont la plupart du temps suffisamment amples et faciles à
John Fiore
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cette mélodie un formidable chant d'espoir chez
les Hébreux opprimés par un tyran sanguinaire.
La musique, dès le début, laisse entendre que
l'espérance n'est pas un vain mot pour celui qui
sait garder la foi. Dans le grand air d'Abigaïle,
plein de fureur et de rage, l'irruption soudaine
d'une flûte solo dans sa séquence centrale laisse
entrevoir la face cachée de ce personnage qui
souffre de n'avoir jamais été aimé. Cette femme
avide de pouvoir est certes monstrueuse, mais
Verdi tient à nous rappeler, par ce soudain accès
de tendresse spontanée, qu'elle a été faite ainsi
par le mépris de son entourage à son égard et
par les circonstances obscures qui ont entouré
sa naissance. La musique, autrement dit, nous
rappelle ici qu'il aurait pu y avoir une autre
Abigaïle si son enfance s'était déroulée plus harmonieusement.
Vous n'êtes donc pas de ceux qui pensent que la psychologie des personnages est
trop primaire ...
Je ne peux, bien sûr, mettre un Iago, voire un
Luna sur le même plan qu'une Abigaïle qui
hurle sa rage avec une telle constance. Mais je
reste séduit par l'honnêteté du musicien qui,
dans un contexte où la peinture des caractères
est marquée par l'exagération et la véhémence,
s'attache à montrer discrètement une autre facette du personnage. Ce chant de la flûte, c'est
comme une soudaine mais courte plongée dans
une psyché dont la complexité reste voilée.
A quoi un chef qui s'attaque à cette
partition doit-il alors particulièrement faire
attention ?
On a souvent dit de Verdi que, dans ses opéras
de jeunesse, il exploitait les possibilités de l'orchestre comme celle d'une grande guitare. C'est
en partie exact, notamment
dans les récitatifs où les
instrumentistes sont avant
tout là pour donner rythme
et forme au chant. Dans ces
moments, il est certain que
le chef doit veiller prioritairement à donner à ces
séquences les impulsions
nécessaires à assurer leur
progression; ensuite, dans
les airs et ensembles, il lui
faut trouver la couleur juste
qui mette en une perspective narrative correcte les
divers moments de l'action.
Et ce n'est pas tout : car
cette musique avance, elle a
un but, un point culminant
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vers lequel toutes les péripéties des scènes doivent tendre.
Le chef doit rendre sensible
les lentes montées de tension
qui trouvent leur exutoire
dans ces moment clefs de l'action que sont, par exemple,
l'entrée de Nabucco dans le
temple (à cheval, si l'on en
croit la tradition !), sa scène
de folie, la destruction de l'idole par un éclair divin, le
retour à la raison du roi, le
délire dément d'Abigaïle suivie de sa demande de pardon,
etc. ... En représentation, la
beauté pure des airs et cabalettes risque de faire
perdre de vue au public ces axes dramatiques
essentiels à la compréhension du sujet car l'auditeur a alors tendance à se laisser porter par la
musique sans trop se poser de questions sur la
progression de l'intrigue. S'ajoute encore à cela
le problème que posent les interruptions liées
aux applaudissements : je n'ai bien sûr rien
contre le fait de manifester son enthousiasme à
des chanteurs ou des choristes qui s'acquittent
de leur tâche avec panache, mais il est certain
que de telles ruptures dans le flux musical ne
favorisent pas la construction de ces grands arcs
mélodiques qui doivent amener tout naturellement l'auditeur à prendre pleinement conscience des enjeux des scènes cruciales mentionnées
ci-dessus. Pour reprendre un exemple précis : le
chœur des Hébreux, si justement célèbre, se
déguste comme une gâterie musicale de choix.
Il s'agit là véritablement d'un tableau vivant,
d'un arrêt sur image apprécié dans la structure
de l'ensemble. Il est par conséquent naturel de
l'applaudir, voire de le bisser comme cela se fait
encore de nos jours en Italie. D'un point de vue
théâtral, cependant, l'arrivée de Zaccharia juste
après les dernières notes du chœur se révèle
bien plus importante, car c'est elle qui, par la
couleur claire de la tonalité choisie, annonce le
lieto fine, c'est-à-dire la fin miraculeusement
heureuse de cette sombre histoire. Il faut donc
capter au plus vite l'intérêt des auditeurs pour
faire sentir l'urgence du message et le changement subit d'atmosphère.
Il reste néanmoins indéniable que
Verdi a conçu son opéra comme une suite de
morceaux de bravoure.
Bien sûr. Mais on peut dire cela de tous les opéras baroques ou du premier romantisme italien
sans que cela implique que leur structure dramatique soit trop lâche ou artificielle! Les
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Leonardo Capalbo sera Ismaele
conventions du temps devaient être respectées,
et Verdi, lorsqu'il compose Nabucco, n'a pas
encore l'aura nécessaire pour imposer à ses
librettistes et à son public les changements dramaturgique qui feront la gloire de partitions fondamentales comme celles de La Traviata ou de
Don Carlo...
Le chœur joue un rôle central ici, plus
que dans presque tous les autres titres de
Verdi. Comment concevez-vous musicalement ce collectif ?
Le chœur est un protagoniste à part entière. Ce
qu'il chante, c'est ce que n'importe quel autre
personnage pourrait dire à sa place. Mais en
choisissant de confier ce message à une masse
chorale, Verdi sent implicitement qu'il augmente la force de frappe des morceaux ainsi mis en
valeur et qu'ils vont ainsi trouver un écho encore plus grand auprès du public. Il ne s'est pas
trompé, comme en témoigne le succès prodigieux de la création milanaise, succès qui ne
s'est jamais démenti depuis. Et personne de
sérieux ne songerait à critiquer un compositeur
parce qu'il cherche à remporter l'adhésion du
public !
Vous avez beaucoup dirigé Verdi en
Allemagne. Dans quel état d'esprit arrivezvous à Genève pour défendre ce répertoire ?
L'OSR est un orchestre magnifique, et, en plus,
j'aime ce théâtre. La scène y est grande et permet de monter du grand spectacle sans avoir à
en rogner les effets par manque de place; malgré cela, le rapport entre scène et salle reste
idéal. Quant à l'orchestre, comme il se confronte régulièrement au domaine symphonique et au
domaine lyrique, il manifeste une souplesse
dans ses approches des divers styles de langages
musicaux que l'on ne trouve pas toujours chez
des ensembles qui passent leur vie uniquement
en fosse. De plus, en Allemagne, le principe de
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la saison continue avec un
lever de rideau quasiment
chaque soir implique que les
instrumentistes sont soumis à
de fréquentes rotations. Vous
pouvez diriger sept fois un
opéra sans vous retrouver
deux fois devant la même formation en fosse ! C'est dire
toute la frustration d'un chef
essayant de mettre au point
une interprétation qui tienne
la route lorsqu'il se retrouve
soudain devant un premier
violon qu'il ne connaît pas ou
avec lequel il n'a pas encore
travaillé la partition en question.
Vous êtes amené à travailler avec
deux distributions différentes ici à Genève
puisque les représentations sont très rapprochées et qu'il serait insensé d'attendre des
protagonistes qu'ils entrent en scène trois ou
quatre soirs de suite. Cela vous gêne-t-il dans
votre préparation ?
Je dirais plutôt que c'est stimulant, puisque le
but de tout chef d'orchestre est d'harmoniser les
tempéraments de façon que l'assise du spectacle
reste solide. Comme chaque interprète apporte
au départ une touche de couleur différente et
une sensibilité autre au personnage qu'il incarne, la mise en commun de ces expériences et de
ces sensibilités différentes reste toujours stimulante... En ce qui me concerne, j'arrive bien sûr
aux premières répétitions avec une idée précise
de ce que je souhaite obtenir à tel ou tel
moment. Mais, en cas de soudain désaccord
avec un chanteur ou un metteur en scène, je ne
peux me résoudre à m'opposer à cet autre point
de vue interprétatif sans me demander si le mien
est d'une valeur aussi absolue que cela. Dans un
tel cas, la recherche du compromis est profitable
à tous et permet un approfondissement supplémentaire. Ainsi, même dans une oeuvre en
apparence aussi limpide que Nabucco, vous
n'arrivez jamais à vous dire en toute honnêteté
que vous en avez définitivement fait le tour...
Surtout que, dans ce cas précis, c'est bien de la
foi qu'il s'agit. Et chacun de nous réagit de façon
fort personnelle à ce qui reste fondamentalement inexplicable ...
Propos recueillis par Eric Pousaz
Nabucco est à l'affiche du Grand Théâtre le 28 février et
les 1, 2, 4, 6, 7, 8 & 10 mars
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correspondance assez tendue qu'il a échangée avec Salvatore Cammarano, son librettiste, au sujet de la distribution de son
ouvrage.
opéra de lausanne : luisa miller de verdi
Une musique qui
ouvre des fenêtres...
Au cours des douze mois passés où l'on a fêté le bicentenaire de la naissance du
grand compositeur italien, les nouvelles productions d'Aida, de la Traviata, du
Bal masqué ou même de Falstaff ont envahi les affiches des théâtres lyriques
partout dans le monde. Luisa Miller, une œuvre pourtant créée en 1849 juste
deux ans avant la première de Rigoletto, n'a par contre pas fait la une de
l'actualité musicale. Seul l'opéra de Malmö, en 2012, s'est offert le luxe d'une
nouvelle production particulièrement remarquée qui a d'ailleurs fait l'objet
d'une parution en DVD.
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On ne peut donc que féliciter les
responsables de la programmation
de l'Opéra lausannois pour leur courage en proposant une nouvelle réalisation d'un titre que beaucoup considèrent comme problématique. Non
que la musique en soit de mauvaise
qualité, mais la mise sur pied de ce
spectacle place les responsables
devant de nombreux problèmes épineux à résoudre, tant au plan théâtral
que musical.
Avant le début de la première
répétition, fixée au 17 février déjà, le
chef d'orchestre Roberto Rizzi
Brignoli a accepté le principe d'une
interview téléphonique, tout en précisant qu'il était encore bien incapable de dire quoi que ce soit sur les
bases dramatiques de cette production car beaucoup de décisions
allaient se prendre seulement au
moment où tous les responsables de
la représentation seraient réunis...
Ma première question concerne
la relative impopularité de ce titre
verdien. Y a-t-il une explication
musicale à cela ?
Roberto Rizzi Brignoli : Je serai bien incapable
de vous dire pourquoi cet ouvrage n'a pas la
place qu'il mérite dans le cœur des admirateurs
de Verdi. Les explications sont certainement
multiples, mais on n'est sûr de rien lorsqu'on
essaie de porter un jugement sur le degré d'acceptation d'une œuvre d'art par le public. Et
puis, il y a des effets de modes: il fut un temps
pas si lointain où Don Carlo, qui est pourtant un
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Oui, Verdi aurait voulu étoffer les rôles de
Wurm et de Frederica car il craignait que l'intrigue ne paraisse trop mélodramatique si le librettiste éliminait tous les éléments liés à la situation politique. Privés de leur contexte social et
historique, ces deux personnages négatifs risquaient en effet de devenir des esquisses
psychologiques inabouties plutôt que des personnages à part entière. Mais Cammarano ne
céda pas aux demandes du musicien, faisant
valoir que le San Carlo de Naples, commanditaire du nouvel ouvrage, n'avait pas l'intention
d'afficher une représentation plus longue que de
coutume. De plus, il semblait aller de soi que le
théâtre n'avait pas les moyens d'engager des stars pour ces deux rôles assez
secondaires si on les compare à ceux
des protagonistes. Pressé par le
temps, Verdi se soumit finalement de
mauvaise grâce, tout en faisant
remarquer que ces deux intrigants
restaient essentiels à la compréhension de l'évolution de la situation dramatique et des conflits psychologiques qui nourrissent l'intrigue. On
en vient à rêver aujourd'hui de ce que
le compositeur aurait pu faire de ce
sujet vingt ans plus tard si l'on compare cette partition avec celle de Don
Carlo, d'une durée presque double, où
le compositeur prend le temps de
creuser plus à fond les portraits de
chaque personnage.
Quelle place occupe cet
ouvrage dans l'énorme production
du compositeur ?
Roberto Rizzi Brignoli
chef-d'œuvre absolu aussi écrit d'après une tragédie de Schiller, paraissait bien plus rarement
qu'aujourd'hui sur les plateaux des maisons d'opéra du monde entier. Or en ce début de 21e siècle, c'est peut-être le titre le plus aimé de toute
la production du compositeur...
On dit que Verdi lui-même a eu
quelques doutes quant à la viabilité de ce
projet dramatique, comme en témoigne la
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On le considère d'abord comme le
premier opéra bourgeois de Verdi.
Tournant le dos aux grands drames
historiques ou bibliques, le musicien
brosse le portrait d'une société marquée au sceau des préjugés de tous
ordres au sein de laquelle l'amour de
la fille d'un militaire à la retraite pour le fils d'un
puissant homme politique n'a aucune chance
d'aboutir au succès. On n'est à vrai dire pas très
loin du mélodrame de La traviata, créé quatre
ans plus tard, qui se joue certes dans le brillant
milieu parisien mais où les données dramatiques de base sont assez semblables.
Et musicalement, où situez-vous cet
opéra ?
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Là aussi, Verdi fait en quelque sorte peau neuve.
Son langage musical s'enrichit d'un nombre
incroyable de nouveautés qu'il exploitera plus
tard avec une belle constance, jusque dans
Falstaff ! Prenez par exemple l'ouverture : c'est
la première fois qu'une telle pièce est écrite sur
un seul motif, très court et très rapide, qui va
ensuite irriguer tout l'opéra en lui conférant sa
couleur sombre si particulière. On est loin des
potpourris habituels qu'on retrouvera pourtant
sous la plume de Verdi jusque dans les années
soixante avec le splendide morceau d'introduction de La forza del destino. Il y a aussi le rôle
de Luisa, qui s'inscrit d'abord avec une légèreté
virtuose dans une délicate scène alpestre qu'aurait presque pu écrire un Bellini pour La sonnambula et qui se termine sur une note plus
morbide, sollicitant à l'extrême le registre grave
du soprano, un peu à la manière de ce
qui se passe dans le dernier acte de La
traviata. Enfin, et c'est le plus important à mes yeux, c'est dans les scènes de
transition que le compositeur se libère
des conventions du temps avec le plus
de panache. Verdi n'écrit pas ici des
récitatifs traditionnels, seulement destinés à donner aux spectateurs les éléments nécessaires à la compréhension
du déroulement de l'action. Lors des
confrontations entre les personnages
négatifs, par exemple, Verdi refuse souvent aux chanteurs le droit à un bel air
avec cabalette ou à un duo spectaculaire; il se contente bien plutôt de composer une scène aux rythmes tendus et à
l'écriture serrée où mots et musique
s'entremêlent pour former un langage
nouveau dont les tournures ne s'impriment pas immédiatement dans la
mémoire des auditeurs. C'est la fameuse parola scenica à laquelle il fait si
souvent allusion dans sa correspondance avec ses librettistes. Et j'en profite
pour revenir à votre première question :
la difficulté d'appréhender à première
écoute de telles scènes qui sont primordiales dans l'équilibre du spectacle contribue
peut-être à rendre moins populaire ce titre qui
demande finalement de l'auditeur un maximum
d'attention dans les moments clefs, au contraire
de ce qui se passe dans Rigoletto, par exemple,
où le flux musical vous emporte de la première
à la dernière note.
Quelles sont pour vous les principales
difficultés à surmonter quand vous abordez
un tel titre ?
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Il convient d'abord de trouver la teinte juste
pour l'ensemble de chaque scène. Cela tient à la
mise en place de textures rythmiques efficaces
au plan théâtral qui ne freinent pas le développement naturel de la musique. Il faut que chant
et diction, théâtre et musique se complètent harmonieusement pour que les articulations musicales restent constamment sensibles. L'opéra ne
doit pas donner l'impression d'une structure
morcelée, malgré la présence de trois courts
tableaux dans les deux premiers actes. Verdi
innove ici en utilisant des procédés musicaux
qui lui permettent de resserrer l'agencement des
scènes de façon que l'auditeur se sente irrémédiablement entraîné vers le dénouement final.
On pourrait dire, en exagérant quelque peu, que
le compositeur semble inviter ici son public à ne
pas considérer les airs comme des morceaux de
Luisa ne sait pas qu'elle a été empoisonnée et
Rodolfo ignore que la lettre de rupture qu'on lui
a remise a été écrite par sa fiancée sous la
contrainte. L'amour ne prend pas ici la première
place comme le veut la coutume. Ce duo est d'abord une scène d'explications difficiles et d'aveux inconfortables qui exige des chanteurs un
art de la nuance et un ciselé épuré dans le legato qui n'ont rien à voir avec la véhémence pathétique de la musique qui accompagne la mort des
protagonistes dans Il trovatore ou La forza del
destino! Je ne veux bien sûr pas dire par là que
je trouve la fin de Luisa Miller supérieure à
celle de ces opéras postérieurs, mais il me paraît
juste de rappeler que dans cette scène ultime, le
compositeur recherche autre chose que le
pathos pur et qu'il nous faut prendre la peine de
l'écouter attentivement pour saisir toutes les
facettes de son message dramatique.
Une dernière question :
quand vous travaillez sur la partition, imaginez-vous déjà une mise en
scène ou attendez-vous de vous trouver à la première répétition pour
découvrir ce que le responsable théâtral du spectacle va proposer ?
Alexia Voulgaridou sera Luisa
bravoure à applaudir bruyamment après leur
exécution mais bien comme des instants de
recueillement où les personnages, se repliant sur
eux-mêmes, nous révèlent le plus profond de
leur âme.
Le duo final semble aussi introduire
une touche nouvelle dans la sensibilité musicale du compositeur...
Il s'agit certes d'un duo d'amour, mais quand il
commence, bien des points restent à résoudre.
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La musique de Verdi n'est pas univoque, elle ouvre des fenêtres sur des
horizons divers que chacun a la liberté
d'interpréter comme il veut. Ainsi, je
n'attends pas d'un metteur en scène qu'il
vienne me dire comment jouer tel ou tel
morceau et je ne m'arroge pas le droit
d'imaginer un mouvement scénique à sa
place! Ce qui n'exclut bien entendu pas
que l'on discute franchement des problèmes rencontrés lors de la mise en
commun de nos expériences théâtrales
et musicales.... Nous avons la chance, à
Lausanne, de travailler presque six
semaines avec tous les artisans du spectacle. C'est ce que je considère comme
des conditions de travail idéale : nous
allons nous réunir le premier jour pour
former une famille artistique où les
idées doivent passer des uns aux autres
en toute confiance. Et c'est de cette émulation
que le spectacle va tirer toute son énergie ...
Propos recueillis par Eric Pousaz
Luisa Miller est à l'affiche de l'Opéra de Lausanne les
vendredi 21 mars 2014 à 20h, dimanche 23 mars 2014 à
17h, mercredi 26 mars 2014 à 19h, vendredi 28 mars 2014
à 20h et dimanche 30 mars 2014 à 15h
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portrait du ténor
Jonas
Kaufmann
Le ténor des ténors, Jonas Kaufmann, sera de passage au
Grand Théâtre le 30 mars prochain pour livrer au public
son interprétation du Winterreise de Schubert, l'un des
cycles les plus difficiles et les plus pénétrants qui soit.
Accompagné par son pianiste attitré Helmut Deutsch, la
chanteur devrait logiquement être aussi intense que dans
son précédent opus, Die Schöne Müllerin, dont il avait
gravé une version de référence publiée par Decca.
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Avant d'accéder au rang le plus élevé et d'occuper la première place
parmi les ténors stars de son temps, Jonas Kaufmann, né le 10 juillet 1969,
contrairement à ce que l'on pourrait croire, n'a brûlé aucune étape. Issu d'une
famille où la musique tenait une place de choix, le jeune Jonas écoute son
grand-père jouer et chanter en s'accompagnant au piano l'ensemble des opéras de Wagner – dont le chanteur conserve aujourd'hui pieusement les partitions – tout en mêlant sa voix à celles de ses parents et de sa sœur, également musicienne. Il intègre très jeune l'un des chœurs d'enfants de sa ville
natale, Munich, et prend plaisir à chanter des chansons folkloriques en bavarois, avant de se voir confier vers 15 ans de petits solos dans des concerts
scolaires. Un professeur de musique lui donne au passage ses premières
leçons, tout en lui apprenant à bien respirer. De là à devenir chanteur, il y a
pourtant un monde ! Attiré par les matières scientifiques, il continue ses études à l’Université tout en pratiquant le chant. A 19 ans sur les conseils d'un
professeur, ce théoricien, adepte du concret, décide enfin de se consacrer à
l'étude du chant à la Hochschule. Il obtient rapidement un contrat pour intégrer la troupe de l'Opéra de Sarrebruck où il passe deux saisons de 1994 à
1996. Ténor léger, il est programmé dans Dr Caius (Falstaff), le
Remendado (Carmen), Andres (Wozzeck), Ottavio (Don Giovanni) et travaille en parallèle la flexibilité, pour parvenir à être distribué dans le répertoire rossinien ; sa voix résiste et se heurte cependant à cette tessiture dans
laquelle il s'aventurera peu. Il quitte Sarrebruck pour Heidelberg, puis se
retrouve à Trèves et à Stuttgart où il enchaîne les spectacles à un rythme soutenu, abordant Jaquino (Fidelio), Almaviva (Barbiere) et Alfredo
(Traviata), tout en prenant le risque de ne plus être attaché à un théâtre et de
ne pouvoir répondre aux propositions venues de l'extérieur. Il participe à
cette époque à des master classes animées par Hans Hotter, après avoir reçu
les conseils d'une autre sommité, le baryton Josef Metternich, pendant de
longs mois. A partir de 2001 pourtant, Jonas Kaufmann reste étroitement lié
à l'Opéra de Zürich dirigé par Alexander Pereira, un collectionneur qui souhaite disposer des meilleurs poulains dans son écurie. Ce « partenariat continu » lui permet de combiner ses engagements avec d'autres rendez-vous et
de participer à plusieurs enregistrements discographiques comme Der
Vampyr de Marschner (1999), Die drei Wunsche de Loewe (1996) ou
Ekkehard de Abert (1998) pour le label Capriccio et de débuter à Salzbourg
en 1999 (Doktor Faustus de Busoni), à Milan en 1999 dans Fidelio (Jaquino
avec Muti), un an après avoir travaillé avec Strehler (mort quelques jours
avant la première) sur Cosi fan tutte de Mozart (Ferrando) au Piccolo Teatro.
Kaufmann élargit à cette époque son répertoire et aborde aussi bien des rôles
allemands (Zauberflöte, Entführung aus dem Serail, Fierrabras de
Schubert), que français, Faust et Mignon qui marque ses débuts en France à
Toulouse en 2001, ou italiens, tels que Nina de Paisiello, Il ritorno d'Ulisse
in patria de Monteverdi, La Clemenza di Tito, Rigoletto ou Bohème, multipliant les styles et les esthétiques. Il débute à Chicago en
2001 avec Cassio (Otello) et à
Paris en 2004 (Cassio à la
Bastille), année où il interprète
Ruggero de La Rondine à
Londres, ses premiers pas au
Grand Théâtre de Genève ayant
lieu en 2003 avec La Damnation
de Faust de Berlioz, mise en
scène par Olivier Py.
Louanges
On loue déjà son adéquation
stylistique, la beauté de son
timbre viril et cuivré, l’élasticité
de ses phrasés et sa capacité à
chanter pianissimo sans détimbrage, autant que sa diction irréprochable dans toutes les langues et l'intensité de sa présence
scénique. Avant Munich et
Vienne qui lui restent à conquérir, Jonas Kaufmann est invité au
Met de New York en mars 2006
Jonas Kaufmann
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pour participer à une série de Traviata (production de Zeffirelli) avec
Angela Gheorghiu - avec laquelle il a beaucoup chanté depuis opéras et
concerts – succès qui lui ouvre grand les portes de l'Autriche. Très proche
du pianiste Helmut Deusch, il n'attend pas longtemps pour se produire en
récital : leur premier programme au disque est consacré à Strauss (HM
2005), aussitôt suivi par Schubert (Decca), le chanteur se montrant d'un
niveau exceptionnel dans les mélodies de Mahler, Duparc ou Britten dans
lesquels sa voix d'une exemplaire musicalité se plie aux moindres nuances
et recrée d'ineffables mondes intérieurs. Ses débuts dans le rôle de Don José
(Carmen) ont lieu en 2006 à Londres (DVD Decca) avec Pappano et
Antonacci, personnage qu'il retrouve en décembre 2009 à Milan pour l'ouverture de la saison (avec Emma Dante à la régie) et où il rencontre un succès similaire à celui qu'il rencontrera bientôt dans le Don Carlo de Verdi
qu'il défend à Zürich, New York, Munich, ou Londres et l'été dernier à
Salzbourg avec sa partenaire préférée, Anja Harteros (mise en scène de Peter
Stein).
Sous la loupe
Sa notoriété est aujourd'hui telle que chacune de ses apparitions fait
l'objet d'une véritable hystérie médiatique et publique. Ses prises de rôles
régulières sont attendues, diagnostiquées et disséquées, de ce sensationnel
Werther parisien dirigé par Plasson en 2010 (Bastille dvd Decca), à ce
Lohengrin de rêve donné d'abord à Munich, puis à Milan en 2012
(Barenboïm en fosse et Claus Guth à la régie), avec lequel il fait se débuts à
Bayreuth en 2010. Tosca (2 dvd Decca et Emi) à Zürich et Londres, Die
Walküre (intégrale avec Gergiev cd Marinscky) et au Met en 2012, suivi par
Parsifal en 2013 l'ont consacrés artiste le plus convoité de la scène lyrique,
régnant sans partage à Munich et à Vienne où il vient de triompher successivement dans Il Trovatore (Py à la régie et Harteros en Leonora), Fanciulla
del West (avec Stemme) et La forza del destino (Harteros et Tézier) dans des
mises en scènes conçues autour de sa fascinante personnalité. On admire
désormais le souffle inépuisable, la puissance d'un instrument qui a gagné
en largeur, le legato de cette voix expressive aux moirures barytonales que
l'aigu n'effraie pas, auxquelles le musicien vient ajouter une séduction et une
dimension scéniques qui font de lui le plus grand ténor du moment.
Contraint à réduire de façon drastique son emploi du temps après des problèmes de nodules sur les cordes vocales (il devait donner son premier Enée
des Troyens en juin 2012 à Londres avec Pappano et Mac Vicar), Kaufmann
a pris conscience des risques qu'il encourait sans pour autant se limiter à
quelques rendez-vous avec un public toujours plus vaste. Il aime les défis à
l'image de Placido Domingo qu'il considère comme un modèle et ne résiste
pas à alterner les rôles, Rodolfo entre deux Bacchus (Ariadne auf Naxos) à
Salzbourg en 2012, Lohengrin entre deux Don Carlo à Munich en 2013 pour
sauver des représentations et croule sous les projets les plus enthousiasmants. Prochaine étape après un nouveau Werther au Met en février et mars,
Des Grieux (Manon Lescaut) à Londres en juillet prochain, Andrea Chénier
en 2015, avant Ballo in maschera, Otello et Tannhaüser... Pour célébrer
Wagner et Verdi en 2013, il a publié deux albums magnifiques qui confirment l'étendue et la variété de ses moyens expressifs et techniques (chez
Decca et Sony son nouveau label). Sa présence à Genève dans le cadre d'une
tournée de récitals commencée à Barcelone et qui se terminera à La Scala,
avec le Voyage d'hiver de Schubert (qu'il vient de graver pour Sony) s'annonce comme l'un des événements incontournables de la saison.
François Lesueur
NOUVELLE PRODUCTION
3 ÈME J O U R N É E D U F E S T I VA L S C É N I Q U E
DER RING DES NIBELUNGEN EN 3 ACTES
E T U N P R O LO G U E
GÖTTERDÄMMERUNG
R I C H A R D WA G N E R
DIRECTION MUSICALE
INGO METZMACHER
MISE EN SCÈNE
DIETER DORN
DÉCORS & COSTUMES
JÜRGEN ROSE
GUNTHER
SIEGFRIED JOHN DASZAK
JOHANNES MARTIN KRÄNZLE
BRÜNNHILDE PETRA LANG
HAGEN JEREMY MILNER
ALBERICH JOHN LUNDGREN
GUTRUNE EDITH HALLER
W A LT R A U T E M I C H E L L E B R E E D T
CHOEUR DU GRAND THÉÂTRE
DIRECTION CHING-LIEN WU
ORCHESTRE DE
LA SUISSE ROMANDE
23.04>02.05.2014
Grand Théâtre, le 30 mars à 19h30
SAISON1314
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d
a
WWW.GENEVEOPERA.CH
+41(0)22 322 5050
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sa propre colère. Selon Danlee Mitchell, percussionniste, chef d’orchestre, manager et ami de
Partch, Delusion of the Fury a induit
«la réconciliation de Harry avec le monde ».
bâtiment des forces motrices, genève
Delusion of the Fury
Avis aux curieux, aux amateurs de surprises, aux lassés du répertoire classique,
un passage au Bâtiment des Forces Motrices le 28 ou le 29 mars s’impose. En
effet, dans le cadre du Festival Archipel, le Grand Théâtre propose Delusion of
the Fury, une œuvre particulièrement originale, voire révolutionnaire, du
compositeur américain Harry Partch.
Créée en 1969 au Pasadena Art Museum de
Los Angeles, elle vient d’être reprise en août
2013, après un oubli de plusieurs décennies en Europe,
pour l’ouverture du Festival
Ruhrtrien-nale
à
la
Jahrhunderthalle Bochum.
Nous aurons la chance de la
découvrir à Genève dans cette
même production.
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Et voici la vérité sur l’affaire Harry Partch ! Celui que
l’on a appelé le Don
Quichotte de la musique
contemporaine est né en 1901
à Oakland (Californie) et mort
à San Diego en 1974. Il apprit
à jouer de plusieurs instruments et se mit très tôt à la
composition, en se servant
bien sûr des outils de la
musique occidentale, tempéraments égaux et échelle chromatique. Frustré cependant de
ne pouvoir transcrire avec
assez de précision les nuances du langage parlé,
il détruisit toutes ses compositions en 1930 et se
mit à inventer et à construire des instruments
qui lui permettraient d’atteindre l’exactitude
recherchée. Il commença par le monophone,
plus tard nommé violon adapté : un manche de
violoncelle est monté sur un corps d’alto et sur
la longueur de cordes obtenue des positions plus
précises que les degrés de la gamme chromatique tempérée sont marquées. Dans son livre
Genesis of a Music, Harry Partch explique sa
théorie musicale fondée sur l’intonation juste et
la microtonalité, décrit les instruments qu’il a
construits et évoque quelques unes de ses compositions majeures. Sa « trinité » a-t-il dit, est la
même que celle de l’homme primitif qui fabriquait ses instruments : « magie du son, impor-
a
tance de l’élément visuel et de sa beauté, expérience rituelle ».
L’ensemble MusikFabrik occupe une place
de choix dans l’univers de la musique contemporaine. Les plus grands compositeurs actuels
ont été ses hôtes : Sir Harrison Birtwistle, Peter
Eötvös, Heiner Goebbels, Michael Jarrell,
Mauricio Kagel, Olga Neuwirth, Wolfgang
Rihm, Karlheinz Stockhausen, Sasha Waltz ou
Hans Zender. L’Ensemble a reconstruit tous les
instruments inventés par Partch, et appris à en
jouer !
«Delusion of the Fury»
Théâtre Musical
Selon son concept de « corporéalité »
Partch ne veut pas de distinction entre les interprètes et les musiciens qui les accompagnent.
Les instruments constituent le décor de l’action
et les intervenants évoluent parmi eux. Delusion
of the Fury s’articule en deux parties : une scène
du théâtre No japonais et une scène de conte traditionnel africain. Comme dans la Grèce
antique, la farce et le drame sont exploités.
L’œuvre met en exergue la nature trompeuse
(delusion) et l’inutilité de la colère humaine et
se moque de la justice dans le second acte.
Il se peut que Partch, victime des injustices
et de l’incompréhension de la société de son
temps, ait trouvé ici le moyen de se confronter à
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La mise en scène est assurée par Heiner
Goebbels, la scénographie et les lumières par
Klaus Grünberg, et la direction musicale par…
personne !
Une occasion unique de découvrir l’univers sonore inspiré et inouï (dans le sens étymologique du terme) de ce pionnier que fut Harry
Partch. Et n’oubliez pas vos jumelles pour suivre en détail le ballet des percussionnistes, danseurs, mimes et acteurs dans leurs costumes
saisissants.
Martine Duruz
28, 29 mars : Delusion of the fury de Harry Partch,
Ensemble Musikfabrik, m.e.s. Heiner Goebbels.
Bâtiment des Forces Motrices à 19h30 (billetterie :
022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
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opéra du rhin
Rigoletto
Créée l'été passé au Festival d'Aix-en-Provence, cette
mise en scène du Rigoletto de Verdi par Robert Carsen,
présentée à l'Opéra du Rhin en cette fin d'année, fera
encore halte prochainement à Bruxelles, Moscou et au
Grand Théâtre de Genève.
A la fois simple et ingénieux, le dispositif scénique de Radu Boruzescu
transplante l'action dans une tente de cirque présentée en coupe. La piste
emplie de sable, les gradins, la loge pour les VIP, les grandes perches soutenant le toit de toile: rien ne manque à l'évocation d'une soirée sous le chapiteau. Implicitement, le spectateur a l'impression de faire partie de la représentation, car le dispositif scénique le place dans les gradins qui lui font face
sur le plateau, la fosse d'orchestre représentant la deuxième partie de l'ère de
jeu des artistes. Avant le lever du rideau, Rigoletto paraît sur le devant de la
scène, portant un grand sac rouge foncé d'où il extrait une poupée gonflable:
elle lui sert à rendre plus explicites ses plaisanteries grivoises destinées à
plaire à un public de courtisans dépravés, massés dans les gradins qui font
face au public. A la fin de la représentation, lorsqu'il prend livraison du
corps du Duc de Mantoue, ce même sac révèle le corps poignardé de sa fille.
La boucle est bouclée. Dans cet univers de cirque, l'action semble se jouer
de nos jours. Quelques femmes dénudées et une équipe de danseurs athlétiques pimentent l'action de leurs pirouettes et ajoutent une touche de dérision à une intrigue dont les développements dramatiques prêtent longtemps
à rire avant de révéler son réalisme sordide longtemps occulté. On ne saurait imaginer procédé plus efficace pour redonner une actualité brûlante à un
sujet vieux de plus de cent-quatre-vingts ans : Le Roi s'amuse de Victor
Hugo a en effet été créé en 1832 déjà... Tout ne fonctionne pas d'idéale façon
dans une transposition aussi radicale. Faire habiter Rigoletto dans une roulotte de cirque ne permet pas, par exemple, de faire comprendre à l'auditeur
comment le bouffon a pu espérer cacher l'existence de sa fille aux artistes du
cirque qui l'emploie. Mais l'accumulation d'images fortes suffit à faire
oublier quelques menues invraisemblances de ce type en donnant à l'ensemble une dimension poétique qui fait fi de toute référence rationnelle.
Paolo Carignani opte pour une approche en finesse : il détaille la partition avec un goût marqué pour un travail en profondeur visant à assurer un
maximum de transparence et de rigueur au commentaire orchestral que les
instrumentistes de l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg détaillent avec
une rare cohésion. Sous sa direction tout en souplesse, le drame se déroule
avec cette rigueur tranquille qui caractérise la lente approche de la catastrophe finale dans toutes les grandes tragédies. Bien qu'annoncé souffrant,
George Petean époustoufle avec son Rigoletto vocalement intense, jamais
forcé, comme sil s'agissait de montrer pour lui qu'il n'atteint jamais ses limites. Le chant coule avec naturel et n'a nul besoin d'effets spectaculaires pour
mettre en avant les moments forts du drame. Cette retenue en dit plus long
sur la psyché du personnage que les cris et gémissements d'interprètes moins
inspirés. Dmytro Popov en Duc fait étalage d'impressionnants moyens
vocaux; mais son interprétation tout d'un bloc finit par lasser tant le personnage paraît étranger au monde qui l'entoure, seulement soucieux de donner
à son chant le maximum d'impact sur les auditeurs. Et comme il n'a pas l'aigu vraiment facile et léger, le rôle paraît seulement esquissé. Il est toutefois
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«Rigoletto» © Opéra national du Rhin / Alain Kaiser
juste de préciser qu'il s'intègre parfaitement dans la conception particulière
de ce spectacle. Nathalie Manfrino possède une voix déjà presque trop mûre
pour Gilda et sa vocalise savonnée dans le 'Caro nome' aurait pu faire craindre le pire si l'interprète ne s'était soudain reprise en main dans les deux derniers actes où son portait de femme délaissée bouleverse par la variété des
accents dramatiques dont elle sait enrichir le profil musical du rôle. Sara
Fulgoni, une Maddalena sonore aux graves profonds et Konstantin Gorny,
un Sparafucile puissant mais à la ligne de chant peu raffinée, complètent
cette distribution d'une cohérence frappante. Quant au chœur d'hommes de
l'Opéra du Rhin, il séduit autant par l'aplomb de ses interventions musicales
que par sa capacité à s'intégrer au projet dramatique sans réticence aucune.
(10 janvier)
Le cenerentola
La Cendrillon de Rossini est sans conteste un chef-d'œuvre.
Musicalement, l'ouvrage est même plus riche que Le Barbier de Séville, car
le mélange des genres y est réalisé de main de maître. Ces oppositions
confèrent à l'ouvrage une largeur de palette expressive que l'on chercherait
en vain du côté de Séville. Le chef d'orchestre espagnol Enrique Mazzola l'a
bien compris: sa battue n'a rien de débridé, voire d'hystérique dans les
grands ensembles. Au contraire, il privilégie une certaine lenteur dans la
construction de ces vastes formes musicales où le délire est structuré de
main de maître par un compositeur connaissant toutes les ficelles du métier.
La distribution fait la part belle aux jeunes talents. Maite Beaumont prête à
Cendrillon sa voix fruitée, déliée dans l'aigu et pourtant agréablement charnue dans le grave. Les passages de registre se font sans rupture aucune, la
vocalise coule de source avec naturel. Bogdan Mihai est un Prince rêveur
dont l'aigu aux luminescences lunaires convient idéalement à ce personnage
qui reste en dehors du cadre social où il se meut. Le baryton français Edwin
Crossley-Mercer ne fait qu'une bouchée du personnage de Dandini dont il
déguste les diverses facettes avec une gourmandise vocale qui n'exclut ni la
précision dans l'accentuation, ni la classe dans la recherche d'un phrasé toujours adéquat. Umberto Chiummo, par contre, reste en deçà du potentiel
comique de Don Magnifico, qu'il incarne ici avec une retenue vocale qui
nous fait perdre sa trace dans les nombreux ensembles de l'ouvrage. Ugo
Guagliardo, un Alidoro à la voix puissante mais manquant parfois de stabilité, ainsi que Hendrickje Van Kerckhove et Sophie Pondjiclis dans le rôles
des deux méchantes sœurs, complètent agréablement ce plateau que soutient
efficacement un Orchestre Symphonique de Mulhouse parfois en mal de
précision et un chœur d'hommes dont l'homogénéité vocale laisse à désirer
dans la formation réduite requise par cette partition. La mise en scène de
Sandrine Anglade ne cherche pas à renouveler le genre car la metteuse en
scène ne paraît pas intéressée par le potentiel dramatique qu'elle aurait pu
tirer de ce conte finalement assez noir (17 novembre).
Eric Pousaz
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opéra de zurich
Les Pêcheurs de
Perles réhabilités
Depuis le milieu du siècle passé, Les Pêcheurs de Perles de
Bizet apparaissent trop rarement à l'affiche. Le sujet passe
pour démodé, la musique est jugée facile et inutilement
alanguie alors que l'exotisme de pacotille auquel se réfère
le librettiste non sans une certaine complaisance semble
paralyser l'imagination des metteurs en scène.
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Dans sa mise en scène zurichoise, Jens-Daniel Herzog a opté pour
une approche résolument contemporaine de l'action scénique. Tout se joue
sur un vieux rafiot vu en coupe; au sous-sol, les ouvriers ouvre des huitres
sur un rythme soutenu pour chercher la perle rare sous le regard dur de surveillants auxquels il ne faut pas en conter; au premier étage se trouve la
cabine où règne sans partage un capitaine Zurga colérique et brutal, alors
que le pont supérieur, donnant vue sur le ciel au début du deuxième acte,
sert de refuge aux amoureux qui tentent d'échapper aux sbires du chef des
pêcheurs. Certes, il est difficile d'accepter cette transposition sans fermer
les yeux sur certaines incohérences : ainsi, où sont les palmiers si souvent
évoqués par les amoureux ? Où est ce village en flammes qui couvre leur
fuite ?... Mais le spectateur s'en accommode d'autant plus facilement qu'il
lui serait facile de trouver dans l'original des éléments contradictoires
défiant le bon sens d'un auditeur moyen! Sous cette forme renouvelée, le
spectacle rappelle au moins opportunément l'injustice des conditions
sociales dans le tiers monde ainsi que l'exploitation éhontée de ses richesses naturelles par des colons sans scrupules....
Les quatre chanteurs réunis pour l'occasion, bien que tous étrangers,
font honneur au style de chant français, même si leur prononciation peine
parfois à rendre le texte compréhensible. Le soprano épanoui de Marina
Rebeka habite avec aisance le rôle de Leïla; si les vocalises de son air d'entrée ne sont pas forcément l'atout principal de son interprétation, la
«Les Pêcheurs de perles» © Suzanne Schwiertz
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vigueur de ses accents, la beauté et l'éclat de son aigu et une présence scénique affirmée, doublée d'une gestuelle subtile, font exister le personnage
en dépit des banalités d'une intrigue assez mal ficelée. Pavol Breslik incarne un Nadir idéal : le timbre, solaire, se déploie sans jamais forcer l'émission au point que le profil mélodique de ses airs charme sans peine l'oreille; de plus, la ligne de chant conserve pureté et élégance en chaque
instant. N'était la coloration parfois baroque de certains sons, on pourrait
parler d'une interprétation idéale. Michael Volle impressionne avec son
Zurga tourmenté, au chant chargé d'accents violents mais idéalement maîtrisés. Avec aplomb, il tire le maximum de la psychologie du seul personnage un tant soit peu crédible de ce quatuor complété par le Nourabad
puissant, aux invectives sonores mais jamais agressives, de Scott Conner.
A la direction, Patrick Fournillier trouve le juste milieu entre les langueurs d'une orchestration pas toujours exempte de facilités et les passages plus dramatiques, notamment au 3e acte, où l'on sent le jeune compositeur pressé de faire éclater le carcan de l'opéra comique aux formules
déjà trop convenues pour lui. Le chœur et les instrumentistes du
Philharmonia Zurich font honneur à leur réputation et défendent cet ouvrage avec la même passion que s'il s'agissait d'un des grands chefs-d'œuvre
du répertoire (19 janvier).
Cecilia Bartoli en vraie magicienne
Alcina est certainement un des plus riches opéras de Haendel. Le portrait que le compositeur y propose d'une femme délaissée qui asservit tous
les hommes sans parvenir à s'attacher durablement le cœur du seul qu'elle
aime vraiment, compte au nombre des grandes réussites de peinture
psychologique dans tout le répertoire de l'opéra baroque. Le rôle semble
pour ainsi dire avoir été écrit pour Cecilia Bartoli, et il était logique qu'elle s'y attaque dans cette salle zurichoise où elle a créé plus d'une dizaine
de rôle dans ce dernier demi-siècle...
Les années ont passé, et il serait vain de nier les légères blessures d'un
timbre dont le vibrato devient parfois intrusif ou dont les couleurs ont tendance à se ternir dans les infinies chaînes de vocalises que l'interprète se
plaît à rajouter dans les da capo de ses six longs airs. Mais au final, qu'importe ? Car tout cela n'est que détail. Comment résister en effet à cette voix
aux accents impalpables qui chante sur le souffle pendant de longues
secondes sans qu'une moindre défaillance n'altère l'émission ? Comment
ne pas succomber à cette capacité de faire vivre une note pour que le texte,
pourtant inlassablement répété, semble tout à coup se charger de sousentendus insondables et insoupçonnés jusqu'ici ? Peu d'artistes parviennent à un tel degré d'identification avec un rôle au point que tout spectateur présent ne pourra dorénavant voir Alcina sans mesurer chaque nouvelle incarnation à celle de la soprano romaine.
Le miracle du spectacle zurichois ne s'arrête pourtant pas là; il tient
également à la réunion sur un même plateau d'artistes qui se hissent apparemment sans peine à la hauteur de la diva. Malena Ernman en Ruggiero
aligne les prouesses techniques avec un abattage incroyable qui lui permet
même d'esquisser quelques appuis faciaux en chantant son air de triomphe
hérissé de difficultés au 3e acte, après deux heures et demie de représentation, sans que l'effort n'influence de quelque façon la suavité de la projection vocale. Et c'est peu dire que ce timbre charnu, puissant mais jamais
forcé, rend pleinement justice à cet emploi d'une difficulté qui n'a rien à
envier à celui de la magicienne; il semble lui aussi idéalement adapté au
rôle. Julie Fuchs est à peine moins impressionnante en Morgana : le soprano est léger mais passe la rampe avec facilité, les réserves de souffle
paraissent inépuisables et l'ornementation des reprises de ses airs reste tou-
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théâtre de bâle
Un Onéguine
'prolo'
Dans sa nouvelle mise en scène de l'opéra le plus connu
de Tchaïkovski, Corina von Rad évacue tout ce qui
pourrait rappeler la différence de milieux sociaux entre
Tatiana et Onéguine.
«Alcina» avec Cecilia Bartoli (Alcina) et Malena Ernman (Ruggiero)
© Monika Rittershaus
jours d'une éloquence et d'une élégance qui forcent l'admiration. Varduhi
Abrahamyan dans le rôle de l'amante trahie fait idéalement contrepoids
avec son mezzo aux belles teintes de bronze qui rendent le travesti parfaitement plausible en début de soirée.
Les hommes sont nettement moins gâtés par le compositeur et leurs
airs semblent souvent écrits rapidement par un compositeur qui se serait
mis ... sur pilotage automatique. Fabio Trümpy et Eric Anstine font de leur
mieux pour éviter que l'intérêt du public ne retombe et réussissent pleinement dans leur tâche. L'orchestre 'La Scintilla' est dirigé par Giovanni
Antonini. Le chef italien, qui prend même la flûte pour accompagner un
air, aime les tempos larges et sereins, au détriment parfois de la variété de
ton dans un 2e acte, notamment, qui aligne les airs funèbres. Mais la qualité des effets sonores tirés des nombreuses interventions en solistes de
plusieurs instrumentistes et surtout la plasticité d'un accompagnement qui
se profile comme un vrai partenaire de la scène rendent cette soirée musicalement mémorable sur tous les plans.
Un jeu virtuose de théâtre dans le théâtre
Christof Loy n'en est pas à sa premières mise en scène d' Alcina, mais
visuellement, il a totalement renouvelé son approche par rapport aux versions proposées à Hambourg et Munich. Ici, l'action se joue dans un théâtre baroque dont la scène, avec ses décors branlants, est visible dans la partie supérieure du plateau zurichois alors qu'au-dessous, la machinerie visible nous fait voir l'envers du décor, Et c'est là que, précisément, se nouent
les véritables enjeux de l'action. Lorsqu'ils quittent les feux des projecteurs, les personnages retrouvent leurs problèmes quotidiens et leur incapacité à les résoudre. Le 2e acte se joue dans les loges du théâtre, le 3e sur
la scène mais derrière un amoncellement de décors qu'on dirait déjà préparés pour la destruction. De cette façon, le metteur en scène rend visibles
les deux niveaux de l'action, celui de l'illusion brillante qu'est l'île d'Alcina
et celui de la précarité de la vie des artistes, toujours menacés d'être rattrapés par les exigences d'un monde sans pitié aux lois duquel ils échappent
difficilement. Au final, le spectacle réussit à être beau esthétiquement, tout
en restant signifiant et captivant pour le spectateur d'aujourd'hui. Une
grande heure de théâtre baroque à voir absolument lors d'une prochaine
reprise. (26 janvier)
Eric Pousaz
Le décor spartiate de Ralf Käselau sert de cadre unique à une action qui
se déroule sans points forts ni coups de théâtre. Onéguine apparaît chez ses
voisins dans une tenue négligée, sanglé dans un veston de cuir mal seyant.
Tatiana et sa sœur portent, elles, des vêtements qui évoquent vaguement le
XIXe siècle, à l'image du chœur qui semble sorti d'une peinture naturaliste
du bon vieux temps. Au 3e acte, les hôtes du Prince Grémine portent des
habits de soirée de coupe moderne, sauf Tatiana qui reste engoncée dans une
ignoble robe blanche épaississant son tour de taille. Tout cela serait de peu
d'importance si le travail gestuel avait été soigné, mais ce n'est pas le cas ici:
les acteurs arpentent la scène sans but précis, comme pour tromper leur
ennui, et lorsqu'ils s'empoignent avec violence, le spectateur se demande le
pourquoi d'un tel déchaînement
d'énergie.
La musique n'est pas servie avec
un maximum d'efficacité. L'Onéguine
d'Eung Kwang Lee commence la soirée avec un timbre agréablement sombre, plein d'assurance et couronné
d'un aigu percutant. Néanmoins, dans
le duo qui clôt l'œuvre, une soudaine
baisse de régime le laisse la plupart du
temps sans voix. Sunyoung Seo ne
connaît pas ce problème : sa Tatiana
est magnifique de présence et d'éclat,
même si la voix peine à trouver les
accents d'une rondeur nécessaire à
rendre toute la nostalgie de son chant
de femme frustrée en fin de parcours.
Andrej Dunaev en Lenski fait une
belle démonstration de chant soigné
«Eugène Onéguine» avec
malgré un timbre qui reste sans charSunyoung Seo, Eung Kwang
e
me dans son air du 2 acte. Le reste de
Lee © Priska Ketterer
la distribution est solide, sans marquer
d'une sceau particulier les scènes auxquelles ils sont associés. A la tête d'un
orchestre symphonique bâlois en grande forme, Christoph Gedschold propose une lecture fort sage de la partition. Au fil des scènes, la tension se relâche irrémédiablement : l'exceptionnel duo de la dernière scène tombe même
à plat, faute d'une direction qui rendrait sensibles les aspérités d'un langage
instrumental qui en sait plus long sur l'inconscient des personnages que ce
que ceux-ci consentent à révéler. Au final, c'est donc une légère impression
d'ennui qui prédomine... (18 janvier).
Eric Pousaz
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à marseille
Lucia di
Lammermoor
Reprise de la production de Frédéric Bélier-Garcia, créée
à Marseille en 2007 (voir SM 196), avec deux valeureuses
distributions vocales en alternance.
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Le désistement d’Eglise Gutiérrez, prévue initialement pour le rôle-titre
du premier cast, a certainement perturbé l’organisation du spectacle, mais
finalement sans aucun dommage. C’est ainsi Zuzana Markovà, programmée
à l’origine pour la deuxième équipe, qui passe en première distribution…
une sorte de « saut dans le grand bain » pour cette jeune chanteuse (25 ans),
en prise de rôle de surcroît, et qui a aussi chanté à pleine voix la veille de la
première ! Le résultat est spectaculaire, la musicalité semble à toute épreuve, elle sait varier entre piani et aigus puissants bien assurés, le public lui
fait une ovation à l’issue de son air de la Folie. L’actrice est moins convaincante, sa grande taille amenant une raideur certaine dans le jeu, mis à part
quelques passages bien travaillés comme l’air précité où elle roule des yeux
comme une vraie folle. Sans avoir exactement les mêmes moyens vocaux,
sa consœur Burcu Uyar en Lucia est une fine musicienne très investie dans
le rôle, et elle émeut par son naturel. Pour la partie masculine de la distribution, c’est le deuxième cast qui surpasse sans conteste le premier, à commencer par le ténor vaillant et élégant Arnold Rutkowski (Edgardo), chez
qui on croit déceler quelques petits accents alla Carlo Bergonzi … et ce
n’est pas rien ! Même s’il traverse une sérieuse baisse de régime sur son air
final, on le préfère à Giuseppe Gipali, d’un volume de plus en plus étriqué
et des aigus parfois à la limite du dérapage, même s’il a potentiellement la
ligne et le style adéquats. Côté barytons, le brillant, le mordant voire l’arrogance de l’émission ainsi que la beauté du timbre de Gezim Myshketa
(Enrico) éclipsent un Marc Barrard en très petite forme, qui lutte souvent
pour trouver la justesse du ton jusqu’à douter sur plusieurs attaques. Dans le
rôle de Raimondo, les deux basses Wojtek Smilek et Nicolas Testé
(Raimondo) sont robustes et autoritaires, avec plus d’humanité dans la voix
de celui-ci, alors que celui-là sonne par moments de manière un brin monolithique. En Arturo, le ténor Stanislas de Barbeyrac fait honneur à son titre
tout fraîchement acquis de révélation lyrique de l’année aux Victoires de la
Giuseppe Gipali et Zuzana Markovà © Dresse
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Musique, l’instrument est clair et superbement projeté, tandis que Marc
Larcher se montre beaucoup moins aguerri en Normanno. Le chef Alain
Guingal déroule une direction solide, de répertoire, en parvenant tout de
même à trouver de belles couleurs. On lui sait gré d’éviter le style pompier
et de ne pas couvrir le plateau de trop de décibels, y compris dans le sextuor
du 2ème acte. La mise en scène, dès les premières images en clair-obscur
noir et blanc, fait la part belle au théâtre et au jeu des passions. Dans cette
ambiance crépusculaire avec un sol jonché de feuilles mortes, la pièce maîtresse du décor reste le cyclorama d’arbres inquiétants vus en transparence
qui produit un effet toujours aussi réussi.
François Jestin
Donizetti : LUCIA DI LAMMERMOOR – les 31 janvier et 5 février 2014 à l’Opéra de
Marseille
à avignon
L’Italiana in Algeri
Représentée il y a un an à l’Opéra de Marseille (voir SM
250), la production de Nicola Berloffa fonctionne toujours
aussi bien, défendue par une équipe artistique
complètement renouvelée.
Sans revenir en détails sur la mise en scène, le lever de rideau à Avignon
est un vrai grand moment d’opéra :
les femmes voilées mettent beaucoup d’énergie à leur activité de
repassage, produisant une fumée
considérable qui part comme un
épais brouillard dans la salle. On
craint d’avoir à subir les toux
démonstratives du voisinage, mais
la brume se lève très vite ! Un petit
bémol dans le dispositif scénique au
début du deuxième acte, la pompe
de la fontaine d’où l’eau s’écoule
par deux petits palmiers est assez
bruyante et perturbe l’écoute des
passages délicats de l’air de
Lindoro. La distribution vocale est
emmenée par l’énergique Silvia Tro
Santafé (Isabella), au timbre sombre
et reconnaissable entre tous, elle
possède l’abattage et l’agilité atten- «L’Italiana in Algeri» © Delestrade
dus, qualités malheureusement bien
absentes chez Donato Di Stefano (Mustafa), en manque d’amplitude, de stabilité, de charisme, il est clairement le maillon faible de la troupe même si son
personnage est visuellement plutôt crédible. L’écriture rossinienne paraît déjà
un peu tendue, en particulier en termes de cadences, pour le ténor léger Julien
Dran (Lindoro), mais il se sort sans dommages de ses difficiles passages d’agilité. Armando Noguera est un Taddeo sonore, à l’aise dans le jeu et d’une
belle présence, tandis que Giulio Mastrototaro (Haly) paraît en retrait dans ce
rôle de moindre importance. Clémence Tilquin (Elvira) est certes puissante
mais pas toujours juste, dommage pour les 2 aigus « stratégiques » du finale
du premier acte !, alors qu’Amaya Dominguez (Zulma) fait valoir une plus
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grande maîtrise. La direction musicale de Roberto Rizzi-Brignoli surprend au
démarrage par sa lenteur, mais on a le sentiment par la suite qu’il se met au
niveau de virtuosité des forces en présence. La cohésion est ainsi assurée à
l’orchestre, y compris pour les ensembles et finales qui tourbillonnent.
François Jestin
Rossini : L’ITALIANA IN ALGERI – le 4 février 2014 à l’Opéra Grand Avignon
à monte-carlo
Rusalka
projection est malgré les années toujours aussi dynamique dans l’aigu, et à
l’autre extrémité quelques graves masculins nous rappellent la profondeur
de son contralto. Les rôles secondaires sont également tenus avec une grande qualité, Julie Robard-Gendre (le Marmiton) dont la voix est bien posée,
et l’ensemble des trois nymphes des bois Daphné Touchais, Marie Kalinine
et Maïram Sokolova. Au pupitre, c’est un spécialiste de ce répertoire
Lawrence Foster (il tenait déjà la baguette pour la Rusalka montpelliéraine
en 2011, voir SM n° 237) qui restitue toutes la beauté et la luxuriance de la
partition, que ce soit la harpe seule à l’entrée de Rusalka ou les tutti orchestraux, dont le volume est cependant gardé sous contrôle dans la petite salle
Garnier.
François Jestin
Le chef-d’œuvre de Dvorak est donné pour la première
fois à l’Opéra de Monte-Carlo, dans une coproduction
avec le Staatstheater de Nuremberg signée de Dieter
Kaegi.
Dvorak : RUSALKA – le 26 janvier 2014 à Monte-Carlo – Salle Garnier
à montpellier
Les premières images surprennent : un jeune couple descend de moto
pour une balade romantique au clair de lune, puis ils ôtent quelques vêtements et sautent à pieds joints dans le lac avec force éclaboussures. Cette
mare fumante encerclée d’un praticable en bois sera présente tout au long de
l’opéra, recouverte d’une passerelle dorée pour le 2ème acte qui se déroule
au palais princier. Le dispositif est alors complété en fond de plateau par une
grande boîte, caisse de résonance recouverte de miroirs dans laquelle les
invités du bal se montrent dans des costumes très colorés. Au début du II
également, à la place du garde-forestier et du marmiton, c’est un éclairagiste qui met la dernière main à l’orientation des spots tout en conversant avec
un costumier. Mais mis à part ce clin d’œil, la mise en scène respecte de
manière très classique le livret, avec un Odin en combinaison turquoise qui
arrive directement des eaux profondes comme un gros triton, et une Jezibaba
effroyable aux doigts crochus et crâne rasé, entourée de petites flammes
autour du lac lorsqu’elle prépare sa potion. Barbara Haveman (Rusalka)
possède le rôle en amplitude et en volume, mais rencontre malheureusement
de sérieux problèmes d’intonation dans le haut du registre, se situant souvent en-dessous de la note. Maksim Aksenov (le Prince) est un ténor à l’aigu claironnant de format héroïque et on l’espère rapidement dans d’autres
emplois, on pense par exemple à Hermann de La Dame de pique. La
Princesse étrangère de Tatiana Pavlovskaïa est très puissante mais beaucoup
plus discrète dans le grave qui perd de sa consistance, et Alexeï Tikhomirov
(l’Ondin) est une basse particulièrement solide. Pour compléter les rôles
principaux, Ewa Podles est tout simplement une Jezibaba d’anthologie, la
Eugène Onéguine
Une lecture faussement originale de l’œuvre et
globalement peu convaincante.
En entrant dans la salle, le spectateur découvre, comme il est indiqué,
un « appartement communautaire de Saint-Pétersbourg – 1999 » qui a un air
de déjà-vu. Les vieilles cuisinières et machines à laver, le linge qui sèche en
avant-scène, les personnages qui errent comme de pauvres âmes, ou qui
changent et rechangent de vêtements en quasi permanence pour certains,
tout cela évoque un mélange de Marthaler, Warlikowski et Tcherniakov
réunis, mais en copie, pas dans l’original. Marie-Eve Signeyrole, qui a ima-
«Eugène Onéguine» © Ginot
giné cette production, souhaite ajouter sa touche personnelle à l’opéra de
Tchaïkovski : avant les premières notes, des chanteuses / danseuses se trémoussent dans un clip à la gloire du « gentil » Poutine, plus tard ce seront
des couplets de Otchi Tchernye qui seront entonnés par certains protagonistes, et on aura aussi droit à quelques cris et beuglement… tout cela finit par
irriter sérieusement ! Et puis, miracle ! la scène du duel est très forte et réussie, elle se joue à la roulette russe accompagnée de très nombreux verres de
Vodka, après que le témoin de Lenski a pris les roubles des parieurs. Le
3ème acte aussi est intéressant, avec un Onéguine SDF, et une baignoire à
jardin pour rafraîchir les bouteilles de champagne de la réception glauque
chez Grémine. La musique ne rehausse pas vraiment le visuel, avec une
direction du chef Ari Rasilainen très lente, qui manque foncièrement d’éclat
Barbara Haveman et Alexeï Tikhomirov © Opéra de Monte-Carlo
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et de brillant. Dans ce volume parfois presque chambriste, ce sont les vents
qui sont mis à l’honneur, pas toujours impeccables d’ailleurs, le meilleur
moment étant produit par les cordes dans la 2ème scène du II. La distribution vocale est handicapée par l’Onéguine de Lucas Meachem, sans charisme ni séduction particulière du timbre. Dina Kuznetsova (Tatiana) n’est pas
toujours très précise dans l’intonation, les aigus sont limites à la fin de son
air de la lettre, mais elle est suffisamment sonore, ce qui n’est pas toujours
le cas des graves d’Anna Destraël (Olga), très joli grain de voix par ailleurs.
Les suffrages vont finalement au ténor Dovlet Nurgeldiyev (Lenski), dont
l’instrument est joliment conduit et élégant. Svetlana Lifar (Madame Larina)
fait valoir un mordant et une projection spectaculaires, Olga Tichina
(Filippievna) est peu stable mais a l’âge du rôle, et Loïc Félix (Monsieur
Triquet) est sans reproches.
François Jestin
Tchaïkovski : EUGENE ONEGUINE – le 21 janvier 2014 au Corum de Montpellier
à lyon
46
Cœur de Chien /
The Tender Land
Après sa création à Amsterdam en 2010, puis un passage
par la Scala de Milan, c’est à l’Opéra de Lyon que Cœur
de Chien est présenté en première française, pour un
spectacle réjouissant à tous points de vue.
Sergei Leiferkus (Filippovitch) et les Soviétiques © Stofleth
L’opéra composé par Alexander Raskatov suit fidèlement, en seize
tableaux, la nouvelle satirique et fantastique de Boulgakov, au cours de laquelle le professeur Filipp Filippovitch Preobrajenski recueille Bouboule (Charik
dans l’opéra), chien errant dans les rues de Moscou, puis lui greffe une hypophyse et une paire de testicules humains. La greffe est une réussite technique,
mais la création homme-chien Charikov se révèle un sans-gêne monstrueux,
poussant finalement le professeur à l’opération chirurgicale inverse, pour
retrouver le Bouboule du début de l’histoire. Un épilogue moins « happy end »
est ajouté par rapport à la nouvelle, des doubles menaçants du chien se
déployant en avant-scène, équipés de mégaphones qui finissent par « casser
les oreilles » des auditeurs ! La production imaginée par Simon McBurney est
enthousiasmante, les scènes successives enchaînant à un rythme haletant. La
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«The Tender Land» © Fernandez
vidéo est utilisé ici à dose légère (la neige moscovite, des nuages, …), le
dispositif scénique principal est une cloison presque de la taille du cadre de
scène, qui peut avancer, pivoter, basculer, et figure le plus souvent un mur au
papier peint vintage dans l’appartement du professeur. Le tableau où celui-ci
explique – dans un cauchemar de voix d’outre-tombe – son expérience devant
un parterre de confrères, est un petit bijou. D’autres passages sont hilarants,
comme les opérations chirurgicales illustrées de petits geysers en ombres chinoises, puis de flaques de sang qui dégoulinent. Ou encore la poursuite du chat
par Charikov qui s’enferme dans les toilettes, et lorsque la porte est fracassée,
c’est un torrent d’eau qui se déverse sur le plateau. La musique illustre idéalement les situations, elle s’écoute avec plaisir et intérêt, assez loin d’un avantgardisme outrancier. La distribution artistique est en majeure partie celle de la
création amstellodamoise, emmenée par le chef d’orchestre Martyn Brabbins.
Le rôle du chien Charik, alias Poligraf Poligrafovitch Bouboulov sous sa
forme humaine, requiert déjà quatre marionnettistes pour mouvoir un grand
chien noir squelettique et désarticulé, la soprano Elena Vassilieva pour évoquer la « voix déplaisante » du chien, le magnifique con-tre-ténor Andrew
Watts pour sa « voix plaisante », puis le ténor à la tessiture très étendue Peter
Hoare pour la forme humaine. Dans le rôle du professeur, le baryton Sergei
Leiferkus est impérial, et son assistant Bormenthal, le baryton Ville Rusanen,
peine un peu dans le grave… mais ses aigus sont tellement haut perchés !
Nancy Allen Lundy (Zina) fait partir ses aigus comme des flèches, tandis que
Sophie Desmars (la Fiancée de Charikov) négocie avec virtuosité un passage
de pure soprano colorature. Un petit bémol tout de même, il faut signaler la
sonorisation généralisée des rôles principaux, évidemment nécessaire pour
certains effets de mégaphones ou autres, mais la plupart du temps superflue et
assez incompréhensible dans un théâtre de cette taille, artificielle et trompeuse… transformant ainsi une fluette soprano en fond de plateau dos tourné au
public en une Brünnhilde déchaînée !
Reprise du spectacle inauguré en 2010 au théâtre de la Renaissance
d’Oullins, cette fois au théâtre de la Croix-Rousse, dont la taille permet à nouveau une appréciable proximité entre le public et la scène. La production de
Jean Lacornerie est dense et variée, avec tout d’abord un film projeté en direct,
procédé qu’on voit de plus en plus dans les maisons d’opéra : ici, chaque protagoniste fait vivre sa marionnette à l’intérieur et autour d’une maquette de
ferme. Le résultat projeté est souvent bluffant et a tendance à attirer durablement les yeux… si bien qu’on ne regarde plus la chanteuse elle-même ! La
version pour 13 instruments, dirigée par Philippe Forget, sonne richement et
rappelle à plusieurs endroits la ressemblance à certaines partitions de Britten.
La distribution vocale a le mérite de la cohésion d’ensemble, où la partie féminine semble la plus assurée, comme Laure Barras (Laurie Moss) et Lucy
Schaufer (Ma Moss).
François Jestin
Raskatov : COEUR DE CHIEN – le 24 janvier 2014 à l’Opéra de Lyon
Copland : THE TENDER LAND – le 1er février 2014 au Théâtre de la Croix-Rousse
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genève
s t r a s b o u rg
Grand Théâtre (022/418.31.30)
s Nabucco (Fiore-Aeschlimann) – 1er,
2, 4, 6, 7, 8, 10 mars
Opéra National (0825.84.14.84)
s Le Roi Arthus (Lacombe-Warner) –
14, 16, 18, 21, 25 mars
lausanne
toulouse
Opéra (021.315.40.20)
s Luisa Miller (Rizzi BrignoliDelMonaco) – 21, 23, 26, 28, 30 mars
s
zurich
Opernhaus (044.268.66.66)
s Don Carlo (Luisi-Bechtolf) – 1er
mars
s Aida (Luisi-Gürbaca) – 2, 6, 9, 13,
16, 19, 22, 26, 29 mars
s Der Fliegende Holländer (TrinksHomoki) – 11, 14, 20, 23 mars
s Les Contes d’Hoffmann (LuisiAsagaroff) – 21, 23, 28, 30 mars
paris
Champs-Elysées (01.49.52.50.50)
s Les Fêtes de l’hymen et de l’amour
(Niquet) – 11 mars
s Der Rosenkavalier (Petrenko) – 18
mars
Opéra Comique (0825.01.01.23)
s Platée (Christie-Carsen) – 20, 22,
24, 25, 27, 30 mars
s Castor et Pollux (Pichon) – 21 mars
Opéra National (08.92.90.90)
Bastille :
s Madama Butterfly (CallegariWilson) – 1er, 4, 7, 12 mars
s Die Zauberflöte (Jordan-Carsen) –
11, 14, 17, 20, 22, 25, 29 mars
s La Bohème (Oren-Miller) – 15, 18,
21, 24, 27, 31 mars
avignon
Opéra-Théâtre (04.90.82.81.40)
s Le Dernier jour d’un condamné
(Kocsar-Duffaut) – 9, 12 mars
lyon
Opéra National (08.26.30.53.25)
s Le Comte Ory (Montanari-Pelly) –
1er, 3, 5 mars
marseille
Opéra (04.91.55.11.10)
s Colomba (Gibault-Roubaud) – 8,
11, 13, 16 mars
monte-carlo
Théâtre du Capitole (05.61.63.13.13)
Cavalleria rusticana/Pagliacci
(Sokhiev-Kokkos) – 14, 16, 18, 21, 23
mars
a m s t e rd a m
Opera (31.20.62.55.456)
s Lucia di Lammermoor (RizziWagemakers) – 14, 17, 21, 23, 27, 30
mars
bruxelles
La Monnaie (32/70.23.39.39)
s Guillaume Tell (Pido) – 3, 5, 9, 11
mars
s Arthur (Petrou-Koek) – 19, 20, 21 mars
b a rc e l o n e
Liceu (34.934.85.99.13)
s Tosca (Carignani-Azorin) - 8, 9,11,
12, 13, 14, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22,
23, 25 mars
madrid
Teatro Real (34/90.224.48.48)
s Alceste (Bolton-Warlikowski) – 2, 4,
6, 7, 8, 9, 11, 12, 14, 15 mars
l o n d re s
ROH (0044/207.304.4000)
s La Fille du régiment (Abel-Pelly) –
3, 6, 9, 12, 15, 18 mars
Opéra-Théâtre (04.77.47.83.40)
s Werther (Campellone-Fréchuret) –
21, 23, 25 mars
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Deutsche Oper (49/30.343.84.343)
s Cavalleria rusticana/Pagliacci
(Meister-Pountney) – 14, 18, 22, 26
mars
s Die Zauberflöte (Repusic-Krämer) –
13, 16 mars
s Lucia di Lammermoor (Garcia
Calvo-Sanjust) – 15, 19, 23 mars
s Don Giovanni (Layer-Schwab) – 20,
29 mars
s La Damnation de Faust (RunniclesSpuck) – 5, 8 mars
s Le Nozze di Figaro (ForemnyFriedrich) – 2, 7 mars
s Les Troyens (Daniel-Pountney) – 30
mars
Staatsoper (49/30.20.35.45.55)
s La Traviata (Hindoyan-Mussbach) –
1er, 4 mars
s Tosca (Ranzani-Riha) – 2, 6, 14 mars
s Le Nozze di Figaro (MouldsLanghoff) – 16, 21, 23, 28 mars
Teatro alla scala
(39/02.720.03.744)
s Il Trovatore (Rustioni-deAna) –
1er, 4, 6, 7 mars
parme
Teatro Regio (39/05.21.20.39.93)
s Les Pêcheurs de perles
Teatro dell’opera
(39/06.48.16.02.55)
s Maometto II (R.Abbado-Pizzi)
– 28, 30 mars
saint-étienne
berlin
milan
Opéra national (04.67.02.02.01)
s L’Etoile (Pillement-Bénichou) – 29,
30 mars
Opéra (04.92.17.40.79)
s Adriana Lecouvreur (Boër-Micheli)
– 16, 18, 20, 22 mars
Teatro La Fenice (39/041.24.24)
s La Traviata (Matheuz-Carsen) – 4, 6,
8 mars
s Il Barbiere di Siviglia (MatheuzMorassi) – 2, 5, 7, 9 mars
s Il Campiello (Romani-Trevisi) – 2, 5,
7, 11 mars
s Elegy for young lovers (Webb-Pizzi)
– 27, 29 mars
Teatro Communale
(39/051.617.42.99)
s Tosca (Veronesi-Abbado) –
1er, 2 mars
ro m e
nice
venise
bologne
Opéra (00.377.98.06.28.28)
s Il Mondo della luna (Rhorer-Sagi) –
21, 23, 25 mars
montpellier
o p é r a
(Fournillier-Sparvoli) – 25, 31
mars
turin
Teatro Regio
(39/011.881.52.41)
s Tosca (Palumbo-Grinda) – 13,
16, 18 mars
s Eine Florentinische Tragödie
/Gianni Schicchi (Reck-Borrelli) –
21, 22, 23, 25, 26, 27, 28, 29, 30
mars
u
a
Komische Oper (49/30.47.99.74.00)
s Serse (Junghänel-Herheim) – 9, 21
mars
s Die Zauberflöte (Poska-Kosky) – 7,
15, 18, 24 mars
s L’Ange de feu (Nanasi-Andrews) – 2
mars
s Iphigénie en Tauride (JunghänelKosky) – 16, 22 mars
s Les Contes d’Hoffmann (MiltonRheinhardt ) – 29 mars
vienne
Staatsoper (43/1514447880)
s Eugène Oneguine (Lange-Richter)
– 7, 10, 14 mars
s Adriana Lecouvreur (Pido-McVicar)
– 4, 8, 12 mars
s Il Barbiere di Siviglia (Garcia CalvoRennert) – 31 mars
s La Bohème (Welser-Möst-Zeffirelli)
– 22, 26, 29 mars
s Wozzeck (Gatti-Dresen) – 23, 27, 30
mars
Theater an der Wien (43/15.88.85)
s Le Nozze di Figaro (Harnoncourt) –
6, 8 mars
s Don Giovanni (Harnoncourt) – 17,
19 mars
s Cosi fan tutte (Harnoncourt) – 27,
29 mars
new york
Metropolitan Opera
(00.1.212.362.60.00)
s The Enchanted
Island (SummersMcDermott) 1er, 5, 8, 12, 15,
20 mars
s La Bohème
(RanzaniZeffirelli) – 19,
22, 26, 29 mars
s
Wozzeck
(Altinoglu-Eyre) –
6, 10, 13, 17, 22
mars
s Le Prince Igor
(NosedaTcherniakov) –
1er, 4, 8 mars
s
Werther
(Altinoglu-Eyre) –
3, 7, 11, 15 mars
s La Sonnambula
(ArmiliatoZimmermann) –
14, 18, 21, 25, 29
mars
s
Andrea
C h é n i e r
(Noseda-Joel) –
24, 28, 31 mars
Susan Graham sera Sycorax dans les représentations de
«The Enchanted Island» au Metropolitan Opera en mars
© Dario Acosta
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gran teatre del liceu, barcelone
teatro comunale de bologne
Un mois après Cendrillon de Massenet où elle interprétait
La Fée, Annick Massis a remporté un vif succès dans un
des sommets du bel canto, La Sonnambula de Bellini, en
alternance avec sa consœur italienne, la soprano
Patrizia Ciofi.
Peu après Mai 68, dans la grande vague des remises
en questions culturelles, quelques épigones de Pierre
Boulez avaient déclaré la mort de l’opéra qualifié
de genre bourgeois passéiste sans avenir. Quelques
décennies plus tard, la popularité du genre ne
s’étant pas démentie, bien au contraire, la
prédiction s’est avérée sans rapport avec la réalité.
La Sonnambula Contre Parsifal
48
Rarement donnée à Barcelone, La Sonnambula de Bellini a fait la joie des
catalans venus découvrir la production de Marco Arturo Marelli déjà présentée à
Vienne et à Paris. Librement inspirée de l'atmosphère délétère qui parcourt les
pages du célèbre roman de Thomas Mann, La Montagne magique, le drame
d'Amina, somnambule accusée à tort d'adultère le jour de ses noces, trouve de
jolies correspondances. Au village tyrolien original, succède l’espace feutré d'un
sanatorium de luxe où se préparent les fiançailles de la douce Amina, ici une
modeste employée, avec un fils de bonne famille. Dénoncée par sa rivale Lisa,
Amina se voit injustement rejetée, jusqu'à ce que son somnambulisme soit
découvert et qu'elle soit publiquement pardonnée. Sommet du bel canto romantique imaginé par Bellini en 1831 et créé à Milan la même année que Norma par
Giuditta Pasta, puis transfiguré au XXème siècle par Maria Callas, ballerine
inégalée dans les sfumature, la cantilène et l'agilité propres à cette école de chant,
La Sonnambula repose, comme souvent dans ce répertoire, sur les épaules de la
soprano. Réputée pour sa grande maîtrise des règles belcantistes, Annick Massis
démontre une fois encore sa parfaite
adéquation stylistique. Dans une forme
vocale impressionnante, la cantatrice
française n'est à aucun moment prise en
défaut, bravant sans effort apparent les
pièges d'une écriture mêlant douceur et
virtuosité, dans un climat baigné de
mélancolie et de poésie. Etonnante dans
l'air d'entrée « Care compagne », délicate aux côtés de son futur mari « Son
geloso del zeffiro errante », elle parvient jusqu'à la cabalette finale à maintenir un même niveau d'exigence musicale et d'élégance, qui plus est à un âge
où bien d'autres ont été contraintes de
baisser la garde.
Ténor prudent, à la technique
encore lacunaire mais consciencieux
dans son approche de la partition, Celso
Albelo est un Elvino en devenir, qu'il
faudrait aider à sortir de sa réserve
«La Sonnambula» © A. Bofill
notamment dans les passages ornementés. Sabina Puertolas, Lisa engagée scéniquement et vocalement, semble promise à un bel avenir, comme Alex Sanmarti, Alessio plus que convaincant, Gemma
Coma-Alabert (la mère d'Amina) poursuivant son joli parcours de mezzo-soprano. Daniel Oren a du métier, aime ses interprètes, mais à trop vouloir les protéger d'éventuelles intempéries, surtout dans les passages rapides, ses tempi s'étirent et sa direction devient émolliente.
En fait, il fallait considérer que le propos concernait avant tout l’opéra en tant que genre musical et s’adressait avant tout aux compositeurs. Toutefois, le succès du genre ne se démentant pas : nouvelles salles (Bastille n’étant qu’un exemple), nouveaux pays (en Asie notamment), nouveaux moyens de diffusion (vidéo, télévision, cinéma…), le
nombre de productions ne cessant de croître, sauf exception dans
quelques régions en crise, il a bien fallu faire appel, en raison de la
demande, à de très nombreuses équipes de néophytes pour monter de
nouvelles productions. Parmi les réalisateurs, très souvent revient le
même leitmotiv, il s’agit d’admettre le fait « de ne rien connaître à l’opéra, mais c’est justement pour cela que c’est intéressant ». Cette attitude très paradoxale peut certes trouver tout son intérêt lorsqu’il s’agit
de traiter des livrets à l’invraisemblance incontestable, ou au contraire
s’il s’agit de monter un opéra dont la trame est très proche d’une œuvre
théâtrale qui l’a inspiré. Parfois même, cela n’est pas contestable, la
vision d’un homme de théâtre peut révéler un aspect négligé d’un livret connu, ou susciter de la curiosité pour une œuvre méconnue.
Toutefois à force de confier n’importe quelle œuvre à n’importe qui, il
est difficile d’éviter les ratages. Il en allait ainsi du pathétique Parsifal
- repris au Teatro Comunale de Bologne après avoir été créé au Théâtre
de la Monnaie de Bruxelles - commis par le sulfureux Romeo
Castellucci, vedette prisée par un certain public branché, dans le genre
trash, autrement dit « regietheater » auf deutsch.
L’accumulation de fantasmes quelque peu nauséeux ainsi que le
fourre-tout vaguement inspiré par des références picturales, à savoir
L’Origine du monde de Courbet et Quarto Stato de Giuseppe Pelizza da
Volpedo (réinterprété par Bernardo Bertolucci dans son film
Novecento), interpelle certes le spectateur mais peut assurément décevoir le mélomane. Dans le cas de cette reprise bolognaise (pour laquelle on conviendra qu’il valait mieux éviter toute référence culinaire), on
ne pouvait que saluer l’abnégation, la constance et l’engagement d’artistes placés sous la direction de Roberto Abbado à la tête de
l’Orchestre et des Chœurs du Teatro Comunale de Bologne. Ces courageux serviteurs (à l’insu de leur plein gré ?) d’un objet scénique n’ayant
guère à voir avec Parsifal méritaient des éloges : l’imposant Andrew
Richards, Parsifal de grande classe aux aigus aisés et puissants, Anna
Larsson, Kundry à la fois sensuelle et émouvante ou encore Lucio
Gallo (Klingsor), Gabor Bretz (Gurnemanz), Detlef Roth (Amfortas) et
Arutjun Kotchinian (Titurel).
Frank Fredenrich
François Lesueur
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hommage à
Claudio Abbado
Le maestro avait accordé un entretien à Scènes Magazine dont nous
publions de larges extraits à l’occasion de sa disparition.
50
Claudio Abbado était lié à la Suisse. Avant
tout à Lucerne. En Suisse Romande, il était venu
en 1997, au festival de musique de Montreux, à
la tête de l’Orchestre Philharmonique de Berlin.
Au programme, la Symphonie inachevée de
Schubert et la Symphonie n°9 de Bruckner.
Etrange coïncidence, on retrouvera ce même programme pour sa dernière apparition publique, le
24 août 2013, au festival de Lucerne. Interprété
cette fois non par le Philharmonique de Berlin
mais par le Lucerne Festival Orchestra, relancé
par lui en 2003, sur le modèle de l’orchestre du
Festival de Lucerne, fondé par Arturo Toscanini
en 1938. Une formation unique et exceptionnelle, comme elle n’existera plus, car elle était constituée pour l’essentiel des chefs de pupitre et
solistes des plus grands orchestres internationaux, qui jouaient en parfaite complicité avec
Abbado. Claudio Abbado nous avait accordé un
entretien qui n’a rien perdu de son actualité.
Claudio Abbado avait succédé en 1989 à
Karajan. Son contrat sera renouvelé jusqu’en
2002, date à laquelle il quittera son poste, laissant
la baguette à Simon Rattle. A ses débuts, le défi
de réussir à la tête du meilleur orchestre du
monde n’était pas gagné d’avance. On peut dire à
présent (en 1997) que son nom fait référence
pour toutes ses interprétations discographiques et
que sa relation avec le Philharmonique de Berlin
est harmonieuse et féconde.
Séduction
De ses origines latines, il avait gardé ce pouvoir de séduction, cet amour presque physique de
la musique et cette générosité de cœur, antidote
contre tout syndrome de tyrannie. Son milieu
d’origine, familial avant tout, marqué par la
résistance au fascisme, n’était d’ailleurs pas
étranger à son orientation politique et artistique.
Compagnon de route des communistes, il n’avait
jamais pris sa carte du Parti, contrairement à son
ami compositeur Luigi Nono. Interrogé sur la
concurrence avec les autres orchestres, Abbado
répondait sans ambages : « je pense qu’on doit
faire le mieux possible mais les mots concurrence, carrière n’existent pas. Il y a l’amour de la
musique et puis on cherche à faire autre chose ».
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Position qui le placait au-dessus de la mêlée avec
un zeste de provocation, quand il ajoutait : « ma
carrière, je ne l’ai pas construite. Ce n’est pas
une carrière. Vous savez, j’habite en Engadine et
parfois, j’ai la chance de descendre à Berlin
pour faire de la musique avec un orchestre à
moi … ». L’Engadine représentait dans sa géographie personnelle un lieu magique, où il se ressourcait volontiers : « c’est formidable, c’est une maison en pierres mais avec une Stube tout en bois de
1600. Il n’y a pas de téléphone, pas de télévision.
Je dois faire le feu le matin, ramasser la neige,
c’est beau, n’est-ce pas ? J’aime venir là pour travailler, étudier les partitions, faire du ski, boire de
la grappa, être avec mes enfants ». Pour parler de
sa carrière, il évoquait ses souvenirs racontés dans
La Casa degli sogni, La Boîte à musique, un filmvideo réalisé par son fils avec l’orchestre de
Gênes : « on m’a demandé d’expliquer aux enfants
ce qu’était la musique pour moi, quand j’étais
enfant. Je suis allé à sept ans à la Scala et j’ai
entendu cette musique de Debussy (les Nocturnes)
mais l’idée , c’était de jouer de la musique et non
pas de la diriger et d’être chef. Après, j’ai appris
le piano, la composition, la direction mais c’était
toujours pour réaliser ce rêve ».
Revenant sur les tractations et les intrigues
entourant la succession de Karajan, il se montrait
discret. Il n’avait jamais fait de forcing mais il
n’était pas non plus le candidat donné favori,
puisque l’industrie musicale avait misé sur des
chefs comme Lorin Maazel, Ricardo Muti ou
James Levine. L’orchestre en a alors décidé
autrement. Depuis 1968, année où il entra
comme directeur musical à la Scala, il fut régulièrement chef invité au Philharmonique de
Berlin. « Pour moi, c’était une faute des maisons
de disques qui ont poussé plusieurs chefs d’orchestre. Moi, j’ai dit non ; j’aime faire de la
musique avec le Philharmonique, je vais continuer, ce n’est pas une question de position dans
la vie. J’ai ensuite appris que les musiciens
avaient voté pour moi, après avoir joué la 3° de
Brahms, qui était un morceau pour l’orchestre ».
Succession redoutable politiquement mais aussi,
par sa culture musicale moderne, Abbado incarnait le contraire de l’imperator. « Ce n’était pas
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un choix contre Karajan. Les musiciens cherchaient aussi quelqu’un qui leur apporterait
humainement autre chose. Karajan, pendant toutes ces années où il a été à Berlin, a fait des choses différentes et je le dis sans aucune connotation polémique, mais formidables. Alors, c’est
vrai, dans les dernières années, il n’y avait plus
le même amour. L’orchestre a aussi cherché quelqu’un qui faisait de la musique moderne, plus de
musique française. Et quand l’orchestre a voté
pour moi, ce sont les mêmes (ceux qui ont été
invités à diriger le Philharmonique) qui m’ont
tout de suite téléphoné pour dire qu’ils étaient
contents ».
A l’écoute des musiciens
« Nous sommes très ouverts pour les programmes. Ce n’est pas facile de gérer cet orchestre, il y a beaucoup trop de solistes pour avoir un
équilibre, mais on se comprend bien car on parle
toujours ensemble pour trouver la meilleure
solution pour l’orchestre. Nous avons fait une
audition pour un nouveau Konzertmeister et à la
fin, il en restait deux que l’orchestre n’arrivait
pas à départager, proposant de garder les deux.
Ce que nous avons fait. Cela vous montre aussi
qu’à Berlin, si on veut faire une chose, on le fait
tout de suite. Une chose pareille serait impossible à Paris, avec le chauvinisme des Français, ou
en Italie, ou même en Angleterre, impossible
pour des raisons économiques. »
Engagement
A la question : Et si on vous promettait de
faire un grand orchestre en Italie, l’équivalent du
Philharmonique, y retourneriez-vous ? Abbado
s’était contenté de rire : « Non merci. Vous savez,
l’Italie est un pays très riche culturellement, mais
l’organisation n’existe pas, la mentalité d’organiser les choses leur fait défaut. Rome c’est une
catastrophe mais c’est dommage car on pourrait y
faire des choses formidables. En Italie, les grands
compositeurs sont du domaine du lyrique et non
symphonique comme celui des Allemands et des
Autrichiens. Il y a de beaux théâtres pour l’opéra
mais aucune salle de concert ». De même lorsqu’on lui demandait pourquoi il n’y a pas de bons
orchestres en France, il répondait : « Pour la même
raison qu’il n’y en a pas non plus en Italie, ni en
Espagne, dans aucun pays latin. Il y a de bons
musiciens solistes, mais la mentalité, la culture
pour jouer ensemble comme en Autriche, en
Allemagne ou en Hollande, n’existe pas. Si un
enfant est préparé pour être soliste, le nouveau
Heifetz, et s’il doit ensuite jouer dans un orchestre, il est frustré et déçu ».
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Claudio Abbado dirigeant le Lucerne Festival Orchestra,au Festival de Lucerne,
en été 2013 © Georg Anderhub / Lucerne Fsetival
Lieu-culte
Il y avait d’abord Milan. Son enfance marquée par un père violoniste et une mère pianiste,
sa jeunesse sauvage et révolutionnaire entouré
d’amis comme Maurizio Pollini et Luigi Nono.
Abbado se montrait agacé toutefois, lorsqu’on
voulait lui faire dire que ses choix musicaux
étaient le résultat d’une prise de position politique. « Si on veut parler de culture politique, je
suis d’accord, par exemple en ouvrant la Scala à
tout le public, ouvriers et étudiants et ne pas
réserver les concerts à une élite. Et je trouve que
c’est juste. Je referais la même chose aujourd’hui, s’il le fallait. C’est pourquoi on a fait des
concerts dans les usines et avec des étudiants.
C’était des choses très importantes en Italie à ce
moment-là. Dans notre famille, nous avons toujours protesté contre l’injustice : ma mère était
en prison, parce que nous avons aidé une famille
juive et moi, j’ai protesté contre le fascisme en
Grèce et en Espagne et avec Barenboïm et
Kubelik, quand les Russes sont entrés à Prague.
Mais les journaux de droite n’en ont pas parlé
car on voulait faire de moi un homme de gauche ». Son engagement politique, il le voyait plutôt dans son parti pris de jouer des compositeurs
du XX° siècle. Il avait créé à Vienne pour le
cycle Wien Modern, un concours de composition : « j’ai dirigé moi-même un morceau du
Suisse Beat Furrer. Il y avait des gens comme
Guarnieri, Marco Stroppa, qui avaient été plusieurs années à l’Ircam avec Boulez. C’est difficile de comprendre aujourd’hui lesquels sont les
meilleurs. Je n’aime pas la mentalité des gens
qui ne veulent pas ouvrir la porte pour comprendre ce qu’il y a derrière, il y a toujours quelque
chose de nouveau ».
Voyages
Quittant Milan, Abbado est parti pour
Vienne, où il travailla avec le pianiste Friedrich
Gulda et le chef d’orchestre Hans Swarowski,
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assista à des répétitions de Bruno Walter et Karl
Boehm et chanta dans les chœurs avec Zubin
Mehta. « Il y avait un professeur formidable mais
surtout une vie musicale très intéressante. Rien
que d’aller dans la rue et regarder les funérailles
accompagnées d’un ensemble de musiciens viennois qui joue, c’est déjà une symphonie de
Mahler. Il y a par contre plus d’intrigues à
Vienne qu’à Berlin, où les gens sont plus directs.
A vienne, c’est toujours bien, on dit oui par
devant, mais par derrière… On ne doit jamais
rien croire à Vienne ».
Après Vienne, Abbado s’est rendu à
Londres et il a pris la tête du London Symphony
Orchestra, créant en 1985 un festival Mahler.
Mais c’est Berlin avec cet énorme potentiel, sa
disponibilité, qui l’enthousiasma le plus. « Berlin
aujourd’hui n’est pas une ville allemande. Il y a
cette tradition d’avant la guerre et pendant quarante ans la présence des Américains, des
Français, des Russes en a fait comme une île
internationale. Ce qu’on fait à Berlin pour la
culture est exceptionnel et unique en Europe. J’ai
compris l’importance qu’il y avait à mettre sur
pied des projets culturels autour d’un cycle
réunissant les acteurs, les orchestres, les opéras,
les musées ». Il a ainsi créé un cycle Hölderlin,
Prométhée, Faust et Shakespeare. Qui a vu diriger Abbado, sait qu’il dirigeait par cœur. « Pour
moi, si je ne connais pas par cœur la partition,
c’est que je ne la connais pas. De plus, il y a le
contact avec les solistes et les musiciens.
Toscanini chez qui j’ai souvent été autrefois,
avait des problèmes d’yeux mais ne dirigeait
jamais avec des lunettes car il pensait que c’était
plus important que les musiciens puissent voir
ses yeux et comprenaient s’il était content ou
fâché. Il y a bien sûr des partitions plus difficiles
que d’autres mais je crois qu’un des compositeurs les plus difficiles à diriger reste Mozart…et
là, c’était très important pour moi de travailler
avec Rudolf Serkin. C’est un des plus grands
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génies et les génies sont difficiles. Mais aussi
Bach, Beethoven, tous les grands classiques
demandent du temps à être étudiés. » Abbado
réagissait cependant violemment à toute forme
de nationalisme culturel et avait tendance à croire que c’était une habitude française de penser
que la musique française n’est bien jouée que par
les Français. « Ce sont des clichés. J’ai vu des
Shakespeare magnifiques à Londres mais le plus
bel Hamlet, je l’ai vu à Moscou avec Lioubimov,
les plus beaux Tristan, je les ai entendus avec de
Sabata, les plus beaux Othello avec Furtwängler.
Et moi, je dirige la musique russe et je ne suis
pas Russe. Si on a la passion, l’amour de comprendre la culture des autres pays, il n’y a pas de
limite. Il y a des limites, quand on ne veut comprendre que la culture de son pays ». En parlant
de son esprit d’ouverture, de curiosité, la presse
allemande l’a baptisé Schatzgräber. « Pas seulement dans la musique, revendique-t-il. J’ai trouvé l’origine du nom de notre famille, d’origine
espagnole mauresque. Le nom vient d’abbade,
mes ancêtres ont construit la casa de Sevilla et
dans la troisième génération, il y avait un grand
poète, qui est venu en Italie vers 1040 ».
Elixir de jeunesse
Jusqu’au moment de sa maladie en 2000, la
question de son éternelle jeunesse et de son énergie inépuisable était presque inévitable. Il se réfèrait alors au Jugend Mahler Orchester, une formidable drogue pour le maintenir en forme et qui lui
injectait cet élixir de jeunesse. « C’est superbe de
travailler avec ces jeunes de toute l’Europe. Ils
n’ont pas d’expérience mais je n’ai jamais un mot
à dire pour la discipline ; ils ne sont pas liés, ils
sont libres, mais il y a un respect réciproque. On
peut expérimenter des choses folles, très intéressantes, différentes sur le plan de l’interprétation.
Il n’y a pas de problème économiques, ni syndicaux, tout le monde travaille pour l’amour de la
musique ». Cet amour de la musique, il avait su
le transmettre à toute une génération de musiciens
qu’il retrouvait régulièrement dans une des nombreuses formations qu’il avait créées. Que ce soit
l’European Youth Community Orchestra (en
1978), le Mozart Orchestra (en 2004) et bien sûr le
joyau de sa couronne le Lucerne festival Orchestra
(en 2003), tous sont orphelins d’un chef des plus
charismatiques de notre temps.
Propos recueillis par Régine Kopp
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migros «pour-cent-culturel»
Entre cultures
et générations
Le «Pour-cent culturel» offre à trois villes suisses une tournée qui conjugue
romantisme et découverte. Musiciens canadiens, compositeurs germaniques
et chef américain aux origines japonaises s’y rencontrent. A l’affiche
également, une page contemporaine suisse dédiée à Kent Nagano.
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Kent Nagano
Si la carrière de Kent Nagano a débuté par
une rencontre transfigurante avec Olivier
Messiaen, le maestro est resté marqué à vie par
une soif de découvertes et d'explorations de la
musique contemporaine, déclenchée à cette
période décisive de sa vie. Enfant, dans sa petite ville californienne, il rêvait déjà de partir à la
conquête du monde grâce à la musique, un vrai
rêve américain. Après avoir exercé sa baguette
auprès de quelques opéras de renom (Boston,
Lyon et Munich), Kent Nagano a pris la tête de
l’Orchestre Symphonique de Montréal en 2006
(il avait œuvré comme conseiller musical de la
formation). Quelques années plus tard — riches
en concerts, tournées et enregistrements —,
devenu un personnage largement apprécié au
Canada, il a reçu de nombreuses récompenses:
le 7 novembre 2013, Kent Nagano est fait
Grand Officier de l'Ordre national du Québec.
Mais à soixante ans à peine, il est loin de songer
a
à une retraite dorée… Il reste encore tellement
de terrains vierges à explorer... d’autant plus
que de nouveaux talents affluent, « encore
mieux éduqués et techniquement plus avancés »
qu’à l’époque où lui-même débutait. L’avenir
de la musique classique ne le préoccupe pas:
dans ce domaine, « il y aura toujours de l’eau
fraîche » affirme-t-il lors d’une interview filmée accordée lors de son dernier passage au
Festival de Verbier.
Adagio de Hefti
David Philip Hefti est un Saint-Gallois qui
a étudié la composition, la direction d’orchestre,
la clarinette et la musique de chambre à Zurich
et Karlsruhe; c'est un habitué des festivals et
collaborateur proche de phalanges germaniques
réputées, mais également de la Sinfonietta de
Tokyo et de l’Orchestre Symphonique de
Montréal…. Lauréat de prestigieuses récom-
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penses (Prix Gustav Mahler à Vienne, Pablo
Casals à Prades, George Enescu à Bucarest et
prix de la Fondation Ernst von Siemens) il
dédie, à la veille de ses 40 ans, son œuvre la
plus récente à Kent Nagano.
Qu’allons-nous entendre lors de ce
concert ? Des opus précédents — souvent des
commandes sur mesure — avaient révélé un
style original, explorant contrastes dynamiques
et luminosité sonore; ce style appartient à un
concepteur exigeant envers lui-même et ses
interprètes, mais aussi envers son public. Pour
ce compositeur, un silence religieux dans le
public est une meilleure récompense que des
applaudissements mécaniques, parfois trop
enthousiastes à la fin du concert. Y a-t-il dans
cette attente d’un accueil sobre et recueilli
quelque chose de … japonais ? La soirée nous
le dira… Comme dirait le maestro: « quoi de
plus excitant que de combiner notre expérience
avec la force, l’énergie et la maîtrise technique
de la jeune génération ».
La musique classique a de l’avenir, et Kent
Nagano veut contribuer à cela!
Beata Zakes
A Genève au Victoria Hall le 13 mars 2014 (Tonhalle
Zürich, 11 mars 2014; Berne Kulturcasino le 12 mars).
Au programme: œuvres de Wagner, Liszt (concerto pour
piano n° 2, en soliste MARC-ANDRé HAMELIN) Berlioz et
David Philip Hefti, commandée par le «Pour-cent culturel», Adagio — Beziehungsweisen für Orchester, première
mondiale à la Maison Symphonique à Montréal, les 4 et
5 mars.
Information et réservation +41 22 319 61 11
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man ! La violoncelliste pousse ses collègues à
se libérer de toute forme d'inhibition ! Pour ce
qui est de Franz Schubert, la conception de ces
chambristes est toujours engagée. Leur interprétation de La jeune fille et la mort est expressive,
exempte de résignation. Signalons enfin la chaleur qui se dégage de l'instrument de Mischa
Amory, altiste.
quatuor brentano à genève
Des traits bien
dessinés !
Collaborations
L'excellence et une recherche constante de nouveaux horizons sonores
caractérisent une formation américaine de passage à Genève.
Quatre anciens élèves de la Julliard School
de New York se construisent depuis environ
vingt ans un répertoire où la tradition fait bon
voisinage avec la modernité.
Très engagés dans leur interprétation, ils
ont choisi pour nom celui de Antonie Brentano,
que d'aucuns estiment être la destinataire de la
lettre de Beethoven « à l'immortelle bienaimée ». Ce clin d'œil au musicien de Bonn n'est
pas fortuit, puisque les interprètes ont souvent
défendu sa production avec talent. Ils considèrent d'ailleurs le mouvement lent de l'Opus 135
comme la quintessence du genre; la page exprime des sentiments d'amour et de vulnérabilité,
et plus généralement toute l'humanité d'un être
qui écrit, mais avec lequel - pour des raisons
évidentes - ils n'ont jamais pu directement communiquer !
Soucieux d'aborder le monde du quatuor
dès ses fondements, ils ont fait de la production
de Haydn, celui qu'on présente toujours comme
le père du genre, leur fonds de commerce. Pour
autant, ils ne se produisent pas avec des instruments d'époque. Mark Steinberg, le premier
violon estime que, pour eux, la différence n'est
pas aussi essentielle que pour les instruments à
clavier, et de toute façon, « avec nos cordes
modernes, nous sommes capables de saisir l'essence de ce qui était destiné aux instruments de
l'époque. » D'après Serena Canin (second violon) « il est difficile, voire insensé, d'avoir une
préférence pour un numéro. Il y a une telle
inventivité et une telle variété. Impossible se
tromper avec Haydn ! » Cette concertiste, au jeu
posé, offre un contrepoint subtil à l'art élégant
de Mark Steinberg. Son archet agile dessine
toujours un léger et fin vibrato, caractéristique.
Il fait merveille dans l'art de Mendelssohn, que
Serena Canin considère également comme l'un
des favoris du groupe : « Sa musique a de la vie
et de la spontanéité. J'y trouve beaucoup d'exubérance et de joie. » De l'exubérance, on en
repère dans la sonorité de Nina Maria Lee.
Enfant, elle rêvait de devenir une wonderwo-
Ces interprètes refusent de se confiner dans
des niches sonores, pour reprendre un terme du
premier violon. « Nous aimons aussi servir des
œuvres de commande ! » C'est ainsi que dans
leur programme figurent les noms d'Elliot
Carter, Steven Mackey, ou György Kurtag. Les
concertistes ont même fait appel à des arrangeurs, pour offrir au public des relectures pour
le moins surprenantes : Charles Wuoren a
réécrit pour la formation des pages de Josquin
des Prés, Bruce Adolphe des madrigaux de
Monteverdi !
En 2013 sortait Le Quatuor, un film de
Yaron Zilberman. Dans ce décor new-yorkais,
sur fond de neige, le long-métrage débute par la
nouvelle que le violoncelliste est atteint par la
maladie de Parkinson. Que va devenir l'ensemble ? Comment la longue amitié entre les artistes va-t-elle tenir ?
Derrière la performance des acteurs, qui
dessinent un drame, le Quatuor Brentano offre
un écho sonore fort, en jouant l'opus 131 de
Beethoven. La capacité des interprètes se trouve aussi mise en scène, et la réalisation de ce
projet illustre bien le goût du challenge qui
caractérise ces concertistes.
Pierre Jaquet
Mark Steinberg, Serena Canin (violons), Misha Amory
(alto), Nina Maria Lee (violoncelle)
«Temps et Musique», le 17 mars à 20h 00 au
Conservatoire de Musique, Pl. Neuve 1 - 1204 Genève
Programme:
Mozart: Quatuor à cordes en ré majeur, K.575
Chostakovitch: Quatuor à cordes N°11 en fa mineur,
op.122
Beethoven: Quatuor à cordes N°8 en mi mineur, op. 59
N°2
Site internet: http://www.brentanoquartet.com
Quatuor Brentano
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Menahem Pressler se voit offrir un poste de pianiste et professeur en résidence à l’Université
de Bloomington, qu’il accepte, sans toutefois
abandonner les masterclasses qu’il donne un
peu partout dans le monde.
récital au victoria hall
Menahem Pressler
Le doyen des pianistes en activité donnera un récital au Victoria Hall
le 24 mars à 20h. dans la série des Grands Interprètes. Après dix ans de
succès personnels, il fut à l’origine du légendaire Beaux-Arts Trio, créé en
1955 et dissous en 2008 après le départ du violoniste Daniel Hope, membre
du groupe depuis 2002.
Aujourd’hui encore Menahem Pressler
poursuit sa carrière mondiale de récitaliste, de
chambriste, et de concertiste avec les meilleurs
orchestres d’Europe et des Etats-Unis, tout en
enseignant à l’Université de Bloomington
(Indiana), ainsi que dans le cadre de nombreuses masterclasses.
Sa réputation de pédagogue est à la hauteur
de celle de musicien.
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Portrait
Né en 1923 d’un père tailleur et violoniste
amateur et d’une « yiddish mama » il passa son
enfance à Magdebourg, étudiant à la fois le violon et le piano. Lorsqu’il fut renvoyé de son
école en 1938, parce que juif, la famille décida
de se réfugier à Tel Aviv, où il continua l’apprentissage du piano auprès d’Eliyahu
Rudiakow, bientôt remplacé par Leo
Kerstenberg, qui avait été l’élève du compositeur Ferruccio Busoni. Désireux de tenter sa
chance au Concours Debussy de San Francisco,
il travaille brièvement les Préludes avec Paul
Loyonnet et peu de temps après, en 1946, il
remporte le premier prix. Suivent ses débuts au
Carnegie Hall de New York dans le concerto de
Schumann avec l’Orchestre de Philadelphie
sous la direction d’Eugene Ormandy. C’est à
New York aussi, en 1955, qu’il rencontre le violoniste Daniel Guilet 1 (né Guilevitch en
Russie) et le violoncelliste américain Bernard
Greenhouse 2, tous deux solistes du NBC
Orchestra que dirige Toscanini. Il leur propose
un enregistrement des trios de Mozart.
Quelques concerts plus tard, le Beaux-Arts Trio
débute au Festival de Tanglewood. Par ailleurs,
Collaborations
Il a également collaboré avec d’autres célèbres formations de chambre : les quatuors
Juilliard, Emerson, Guarneri, Cleveland, l’Israël
Quartet, le trio Pasquier. Il siège de plus dans les
jurys de maints concours.
Le pianiste a été honoré de multiples
façons, notamment en étant nommé membre de
l’American Academy of Arts and Sciences ou
en recevant le titre de Commandeur dans l’ordre des Arts et Lettres en France.
Cinquante enregistrements avec le BeauxArts Trio et environ trente en tant que soliste
sont les témoins de son exceptionnel talent. Sur
le dernier en date figurent la sonate No 18 en sol
majeur de Schubert, les Bagatelles op. 126 de
Beethoven et le Rondo en la mineur de Mozart,
A Genève Menahem Pressler jouera la
sonate No 18 en sol majeur « Fantaisie » (op.78)
de Schubert ainsi que la Sonate No 21 en si
bémol majeur, dernière sonate du même compositeur, que le pianiste, à 90 ans, n’a certainement
pas choisie par hasard. On a dit avec raison que
sa sonorité rappelle celle de Wilhelm Kempff
dans ce répertoire.
Il interprétera entre les deux
sonates l’Impromptu-all’ongherese
écrit pour lui par György Kurtag.
Martine Duruz
1 Daniel Guilet s’est retiré en 1969 ; il est
décédé en 1990 à l’âge de 91 ans.
2 Bernard Greenhouse a quitté le Trio en
1987 ; il est mort en 2011, à l’âge de 95 ans.
24 mars : Les Grands Interprètes. Menahem
Pressler, piano; dir. Romain Mayor
(Schubert, Kurtag). Victoria Hall à 20h (tél.
022/322.22.40 ou : [email protected])
Menahem Pressler lors du Festival de Verbier, en été 2013 © Aline Paley
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portrait
Karl Anton
Rickenbacher
Le chef d’orchestre Karl Anton Rickenbacher sera à la tête de l’Orchestre
de la Haute Ecole de Musique de Genève (HEM) le dimanche 16 mars à
17h au Victoria Hall, dans un programme de haute tenue comportant les
Métamorphoses (1945) de Richard Strauss, Les Offrandes oubliées (1930)
composées par Olivier Messiaen à l’âge de vingt-deux ans, ainsi que
Totenfeier, sorte de grandiose marche funèbre datant de 1888 qui,
remaniée, deviendra le premier mouvement de la 2e symphonie
« Résurrection » de Gustav Mahler.
Une précieuse opportunité pour ces jeunes
musiciens de tirer le meilleur profit de l’immense expérience d’un chef qui est un éminent
connaisseur de l’œuvre de Richard Strauss et a
côtoyé quelques-uns des plus importants compositeurs de la seconde moitié du XXe siècle,
Messiaen et Boulez en tête.
vivants. Protégé d’Otto Klemperer, il entretient
aussi d’étroites relations avec Olivier Messiaen,
auquel il consacrera une étude très fouillée, et
avec Pierre Boulez, qui a, dit-il, exercé une
influence déterminante sur sa manière de travailler.
Parcours
Né à Bâle, où il sera élève
du pianiste Charles Dobler à la
Musikakademie de cette ville,
Karl Anton Rickenbacher poursuit ses études au Conservatoire
de Berlin, où il bénéficie entre
autres de l’enseignement de
Herbert von Karajan, avant de
revenir dans sa ville natale suivre en 1965 les cours de direction
de Pierre Boulez. Il fait ses
débuts comme répétiteur et
assistant du chef de chœur à
l’Opéra de Zurich de 1966 à
1969. Sa carrière se poursuit
comme Kapellmeister à
Karlsruhe, Munich et Berlin. Il passe ensuite
neuf ans à la tête de l’Orchestre de Westphalie,
où il se familiarise avec tout le grand répertoire
symphonique, puis trois aux commandes du
BBC Scottisch Symphony Orchestra. Invité à
conduire les grandes formations du continent, il
renonce pourtant à un poste de directeur permanent, rebuté par les charges administratives
qu’une telle fonction comporte, pour mener
tout au long de sa carrière une activité de chef
invité, se consacrant plus particulièrement à la
défense d’œuvres injustement oubliées de compositeurs du passé et à celles des compositeurs
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Karl Anton Rickenbacher © Nicolas Brodard
Il faut reconnaître enfin au Montreusien
d’adoption qu’est Karl Anton Rickenbacher le
grand mérite d’avoir remis sur les rails un
« Septembre musical » de la Riviera vaudoise
alors moribond en en assurant la programmation de 2002 à 2004.
Repères discographiques
(non exhaustifs)
Le legs discographique de Karl Anton
Rickenbacher témoigne de l’insatiable curiosité
de ce chef pour redonner vie à certaines œuvres
de grands compositeurs négligées à tort selon
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lui ou, à l’inverse, à des partitions de valeur
jamais jouées de compositeurs de moindre
importance.
Pour le label Koch Schwann, K.A.
Rickenbacher a enregistré à Berlin, Munich et
Bamberg, entre 1997 et 2000, 14 CD d’œuvres
méconnues de Richard Strauss, dont les 2
symphonies de jeunesse pour grand orchestre, et
les deux œuvres concertantes pour la main gauche écrites pour Paul Wittgenstein, avec la pianiste Anna Gourari et les Bamberger
Symphoniker.
Chez le même éditeur, on trouve les 6
Petites Symphonies, 3 Opéras-Minute, et les
Saudades do Brasil de Darius Milhaud, des
pages de Schrecker, de Hindemith, de
Humperdinck (les 2 Shakespeare Suiten), de
Grieg (la Symphonie en ut mineur), de Liszt,
les 2 Cantates sur la mort de Joseph II et sur
l’avènement de Léopold II de Beethoven, et
deux symphonies de Karl Amadeus
Hartmann. Un compositeur dont K.A.
Rickenbacher souligne l’importance, le considérant comme le véritable continuateur de
Mahler au XXe siècle.
Chez Koch également, et avec Peter
Ustinov comme narrateur (en allemand), le
Carnaval des animaux
de Saint-Saëns, complété sur le même CD
par la Cinderella Suite
d’Eugen D’Albert.
K.A.Rickenbacher
a également enregistré
les 4 symphonies de
Brahms
avec
l’Orchestre symphonique de Budapest, et
surtout quelques-unes
des grandes œuvres du
compositeur qu’il a
sans doute le mieux connu, Olivier Messiaen.
Yves Allaz
16 mars : Orchestre de la Haute école de musique de
Genève, dir. Karl Anton Rickenbacher (R. Strauss,
Messiaen, Mahler). Victoria Hall à 11h
Rens. 0800.418.418, billets : Espace Ville de Genève,
Alhambra, Grütli / tél. 022/311.80.52
email : http://billetterie-culture.ville-ge.ch
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scènes de mars
Agenda genevois
Le mois de mars sera chargé sur la
scène du Grand Théâtre de Genève :
Nabucco, rarement monté dans la cité de
Calvin, sera à l’affiche du 28 février au 10
mars. Dans une mise en scène de Roland
Aeschliman, Lucio Gallo et Roman
Burdenko seront tour à tour Nabucco, tandis que Roberto Scandiuzzi et Almas Svilpa
se partageront le rôle de Zaccaria et que
Csilla Boross et Elizabeth Blancke-Biggs
interpréteront Abigaille. Dans la fosse,
l’Orchestre de la Suisse Romande sera dirigée par John Fiore. Pour continuer ensuite
les célébrations wagnériennes de la saison,
un spectacle sur Siegfried arrangé par Peter
Larsen sera proposé les 21 et 22 mars : la
troupe des chanteurs en résidence sera alors
dirigée par Philippe Béran. Enfin, Jonas
Kaufmann, accompagné par Helmut
Deutsch, viendra dire se adieux à l’hiver
avec le Winterreise de Schubert, toujours
sur la scène du Grand Théâtre, le dimanche 30
mars.
L’Orchestre de la Suisse Romande sera au
Victoria Hall les 12 et 14 mars prochains avec à
sa tête Neeme Järvi. Vadim Repin et Truls
Mork, violoncelle, interpréteront alors le
Double concerto de Brahms. L’Orchestre
Symphonique de Montréal rendra visite au
Victoria Hall le 13 mars, avec à sa tête Kent
Nagano ; le pianiste Marc-André Hamelin
sera également de la partie, pour interpréter
le Concerto pour piano No 2 de Liszt. Au
programme de cette même soirée : la
Symphonie fantastique de Berlioz, une création mondiale de Hefti ainsi que le Prélude
de Parsifal.
Au Forum Meyrin, Philippe Béran propose de faire découvrir la forme concerto
avec la collaboration de l’Orchestre de
Chambre de Genève : rendez-vous donc le
jeudi 13 mars pour cette traversée des styles
et des époques.
Au Conservatoire de Musique, le 17
mars, Mozart, Chostakovitch et Beethoven
seront servis par le Quatuor Brentano,
invité par Temps & Musique.
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Maxim Vengerov
Au Musée d’Art et d’Histoire, les 14 et 16
mars, le Geneva Camerata propose pour sa part
l’intégrale des six Concertos brandebourgeois
de Bach. Le même ensemble propose, le 10
mars, un concert sauvage dédié à «Un violoncelle fou» qui permettra d’entendre des œuvres
de Machat, Catherin, Monteverdi ou Merula; le
15 mars, le concert en famille du Geneva
Camerata se penchera sur «Le Monde de
Mozart». Enfin, le concert du 20 mars, dirigé
par David Greilsammer, offrira un programme
«Au Cœur du Printemps».
Notons encore la venue du violoniste
Maxim Vengerov, au Victoria Hall, le 8 mars
avec les solistes de l’Académie Menuhin,
pour un programme bariolé allant de Bach à
Piazzola. La série Classiques Alternances
invite à écouter des sonates pour piano et
violoncelle le 18 mars, toujours au Victoria
Hall : Silvia Chiesa et Maurizio Baglini
interpréteront des œuvres de Brahms,
Schubert et Rachmaninov.
L’Orchestre des Nations Unies, dirigé
par Antoine Marguier, en présence de la pianiste Elisso Bolkvadze, offrira un concert le
21 mars, avec au programme notamment la
sixième de Dvorák. Enfin, l’Orchestre
National de Lyon sera de passage à Genève
pour exécuter des œuvres de Debussy et de
Takemitsu le 30 mars, tandis que le San
Francisco Symphony se produira le 20 du
mois : Michael Tilson Thomas dirigera la
Symphonie No 3 de Mahler.
La série Jazz Classics invite le saxophoniste Joshua Redman le mardi 4 mars, puis la
pianiste japonaise Hiromi le vendredi 28
mars.
Le Quatuor Schuman sera le 30 mars au
Musée d’Art et d’Histoire pour un programme
Mozart et Fauré.
N’oublions pas le concert StraussMessiaen-Mahler du 16 mars, donné par
l’Orchestre de la Haute Ecole de Musique de
Genève placé sous la direction de Karl
Anton Rickenbacher.
Les amateurs de musiques d’aujourd’hui seront comblés grâce au Festival
Archipel qui se tiendra dans diverses salles
du canton du 21 au 30 mars : le programme
complet sur www.archipel.org.
L’ensemble Contrechamps propose
pour sa part une soirée Holliger le 9 mars à
l’Espace Fusterie, ainsi qu’une exploration
de « Chronos et Thanatos » le 21 mars, à la
Salle communale de Plainpalais.
Remarquons enfin le récital que le pianiste
Menahem Pressler offrira au Victoria Hall
le 24 mars prochain, avec des œuvres de
Schubert et Kurtág.
Martina Díaz
Michael Tilson Thomas
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portrait
Bertrand de Billy
Pour son 5e Concert du Dimanche de la saison, le 9 mars à 11h15 à la Salle
Métropole, l’Orchestre de Chambre de Lausanne aura à sa tête Bertrand
de Billy, son principal chef invité de 2013 à 2016. Au programme figureront les deux Konzertstücke pour clarinette, cor de basset et orchestre
(1833) de Félix Mendelssohn, ainsi que l’unique Symphonie(1815) de Luigi
Cherubini. Les solistes du concert seront les deux clarinettistes de l’OCL,
Davide Bandieri et Curzio Petraglio.
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Né à Paris en 1965, violoniste de formation, élève de Jacques Castérède en classe d’analyse et de Pierre Dervaux dont il deviendra
l’assistant de direction à l’Orchestre Colonne,
Bertrand de Billy est appelé un jour fortuitement à faire un remplacement à Dessau, où on
lui propose aussitôt un contrat de 2 ans de chef
assistant au Anhaltisches Theater. Il accepte et
passe finalement trois ans dans cette ville de
Saxe-Anhalt. « La meilleure décision de ma
vie », avouera-t-il plus tard. En effet, c’est à
Dessau, à l’abri des pressions médiatiques et
des agences, que Bertrand de Billy apprend
véritablement son métier de chef. Il y conduit
opéras et concerts symphoniques à un rythme
soutenu, avant d’obtenir en 1996 un poste de
directeur musical adjoint au Volksoper de
Vienne.
Carrière internationale
fait jouer aussi bien Mozart que Dutilleux,
encore peu connu à Vienne. En 2010, lors de
son premier concert avec l’Orchestre de Paris, il
est vu comme « le plus viennois des chefs français » au terme de dix années passées à la tête
du RSO Wien.
Mais en cette même année 2010, alors qu’il
a déjà dirigé Tristan und Isolde et la Tétralogie
de Wagner et conduit avec succès des formations prestigieuses, en Europe et aux USA, et
que des propositions alléchantes lui sont faites,
Bertrand de Billy, à 45 ans, soucieux de prendre un peu de recul, de mettre un peu de distance
par rapport à une carrière qui s’est développée
jusque-là à une vitesse fulgurante, décide de
s’accorder un temps de réflexion, de « faire une
mise à plat », selon ses propres termes.
Et aujourd’hui encore, Bertrand de Billy
continue de mener une existence de chef itiné-
C’est alors que s’ouvrent à lui
les portes d’une carrière internationale. Il est invité à Covent Garden à
Londres, à l’Opéra Bastille à Paris,
au Théâtre de la Monnaie à
Bruxelles, au Grand Théâtre de
Genève (Les Contes d’Hoffmann en
2001) et fait des débuts couronnés de
succès aux USA. En 1999, il devient
directeur musical du Liceu de
Barcelone reconstruit après l’incendie de 1994, avec la lourde charge
d’en recréer la structure musicale.
En parallèle, sa carrière se poursuit à
Vienne, où il entretient une relation
privilégiée avec le théâtre An der
Wien et le Staatsoper. En 2002, il est
nommé directeur de l’ORF RadioSymphonieorchester Wien, une formation vouée essentiellement à la
musique contemporaine, à laquelle il
rant, sans poste fixe, avec toutefois de solides
ancrages à Vienne, Munich et Francfort, où il
est depuis 2013 premier chef invité de l’Opéra
et du Museumsorchester. A Lausanne, entre
Falstaff en février à Francfort, Lohengrin et
Faust à Vienne, Simon Boccanegra à Munich en
avril et Arabella de Strauss en mai à Tokyo,
Bertrand de Billy mettra sa baguette tout en
finesse au service d’une Symphonie en ré
majeur de Cherubini bien connue des discophiles grâce à la fameuse gravure historique qu’en
avait réalisée en son temps Arturo Toscanini et
son orchestre de la NBC, à New York, au
Carnegie Hall, en 1952.
Bertrand de Billy et l’opéra,
en DVD :
Verdi :
- Don Carlos au Wiener Staatsoper, version
intégrale en 5 actes et en français ; mise en
scène de Peter Konwitschny (2004)
Wagner :
- la Tétralogie au Liceu de Barcelone ; reprise
en 2003/4 de la mise en scène de Harry
Kupfer à Bayreuth en 1988
- Tristan und Isolde au Liceu de Barcelone
(2005) ; m.sc. Alfred Kirchner
Mozart :
- Don Giovanni au Liceu de Barcelone ; m.sc.
Calixto Bieito (2002)
- Don Giovanni au Festival de Salzbourg : m.sc.
Claus Guth (2008)
Donizetti :
- Lucrezia Borgia au Nationaltheater de Munich
(2009) ; m.sc. Christof Loy
Debussy :
- Pelléas et Mélisande au
Theater an der Wien (2009) ;
m.sc. Laurent Pelly
Thomas :
- Hamlet au Liceu de Barcelone
(2003) ; m.sc.Caurier & Leiser
Massenet :
- Cendrillon au Royal Opera
House, Covent Garden (2011) ;
m.sc. Pelly.
Yves Allaz
Billetterie OCL : Rue Saint-Laurent 19
021 345 00 25
www.ocl.ch
Bertrand de Billy © Marco Borggreve
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chronique lyonnaise
Orchestre de Lyon
Et si, pour les Genevois, l’Orchestre national de Lyon était le grand voisin
méconnu ? Dans la carte des grands orchestres européens, c’est à qui serait
le plus ancien, jusqu’à friser le ridicule : hormis le nom, existe-t-il un lien
entre l’admirable et actuelle Staatskapelle de Dresde, et la chapelle
musicale que Schütz dirigea au XVIIe siècle ? Non. Et, dans cette sotte
course au pedigree, des orchestres assez récents, tel le Philharmonia
Orchestra, l’emportent sur bien des phalanges historiques.
En 1905, GeorgesMartin
Witkowski
(1867-1943) fonda la
Société des Grands
Concerts de Lyon. En
1969, la Ville de Lyon
apporta la permanence à
cette phalange qui, en
1972, reçut la dénomination d’Orchestre national de Lyon. Depuis
1975, l’OnL répète et
joue dans « sa » salle,
toute de largeur et de
plaisante acoustique,
l’Auditorium de Lyon, et
dont les 2’100 places
sont à la mesure de la
métropole lyonnaise.
Administré par la Ville
de Lyon, il a, pour autres
partenaires publics, le
Ministère de la Culture
et la Région RhôneAlpes. Depuis que, en
1983, l’Opéra de Lyon a créé sa propre phalange, l’OnL et sa centaine d’instrumentistes se
vouent exclusivement au concert. Ses directeurs
musicaux successifs ont été Serge Baudo (19711987), Emmanuel Krivine (1987-2000), David
Robertson (2000-2004) et Jun Märkl (20052011) ; depuis 2011 et au moins jusqu’en 2017,
Leonard Slatkin en est le patron.
Un orchestre ambitieux
Sur la carte française, l’Orchestre national
de Lyon tient son haut rang, à égal statut avec
les quatre orchestres parisiens (Orchestre de
l’Opéra national de Paris, Orchestre de Paris,
Orchestre philharmonique de Radio France et
Orchestre national de France) et avec son alter
ego en région, l’Orchestre national du Capitole
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Claude Debussy et Toru Takemitsu (avec biwa
et shakuhachi). Ce programme illustre l’attention que l’OnL porte aux compositeurs de notre
temps (Luciano Berio, Pascal Dusapin, Michael
Jarrell, Steve Reich), dont il donne des premières auditions mondiales. Au cours de cette saison, il accueille Kaija Saariaho comme compositrice associée.
Les musiciens de l’Orchestre national de
Lyon avec lesquels nous avons récemment
conversé s’impatientent de découvrir le Victoria
Hall, sa fameuse acoustique et son public généreux.
Deux lumineux et
récents concerts
Eivind Gullberg Jensen © Mat Hennek
de Toulouse. Et sur la carte européenne, les
solistes (Argerich, Lupu, Mørk, Repin ou
Zimerman) et chefs (Armin Jordan et Neeme
Järvi, mais aussi John-Eliot Gardiner, Alan
Gilbert, Marek Janowski ou Christian
Zacharias) qu’il a invités plaident pour lui.
Enfin, avec des intégrales Berlioz, Debussy et
Ravel, une ample politique d’enregistrement
chez Naxos complète ce portrait d’un orchestre
ambitieux.
Depuis 1979, l’Orchestre national de Lyon
effectue de fréquentes tournées internationales,
témoins la Chine et le Japon visités lors de cette
saison, et sans oublier Genève et son fameux
Victoria Hall, le dimanche 30 mars. Coloré de
ses récents séjours nippons, ce concert, dirigé
par Eivind Gullberg-Jensen, mettra en regard
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L’Orchestre national de
Lyon développe une intelligente politique de chefs invités.
Lors de la saison passée, dirigeant une lyrique et ductile
Symphonie n°8 de Bruckner,
Stanisław Skrowaczewski laissa l’auditoire ébahi, et, à lui
seul, exprima toutes les tragédies que connut l’Europe au
XXe siècle. Quant à cette saison, deux grandes baguettes
finlandaises y ont déjà fait
merveille. Le 14 décembre,
Jukka-Pekka Saraste a révélé
un Oiseau de feu décalé : l’usuel conte russe laissa la place
à un récit épique, chatoyant et
palpitant ; dans les espaces
intérieurs ainsi découverts, les
solistes de l’OnL ont offert le
plus fruité de leur travail. Et le
25 janvier, le trop rare Osmo
Vänskä et l’OnL ont montré trois visages complémentaires : le plein art symphonique allemand (Don Juan de Richard Strauss) ; un esprit
chambriste et souple (Concerto pour flûte n°1
de Mozart) ; et une expérience rhapsodique,
avec une « Nouveau monde » de Dvořák qui
devint un épique et enflammé poème symphonique.
Frank Langlois
30 mars : Orchestre National de Lyon, dir. Eivind
Gullberg Jensen, Emmanuelle Réville, flûte, Eléonore
Euler-Cabantous, harpe, Kumiko Shuto, biwa, Kifu
Mitsuhashi, shakuhachi (Debussy, Takemitsu). Victoria
Hall à 11h (rens. 0800.418.418, billets : Alhambra, Grütli)
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A l’Octogone de Pully, le Quatuor Merel interprétera, le 11 mars à
Pour l’Art, des quatuors de Mozart, de Schubert (Rosamunde), ainsi qu’avec la soprano Ruth Ziesak le Quatuor No 2 de Schoenberg. A Lutry, le
23, les Concerts Bach reçoivent l’Orfeo Vokalensemble et Barokorchester
de Salzbourg, conduits par Michi Gaigg, pour des Cantates du jeune
J.S.Bach.
Luisa Miller de Verdi dans une nouvelle production à
Au Théâtre de Vevey, le 18, le Quatuor Zehetmair sera l’hôte d’Arts
l’Opéra de Lausanne, Tosca de Puccini mis en scène
et Lettres pour le Quatuor No1, dit « Sonate à Kreutzer » de Janacek, un
par Robert Bouvier au Théâtre du Passage à Neuchâtel, quatuor du jeune Schubert, ainsi que celui de Debussy.
création d’un opéra de Christian Henking au Théâtre
Le 2 mars à l’Eglise St-Paul, les Concerts de Villeneuve reçoivent le
de Bienne : trois spectacles qui témoignent de la vitalité chœur lausannois de gospels One Step pour le dernier concert de la saison.
Le 1er mars, au temple de Vers-l’Eglise, l’Ensemble Fiacorda, formation
de l’art lyrique en nos contrées. On y célèbre aussi en
musique des anniversaires en ce mois de mars, celui des à géométrie variable fondée à Bâle par Robert Zimansky, ancien 1er violon solo de l’OSR , mettra un terme au Festival Musique et Neige des
80 ans de Michel Corboz à Lausanne, celui des 75 ans
Diablerets.
de Jost Meier à Bienne.
Conclusion également des Classiques de Villars, à la Grande Salle le
A Lausanne, Alexia Voulgaridou sera l’héroï2, avec des œuvres de Tchaïkovski – dont le poine éponyme de l’opéra de Verdi mis en scène par
gnant Trio en la mineur – et Arenski, interprétées
Giancarlo del Monaco, du 21 au 30 mars. La direcpar Valentina Igoshina au piano, Kirill Troussov au
tion musicale en est confiée à Roberto Rizzi
violon et Mark Drobinsky au violoncelle.
Brignoli, l’OCL étant dans la fosse.
En Valais, le 1er mars à Crans, Boris
Le 21 mars, les Concerts de Montbenon fêtent
Berezovsky au piano et Michael Guttman au vioMichel Corboz, invité à interpréter les Motets à
lon, donneront un programme de musique françaidouble chœur de J.S.Bach en compagnie de son
se, avec des œuvres de Debussy,Fauré, Franck et
Ensemble Vocal de Lausanne.
Ravel. A l’Hôtel de Ville de Sierre, le 2, l’excellent
L’Opéra de son côté offre une carte blanche au
Trio Wanderer se produira dans trois trios avec
pianiste Cédric Pescia, qui sera sur la scène lausanpiano, de Beethoven, de Chostakovitch et de
noise le 9 mars, pour y jouer la Sonate D.959 et,
Mendelssohn. A Sion, le 9, à l’église St-Théodule,
avec le baryton Sebastian Geyer, le cycle des 24
le jeune Sedunum String Orchestra, fondé en 2012
lieder de la Winterreise de Franz Schubert.
par Sebastien Bagnoud, défendra un beau programLes 3 et 4 mars à la Salle Métropole, Frank
me comportant une symphonie de Haydn, le motet
Peter Zimmermann sera à la fois chef et soliste du
Exultate Jubilate de Mozart et un concerto d’A.
7e concert d’abonnement de l’Orchestre de
Stephenson, avec Carole Rey, soprano, et David
Frank Peter Zimmermann © Franz Hamm
Chambre de Lausanne pour les Concertos pour vioRey, tromboniste. Les 22 et 23 mars à l’église des
lon K. 207, K 216 et K.218 de Mozart. Au même endroit, pour les Jésuites, l’Ensemble Vocal Cantamabile, fondé à Sion en 2009 par MarieConcerts du Dimanche, le 9 mars, l’OCL jouera les deux Konzertstücke Marthe Claivaz, présentera une version concertante de Didon et Enée de
pour clarinette et cor de basset de Mendelssohn, ainsi que la Symphonie Purcell.
en ré majeur de Cherubini, sous la conduite de son principal chef invité
A Neuchâtel, Flora Tosca sera incarnée par Joanna Parisi,
Cavaradossi par Ramon Vargas (remplacé par
Bertrand de Billy, et avec deux solistes sortis de
Orlando Niz à Vevey) et Scarpia par le baryton
ses rangs, Davide Bandieri et Curzio Petraglio.
Rubén Amoretti, sous la conduite de Facundo
Le 30, également au Métropole, ce sont les
Agudin, avec l’Orchestre Symphonique du Jura. Il
vocalistes et l’orchestre de la HEMU, avec à leur
y aura 3 représentations de l’opéra de Puccini à
tête Benjamin Lévy, qui se produiront dans la merNeuchâtel, les 1er, 4 et 7 mars, et une au Théâtre de
veilleuse fantaisie lyrique L’enfant et les sortilèges
Vevey, le 11. Le même Théâtre du Passage
de Maurice Ravel. A la Cathédrale le 28 - et à
accueillera la troupe de L’Avant-Scène Opéra trois
Yens-sur-Morges le 29 - place aux jeunes égalesoirs durant, du 14 au 16, pour la truculente opéretment, ceux des Chœurs des Gymnases lausannois
te d’Offenbach La Vie parisienne. Trois concerts
et du Gymnase de Waiblingen, qui, avec
sont annoncés au Temple du Bas. Le 9, l’Orchestre
l’Orchestre Romand des Jeunes professionnels,
de Chambre Fribourgeois se joindra à l’Ensemble
vont donner Ein Deutsches Requiem de Johannes
Symphonique de Neuchâtel pour y donner, sous la
Brahms, sous la baguette d’Olivier Piguet,
A Gland, le 23, au Théâtre Grand-Champ, la
direction de Laurent Gendre, avec la participation
Sinfonietta, conduite par James Lowe, jouera des
du pianiste Oliver Schnyder, des pages célèbres de
pages de Mozart, Lutoslawski et Beethoven (2e
Gershwin et la 9e Symphonie, « du Nouveau
Monde » de Dvorak. Le 15, le Quatuor Schumann
symphonie) et accompagnera le violoncelliste
Joanna Paris sera Floria Tosca
à Neuchâtel et Fribourg
présentera deux quatuors avec piano, l’un de Robert
Enrico Bronzi dans le Concerto No1 de Saint-Saëns.
scènes de mars
Agenda romand
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Schumann, l’autre de Gabriel Fauré, plus une page de Frank Bridge.
Enfin, le 22, la Passion selon Saint Jean de Bach aura pour interprètes la
Société chorale de Neuchâtel et l’Ensemble baroque La Freitags
Akademie de Berne, sous la conduite de Gilbert Bezençon.
A La Chaux-de-Fonds, à la Salle Faller, le14, le duo de la flûtiste
Anne-Laure Pantillon et du pianiste Marc Pantillon se fera entendre dans
des pages de musique française, dont une, fort rare, de la compositrice Mel
Bonis (1858-1937). Au même lieu, le 27, récital du pianiste Ashot
Khachatourian. A son programme, Beethoven, Chopin et la 4e Sonate de
Prokofiev. Concerts-portrait, le 30 mars au Musée International
d’Horlogerie, du compositeur grec Nicolas Tzortzis, né à Athènes en
1978, établi à Paris, où il a fait ses études. Diverses œuvres de ce musicien
seront présentées, dont L’Etoile de Mer, avec projection du film de 1928
de Man Ray, et Alk Création 2014, pour voix de femme et grand ensemble électronique, par le Collectif Binoculaire le matin et le Nouvel
Ensemble Contemporain l’après-midi, avec Franziska Baumann, voix, et
Pierre-Alain Monot à la direction.
A Bienne, l’opéra Figaro de
Christian Henking, dont la première a
lieu le 28 février, est redonné deux fois
en mars, le 2 et le 26, au Stadttheater,
sous la conduite de Jürg Henneberger,
ou pour les reprises, de Harald Siegel,
qui tiendra aussi la baguette le 6 mars
pour la Fledermaus de Johann Strauss.
Le 12, pour l’anniversaire de Jost
Meier, l’Orchestre Symphonique
Bienne Soleure (OSBS), qu’il a fondé
en 1969, donnera un concert en son
honneur au Palais des Congrès, sous la
direction de Hans Urbanek. Le corniste
Bruno Schneider sera le soliste du
Concerto pour cor de Jost Meier, dont
Lena Neudauer
sera aussi donnée en création une œuvre
© Marco Borggreve
écrite spécialement pour l’occasion,
Adullam. Au même endroit, le 27, on pourra entendre l’Histoire du Soldat
de Stravinski-Ramuz en version bilingue, dans une mise en scène
d’Ariane Gaffron. Le 20, l’OSBS et le Chœur Bach de Berne, conduits par
Kaspar Zehnder, avec Ruth Ziesak, soprano, et Marc-Olivier Oetterli,
baryton, interpréteront Ein Deutsches Requiem de Brahms à la
Stadtkirche.
Dans le Jura, le dimanche 2, Etienne Baillot, à l’orgue de la
Collégiale de St-Ursanne, et la soprano Françoise Masset présenteront
des pages de musique sacrée à l’enseigne de « Psaumes et Déplorations ».
A Fribourg enfin, le 11 mars, au Théâtre de l’Equilibre, se fera la
reprise du concert donné le 9 à Neuchâtel par l’Orchestre de Chambre
Fribourgeois et l’Ensemble Symphonique de Neuchâtel, avec Un
Américain à Paris, la Rhapsody in Blue de Gershwin et la 9e Symphonie
de Dvorak. Autre concert le 22 mars, avec Mario Venzago et l’ Orchestre
Symphonique de Berne dans des œuvres de Wagner, de Mahler (5e
Symphonie) et de Robert Schumann dont la brillante Lena Neudauer sera
la soliste du trop rare Concerto pour violon et orchestre en ré mineur.
gstaad, sommets musicaux 2014
Duo à l’honneur
Les Sommets Musicaux de Gstaad ont mis à l’honneur
cette année la forme duo. La semaine musicale a
proposé en effet pas moins de huit concerts consacrés au
piano à quatre mains et permettant à de jeunes musiciens
de se produire dans l’intimité de la Chapelle de Gstaad.
Comme chaque année, la musique a aussi résonné dans l’église de
Saanen et dans celle de Rougemont avec notamment un magnifique récital
de Renaud Capuçon et Francesco Piemontesi. Une entrée pourtant sur la
pointe des pieds avec la Sonate pour piano et violon en mi mineur de
Mozart, une œuvre toujours difficile dans le choix du caractère musical à
adopter. Puis, c’est avec la Sonate pour violon et piano en si mineur
d’Ottorino Respighi que s’est poursuivi la soirée. Cette œuvre peu jouée
représente pourtant une part non négligeable de la création du compositeur
dans le domaine de la musique de chambre. Il s’agit, en effet, d’une partition complément monumentale dans sa forme et dont la difficulté d’écriture
requiert non seulement une technique acérée de la part des interprètes mais
également un niveau de concentration soutenu du public. Renaud Capuçon
et Francesco Piemontesi réussissent avec panache dans cette musique grâce
à une complicité musicale forte. Violoniste et pianiste plongent avec violence dans un déferlement de gammes et d’arpèges inquiets, se rendant trait
pour trait toute la violence du premier mouvement, à la fois lyrique et tourmenté. Dans l’Andante espressivo, le piano de Francesco Piemontesi cède
subtilement devant le chant raffiné du violoniste français avant de conclure
avec un dernier mouvement dont les rythmes agressifs portent la musique à
un degré de violence rarement atteint dans le style de la sonate. Enfin, la
Sonate pour violon et piano en la majeur de César Franck révèle chez les
deux artistes une profonde compréhension de l’œuvre, avec dès les premières mesure le choix d’un tempo retenu ainsi que celui d’un traitement
large de la phrase musicale. Renaud Capuçon y déploie la belle sonorité
de l’école française du violon avec un dosage exact de la dynamique. Le
troisième mouvement reste en cela un exemple parfait de ce que peut
signifier la pulsation en musique avec ses tensions, ses relâchements, tour
à tour Francesco Piemontesi lance et récupère son partenaire dans un
rubato incessant jamais artificiel.
Martina Díaz
Yves Allaz
Eglise de Rougement le 2 février : Renaud Capuçon et Francesco Piémontesi
© Miguel Bueno
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Victoria Hall, Genève
Victoria Hall, Genève
Elisso Bolkvadze
Maurizio Baglini et Silvia Chiesa
Concert de Printemps, le 21 mars, de l’Orchestre des Nations-Unies
avec la pianiste Elisso Bolkvadze.
Mardi 18 mars, dans le cadre de la saison de Classiques Alternances,
le pianiste Maurizio Baglini, qui avait donné dans ce même Victoria Hall un
mémorable concert en
solo le 17 janvier 2013,
revient, cette fois en
compagnie de la violoncelliste Silvia Chiesa,
avec laquelle ils forment un duo stable
depuis 2005 tournant
dans le monde entier.
Née à Tbilissi en
1967, formée en Géorgie
et à Moscou, élève de
Michel Sogny, Elisso
Bolkvadze poursuit une
carrière internationale au
plus haut niveau. Sa musicalité et sa maîtrise de
l’instrument ont été très
tôt reconnues par Zubin
Mehta. Elle donnera le
Concerto pour piano n°2
de Camille Saint-Saëns
qu’elle a enregistré pour
Cascavelle en 2010 avec
l’Orchestre symphonique
de Tbilissi.
Ils
donneront
quelques unes des plus
belles sonates pour violoncelle et piano du
répertoire : la Sonate
no.1 op.38 en Mi
mineur de Brahms; la
Sonate «Arpeggione»
en la mineur de
Schubert; et la Sonate
en Sol mineur de
Rachmaninoff. C.B.
Elisso Borkvadze
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Encadrant
ce
Concerto, l’Ouverture de
Guillaume Tell de Rossini et la Symphonie n°6 de Dvorák permettront d’apprécier les qualités de l‘orchestre co-fondé et dirigé par Antoine Marguier.
C.B.
. Vendredi 21 mars
Maurizio Baglini et Silvia Chiesa
. Mardi 18 mars à 20h
Billetterie : points de vente Ville de Genève, et Service culturel Migros
Musicales de Compesières
Billetterie : Espace Ville de Genève, Grütli, Genève Tourisme...
Centrale Billetterie au 0800.418.418
Musée d’Art et d’Histoire, Genève
Le Quatuor Schumann
Dimanche 30 mars à 11 heures, le Quatuor Schumann sera pour la 3e
fois l’invité du Quatuor de Genève. L’occasion de découvrir Frédéric
Week-end musical dans la campagne genevoise pour fêter l’arrivée du
printemps.
. Vendredi 21 mars 2014, 20h30
Tomoki Sakata, piano
Le pianiste Tomoki Sakata, a obtenu en 2012 un Prix de soliste à la
Haute Ecole de Musique de Genève ainsi que le Prix du Public des Jeudis
du Piano - Société des Arts de Genève.
On l’entendra dans des Sonates de Scarlatti et de Granados suivies,
après l’entracte, des 24 Préludes de Chopin.
. Samedi 22 mars 2014, 20h30
Bruno Rigutto, piano
Le pianiste, compositeur et chef d'orchestre français Bruno Rigutto, un
élève de Samson François et Paul Badura-Skoda, a derrière lui une longue
carrière lancée par les Prix obtenus au concours international MargueriteLong en 1965, et au concours Tchaïkovski en 1966.
Au programme de ce concert on trouvera Chopin (Nocturnes opus 9
n°1 et opus 15 n°2 ; Scherzo opus 31 ; Fantaisie opus 49) ; Schumann
(scènes d'enfants opus 15) ; Liszt (Funérailles) et Ravel (Sonatine ;
Alborada del gracioso).
Quatuor Schumann
Angleraux, nouveau violon de l’ensemble, aux côtés de Christian Favre
(piano), de Christoph Schiller (alto) et de François Guye (violoncelle).
Au programme le Divertimento pour trio à cordes K 563 de Mozart, et
le Quatuor avec piano no 2, opus 45 de Fauré, deux oeuvres de la maturité
des compositeurs. C.B.
. Dimanche 30 mars à 11 h
. Dimanche 23 mars 2014, 17h00
Ensemble vocal DeMusica
Direction Marc Bochud
Habitué des Schubertiades d’Espace 2, L’Ensemble vocal deMusica a
chanté, lors de l’édition 2007, sous la baguette de Christian Zaccharias, la
messe en mi bémol majeur de F. Schubert, accompagné par l’Orchestre de
Chambre de Lausanne et deux autres chœurs fribourgeois.
C’est Bach qui sera célébré ce dimanche avec 6 Motets.
Billetterie : Billets sur place, une heure avant le concert
ou prélocation au points de vente Ville de Genève
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Abonnements : détails sur www.musicalesdecompesieres.ch
Location : billets en vente le soir même sur place, une heure avant le concert.
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Forum Meyrin
Victoria Hall, Genève
Philippe Béran, sa baguette magique, et l’Orchestre de Chambre de
Genève se sont donné pour mission de raviver vos connaissances en matière
de concerto. Le temps d’un concert, un parcours découverte, du genre
«Concerto pour les Nuls», à travers les époques et les styles, vous sera
présenté.
Sous la baguette de
Philippe Béran, le concert
devient un spectacle que le
chef d’orchestre genevois
n’hésite pas à commenter,
à interrompre pour faire
intervenir le public ou
même pour renvoyer ses
musiciens ! Tout est bon,
dès lors qu’il s’agit de
faire découvrir le grand
répertoire symphonique,
mais toujours avec simplicité et humour.
Mais sachez déjà
qu’un concerto, c’est une
Philippe Béran © Michel Blanc
œuvre dans laquelle on
fait dialoguer un ou
plusieurs solistes avec un ensemble orchestral. A l’issue de la représentation, une rencontre avec Philippe Béran est agendée.
Les amateurs de la série Jazz Classics se réjouiront d’entendre le
saxophoniste virtuose Joshua Redman, qui se produira en quartet au
Victoria Hall. Lors de cette
soirée, il sera sur scène en
compagnie de Aaron Goldberg,
Reuben Rogers et Greg
Hutchinson.
Vous avez dit Concerto ?
Joshua Redman
Mélodiste à tout crin,
ténor et sopraniste virtuose et
féru de l’histoire de son instrument, Joshua Redman s’est
construit un chemin à la fois
respectueux de la tradition et
original, au travers d’un répertoire qui fait la part belle à des
compositions personnelles.
Toutefois, le programme
du concert genevois sera tissé
des grandes ballades qui ont
Joshua Redman © Jay Blakesberg
fait l’histoire de Broadway,
caressées dans le sens du
velours en compagnie des brillants complices que sont le pianiste Aaron
Goldberg, le contrebassiste Reuben Rogers et le batteur Greg Hutchinson.
. Jeudi 13 mars à 19h
. Mardi 4 mars à 20h30
Location en ligne : /www.forum-meyrin.ch/billetterie
Location : 0900.800.800 TicketCorner ou en ligne sur : www.prestigeartists.ch/
Geneva Camerata
Victoria Hall, Genève
Quatre concerts à l’agenda du Geneva Camerata pour ce mois de mars,
des événements qui auront lieu dans différents endroits de la place.
Hiromi
Pour commencer, le Concert Sauvage n°2 intitulé « Un Violoncelle Fou »
proposera des œuvres de Guillaume de Machaut, Brice Catherin («Von der
Musik» création mondiale d’une commande du Geneva Camerata), Claudio
Monteverdi, Dario Castello, Morton Feldmann et Tarquino Merula.
. Lundi 10 mars - 19h30 à la Comédie de Genève
La pianiste prodige sera l’invitée de Jazz Classics. Une occasion
unique de découvrir la personnalité débordante de passion de la Japonaise.
Assoiffée de musique dès
son plus jeune âge, Hiromi
Uehara s’est juste rapidement donné les moyens techniques de répondre à son
appétit viscéral de musique,
une qualité qui lui vaut les
parrainages musicaux inconditionnels de grands musiciens comme Ahmad Jamal
ou encore Chick Corea, avec
lequel elle a d’ailleurs souvent joué, et enregistré un
disque détonnant en duo.
Son appétit musical, de
Liszt à Peterson, en passant
par Bach et King Crimson,
semble paraît-il insatiable. A
vérifier sur scène, où Hiromi
donne toujours des prestations inclassables !
Suivra le Concert en Famille n°3, durant lequel «Le Monde de Mozart»
sera présenté et dirigé par David Greilsammer.
. Samedi 15 mars - 11h à la Salle Frank-Martin
Puis Les Rencontres Magiques
vous permettront d’écouter les Six
Concertos Brandebourgeois de
Bach, servis par les musiciens du
Geneva Camerata.
. Vendredi 14 mars - 19h et
dimanche 16 mars - 16h au Musée
d'Art et d'Histoire
Le dernier concert appartient à
la série La Musique du Cœur et vous
offrira, sous le titre «Au Cœur du
Printemps, des œuvres de Vivaldi et Piazzolla.
. Jeudi 20 mars - 20h à la Salle Frank-Martin
David Greilsammer © Julien Mignot
Hiromi © Sakiko Nomura
. Vendredi 28 mars à 20h30
Concert Sauvage, Concert en Famille : billets sur place une heure avant le concert.
Réservation possible à [email protected]
pour les autres concerts : Fnac ou Genève Tourisme
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Location : 0900.800.800 TicketCorner ou en ligne sur : www.prestigeartists.ch/
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tre garçons. L’autre danseuse est la Japonaise
Sae Maeda, qui fut on ne peut plus gracieuse
dans la variation du royaume des ombres
(extrait du Ballet La bayadère de Petipa) et très
habile dans sa variation contemporaine (de
Richard Wherlock).
Comme chaque année, les Asiatiques sont
venus en grand renfort et ils sont doués! Il y en
avait huit en finale. En plus des deux lauréats
déjà évoqués, le Japonais Haruo Niyama a
remporté un prix, et pas n’importe lequel : le premier Prix. Il
faut dire qu’il a été époustouflant dans la variation de Solor
(de La Bayadère) et qu’il a
interprété sa variation contemporaine avec enthousiasme, ce
qui est le plus difficile pour les
Asiatiques. Un seul bémol : il
n’est pas très élégant avec ses
courtes jambes.
prix de lausanne : concours pour jeunes danseurs
Excellent niveau
La capitale vaudoise est célèbre dans le monde entier de la danse pour deux
raisons : elle héberge le Béjart Ballet et elle offre des bourses aux meilleurs
danseurs solistes en herbe. 73 candidats venant de 15 pays ont été
sélectionnés parmi 295 dvd reçus.
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Le niveau des danseurs qui
ont tous eu l’occasion de montrer
leurs variations classique et
contemporaine était excellent, le
choix du jury (présidé par Kay
Mazzo, ancienne danseuse étoile
du New York City Ballet) d’autant plus difficile. 20 candidats
ont cependant été sélectionnés
pour la finale, 8 filles et 12 garçons (depuis une demi-douzaine
d’années le niveau des garçons
s’est nettement amélioré).
Après être rentrés bredouilles depuis plusieurs années, les écoles
française et de Monte-Carlo ont été à nouveau
couronnées de succès. Ainsi le Français
Garegin Pogossian, élève du Conservatoire
Precious Adams © Gregory Batardon
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Sae Maeda © Gregory Batardon
National Supérieur de Musique et de Danse de
Lyon, a convaincu aussi bien dans sa version
classique (extraite de Don Quichotte) que dans
sa version contemporaine, du chorégraphe finlandais Jorma Elo. Parmi les lauréats, on compte même deux élèves de l’Académie Princesse
Grace de Monte-Carlo : le Japonais Mikio
Kato, qui s’est très bien débrouillé dans sa
variation, très exigeante, du Lac des cygnes, et
qui a exécuté avec bravoure sa variation
contemporaine de Richard Wherlock, le chorégraphe du Theater Basel. David Fernando
Navarro Yudes, de la même école, a remporté
non seulement un Prix de Lausanne mais aussi
le Prix du public. Il a su nous enthousiasmer
dans le solo de Basile (du ballet Don Quichotte)
et celui d’Otello (dans la version de Goyo
Montero).
Une autre lauréate a obtenu deux prix très
mérités, l’Afro-américaine Precious Adams.
Originaire de Canton dans le Michigan, elle a
eu le courage de quitter sa patrie à l’âge de 16
ans pour devenir une élève de l’école de danse
du Bolchoï ! Même si son tutu rose ne lui allait
pas très bien, sa technique était impeccable et
elle était encore plus convaincante dans sa
variation contemporaine de Jorma Elo. Elle a
remporté un Prix de Lausanne et le Prix de la
meilleure interprétation contemporaine. Les
lauréats comptent seulement 2 filles, pour qua-
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Le prix de Lausanne est
aussi le lieu de rencontre des
directeurs d’écoles et de compagnies. Ainsi, les candidats qui
n’ont pas reçus de prix ou même ceux qui n’ont
pas été finalistes peuvent recevoir des offres,
voire des contrats.
Emmanuèle Rüegger
Garegin Pogossian © Gregory Batardon
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espace nuithonie, villars-sur-glâne
Promesses de l’Apocalypse
Dans Suivront mille ans de calme, tout se déploie avec la simplicité du rêve, en
un cheminement de visions implacables. Anjelin Preljocaj est au sommet de son
art, et cette simplicité là, cette pertinence visionnaire aussi, sont la
propriété exclusive des seigneurs.
rejouant
des
ensembles pornographiques. Ces
derniers rappellent, sous forme de
chorégraphie ascétique, la démarche
photographique de
l’écrivain Edouard
Levé selon la tradition des tableaux
vivants du 19e siècle. Enserrés dans
les drapeaux, les
visages n'expri«Suivront mille ans de calme» © JC Carbonne
ment rien. C'est
une pornographie
Grand maître des ensembles travaillés par glacée, dérivée d’un oxymore photographique
des phrases chorégraphiques chaînées aux sur fond de médusant pamphlet plasticien sur les
variantes multiples et intimes, où les unissons se corps enchâssés du concert des nations. Et la posdédoublent et se cassent, le chorégraphe livre un sible représentation d’une mécanique du « suropus dont le titre est tiré de L’Apocalypse de veiller, jouir et punir » attachée à la communauté
Saint-Jean. « Après l’arrivée des Anges annon- internationale que ne renierait pas le dramaturge
çant un Royaume nouveau et la mise en chaines et metteur en scène hispano-argentin Rodrigo
de Satan et ses légions, il est écrit: Suivront mille Garcia.
Partagée entre danseurs du Bolchoï et interans de calme, relève le chorégraphe La création
n’est pas rattachée de manière littérale et théma- prètes du Ballet Preljocaj, la réalisation aborde
tique à l’Apocalypse, mais à la dimension poé- notamment l’idée de Révolution, de 1789 à 1917,
tique flottant de cette phrase prophétique. Je me en alliant précision, torsion, dislocation et folle
suis inspiré d’images et métaphores présentes au expressivité innervant jusqu’aux jeux ciselés des
fil de L’Apocalypse. La racine du mot apo signi- mains. La pièce apprend à voir le monde d’un
fie soulever, ôter et calypsis désignant le voile. autre regard, plus calme, plus attentif ; l’alphabet
L’expression ne trahit rien de cette idée commu- mouvementiste est ici moins une fin, condamnée
ne de désastre ou de catastrophe. Le sens origi- au sanctuaire du répertoire, qu'un moyen d’exernel est de l’ordre de la révélation intérieure de cer sur toutes choses un œil de visiteur perpétuel.
l’indicible, de ce qui est sous-jacent et que l’on L’opus arpente aussi diverses formes d’asservisne connaît pas en le rendant perceptible, sensi- sement. « Le chaînes sont ici très présentes, tant
ble. D’où cette intention de révéler par la danse elles peuvent à la fois entraver et relier destins et
des réalités présentes dans nos sociétés, mais trajectoires. Si ces éléments peuvent évoquer la
que l’on ne voit guère. C’est ainsi une métapho- contrainte liberticide, les chaînes tombent aussi
du ciel comme la foudre fouettant le plateau. A
re qui serait en prise avec notre aujourd’hui. »
En levée de voiles ouvrant sur les servitudes mes yeux, elles peuvent convoquer l’imagerie des
contemporaines, les héraldiques de nations en Cavaliers de l’Apocalypse. Les déluges d’eau
drapeaux formatent des corps anonymes en dessinent, eux, une forme de purification. »
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Histoires de la violence
« L’amour est violation de l’intégrité des
individus, il fait toucher du doigt les limites de
l’être humain », pose le philosophe et psychanalyste Umberto Galimberti. Dans cette veine, la
chorégraphie donne lieu à des scènes aussi surprenantes qu’entêtantes, dans leur énergie formelle et leur réalisme de la violence désespérante au sein du couple, qui effondre et fiche les
êtres comme insectes sur la surface de murailles
en métal. Ainsi le binôme d’amants qui se livre à
l’adresse du « je t’aime », tout en s’écrasant contre les parois. Cet épisode semble s’inscrire dans
le sillage des slows ouvrant Paysages après la
bataille (1997) de Preljocaj. Comment oublier
les duos enlacés sur le Ti amo d’Umberto Tozzi
qui confondaient finalement le baiser et la morsure, l’enlacement et l’étouffement mortifère ?
La violence innerve ainsi toute l’œuvre du chorégraphe français. En témoigne N (2004) et ses fulgurances somatiques de corps marionnettiques
manipulés entre l’animé et l’inerte, le vif et le trépassé. Ou Ce que j'appelle oubli (2012) prolongeant les atteintes faites au corps d'une dimension sociale et politique sur un texte de Laurent
Mauvigner interrogeant l’emprise sur autrui
exercée par les agresseurs.
Dès l’entame, se déploient des femmes porteuses de la paix. Elles évoluent dans un unisson
harmonieux, la béatitude en front de corps. Etat
évoqué avec une délicatesse, dont on peine à
trouver un équivalent dans le paysage chorégraphique contemporain français. Aux éclats des
Anges de Benjamin Rippert et de Sonate au
Clair de lune signée Beethoven, se greffe le martial avec les mosaïques cadencées dues au DJ
français Laurent Garnier pour accompagner les
visions de Preljocaj qui retrouvent, par instants,
le périple intra-utérin de son Near Life
Experience (2002) en ses corps déclinés en cristallisations de nos fantasmes et de nos inconscients.
Une production multipliant ses cadrages
scéniques que rehausse la scénographie et les
coiffes en éléments de cuisine totémique signées
par une icône de l’art contemporain indien,
Shilpa Gupta, dont les d’installations métaphoriques sont d’essences politique et poétique.
Bertrand Tappolet
Equilibre Nuithonie. Villars-sur-Glâne. 19 mars.
Rés.: 026 407 51 41
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spectacles onésiens
Humour, humour...
L’humour sera roi en mars à Onex, en tous cas en ce qui concerne les
spectacles destinés aux adultes, puisque les enfants, eux, auront droit à des
aventures de caneton...
Les 6 et 7 mars 2014, le troisième one man
show de et avec Frédéric Recrosio, Je suis vieux
(pas beaucoup mais déjà), mis en scène par JeanLuc Barbezat, traite de l'avancée dans l'âge, sorte
de bilan de milieu de vie de cet humoriste en pleine crise de la quarantaine, qui visite les pertes
ordinaires qui accompagnent le vieillissement. A
ces questionnements existentiels, l'humoriste
répond avec un humour corrosif et contagieux.
Un spectacle qui, hélas pour certains, affiche déjà
complet depuis de nombreuses semaines.
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Le mois de mars reste placé sous le signe de
l'humour avec la venue, les 27 et 28 mars mars,
des frères Taloche qui, après avoir fêté en grandes pompes leur vingt ans de carrière à
l'Olympia, nous font l'honneur de venir amuser le
public onésien.
Au fil des ans, ces artistes sont devenus l’un
des duos comiques belges les plus connus. Basé
sur le modèle des clowns traditionnels du cirque,
ce numéro connait un succès notable. les Taloche
ont d’abord entamé leurs carrières séparément
avant de former leur duo en 1992. Bruno et
Vincent Counard, nés respectivement en 1960 et
1969, sont également frères dans la vie, aîné et
benjamin d’une fratrie de quatre enfants originaires de la région de Liège. Ils se voient distingués
par le convoité prix Raymond-Devos en 2005 par
le ministère de la Culture française, prix créé en
2003, destiné à récompenser un travail d’excellence autour de la langue française. Le succès
viendra grâce aux médias amis qui les imposeront par le mime parodique de la chanson J’ai
encore rêvé d’elle du groupe Il était une fois.
Leur humour réside aussi bien dans les dialogues, où se mêlent quiproquos, jeux de mots et
caricatures, que dans leur panoplie de mimiques
et grimaces en tout genre. Ils font constamment
appel au mime et il n’est pas rare de les voir présenter un sketch sans aucune parole. Ils caricaturent des moments de la vie de tous les jours,
depuis le chauffeur impatient au médecin généraliste (aux prises avec un amnésique), en passant
par les vendeurs de calendriers, les montagnes
russes, la préparation des frites, etc. Bruno tient
généralement le rôle du clown blanc et Vincent
celui de l'auguste.
Les deux frères sont également producteurs,
directeurs du festival international d’humour de
Liège et à la tête d’une émission de variété à la
RTBF (la télévision nationale belge), Signé
Taloche, qui connaît un énorme succès. Le spectacle présenté à Onex reprend des sketches
incontournables avec quelques inédits. Du burlesque visuel terriblement efficace, pour rire de
bon cœur à tout âge.
Quant aux petits spectateurs, ils pourront
voir, les 9 et 12 mars, A l'Aide! par Cie Deux
Fois Rien, un spectacle de marionnettes & théâtre d'ombres dès 4 ans, qui relate les aventures du
caneton Loulou étouffé par sa mère, la grenouille
Grelotte ou Helpman, incapable de dire non…
des aventures qui vous rappelleront certainement
quelqu’un de proche !
Firouz-Elisabeth Pillet
www.spectaclesonésiens.ch
Théâtre Am Stram Gram
Au mois de mars, le Théâtre Am Stram
Gram proposera deux spectacles : du 4 au 16
mars, un conte rock en création, Lola Folding,
l’histoire d’une fillette happée par un album de
photographies vivantes qui l'entraînent dans un
univers de folie et lui fait découvrir son univers
familial. ASG retrouve Brico Jardin pour ce
spectacle dont les textes sont signés Marc
Jeanneret, sur une musique de Simon
Aeschimann.
Pour les plus jeunes, La Brioche des
Mioches, du 4 mars au 6 avril, sera l'occasion de
découvrir une jeune artiste vaudoise, conviée
par ASG à cette occasion. Comédienne, écrivain, scénariste, Sandra Korol écrit pour les
enfants : en 2011, le théâtre des Osses présente
Le voyage de Célestine, son premier texte destiné au jeune public. En novembre 2012, le petit
théâtre de Lausanne a proposé Tim et les
Zinvisibles, sa première pièce jeune public dans
laquelle Sandra Korol joue le rôle de Mel, l'amie imaginaire du héros.
Firouz-Elisabeth Pillet
Les Frères Taloche fêtent leur 20 ans de carrière
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www.amstramgram.ch
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bonlieu, annecy
Cirque alors...
Les incroyables installations du Jardin des haras, un
espace insolite qui allie le végétal, les installations
plastiques et musicales - complété par Zoophonies et
Les Architextures - accueilleront en mars la
programmation du Théâtre et Scène nationale de
Bonlieu, une affiche faisant la part belle à l'art
circassien.
«Mazut» © Alexandra Fleurantin
Johann Le Guillerm, artiste atypique de la piste et théoricien, s'établit
dans les espaces des haras avec Attraction, projet colossal et protéiforme
composé de spectacles, expositions, films, livres, architectures.
Les Architextures, installées depuis septembre 2013, sont à voir
durant toute la saison dans le Jardin des haras. Ce cadre unique abrite également Monstration, un incroyable et extravagant parcours-installation
dans lequel les spectateurs sont conviés à remettre en question leurs repères et à voir les choses qui les entourent différemment.
Le public pourra aussi découvrir ou revoir Secret, le spectacle de
Johann Le Guillerm, créé en 2003 et qui a fait le tour du monde. Année
après année, Johann Le Guillerm perfectionne son point de vue : une
image du monde où le cirque est un cosmos en réduction. Prodige couronné à l’âge de 27 ans du Grand Prix National du Cirque, Johann Le
Guillerm invente dans ce spectacle, selon ses propres termes, « une machinerie pour déstabiliser le monde et le faire réagir ». Seul artiste à rassembler de multiples talents - il est tour à tour acrobate, funambule, clown,
jongleur, magicien, manipulateur d’objets -, le redoutable équilibriste
veut « mettre de l’ordre dans le chaos ». Chez lui, tout est pensé minutieusement afin que le cirque soit perçu comme une cosmogonie, un espace où
tous les éléments sont liés à la manière de cellules vivantes. Il crée en
direct des mécanismes qui s'apparentent étrangement à un mikado géant
sur lesquels il agit en défiant les lois de la gravité et de la stabilité. Jouant
avec des objets dont on est sûr qu’ils ne tiendront pas d’aplomb, il prouve
avec brio que la force mentale est notre principal alliée.
Le spectacle Secret sera présenté aux dates suivantes : mardi 18, mercredi 19, vendredi 21, samedi 22, mardi 25, mercredi 26, vendredi 28 et
samedi 29 mars à 20h30 et dimanche 23 et dimanche 30 mars à 17h; tandis que l’exposition Monstration peut se voir du 18 mars au 13 avril 2014.
Toujours dans le domaine du cirque, très représenté durant le mois de
mars, citons les spectacles suivants : Escargopolis, une installation de la
Compagnie 2 rien merci (du 28 mars au 25 mai), Mazùt , un spectacle de
et avec Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias (du 28 au 30 mars) ainsi
que Pour le meilleur et pour le pire, présenté par le Cirque Aïtal, dans la
conception et l’interprétation de Kati Pikkarainen et Victor Cathala (du 28
au 30 mars).
Les mélomanes ne seront pas en reste et auront l'embarras du choix
entre Alpbarock, un projet d'Yves Rechtsteiner, qui nourrissait l'envie de
quitter un instant le champ de la musique savante pour se réapproprier des
mélodies simples d’essence populaires et plonger dans les racines culturelles d’un pays, la Suisse ; Orfeo et Euridice, le trentième et plus célèbre opéra de Christoph Willibad Gluck et une soirée consacrée aux
musiques sacrées du XXe siècle sous l'égide de L'Orchestre des Pays de
Savoie ; son chef, Nicolas Chalvin, retrouve Bernard Tétu et ses chœurs
pour interpréter les répertoires de Benjamin Britten, Francis Poulenc et
Gabriel Fauré.
Finalement, il y aura un zeste de théâtre avec le Requiem de Salon
organisé par Andrea Novicov, les 25 et 26 mars.
Firouz-Elisabeth Pillet
www.bonlieu-annecy.com
«Secret», un spectacle de Johann Le Guillerm © Ph. Cibille
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s pec tac le
les marionnettes de genève
Chaperon Rouge
Cartoon
Le Théâtre des Marionnettes de Genève se fait un point
d'honneur de faire des propositions de spectacles pour
toutes tranches d'âge. Le très jeune public est convié à
découvrir l'univers théâtral et marionnettique tout jeune.
Ainsi, deux spectacles se partagent l’affiche en mars.
tacle revisite un classique des contes pour enfants. Les marionnettes, réalisées par Pierre Monnerat, sont accompagnées par la musique d'Hélène
Zambelli. Les costumes sont signés Ingrid Moberg, le tout baigné par la
lumière d'Eric Carruzzo.
Cette nouvelle version du célèbre conte mêle savoureusement comédie musicale, marionnettes à fils et dessin animé façon Tex Avery, un
savoureux mélange de clins d'œils qui régaleront les plus jeunes et amuseront les adultes qui les accompagnent. Chaperon rouge cartoon confronte
des personnages à leur rôle qu´ils ne veulent pas toujours tenir. Dérision,
loufoquerie, pastiche, c´est l´humour à la sauce cartoon amplifié, voire
décuplé.
Le spectacle commence par un projet fou, celui concocté par un
marionnettiste slave flanqué de son manager assistant. Tentés par l'univers
hollywoodien, les deux compères scénarisent leur conte pour le grand
écran, tel un blockbuster. Enfin, plus ou moins ... car les fils de l´histoire
s’emmêlent. En même temps qu´ils concoctent leurs ressorts comiques et
arrangent leurs effets, les marionnettistes comédiens suspendent le récit,
pour mieux le faire dévier vers le burlesque et l´absurde. Entre comédie et
loufoquerie, les images associent le noir-blanc des premiers dessins animés à des traces de rouge présentes sur tous les personnages. Un spectacle jubilatoire à partager entre générations !
Des représentations destinées aux personnes sourdes et malentendantes auront lieu mercredi 12 mars à 15h et mercredi 19 mars à 15h.
Firouz-Elisabeth Pillet
www.marionnettes.ch
«Nota Bébés» © Cédric Vincensini
Ainsi, le TMG propose, depuis le 17 février et jusqu'au 2 mars, Nota
Bébés, un spectacle du directeur des lieux, Guy Jutard, interprété par
Sandrine Girard qui manipule des marionnettes réalisées par Annemarie
Roth-Baud. Dans cet univers onirique, peu de mots sont nécessaires
puisque les marionnettes parlent d'elles-mêmes; la comédienne fait vibrer
les cordes de son violon. Les cordes sont frottées, caressées, pincées au gré
des personnages qui évoluent et s´agitent sur les fils, accompagnés par les
ritournelles du violon. Tous les sens des tout-petits sont sollicités.
Du 5 au 26 mars 2014, le TMG reprend une création de son répertoire, Chaperon Rouge Cartoon, un spectacle burlesque avec des marionnettes à fils longs. Dans un texte, une mise en scène et une scénographie
signés Guy Jutard, interprété par Liviu Berehoï et Guy Jutard, avec de
brillants et facétieux comédiens dirigés par Claude-Inga Barbey, ce spec-
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«Chaperon rouge cartoon» © Cédric Vincensini
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musée de l’élysée, lausanne
Philippe Halsman
Une technique impeccable au service d'un imaginaire époustouflant.
« Je fais beaucoup de portraits et je les prends très au sérieux. Avec vérité et sans
artifice je tâche de saisir l'essence-même du sujet. L'idéal serait de créer
une image qui resterait dans l'histoire de façon que si la postérité se rappelle
un grand homme, elle le verrait dans une image créée par mon appareil
et ma vision. »
Cette fois, c'est l'espace tout entier du
musée de l'Elysée qui nous offre, pour notre
plus grand bonheur, une sélection de 300 pièces
de cet Américain d'origine lettone incontournable du 8ème art. Il n'en faut pas moins pour
célébrer cette carrière exceptionnelle de quarante années, allant de la mode, des publicités, des
commandes institutionnelles et privées aux
fameux portraits.
se pas moins de 101 couvertures pour Life,
l'hebdomadaire d'actualités illustré par la photographie. Il remarque à ce propos : « (Cent couvertures, c'est) comme gagner cent fois une
compétition de très haut niveau. J'ai dû réaliser
quelque trois cents sujets pour ces couvertures.Une sur trois me semble être une moyenne
plutôt bonne dans ma catégorie, mais certains
échecs ont été des déchirements ». En 1943, à la
tains de ses portraits sont devenus de véritables
icônes. Albert Einstein, Winston Churchill (de
dos), Marilyn Monroe, qu'il photographie à plusieurs reprises, captant son potentiel alors qu'elle n'est encore qu'une starlette. Son intention
profonde, à chaque fois, est de saisir l'essence
de la personne au-delà de son rôle social. En
1950, il crée la jumpology pour atteindre à des
portraits spontanés et authentiques: au lieu de se
concentrer sur leur image publique, les sujets
pensent à leur saut, et les masques tombent. La
réalisation reste simple techniquement : un
Rolleiflex et un flash électronique. Mais il ne
faut pas crever le plafond... Après avoir décliné
l'offre en 1954, Marilyn se prend au jeu, exécutant en 1959 200 sauts pendant 3 heures pour
atteindre le « saut parfait ».
Jubilation
Le lien avec d'autres artistes ne cesse de stimuler la créativité d'Halsman, voyez les épreuves chromographiques de la face d'Andy
Warhol. Il réalise également des
images promotionnelles pour Les
Parfait cadrage
L'exposition a été l'occasion
Oiseaux d'Alfred Hitchcock et
d'une première étude consacrée à
Magnum Force avec Clint
l'ensemble de son œuvre. Sont
Eastwood.
montrés des planches contacts, des
Mais c'est avec Dali que les
photomontages originaux, des tiradéfis créatifs touchent à la jubilages annotés, qui dévoilent pour
tion : la salle du haut y est entièrenous les diverses expérimentations
ment consacrée. « En trente années
techniques et esthétiques que tente
d’amitié, j’ai fait d’innombrables
Halsman, pour qui la photographie
photographies montrant le peintre
est une expression à explorer éclaisurréaliste dans les plus improbarée par l'imagination. Ses écrits
bles et incroyables situations. A
montrent qu' il ne cesse de penser
chaque fois que j’avais besoin
sa pratique et ses images.
d’un protagoniste marquant ou
Dès 1930 à Paris, Halsman
célèbre pour une de mes idées délirantes, Dalí acceptait généreusecollabore avec l'institut d'Elisabeth
ment. A chaque fois que Dalí penArden, les revues Vogue, Vu et
sait à une photographie si étrange
Voilà, et expose à la galerie La
qu’elle semblait impossible à proPléïade au cœur du Quartier latin,
duire, j’essayais de trouver une
où il est associé au mouvement de
solution. «Pouvez-vous me faire
la Nouvelle Vision. On remarque
ressembler à Mona Lisa ?...
immédiatement le cadrage de ses
Philippe Halsman, Marilyn Monroe, 1959.
Pouvez-vous faire un homme dont
portraits concis et expressifs
Musee de l’Elysee © 2013 Philippe Halsman Archive / Magnum Photos
une moitié ressemblerait à Dalí et
(Malraux, Marc Chagall, Le
Corbusier...), ainsi que ses études de têtes et faveur du portrait du candidat républicain à la l’autre moitié à Picasso ?» Je pouvais le faire et
d'expressions sur des acteurs ou des clochards, présidence Wendell Willkie pour son livre One je le faisais. »
World, il obtient que son nom soit mentionné
admirablement éclairés.
Catherine Graf
En 1940, l'invasion allemande le contraint sur la couverture, inventant par là-même le créà émigrer à New York avec sa famille, qu'il peut dit photographique.
Mais c'est bien par son impressionnante « Philippe Halsman, Etonnez-moi ! » au Musée de
finalement rejoindre grâce à une lettre d'Albert
Einstein à Eléanor Roosevelt. Très vite, la galerie de célébrités toutes catégories (indus- l'Elysée, Lausanne, du 29 janvier au 11 mai 2014
renommée de son studio s'étend. En trente ans, triels, scientifiques, écrivains, politiques, artisil travaille avec de nombreux journaux et réali- tes) qu'il reste dans les mémoires, puisque cer-
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69
expos ition
fondation beyeler : odilon redon
De l’ombre à la lumière
Après l’exposition consacrée à l’artiste contemporain Thomas Schütte, pour
laquelle le public ne s’est pas vraiment mobilisé, la fondation retourne à des
valeurs plus sûres. Celles des pères fondateurs de l’art moderne, parmi
lesquels Odilon Redon (1840-1916) occupe une place privilégiée.
Pour la jeune génération, celle du groupe
des Nabis, Pierre Bonnard, Edouard Vuillard,
Maurice Denis, Redon a fonctionné comme un
modèle. Ils voyaient en lui le père du symbolisme, donnant à son art une dimension spirituelle.
Mais ce sera surtout sa conception de la couleur,
à laquelle il confère une intensité et une autonomie toute particulière, qui lui vaudra l’admira-
tion de la génération plus jeune. Une admiration
partagée par Matisse, lui-même acquéreur de
plusieurs pastels dont Fleur radieuse et La Mort
de Bouddha. « Matisse raffole de Redon ; il en
achète tant qu’il peut » remarquait Aristide
Maillol, convaincu de son influence sur les jeunes artistes à qui « il a montré la voie ».
En 2011, le Grand Palais à Paris rendait un
bel et grand hommage à ce prince des rêves
avec une rétrospective réunissant trois cents
pièces. Dans la collection Beyeler, Odilon
Redon est aux abonnés absents, ce qui n’a pas
empêché Beyeler de croiser souvent cet artiste
sur son chemin de marchand. Mais la raison
essentielle pour justifier cette nouvelle exposition, c’est bien sûr le lien de Redon avec les
artistes de la fondation. Ce que rappelle le commissaire de l’exposition Raphaël Bouvier. Une
exposition « qui met l’accent sur les aspects
pour ainsi dire avant-gardistes de l’art de
Redon et, du même coup, sur l’éminente contribution qu’il a pu apporter simultanément à plusieurs des voies empruntées dans son développement par l’art du XX° siècle. Ces voies
mènent à des artistes aussi différents que Pierre
Bonnard, Henri Matisse, Pablo Picasso,
Wassily Kandinsky, Piet Mondrian, Max Ernst,
Barnett ou Ellsworth Kelly ». Des artistes qui
constituent le noyau de la collection.
Un monde onirique
La présente exposition n’ambitionne pas
d’être une rétrospective, ni même de respecter
la chronologie. Il s’agit plus d’une présentation thématique qui tient compte des principales sphères d’intérêt de l’artiste et de ses innovations artistiques. Le parcours se construit de
l’époque angoissée des Noirs, avec ses premiers fusains et lithographies, jusqu’à la profusion colorée, qui caractérise ses tableaux
mythologiques mais aussi ses compositions
florales, ses compositions sacrées, ou ses
représentations de barques.
On peut diviser l’œuvre de Redon en
deux phases. Celle de 1870 à 1890, qui correspond à la période plus sombre, des travaux
au fusain, les Noirs. Elle accueille le visiteur
et les murs de couleur bleu nuit de la salle sur
lesquels sont accrochés les sombres compositions de Redon viennent renforcer ce sentiment inquiétant et énigmatique. Redon est
proche des milieux symbolistes, pour qui le
rêve est le lieu de l’imagination artistique. Le
monde, pour eux, ne saurait se réduire à sa
seule connaissance rationnelle, il est un mystère à déchiffrer. Telle est la mission du poète
ou du peintre, explorer les méandres de la
pensée ésotérique, de l’âme humaine,
empreinte des mécanismes du rêve. Dans son
roman, A rebours (1884), livre culte du symbolisme, Joris-Karl Huysmans évoque l’artiste, le faisant ainsi découvrir à un public plus
large. Etre artiste symboliste signifiait refuser
l’imitation de la nature pratiquée par le réalis-
70
Odilon Redon, «La Mort de Bouddha», vers 1899. Pastel sur papier, 49 x 39.5 cm.
Millicent Rogers Collection. Photo Davis A. Gaffga
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me ou l’impressionnisme et chercher derrière le
visible l’invisible. Dans cette période des Noirs,
les motifs choisis par Odilon Redon sont les
têtes coupées, les yeux isolés, les monstres
hybrides, les phénomènes cosmiques circulaires. Dans l’étrange fusain Le Cube (1880), l’œil
est enfermé dans un cube, qui plane dans le cosmos telle une planète stylisée sous forme de dé.
Le Noyé (1884) célèbre les ténèbres solaires
apocalyptiques. Dans ses Noirs, les formes
hybrides correspondent à l’intérêt de Redon
pour la théorie évolutionniste du darwinisme et
la métamorphose des formes, dont L’Araignée
souriante (1881) ou Fleur de marécage (1881)
sont de beaux exemples. Que beaucoup de ses
contemporains l’aient considéré comme « peintre des monstres » n’étonne donc guère. Il ne
faut pas manquer non plus les onze planches
lithographiques intitulé Dans le rêve (1879), qui
témoigne de l’importance qu’avait pour Redon
le monde onirique. Les Surréalistes ne s’y tromperont pas et afficheront leur filiation directe
avec cet artiste.
Exploration
Après s’être consacré essentiellement au
fusain et à la lithographie, Odilon Redon va
explorer, dans les années 1990 d’autres techniques, l’huile et le pastel, prenant pour sujet les
yeux clos et les scènes de nuits mystiques. Des
techniques qui lui permettent d’introduire la
couleur. Son œuvre Yeux clos (1894) annonce ce
passage de l’ombre à la lumière. De même La
Mort de Bouddha (1899) donne aux couleurs
une intensité et une pureté uniques. Cette
découverte de la force de la couleur trouve son
point d’orgue avec les thèmes mythologiques
tels que celui du Char d’Apollon dont sont présentées plusieurs versions. Dans son interprétation artistique du sujet, il rend hommage à son
mentor Eugène Delacroix qui, un demi-siècle
avant lui, avait traité le même sujet. Le char
d’Apollon représente le triomphe de la lumière
sur les ténèbres. Dans cette fête de la lumière,
l’objet de la représentation se dissout peu à peu
dans la couleur pure. Une salle regroupe le
thème de la spiritualité et de la sacralité aussi
bien chrétienne que bouddhiste. Que ce soit le
Christ en croix (1895) d’où tout réalisme est
absent et où le motif semble se dissoudre en
pures surfaces chromatiques ou Le Bouddha
(1905) dont il cherche à rendre l’instant précis
de l’illumination, toutes ces peintures offrent
par la délicate splendeur de la palette, une forme
de sérénité méditative.
Au contact du botaniste Armand Clavaud,
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Redon a observé la
nature différemment
de manière microscopique et précise
mais en même
temps, il a laissé
libre cours à son
imagination. Dans
Papil-lons (1910),
c’est une version
poétique du botaniste qu’il nous est
donné de voir, dans
laquelle il exprime
que l’origine de la
vie terrestre est
aquatique. Une toile
tout en contraste
Odilon Redon «Martyr» ou «Tête de martyr sur une coupe»
avec le caractère
ou «Saint Jean», 1877
pesant et sombre des
Charbon sur papier, 36,6 x 36,3 cm. Musée Kröller-Müller, Otterlo
Photo: Collection Musée Kröller-Müller, Otterlo
rochers auquel s’oppose la douceur, la
légèreté, les couleurs somptueuses des tent les harmonies chromatiques, qui exercent
sur le spectateur « une force contemplative
papillons.
presque
méditative », souligne le texte du comDans son œuvre tardive, Odilon Redon a
missaire.
découvert le champ d’expérimentation du genre
Le Musée d’Orsay s’est montré particulièrede la nature morte de fleurs. Une salle a été
ment
généreux avec neuf œuvres prêtées dont
réservée au centre du parcours, qui présente de
plusieurs
panneaux muraux décoratifs, réalisés
somptueux bouquets. Peu importe à l’artiste la
pour
la
salle
à manger du château du Baron de
précision botanique. Il y va plus de l’explosion
Domecy
en
Bourgogne,
et qui sont placés dans
chromatique. « L’art est une fleur qui s’épale
foyer
pour
accueillir
le
visiteur. Même si des
nouit librement, hors de toute règle », écrit l’aréléments
de
la
nature
sont
reconnaissables,
tiste. Le sujet peu sembler mièvre mais ces boucomme
des
troncs
d’arbre,
des
feuilles,
des bourquets dont beaucoup proviennent de collections
geons
de
fleurs,
Redon
dépasse
le
narratif
orneprivées (Bouquet sur fond noir (1905), Fleurs
mental
et
ouvre
la
voie
vers
une
première
forme
(1909), Le grand vase turquoise (1910)) sont à
d’abstraction. C’est aussi dans cette expression
voir comme un hommage à la couleur pure.
que s’inscrit la modernité de l’artiste.
Harmonies chromatiques
Les portraits que réalisent Redon après
1900 sont généralement des œuvres de commande. Il ne s’agissait pas seulement pour lui de
rendre l’aspect extérieur du modèle mais surtout
l’essence de cet être humain. Trois portraits ont
été réunis sur un mur : Mademoiselle de Gonet
(1907), Portrait de Mademoiselle Chaine
(1903) et Femme au corsage fleuri (1912) dans
lesquels il recourt au motif des fleurs, évoquant
ainsi une interaction de l’être humain et de l’univers floral.
On sait combien l’eau a inspiré les impressionnistes. Odilon Redon traite le même sujet,
se servant du motif de la barque, qui dérive sur
une mer calme, en route vers une destination
inconnue. Aussi ni le lieu, ni le temps, ni les
personnages n’ont d’importance. Seules comp-
a
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Que le visiteur ne boude pas son plaisir,
puisque c’est à une belle promenade dans l’œuvre d’Odilon Redon, qu’il est convié. Mais
après avoir lu l’introduction du catalogue, qui
analyse les influences de Redon sur les Nabis,
Matisse, Yves Klein, Picasso, Kandinsky,
Mondrian, Kelly, Duchamp, on peut se demander s’il n’eût pas été plus intéressant de composer le parcours de l’exposition en intégrant les
œuvres de tous ces artistes, qui doivent tant à
Odilon Redon. L’exposition aurait alors gagné
en substance, en originalité et en nouveauté.
Régine Kopp
Jusqu’au 18 mai 2014
www.fondationbeyeler.ch
é
71
expos itions
en
FRANCE Grenoble
Annemasse
Villa du Parc : La République - medio
l
tutissimus ibis. Jusqu’au 22 mars.
Annecy
La Turbine-CCSTI : Les doigts dans
l
le cerveau. Jusqu’au 30 mars.
Baux-de-Provence
Carrières de lumières : Klimt et
l
Vienne. Un siècle d’or et de couleurs.
Jusqu’au 4 janvier 2015
Biot
Musée
national Fernand
Léger : Fernand Léger, reconstruire
le réel. 1924-1946. Jusqu’au 2 juin
l
Carcassone
Musée des Beaux-Arts de
l
Carcassonne : Corot dans la lumière
du Nord. Jusqu’au 21 mai.
72
Evian
Palais Lumière : Joseph Vitta l
Passion de collection. Jusqu’au 1er
juin.
l Bibliothèque d’étude et d’infor-
mation : Paroles de palette. Diodore
Rahoult (1819-1874). Jusqu’au 1er avril
l Magasin-Centre national d’art
contemporain : Ericka Beckman
Works 1978-2013 / Philippe
Decrauzat - «Notes, Tones, Stone» /
Blair Thurman. Jusqu’au 4 mai.
l Musée de l’Ancien Évêché :
Paroles de palette. Diodore Rahoult
(1819-1874). Jusqu’au 1er avril.
Le
Havre
Musée d’Art moderne André
l
Malraux : Le siècle d’or de la
peinture danoise : une collection
française. Jusqu’au 11 mai.
Lens
Le Louvre : Les Etrusques et la
l
Méditerranée. La cité de Cerveteri.
Jusqu’au 10 mars. Voir le Sacré.
Jusqu’au 21 avril.
Lille
Musée d’Art moderne : Meret
l
Oppenheim.
Rétrospective.
Jusqu’au 1er juin.
franc e
Lodève
Musée de Lodève : Bonnard,
l
Renoir, Vuillard / la Collection
Arkas. Juqu’au 30 mars
Lyon
Musée des beaux-arts : Tony
l
Garnier et l’Exposition internationale de 1914. Jusqu’à fin mars.
Marseille
Centre de la Vieille Charité :
l
Visages, Picasso, Magritte, Warhol.
Jusqu’au 22 juin.
l MuCEM : Splendeurs de Volubilis Bronzes antiques du Maroc et de
Méditerranée. Du 12 mars au 25 août.
Des artistes dans la cité. Du 15 mars au
8 septembre. Le Monde à l’envers Carnavals et mascarades d’Europe et
de Méditerranée. Du 26 mars au 25
août.
Metz
Centre Pompidou-Metz
:
Paparazzi ! Photographes, stars et
artistes. Jusqu’au 9 juin.
l
Montéliard
Musée du château des ducs de
Wurtemberg : Jules-Emile Zingg à
Perros-Guirec. Voyage japonisant d’un
peintre montbéliardais en Bretagne
(1914-1930). Jusqu’au 23 mars.
Montpellier
Musée Fabre : François-André
l
Vincent, 1746-1816, un peintre entre
Fragonard et David. Jusqu’au 11 mai.
St.Paul
de Vence
Fondation Maeght : « Djamel
l
Tatah » - Monographie. Jusqu’au 16
mars
Sèvres
Musée de la Céramique :
l
Picasso céramiste et la Méditerranée.
Jusqu’au 19 mai
Strasbourg
Musée d’Art Moderne et
l
Contemporain : Doré & Friends.
Jusqu’au 25 mai.
Valenciennes
Musée des Beaux-Arts :
l
Constant Moyaux (1835-1911).
Jusqu’au 23 mars.
l
Centre Pompidou-Metz
Paparazzi !
Le Centre Pompidou-Metz consacre une exposition pluridisciplinaire sans
précédent au phénomène et à l’esthétique de la photographie paparazzi à travers plus de 600 œuvres (photographies, peintures, vidéos, sculptures, installations…).
Parcourant un demi-siècle de photographies de stars, l’exposition se penche sur le métier de chasseur d’images, en abordant les rapports tout aussi
complexes que passionnants qui s’établissent entre le photographe et la célébrité, jusqu’à révéler l’influence du « phénomène paparazzi » sur la photographie
de mode.
En associant les grands noms de la discipline, tels Tazio Secchiaroli, Ron
Galella, Rostain et Mouron, à des oeuvres de Richard Avedon, Raymond
Depardon, William Klein, Gerhard Richter, Cindy Sherman ou encore Andy
Warhol, qui se sont interrogés sur ce mythe moderne, l’exposition «Paparazzi !
Photographes, stars et artistes» a pour ambition de définir les caractéristiques
d’une esthétique paparazzi.
Le métier de paparazzi est plus complexe qu’il n’y paraît. Les paparazzi se
doivent d’être ingénieux. Chacun d’entre eux possède ses trucs et ses anecdotes, autant d’éléments fondateurs du grand récit du « paparazzisme ». Les
cibles sont majoritairement des incarnations de la féminité : Brigitte Bardot,
Jackie Kennedy-Onassis, Liz Taylor, Stéphanie et Caroline de Monaco,…
Toutefois, ces stars ne sont pas toujours les victimes passives des paparazzi...
elles peuvent également entrer dans le jeu du photographe en se montrant
réceptives, voire complices.
L’esthétique paparazzi (la prise de vue au téléobjectif, le grain de l’agrandissement, le coup de flash, etc.) a inspiré quantité d’œuvres à des artistes
contemporains, tels Viktoria Binschtok, Malachi Farrell, Kathrin Günter, Alison
Jackson, ou encore Armin Linke.
. A voir jusqu’au 9 juin
Martin Xavier «Jack Nicholson en bateau, Saint-Tropez», juillet 1976
© Martin Xavier
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e
n
d
a
expos itions
en
europe
Albertina, Vienne
De Dürer à Napoléon
Pour son exposition de printemps, l’Albertina propose de se pencher sur les
origines du musée, sous le thème « De Dürer à Napoléon » et, pour la première
fois, accroche à ses cimaises environ 200 chefs-d’œuvre sortis de sa collection
et liés à l’histoire de ses fondateurs, le Prince Albert de Saxony, le Duc de
Teschen et l’Archiduchesse Marie Christine.
Cette présentation à grande échelle réunit les points culminants de la collection, de Michelangelo à Rembrandt et de Rubens à Caspar David Friedrich.
Elle s'étend plus précisément de 1738 à 1822 : du Baroque sous Maria Theresia
au Siècle des Lumières sous Joseph II, pendant la période prémoderne et les
années des révolutions en Amérique, et en Europe à la période Biedermeier du
Vormärz (les années menant jusqu'aux révolutions de 1848 en Allemagne) après
le Congrès de Vienne.
Albrecht Durer, «Lievre», 1502 © Albertina, Vienne
La pièce maîtresse de l'Albertina, le célèbre «Jeune Lièvre» de Dürer,
sera à nouveau accessible au public dans le contexte de cette exposition.
Les incursions dans la vie des fondateurs de la collection présentent les
principaux centres d'art et de politique et fournissent un aperçu des réseaux
des marchands d'art, de la vie féodale de l'aristocratie européenne, aussi bien
que la réorientation politique et intellectuelle sous les auspices du Siècle des
Lumières.
. A voir du 14 mars au 29 juin 2014
AILLEURS
Bologne
Palazzo Fava : «La Jeune fille à la
l
perle». L’Age d’or de la peinture hollandaise. Jusqu’au 25 mai.
Bruxelles
Palais des Beaux-Arts : Zurbarán.
l
Maître de l’âge d’or espagnol.
Jusqu’au 25 mai. Michaël Borremans.
Jusqu’au 3 août
Ferrare
Palazzo dei Diamanti : Matisse. La
l
silhouette. La force de la ligne, l’émotion des couleurs. Jusqu’au 15 juin
Florence
CCC Strozzina : Contexte familial.
l
Portaits et expériences de familles
d’aujourd'hui. Du 20 mars au 20 juillet
l Galleria del Costume : Le chapeau
entre art et extravagance. Jusqu’au 18
mai.
l Palazzo Strozzi : Pontormo et Rosso.
Les divers chemins du Maniérisme. Du
8 mars au 20 juillet.
l Villa Bardini : Photographies de
1975 à 2013. Jusqu’au 16 mars.
a
g
Forli
Musée San Domenico : Liberty.
l
Un style pour l’Italie moderne.
Jusqu’au 15 juin.
73
Rembrandt Harmensz. von Rijn, «Un elephant», 1637. Albertina, Vienne
Tate Modern : Paul Klee - Making
Visible. Jusqu’au 9 mars.
l Victoria & Albert Museum : L’art
perdu de l’écriture. Jusqu’au 30
juin. Dessins britanniques - De
1600 à nos jours. Jusqu’au 13 avril
l
Francfort
Städelmuseum : Emil Nolde, Madrid
Fondation Mapfre : Pontormo,
l
rétrospective. Du 5 mars au 15 juin
Londres
British Museum : V
IKINGS - vie et
légende. Du 6 mars au 22 juin. Au-delà
de l’Eldorado. Pouvoir et or dans l’ancienne Colombie. Jusqu’au 23 mars.
Hommes sages de l'est. Les traditions
zoroastriennes en Perse et au-delà.
Jusqu’au 27 avril.
l Courtauld Gallery : Un dialogue
avec la nature. Paysages romantiques
de Grande-Bretagne et d’Allemagne.
Jusqu’au 27 avril.
l Estorick Collection of Modern
Italian Art : Giorgio de Chirico Mythe and Mystère. Jusqu’au 11 mai
l National Gallery : Etrange beauté - maîtres de la Renaissance allemande. Jusqu’au 11 mai
l Queen’s Gallery, Buckingham
Palace : Castiglione, génie perdu.
Jusqu’au 16 mars.
l Royal Academy : Frar. Jusqu’au
l
e
n
l
dessins. Jusqu’au 11 mai.
l Musée du Prado : Les Furies. De
Titien à Ribera. Jusqu’au 4 mai.
Rubens - Le Triomphe de
l'Eucharistie. Du 25 mars au 29 juin
l Musée Thyssen-Bornemisza :
Cézanne. Jusqu’au 18 avril. Darío
de Regoyos (1857-1913). Jusqu’au
1er juin
Milan
Galleria Gruppo
Credito
Valtellinese : Franco Grignani.
Jusqu’au 15 mars
l
Escher. Paradoxes graphiques entre
arts et géométrie. Jusqu’au 23 mars.
Rome
Galerie d’art contemporain : À tral
vers Rodin. La sculpture italienne
de la première moitié du XXe siècle. Jusqu’au 18 mai.
l Museo di Roma : Dessins d’architecture du XVIIIe. Jusqu’au 31 mars.
l Palazzo Cipolla : Modigliani,
Soutine et les artistes maudits. La collection Netter. Jusqu’au 6 avril.
Rovigo
Palazzo Roverella : L’obsession norl
dique. Böcklin, Klimt, Munch et la peinture italienne. Jusqu’au 21 juin.
Venise
Peggy Guggenheim Collection:
l
Themes & Variations. The Empire of
Light. Jusqu’au 14 avril.
Ravenne
Vienne
Musée d’art de la Ville : Le charme
Albertina Museum (Albertinapl.)
l
l
de la fresque. Chefs-d’œuvres détachés de Pompeï à Giotto et de
Corrège à Tiepolo. Jusqu’au 15 juin.
DE DÜRER À NAPOLÉON. Du 14 mars
au 29 juin.
l Belvedere : VIENNA - BERLIN. L’Art
de deux villes. Jusqu’au 15 juin.
Rita Vitorelli. Du 13 mars au 6 avril
Reggio
Emilia
Palazzo Magnani : L’énigme
l
d
a
expos itions
Genève
Art & Public (Bains 37) Franz
l
74
West. Du 20 mars au 11 avril.
l Bibliothèque d’art et d’archéologie (Promenade du Pin) Les livres de
photographes - Un musée de papier
pour l’image. Jusqu’au 31 mai.
l Blancpain Art Contemporain
(Maraîchers 63) Jérôme Leuba, Yves
Mettler. Jusqu’au 15 mars. Sarah
Burger / Pascal Danz. Du 20 mars
au 2 mai.
l Blondeau & Cie (Muse 5) Adel
Abdessemed. Du 20 mars au 3 mai
l Cabinet d’Arts graphiques
(Promenade du Pin 5) Not Vital.
Jusqu’au 13 avril.
l Centre d'Art Contemporain
(Vieux-Grenadiers 10) Robert
Overby & Nicole Miller. Jusqu’au
27 avril.
l Centre de la Photographie (Bains
28) Max Regenberg & Emmanuelle
Bayart. Jusqu’au 23 mars.
l Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle)
Francisco Sepulveda et Serge
Cantero / L’envers du miroir. Du
1er au 30 mars.
l Fondation Bodmer (Cologny)
Wagner ou l’opéra hors de soi.
Jusqu’au 23 février
l Gagosian Gallery (Longemalle
19) Rachel Whiteread. Jusqu’au 22
mars.
l Galerie Bärtschi (rte des Jeunes
43) Cornelia Parker. Jusqu’au 21
mars. Fabian Marti. Du 25 mars au
16 mai.
l Galerie S. Bertrand (Simplon 16)
Sam Kaprielov. Jusqu’au 5 avril.
l Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Kira Weber. Jusqu’au 1er
mars. Antonio Saura. Du 20 mars au
17 mai.
l Galerie Anton Meier (Athénée 2)
Roger Chappellu. Jusqu’au 26 avril
l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers
9) Thomas Huber. Du 20 mars au 10
mai.
l Maison Tavel (Puits-St-Pierre 6)
Qu’as-tu appris à l’école ? La Criée
a 25 ans. Jusqu’au 16 mars.
l Mamco (Vieux-Granadiers 10)
Cycle Des Histoires sans fin, séquence printemps 2014. Jusqu’au 18 mai.
l Milkshake Agency (24, Montbrillant) Simone Holliger. Jusqu’au
25 mars.
l Musée Ariana (Av. Paix 10) Terres
d’Islam - L’Ariana sort de ses réverves II. Jusqu’au 31 août
l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Corps et Esprits.
Regards croisés sur la Méditerranée antique. Jusqu’au 27 avril.
en
Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin
10) Découvrez les Baga. Jusqu’au
30 mars.
l Musée Rath (pl. Neuve) Héros
antiques. La tapisserie flamande
face à l’archéologie. Jusqu’au 2
mars.
l Musée de la Réforme (Maison
Mallet) Enfer ou paradis, aux sources
de la caricature. Jusqu’au 16 février.
l Saint-Gervais Genève (r. Temple)
La porte du non-retour, une exposition de Philippe Ducros. Jusqu’au
9 mars
l Villa Bernasconi (8, rte Gd-Lancy)
Un temps sur mesure / Esther
Ferrer, La Ribot, Olga de Soto,
Olga Mesa & Francisco Ruiz de
Infante. Jusqu’au 23 mars.
l
Lausanne
Collection de l’Art brut (Bergières
l
11) Véhicules. Jusqu’au 27 avril
l Fondation de l’Hermitage (2, rte
Signal) Le goût de Diderot. Greuze,
Chardin, Falconet, David....
Jusqu’au 1er juin
l Mudac (pl. Cathédrale 6) Le verre
s uis s e
vivant. Acquisitions récentes de la
collection d'art verrier. Jusqu’au 16
novembre.
l Musée cantonal des beaux-arts (pl.
Riponne) Giacometti, Marini, Richier.
La figure tourmentée. Jusqu’au 27
avril.
l Musée de l’Elysée (Elysée 18)
Philippe Halsman, Etonnez-moi !
Jusqu’au 11 mai.
Chaux/Fonds
Musée des beaux-arts : L’art
l
belge entre rêves et réalités.
Chefs-d’œuvre du Musée d’Ixelles.
Du 9 mars au 1er juin
Fribourg
Espace Jean Tinguely-Niki de
l
Saint Phalle : Corps en jeu / la collection du MAHF. Jusqu’au 24
août.
Lens
/ Crans
Fondation Pierre Arnaud
l
:
Divisionnisme. Jusqu’au 22 avril.
Martigny
Fondation Pierre Gianadda : La
l
Beauté du corps dans l'Antiquité
grecque. Jusqu’au 9 juin.
l Fondation Louis Moret (Barrières
33) Jean Scheurer - Zone grise.
Jusqu’au 24 mars.
l Le Manoir de la Ville : Show
Showed Shown. Du 6 mars au 13
avril
Neuchâtel
Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut
l
74) Balades avec le Minotaure.
Jusqu’au 9 mars.
l Laténium (Hauterive) Fleurs des
Pharaons. Jusqu’au 2 mars 2014.
l Musée d'art et d'histoire (espl.
Léopold-Robert 1) Argent - Jeux Enjeux. Jusqu’au 31 août.
Romont
VitroMusée : Le monde sous
l
verre de Fride WirtlWalser.
Jusqu’au 20 avril.
Musée Jenisch, Vevey
Manon Bellet
La prochaine exposition du musée Jenisch se penche sur l’œuvre d’une artiste née à Vevey en 1979,
mais vivant et travaillant à Berlin.
Manon Bellet a reçu
carte blanche pour organiser, sous l’intitulé
«L’onde d’une ombre»,
sa première exposition
dans un musée suisse, une
exposition qui bénéficie
de la collaboration du
Kunstmuseum Solothurn.
Dans ses installations monumentales, ses
œuvres en série ou ses
vidéos, Manon Bellet
témoigne d’une affection
particulière pour le
papier. Opaque ou
transparente, froissée ou
déchirée, lentement disloquée au contact du feu ou
frémissant au contact de
l’air, la page se meut et se
Manon Bellet, «Imageries du hasard», 2010, papier fax insolé,
transforme sous l’impulMusée Jenisch Vevey, don de la Fondation Lélo Fiaux
sion de l’artiste qui
explore, ainsi, ses nouvelles vies possibles. Légers ou opalescents, les papiers thématisent la fragilité de
l’existence, la mémoire et la ruine.
à l’occasion de son exposition, une monographie paraît aux éditions The Greenbox, Berlin.
. A voir du 21 mars au 1er juin 2014
Visite guidée : Jeudi 27 mars à 18h30 - Avec Julie Enckell Julliard, commissaire de l’exposition, et Manon Bellet
a
g
e
n
d
a
expos itions
en
PhotoforumPasqu’Art : Beat
Schweizer & Thomas Kneubühler.
Jusqu’au 20 avril.
l
Kunstmuseum, Winterthur
Gerhard Richter
Le Kunstmuseum de Winterthur propose actuellement une double exposition consacrée à Gerhard
Richter. Un artiste qui, rappelons-le, aura bientôt son propre musée au Japon.
La première, intitulée «Rubans et verre», est consacrée aux nouveaux moyens d’expression que l’artiste a développés au cours des dernières années; les œuvres qui en résultent
- peintures à la laque sur verre, sculptures de verre de grandes dimensions...
- sont exposées pour la première fois
dans un musée, et c’est Gerhard
Richter lui-même qui en a conçu la présentation.
. A voir jusqu’au 21 avril 2014
Gerhard Richter «Flow (933-3)», 2013. Laque sur verre, monté sur
Alu-Dibond, 100 x 200 cm © Gerhard Richter, Köln 2013
En parallèle, le musée présente sa collection d’œuvres sur
papier de Gerhard Richter, un ensemble extraordinaire
aujourd'hui. Cette collection comprend des dessins des années
1960 jusqu'à 1999, des aquarelles et des peintures dans des
couleurs à l'huile sur le papier ou sur des photos. Elle est complétée avec les cycles l'Elbe et novembre, un travail de jeunesse et un ouvrage tardif qui se correspondent de manière surprenante.
. A voir jusqu’au 27 juillet 2014
Gerhard Richter «10.11.1995», 1995
Couleurs à l’huile sur papier, 41.8 x 29.7 cm. Kunstmuseum Winterthur
Vevey
Alimentarium : Délices d’artisl
tes. L’Imaginaire dévoilé des natures mortes. Jusqu’au 30 avril.
l Musée Jenisch : Manon Bellet /
L’onde d’une ombre. Du 21 mars au
1er juin
l Musée suisse de l’Appareil photographique (Grand Place) Bernard
Dubuis, Tant et temps de passages. Du 21 mars au 30 août.
OUTRE SARINE
Aarau
Aargauer Kunsthaus : Veronika
l
Spierenburg - Prix Culturel Manor
2013 & Matthias Wyss. Jusqu’au 21
avril
Bâle
Antikenmuseum
l
Basel (St.
Alban-Graben 5) Comment être un
homme? Le sexe fort dans l'antiquité. Jusqu’au 30 mars.
a
g
Cartoon Museum (St. AlbanVorstadt 28) Le monde selon Plonk
& Replonk. Du 22 mars au 22 juin.
l Fondation Beyeler (Riehen)
Odilon Redon. Jusqu’au 18 mai.
l Kunsthalle : Ross Birrell et David
Harding – Winter Line. Jusqu’au 23
mars. Rita Ponce de León – Endless
openness produces circles.
Jusqu’au 30 mars.
l Kunstmuseum (St. Alban-Graben
16) Les masques intriguées - James
Ensor. Du musée royal d'Anvers et
dans les collections suisses.
Jusqu’au 25 mai. Kasimir
Malewitsch - Le monde comme nonfiguration. Jusqu’au 22 juin
l Museum für Gegenwartskunst
(St. Alban-Rheinweg 60) Le
Corbeau et le Renard. Révolte de la
langue avec Marcel Broodthaers. Du
22 mars au 17 août.
l Cartoonmuseum (St. AlbanVorstadt 28) Les Aventures de la
Ligne claire. L'affaire Herr G. & Co.
Jusqu’au 9 mars.
l HMB - Museum für Musik / Im
Lohnhof (Im Lohnhof 9) pop@bâle.
l
e
n
s uis s e
La musique pop et rock depuis les
années 1950. Jusqu’au 29 juin.
l Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Objets ludiques. L'Art
des possibilités. Jusqu’au 11 mai.
l Spielzeug Welten Museum :
Marilyn privée: l'être humain derrière le concept Monroe. Jusqu’au
6 avril.
Berne
Centre Paul Klee (Monument im
l
Fruchtland 3) Hanna Bekker vom
Rath, promotrice de l'art moderne.
Jusqu’au 23 mars. Paul Klee – Vie et
Œuvre. Jusqu’au 30 mars.
l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr.
8-12) Rétrospective Germaine
Richier. Jusqu’au 6 avril. Hieronymus
Grimm (1733-1794), illustrateur et
caricaturiste. Jusqu’au 21 avril.
Markus Raetz. Estampes et sculptures. Jusqu’au 18 mai.
Bienne
CentrePasqu’Art (fbg Lac 71-75)
l
Barbara Probst & Telling Tales.
Jusqu’au 6 avril.
d
a
Warth
Kunstmuseum Thurgau : Joseph
l
Kosuth. L’existence et le monde.
Jusqu’au 24 août.
Weil
/ Rhein
Vitra Design Museum : Konstantin
l
Grcic - Panorama. Du 22 mars au
14 septembre.
Winterthur
Fotomuseum (Grüzenstr. 44)
l
Surfaces. Nouvelle photographie
de la Suisse. Du 8 mars au 24 août.
Deposit, projet de Yann Mingard.
Du 8 mars au 25 mai.
l Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) Iren Stehli - Si près, si loin.
Du 8 mars au 25 mai.
l Kunstmuseum (Museumstr. 52)
Gerhard Richter - Lignes et verre.
Jusqu’au 20 avril. Gerhard Richter Travaux sur papier de la collection.
Jusqu’au 27 juillet.
l Museum Oskar Reinhart
(Stadthausstr. 6) Les peintres de
Winterthur à travers les siècles.
Jusqu’au 1er juin.
l Villa Flora (Tösstalstr. 44) Chefsd’œuvre de la collection Hahnloser
/ Jaeggli : Bonnard, Van Gogh,
Vallotton.... Jusqu’au 27 avril.
Zurich
Haus Konstruktiv
l
: Victor
Vasarely – La redécouverte du
peintre. Jusqu’au 18 mai.
l Kunsthalle : Tobias Madison.
Jusqu’au 24 mars. Ed Atkins Slaves et Tatares. Jusqu’au 11 mai.
l Kunsthaus (Heimpl.1) De Matisse
au Cavalier bleu - l’expressionnisme en Allemagne et en France.
Jusqu’au 11 mai. Alberto
Giacometti. Jusqu’au 25 mai.
l Landesmuseum : Contes, magie
et Trudi Gerster. Jusqu’au 11 mai.
l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Henry van de Velde –
Intérieurs. Jusqu’au 1er juin.
l
Museum für Gestaltung
(Austellungsstr. 60) Galerie : Vintage
– Design with a History. Jusqu’au 6
avril. Halle : Affiches d'artistes
japonais - Fleurs de cerisier et
ascétisme. Jusqu’au 25 mai.
l Museum Rietberg (Gablerstr. 15)
Art de la Côte d’Ivoire. Jusqu’au
1er juin. Baldaquins pour la déesse.
Art textile en Inde. Jusqu’au 13
avril. Un jardin secret - Peinture
indienne de la collection Porret. Du
18 mars au 29 juin.
75
expos ition
musée des beaux-arts de lausanne : la figure tourmentée
Giacometti, Marini,
Richier
Quelles belles têtes d’affiche le mcb-a de Lausanne offre au public ! L’idée de
regrouper ces trois artistes majeurs, nés pratiquement la même année soit en
1901 et 1902, est particulièrement judicieuse car ils se sont en effet croisés à
plusieurs moments clés de leur carrière. L’exposition montre comment
chacun, souvent à rebours des mouvements d’avant-gardes, propose
une nouvelle image de l’homme.
76
Les questions de la perception du corps, de
l’expression de l’échelle, de la traduction du
mouvement, ou encore du rapport entre les figures et l’espace constituent un intérêt partagé par
les trois plasticiens. Mais il existe un autre
dénominateur commun ; ils ont tous été sous
l’influence du sculpteur français Antoine
Bourdelle, élève et héritier spirituel de Rodin.
Albert Giacometti suit les cours de Bourdelle à
l’Académie de la Grande Chaumière, de 1922
jusqu’en 1925. Germaine Richier y arrive dès
1926 et devient son élève particulière, puis en
1929, année de la mort de Bourdelle, elle épouse son principal collaborateur, le sculpteur zurichois Otto Charles Banninger. Marino Marini
quant à lui ne suit pas l’enseignement de
Bourdelle, mais durant la guerre il s’exile en
Suisse et fréquente Giacometti (qui a quitté
Paris pour Genève dès décembre 1941), Otto
Charles Banninger et Germaine Richier, avec
laquelle d’ailleurs il expose au Kunstmuseum
de Bâle en 1944, puis l’année suivante à la
Kunsthalle de Berne. Au-delà des liens d’amitié
qui ont pu se tisser entre eux durant ces temps
de conflit et d’exil, se forge également une communauté d’esprit guidant leurs recherches
respectives dans la réinterprétation de la figure
humaine.
Une matière tourmentée
Alberto Giacometti, «Homme qui chavire» [Taumelnder Mann], 1950, Bronze, 60 × 22 × 36 cm.
Paris, Musee d’Orsay, Depot im Musee Granet/Aix-en-Provence, Schenkung Philippe Meyer,
2000. Guss 3/6. © Succession Alberto Giacometti / 2013, ProLitteris, Zurich
Photo : RMN-Grand Palais / Michele Bellot
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A travers un parcours réunissant quelque
septante sculptures et œuvres graphiques,
disposées dans des espaces neutres et dégagés,
propres à la contemplation optimale des œuvres,
et surtout sans aucune scénographie branchée
venant surcharger le propos, l’exposition présente sobrement les réponses que les trois artistes offrent à la postérité, dans un contexte dominé par l’abstraction lyrique ou géométrique.
Qu’elles soient modelées dans la terre, le plâtre
ou coulées dans le bronze, les sculptures de
Giacometti, Richier et Marini tourmentent la
matière dans une sorte de confrontation aussi
physique que métaphysique avec la tradition
naturaliste. Aussi leurs têtes, bustes, figures en
pied ou portraits équestres puisent-ils à la fois
aux sources de la statuaire antique comme à celles de l’imaginaire populaire, mais avec l’idée
de créer un univers formel qui soit en mesure de
combiner les canons classiques avec la nouvelle esthétique de la fragmentation issue des
recherches cubistes et constructivistes.
Après son exclusion du groupe surréaliste
en 1935, Giacometti retourne à la figuration et
s’engage sur une voie qui l’amène à explorer la
vision proche et éloignée, une perception qui se
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expos ition
Germaine Richier, «La Mante», 1946,
bronze, 158 × 56 × 78 cm.
Geneve, Galerie Jacques de la Beraudiere.
© 2013, ProLitteris, Zurich
Photo : Droits reserves
bronze 1959) de Marino Marini, en passant par
l’Orage (bronze, 1947-48) ou La Mante (bronze, 1949) de Germaine Richier, la mise en perspective des trois artistes illustre un momentum
de l’histoire de la sculpture moderne. Ajoutons
que la présence en contrepoint d’œuvres de
Degas, Maillol, Dubuffet, Fautrier, Vieira da
Silva, contribuent à alimenter la réflexion sur
les enjeux stylistiques et esthétiques de l’époque, soumis à l’épreuve de l’abstraction.
Enfin, l’imposante Tête d’Apollon, réalisée
par Antoine Bourdelle en 1900, complète ce
riche corpus ; une pièce commencée alors qu’il
était encore actif dans l’atelier de Rodin et qui
annonce déjà la rupture avec les tourments
romantiques de son mentor. La synthèse formelle et constructive opérée par Bourdelle sera au
cœur de son enseignement : « Quand une sculpture est faite comme je vous le dis, ce n’est pas la
ressemblance que vous obtenez, c’est de la présence », tel est le message qu’il délivrait à ses
élèves (cité dans le catalogue de l’exposition:
Giacometti, Marini, Richier. La figure tourmentée, mcb-a Lausanne, Ed. 5 Continent, p. 100).
Françoise-Hélène Brou
Giacometti, Marini, Richier. La figure tourmentée.
Jusqu’au 27 avril 2014, Musée cantonal des Beaux-Arts,
Lausanne, Palais de Rumine Place de la Riponne 6.
fige sur les détails et qu’il conjugue à une extrême réduction formelle. Chez Richier la fragmentation opère par mutilation et hybridation,
procédé qui aboutit à une sorte de naturalisme
baroque où les forces élémentaires, organiques
et animales, s’opposent et se superposent à la
rationalité géométrique. L’approche de Marini
reflète son intérêt pour la statuaire de
l’Antiquité et de la Renaissance, mais avec lui
la simplification des formes, la tension des masses et des lignes en arêtes, expriment la vision
dramatique d’une humanité en voie de disparition, un sentiment qui ressort dans son travail
sur le bronze, après la fonte, par lequel il obtient
des effets saisissants de fossilisation.
De l’Homme qui chavire (bronze, 1950)
d’Alberto Giacometti au Cavaliere (Cavalier,
Marino Marini, «Il Grido» [Le Cri], 1962,
bronze, 76,8 × 125,3 × 66,5 cm. Pistoia,
Fondazione Marino Marini © 2013, ProLitteris,
Zurich. Photo : Mauro Magliani
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fondation henri cartier-bresson
Veramente
Guido Guidi
Du 16 janvier au 27 avril 2014, la Fondation
Henri Cartier-Bresson présente une importante
exposition de Guido Guidi, figure majeure de la
photographie contemporaine italienne.
Pour la première fois en France, les quarante ans de carrière du photographe, pionnier du renouveau de la photographie de territoire, sont retracés. Sur deux étages, les expérimentations en noir et blanc des années soixante-dix côtoient
les séries emblématiques couleur telles que In between cities,
A New map of Italy ou Preganziol.
«Puente la Reina, Espagne», 08.1995 © GuidoGuidi
Ombre et lumière
Architecte de formation, il considère son travail photographique
comme une documentation sur la vie italienne à travers ses espaces « périphériques » et leur transformation, ce qui est contraire à la tradition photographique « culturelle » traditionnelle documentant les lieux et monuments classiques.
Son travail du début, en noir et blanc, est déjà plus qu’un simple
« répertoriage » : c’est une mise en image magnifique des différents plans
d’ombre et de lumière. On retrouve cette même démarche dans son travail ultérieur en couleur. Il réalise ainsi ses premières enquêtes photographiques personnelles en Émilie-Romagne, à Ravenne, à Porto Marghera.
Afin de documenter l’expansion de l’Union Européenne et les
nouveaux territoires urbains, il n’hésite pas à s’éloigner. En
1993, il entre-prend avec l’architecte Marco Venturi un périple
en Europe. Lors de trois voyages de deux semaines, ils suivent
le maillage routier qui relie Saint- Pétersbourg à Finisterra
(Espagne).
Dans ces photographies, que l’on retrouve en partie au
premier étage de l’exposition, Guidi s’intéresse aux espaces
indéfinis entre les villes européennes, territoires en mouvement, sans cesse transformés par l’homme.
Dans ces lieux, quelconques à première vue, qu’il nous
dépeint avec un magnifique sens de la construction, figure toujours une présence humaine : enfants, adultes en groupes ou
isolés, voitures garées, voire traces de passages récents tel un
gant de caoutchouc oublié sur une route déserte. Il se dit avoir
été dans ses débuts moins inspiré par la photographie que par
la vision des réalisateurs italiens des années 50-60 dits « nouveaux réalistes », en particulier dans ses prises de vue de la
périphérie urbaine. Pour lui, c’est là que peut se voir le passage entre le passé et le futur par les modifications qui s’y opèrent, mais toujours en la présence d’objets et de détails contemporains.
Christine Pictet
Jusqu’au 27 avril 2014
«Fosso Ghiaia, Italie», 1971 © Guido Guidi
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opéra
Fanciulla sans western
La Fanciulla del West fait une entrée fracassante à la Bastille, dans une
production particulièrement remarquable. Son originalité semble choquer les
habitudes d’une portion du public, dérangée dans son confort, mais les bravos,
en cadence, finissent par l’emporter. Succès mérité !
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A la Bastille : «La Fanciulla del West», vue d'ensemble avec Alexandre Duhamel (Jack Wallace)
en blanc au-dessus de la scène. Crédit : Opéra national de Paris/ Charles Duprat
L’opéra, l’un des derniers de Puccini, est
peu fréquent sur les scènes lyriques. Sort injuste. Désormais réparé, avec un certain panache.
L’opéra souffre apparemment de son sujet,
campé dans l’Ouest des chercheurs d’or, avec
ses cow-boys, son shérif, ses bandits mexicains,
son héroïne amoureuse et tenancière de tripot :
un western ! Ce pittoresque trop connotée a dû
par la suite nuire à l’œuvre. Si ce n’est qu’en
1910, année de sa création au Met de New York,
le western n’était pas encore né. Reste une des
grandes ambitions de Puccini, une musique
savante pour l’orchestre, un traitement original
(avec sa fin heureuse, qui contredit les schémas
du vérisme), achevés en grand envol lyrique qui
préfigure le prochain Turandot.
Pour le metteur en scène, c’est aussi un
piège : éviter le chromo (du western précisément, et qui porterait facilement à la dérision),
tout en gardant le climat. Nikolaus Lehnoff y
parvient pleinement. Mais par des chemins
détournés. Le premier acte s’ouvre par une sorte
de réunion de motards gainés de cuir, ou une
vision de l’Amérique sauvage ; le deuxième fait
place, pour la rencontre des amants, à une cro-
a
quignolette roulotte ouverte sur le devant, toute
de rose capitonnée, plantée sur un sol enneigé
que gardent deux bambis en peluche sortis de
Walt Disney (une autre Amérique) ; alors qu’au
troisième acte, un cimetière de voitures (des
limousines américaines, bien évidemment)
découvre pour l’apothéose finale un grand escalier à la manière des revues de Broadway, que
descend l’héroïne grimée en Rita Hayworth, sur
fond projeté du lion rugissant de la Goldwyn
Mayer. Tout un catalogue de l’imaginaire étatsunien. Et une vision renouvelée des références
que l’œuvre appelle. Mais dans une précision de
jeu scénique de chaque instant, aussi bien du
côté des solistes que des masses (nombreuses et
constantes). Une conception à la fois large
(étant donnée la vaste Bastille) et juste, qui ne
peut au bout du compte que ravir. Presque un
exploit, au regard des risques de l’ouvrage.
Musicalement, le plaisir est aussi au rendez-vous. Nina Stemme plante la fragile
Minnie, mais qui ne l’est pas vocalement, avec
l’ardeur et les notes brillamment lancées qu’on
lui connaît. Marco Berti possède les capacités et
le timbre de ténor clair qui conviennent à
Johnson, l’amoureux transi. Claudio Sgura est
un Jack (le méchant de l’histoire) noir à souhait,
quand Roman Sadnik figure un Nick de bonne
prestance. L’orchestre, qui a la part belle,
comme le chœur, exclusivement masculin et qui
n’est pas non plus en reste, resplendissent sous
la battue sûre et fouillée de Carlo Rizzi (qui
essuie inexplicablement quelques huées finales,
de la part de la portion de public susmentionnée,
emportée apparemment par son élan contestataire).
Lucrèce et Kaiser
Le Viol de Lucrèce revient à l’Athénée,
dans la production où il fut présenté en 2007.
C’est toujours les voix de l’Atelier lyrique de
A l’Athénée : «Le Viol de Lucrèce» © Mirco Magliocca
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patriotisme, donne lieu à un jeu pétillant des
cinq acteurs-chanteurs, vêtus comme de nos
jours, sur une scène sans autre décor que le petit
groupe d’instrumentistes. Côté chant, l’efficacité est pareillement de mise pour les ensembles,
bien que Pieter Hendriks, Wendy Roobol et
Mijke Sekhuis livrent le meilleur des parties
solistes. L’Ensemble BarokOpera, venu
d’Amsterdam comme toute la production, s’attache à une partie instrumentale servie bravement sous la direction de Frédérique Chauvet.
Boris toulousain
A l’Athénée : «Der Kaiser von Atlantis» © Nathaniel Baruch
l’Opéra de Paris qui sont à la fête de l’un des
tous premiers opéras de Britten, mais renouvelées depuis ce temps. Oleksiy Palchykov remporte la palme du beau chant. Cependant
qu’Agata Schmidt défend vaillamment et joliment le rôle-titre. Maxime Pascal dirige son
orchestre le Balcon avec précision et élan. La
mise en scène de Stephen Taylor reste toujours
aussi aboutie, avec on plateau tournant et ses
situations bien tournées.
Dans ce même Théâtre de l’Athénée, succède un autre opéra, presque contemporain de
celui de Britten, mais qui a connu un autre destin : Der Kaiser von Atlantis. On sait qu’il fut
écrit dans les camps par Viktor Ullmann,
magnifique geste de résistance, pour ne ressortir que depuis les années 90. Juste retour d’un
splendide ouvrage expressionniste, avec sa caricature grinçante de la guerre et son lyrisme poignant. C’est ici Louise Moaty qui l’a conçu,
dans une absence d’imagerie, si ce n’est trois
toiles en forme de parachutes (des vrais !), tendues par des filins, qui se déploient et se resserrent autour d’une sorte d’échafaudage métallique. Il faut donc un peu d’imagination pour
reconstituer les déboires de cet empereur fou
(Hitler ?) et de sa cour sanguinaire. Dirigés par
Philippe Nahon, les musiciens de l’ensemble
Ars Nova sont toutefois adaptés, comme la distribution vocale (à une exception près), et en
particulier Pierre-Yves Pruvost, l’Empereur, et
Wassyl Slipak, la Mort. Les deux rôles-clefs.
ment. En l’espèce celle écrite par Purcell (d’une
durée d’une heure et demie) pour illustrer en
1684 la pièce théâtrale de Dryden (elle, longue
de quatre heures). Ce n’est donc pas un opéra,
comme l’annonce fièrement le programme de
salle. Mais notre époque l’a voulu ainsi, depuis
les travaux musicologiques des années 90 et la
reconstitution de la partition. Et c’est de cette
façon que l’ouvrage se présente à l’Athénée par
les soins de Sybrand van der Werf. Le texte
parlé a été resserré de façon drastique, réduit à
quelques répliques partagées entre l’anglais original et des traductions en français. C’est mieux
ainsi ! et on ne voit pas trop comment faire
autrement. Ce conflit entre Bretons (tels que se
désignent les anciens habitants de l’île britannique) et Saxons, sur fond d’allégories et de
L’orchestre du Capitole vient à Pleyel au
grand complet, avec l’appoint de l’Orfeón
Donostiarra et d’un plateau international de premier choix. Il s’agit d’une version de concert de
Boris Godounov ; choix judicieux, puisque
Tugan Sokhiev est à la baguette, le chef titulaire
de la phalange toulousaine et, depuis janvier,
directeur musical du Bolchoï. De fait, on aura
rarement connu le chef ossète aussi investi : galvanisant ses troupes dans une battue nerveuse de
chaque instant. Pour cette version originale de
l’opéra de Moussorgski (celle de 1869), plus austère et plus forte, est rassemblé le meilleur plateau actuel. Ferruccio Furlanetto est le Boris du
moment, rôle que la basse italienne a porté sur
toutes les planches, dont le Mariinski de SaintPétersbourg et le Bolchoï de Moscou. Et il ne
faillit pas. Anastia Kalagina, Ain Anger, Vasily
Efimov, Stanislas Mostovoi, John Graham-Hall,
Garry Magee ou Hélène Delalande, complètent
un plateau rêvé. Le chœur venu de SaintSébastien dispense l’ardeur et la subtilité qui ont
fait sa juste réputation.
Arthur hollandais
L’Athénée ne cesse pas ! C’est ainsi que
succède King Arthur, un mask. Qu’est-ce qu’un
mask ? Une musique de scène, tout simple-
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«Kibg Arthur» © DR
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Sons latins
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La foule se presse, venue parfois avec deux
bonnes heures d’avance, allongeant des files
d’attente sans fin dans la pluie et le froid, pour
entendre le Requiem de Berlioz sous la direction
de Gustavo Dudamel à Notre-Dame de Paris.
L’événement annoncé ne déçoit pas.
L’orchestre, constitué du Philharmonique de
Radio France au complet et du fameux
Orchestre symphonique Simón Bolívar (formé
de tout jeunes gens, souvent issus de milieux
défavorisés du Venezuela), soit 220 instrumentistes, sonne comme un seul homme. Et le
chœur, paradoxalement moins nombreux que
les instrumentistes (180 choristes, réunissant le
Chœur de Radio France et la Maîtrise NotreDame), s’avère un alliage parfait.
Salle bondée pareillement au Châtelet,
pour le concert “ ¡Viva las Américas! ” de
l’Orchestre Pasdeloup rassemblant des
musiques latino-américaines. Les pièces pour
orchestre des Argentins Carlos López Buchardo
et Carlos Guastavino, des Mexicains Manuel
Ponce et Arturo Márquez, du Cubain Ernesto
Lecuona, ou de Louis Moreau Gottschalk, compositeur originaire des États-Unis mieux connu
sous nos cieux (mais pas tant que cela), constitue autant de premières françaises et de découvertes passionnantes. Grâce à une transmission
qui resplendit sous la direction de Pierre
Dumoussaud, tout jeune chef de 23 ans, et les
doigts d’Olivier Besnard au piano.
Frimas nordiques
Autre climat à Pleyel avec l’Orchestre
Paris qui rend hommage au toujours jeune pianiste Menahem Pressler, pour ses 90 ans, et à
Sibelius. On reste ébahi devant la virtuosité et la
musicalité du soliste pour le Concerto n°23 de
Mozart, alors que les Sixième et Septième symphonies enchaînées du compositeur finlandais
révèlent les magnifiques qualités de la grande
formation parisienne depuis sa prise en main
par Paavo Järvi. (À noter le tout récent disqueanniversaire de Pressler, paru chez la Dolce
Volta, “ une soirée viennoise ”, avec Schubert,
Mozart et Beethoven au programme.)
Au Temple du Luxembourg, c’est la
musique russe qui est invitée avec des pages
pour piano ou des mélodies de Prokofiev,
Rachmaninov, Chostakovitch et Tchaïkovski,
par le doigté expert de Thomas Macfarlane et la
voix chaude du baryton L’Oiseleur des
Longchamps. Ce dernier est aussi le diseur captivant d’extraits de la nouvelle de Tolstoï,
a
s
Histoire du cheval pie. Puisqu’il s’agit de la première soirée du festival Victor Hugo et Égaux,
dédié pour cette édition à Tolstoï. Et aussi une
façon de marquer la nouvelle année chinoise du
cheval !
Pierre-René Serna
Deux reprises de prestige
Werther
L'opéra de Massenet n'a pas fait grande
carrière à l'Opéra de Paris jusqu'ici, car on
jugeait que l'ouvrage convenait mieux au cadre
plus intimiste de l'Opéra-comique. Pourtant,
lorsqu'il s'est agi de présenter Rolando Villazon
ou Jonas Kaufmann aux Parisiens, c'est bien
dans le grand vaisseau impersonnel de la
Bastille qu'on a transplanté le drame du jeune
poète allemand désespérément amoureux d'une
inaccessible beauté....
Pour cette nouvelle reprise, destinée à donner enfin l'occasion aux amateurs de la capitale
d'entendre le ténor italo-français Roberto Alagna
dans un de ses rôles de prédilection, la direction
de l'Opéra a décidé de reprendre une production
du Covent Garden de Londres qui a déjà servi de
cadre à la série de représentations confiées à
Jonas Kaufmann en janvier 2010, - spectacle qui
a d'ailleurs fait l'objet d'une captation télévisée
parue en DVD il y a quelques mois.
Il serait tentant, mais finalement vain, de
comparer l'art du ténor munichois à celui, plus
solaire et méditerranéen, de Roberto Alagna. Cet
artiste a en effet su faire sien un rôle qui semble
avoir été écrit pour son timbre, même s'il reste
évident que sa conception du personnage est aux
antipodes de ce qu'Edouard Blau, le librettiste du
drame lyrique, et Goethe, l'auteur du roman épistolaire original, ont souhaité. Peut-on alors parler
de trahison ? Certainement pas, car une œuvre
lyrique tirée d'un roman ou d'une pièce de théâtre procède déjà à des aménagements qui font
grincer des dents aux puristes. En représentation,
un opéra appartient d'abord à ses interprètes, et si
ceux-ci parviennent à convaincre leur public,
personne ne songe à se plaindre. Dans le cas particulier, le succès a été au rendez-vous, même si
les spectateurs ne sont pas accourus aussi nombreux qu'on eût pu le souhaiter..
Le contraste entre l'art des deux ténors qui
ont abordé le rôle titre dans cette production sur
la scène parisienne est saisissant. Là ou l'artiste
allemand creusait la ligne de chant jusqu'à
atteindre à des sommets de nostalgie morbide,
le chanteur français préfère tirer cet emploi vers
la lumière. La pâte sonore de sa voix s'y prête,
et l'interprète ne recule pas devant divers effets
appuyés pour souligner la tristesse, ici plutôt
démonstrative, de son personnage torturé. Ce
Werther aussi chaleureux qu'un amoureux sous
un ciel napolitain aurait à vrai mérité un autre
cadre scénique que la production minimaliste de
Benoît Jacquot qui semble embrouillardée à
l'excès devant tant de chaleur vocale.
Abandonné à lui-même, le ténor ne paraissait
pas très à l'aise dans ce cadre scénique plutôt
spartiate au point de se sentir enclin à "surjouer". Il est pourtant difficile de bouder son
plaisir quand ce timbre d'exception se coule
avec autant de facilité dans une musique dont
les relents nostalgiques sont décryptés avec un
plaisir ostentatoire aussi évident.
Le reste de la distribution est d'un excellent
A la Bastille : «Werther» avec Karine Deshayes (Charlotte) et Roberto Alagna (Werther)
Crédits : Opéra national de Paris/ Julien Benhamou
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niveau. Karine Deshayes prête à Charlotte son
timbre chaleureux, un peu mince dans le grave,
mais d'un beau métal dans le haut de la tessiture. Le jeu reste sobre, comme il se doit, mais
rend sensible la progression du trouble qui
monte en elle jusqu'au baiser final et passionné
qu'elle accorde tardivement à son amant malheureux qui vient de se tirer une balle dans la
poitrine. Hélène Guilmette en Sophie séduit par
la légèreté de ses accents comme par l'exquise
finesse d'une émission vocale d'une imparable
précision. Jean-François Lapointe est un Albert
plus convenu scéniquement; si le personnage
peine à exister sur le plateau, l'interprétation
musicale fascine par la richesse d'un timbre
flamboyant aux les nuances d'un extrême raffinement. Les autres personnages épisodiques
s'intègrent sans rupture de ton dans ce spectacle
dirigé de main de maître par un Michel Plasson
qui semble avoir trouvé la potion de l'éternelle
jeunesse à en juger par sa direction nerveuse,
riche en tensions et parfaitement apte à donner
à entendre ce que la mise en scène se refuse,
elle, à montrer.
Le cinéaste français Benoît Jacquot signe
là un spectacle qui a en effet plutôt mal vieilli;
dans le décor minimaliste et sans grande
atmosphère de Charles Edwards, il se contente
d'esquisser vaguement les situations dramatiques sans chercher à en explorer les prolongements éventuels qui pourraient passionner le
spectateur d'aujourd'hui. Purement illustrative,
une version aussi vide de sens semble malheureusement taillée pour rester de longues années
au répertoire car elle ne doit pas nécessiter d'importants travaux de reconstruction à chaque
nouvelle reprise... (5 février)
Retour d'Alcina
Alcina de Haendel, montée par Robert
Carsen, est une tout autre histoire. Cette production a été une des réussites majeures de la période où Hugues Gall fut le directeur de l'institution parisienne et a été inlassablement reprise, à juste titre! L'actuelle série de représentations
était en effet la quatrième depuis 1999, et elle
n'a pas pris une ride. Dans sa rigueur classique,
elle s'impose comme une des grandes recréations modernes des fastes de l'univers broque
sans jamais tomber dans le travers de la reconstitution luxueuse.
L'action se joue dans une antichambre, qui
fait penser à ce lieu indéterminé où se jouent
toutes les grandes tragédies classiques d'un
Racine ou d'un Corneille. Lorsqu'une porte s'ouvre sur une enfilade de pièces de même nature
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A Garnier : «Alcina» avec Anna Goryachova (Ruggiero) et Myrto Papatanasiu (Alcina)
Crédit : Opéra national de Paris/ J.M Lisse
ou sur un paysage bucolique noyé de lumière, la
musique semble soudain prendre une profondeur encore plus dramatique et retrouve une
fraîcheur d'inspiration que l'ascèse de la gestuelle et des mouvements aurait pu menacer de
détruire. La sensualité n'est jamais absente de ce
spectacle car le metteur en scène a veillé à montrer chaque nouvelle rencontre comme un
moment privilégié unique où les personnages
exécutent avec élégance des déplacements chorégraphiés au millimètre qui restent en parfait
accord avec la musique. A chaque instant, ce
spectacle s'impose ainsi comme le prolongement visuel légitime de ce que le compositeur
donne à entendre.
La distribution séduit d'abord par la parfaite adéquation des voix et des physiques aux
rôles interprétés, même si elle ne comporte pas
de noms de stars, comme ce fut le cas lors de la
première où Nathalie Dessay et Renée Fleming
se partageaient la vedette. Pourtant, le public n'a
pas eu à s'en plaindre, car ces jeunes interprètes
ont su trouver une unité de ton que l'on chercherait en vain dans le document phonographique
édité au lendemain de la prestigieuse première...
Mirto Papatanassiu ne révèle pas tout de
suite sa véritable grandeur de la personnalité
complexe d'Alcina. D'abord monocolore, le
chant prend progressivement de l'ampleur et
séduit alors autant par l'intensité de l'émotion
que par le fini de pianissimi éthérés qui remplissent sans peine le vaste auditorium du Palais
Garnier. Anna Goryachova en Ruggiero reste
aussi sur la réserve au début, comme si l'artiste
était effrayée par la difficulté d'écriture d'un rôle
parmi les plus complexes du répertoire. Mais
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l'interprète se lâche bien vite et habite le personnage avec un brio et une virtuosité technique
éblouissants. Sandrine Piau en Morgana fait étalage de dons de comédiennes hors pair; le
soprano est plutôt petit et étroit, mais l'artiste en
tire le meilleur parti en exploitant au maximum
un art sans limite de l'éloquence musicale dans
n'importe quelle situation. Quant à Patricia
Bardon, elle convainc pleinement dans le rôle
moins gratifiant de l'amoureuse délaissée grâce
à son chant souple et chaleureux rendant inhabituellement crédible le travesti qu'elle ne quitte
qu'en fin de représentation. Les hommes n'ont
pas le beau rôle dans cet ouvrage; pourtant le
ténor français Cyril Dubois donne tout son
poids dramatique à Oronte, l'amoureux transi
toujours prêt aux compromissions pour parvenir
à ses fins. Enfin, le jeune baryton-basse Michal
Partyka donne à Melisso le poids dramatique
nécessaire sans forcer le trait, comme c'est trop
souvent le cas.
A la tête de son ensemble Les Talens
lyriques, bien connu des amateurs lyriques de
l'Opéra lausannois, Christian Rousset propose
une version fort personnelle de la musique de
Haendel; tantôt précipitée, tantôt étirée à l'excès, son approche souffle le chaud et le froid au
risque, parfois, de freiner dangereusement le
flux dramatique du spectacle. Si les chanteurs
semblaient s'accommoder facilement de sa
relecture hautement idiosyncrasique, certains
spectateurs, eux, ne l'entendaient pas de cette
oreille et manifestèrent bruyamment leur
déplaisir en fin de spectacle. (7 février)
Eric Pousaz
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Il faut croire que ce passage du célébrissime roman de Joyce inspire actuellement le théâtre, si l’on se fie au spectacle présenté récemment au Théâtre Kléber-Méleau (voir Scènes
Magazine de février).
spectacle-lecture
Monologue de
Molly Bloom
Ici c’est Natalie Dessay qui a tout conçu,
aidée toutefois du montage de Sylvie Ballul et
des lumières d’Alain Dutain. La petite scène de
la Maison de la Poésie est vide, seulement peuplée d’un canapé, sur lequel l’héroïne s’étend et
rêve à bouche déployée, et d’un écritoire, où
elle finit par échoir et achever sa méditation.
Car il s’agit d’une méditation intérieure à haute
voix, d’un monologue certes, mais qui prend
des allures d’appel (au public dans ce cas).
Natalie Dessay varie les plaisirs. La cantatrice, célèbre pour ses grands
rôles à l’opéra, s’attaque désormais aussi au théâtre parlé. Ainsi de ce
Monologue de Molly Bloom, reprenant les pages finales d’Ulysse de
James Joyce, qu’elle a créé en septembre 2012 et qu’elle transporte sur
différentes scènes. Comme à la Maison de la Poésie.
Le texte est dru et cru, on le sait, qui n’évite pas le trivial, la précision sexuelle, comme
une certaine critique d’une société surannée.
Molly Bloom, alias Dessay, réfléchit sur sa
condition de femme, alors que son amant vient
juste de partir et que son mari vient de rentrer.
Et tout un monde surgit.
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Dessay joue le jeu, et joue à la scène
comme dans la vie. Voix caressante ou clamée,
la langue si particulière de Joyce prend alors
tournure, se fait brise ou tempête. On ne peut
s’empêcher de songer que l’actrice (la liseuse ?
la chanteuse de mots ?) s’incarne elle-même,
tant une vérité émane de ses dires. De la lecture, prétendue et telle qu’annoncée, reste un
cahier que Dessay feuillette négligemment.
Mais le son coule et le phrasé se fait impeccable, spontané, quasi improvisé.
On reconnaît l’excellente élocution de la
cantatrice aguerrie, qui à l’occasion pousse
aussi la note comme seule elle sait le faire (et
comme le texte s’y prête), mais aussi la comédienne qu’elle n’a jamais cessée d’être, sur toutes les planches. Dessay ou l’artiste aux visages
multiples.
Pierre-René Serna
Natalie Dessay © Simon Fowler
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au gémeaux, scène nationale de sceaux
au théâtre du rond-point
Les Gémeaux accueillaient, du 30 janvier au 1er février,
le Ballet du Grand théâtre de Genève pour un programme
rassemblant Lux de Ken Ossola et Glory d’Andonis
Foniadakis. C’était l’occasion de découvrir le travail de
ces deux danseurs chorégraphes, relativement méconnus
en France.
Créée en 2003, Erection est la première pièce conçue et
interprétée par Pierre Rigal. Depuis, l’ancien athlète a
acquis une belle notoriété dans le paysage chorégraphique
français et est pressenti pour créer une pièce pour la saison
prochaine du Ballet de l’Opéra de Paris. Le Théâtre du
Rond-point nous offrait l’occasion, du 9 janvier au
1er février, de voir ou revoir cette pièce.
Lux et Glory
Erection
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«Glory», photo Vincent Lepresle
«Erection», photo P. Rigal
La lumière de Lux, c’est celle des ténèbres. Le rideau qui se lève découvre, dans une ambiance crépusculaire, les danseurs allongés sur le sol.
Gestuelle contemporaine, fluide, la chorégraphie faite de scènes de groupes,
de solos et de pas de deux, est en parfaite harmonie avec la musique, extraite du Requiem de Gabriel Fauré. Les broderies scintillantes des justaucorps
de tulle font penser aux écorchés d’anatomie. Lux serait-il un ballet de fantômes, de morts vivants ? L’ensemble est assez envoûtant même si le rythme parfois s’essouffle et capte difficilement l’attention sur toute la durée.
Tempo différent avec Glory. Sauts, extension, les pas de deux dynamiques s’enchaînent dès les premières notes. Le ballet est une succession de
tableaux sur une alternance d’extraits d’œuvres d’Haendel et de morceaux
électroniques. Les tableaux ont une recherche esthétique intéressante, que ce
soit avec le jeu des lumières – scène avec les danseurs en ombre chinoise –
ou les costumes très recherchés et un brin futuristes de Tassos Sofroniou. On
retrouve dans la chorégraphie l’influence de Béjart avec qui Andonis
Foniadakis a travaillé. Glory apparaît comme un hommage à Haendel et à sa
glorieuse musique.
Pour Erection, Pierre Rigal a travaillé avec le metteur en scène
Aurélien Bory qui a connu également depuis une réelle reconnaissance
internationale. Erection met en scène un homme couché sur le sol, inscrit
dans un rectangle lumineux. Pendant trois quart d’heure, il va essayer de se
lever. Résumée ainsi, l’intrigue paraît bien mince. Pourtant, la chorégraphie
et la présence scénique de Pierre Rigal arrive à créer un certain suspens, une
certaine tension.
On vit, en le regardant, le poids de l’attraction terrestre, l’effort que
chaque muscle humain fournit pour se tenir debout sur deux jambes. Ces
efforts, nous les faisons inconsciemment, nous les ressentons parfois quand
la fatigue s’installe mais notre corps les a intégrés, ce qui nous distingue des
animaux. Pierre Rigal nous donne à voir le corps qui s’éveille, la recherche
de l’équilibre stable. La scène est éclairée par des néons blancs ou verts et
modulée par des projections vidéos de type hologramme. Erection est une
curiosité chorégraphique où le corps humain est particulièrement mis à
l’honneur.
Stéphanie Nègre
Stéphanie Nègre
La danse en mars
Le mois de mars démarre par un gala autour de Manuel Legris les 1er et 2 mars
au Palais des congès. Le directeur de Ballet de Vienne rassemble autour de lui, entre
autres, Aurélie Dupont, Ludmila Pagliero, Matias Heymann, Maria Shirinkina et
Vladimir Schlyarov du Ballet du Mariinski. Le Théâtre de Chaillot accueille, du 5 au
7 mars, Alban Richard et sa compagnie L’Abrupt pour Et mon cœur a vu à foison.
Alban Richard est l’auteur de Pléiades, vu la saison passée (voir numéro 251 de
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Scènes Magazine). Tero Saarinen prend la suite avec sa compagnie, du 13 au 15
mars, pour la reprise de Borrowed Light crée en 2004. Emanuel Gat est de retour au
Théâtre de la ville avec The Goldlanbergs, un ballet inspiré par les variations
Goldberg par Glenn Gould.
L’Opéra de Massy offre l’occasion de voir ou revoir, le 15 mars, Anastylose,
pas de trois de Julien Lestel créé il y a quelques années au Théâtre des Champs
Elysées.
Stéphanie Nègre
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Chronique musicale de mars 2014
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wagnérienne. Les 26 et 27, l'Orchestre de Paris dirigé par Giovanni
Sur la scène de la Bastille, Robert Carsen encore et toujours, cette fois Antonini avec Sol Gabetta et les chanteurs Camilla Tilling, Kate Lindsey,
chez Mozart avec une nouvelle production de Die Zauberflöte présentée Rainer Trost et Havard Stensvold seront réunis pour un concert où alterdu 11 mars au 15 avril : dans la fosse Philippe Jordan et sur le plateau neront les œuvres de Joseph Martin Kraus, Haydn et Mozart (Concerto
Pavol Brelsik, Eleonore Marguerre, Franz Josef Selig, François Piolino, pour basson et Messe de l'orphelinat). Le 28, l'Orchestre Philharmonique
Julia Kleiter et Sabine Devieilhe. Toujours à la Bastille, reprise de La de Radio France retrouvera Myung-Whun Chung et Ludovic Tézier dans
Bohème de Puccini mise en scène par Jonathan Miller et dirigée par un programme Duparc (Mélodies pour baryton et orchestre) et Beethoven
Daniel Oren avec, en alternance, Maria Agresta, Angela Gheorghiu et (Symphonie n° 7).
Brigitta Kele (Mimi), Anita Hartig et Elena Tsallagova (Musetta), Stefano
A l'Opéra-Comique version concert de Castor et Pollux de Rameau
Secco, Massimo Giordano et Piotr Beczala (Rodolfo), Ludovic Tézier et le 21, avec Bernard Richter (Castor), Florina Sempey (Pollux), Judith van
Lionel Lhote (Marcello) du 15 mars au 11 avril. Sur la scène du Palais Wanroij (Télaïre) et Michèle Lozier (Phébé), l'Ensemble Pygmalion diriGarnier à partir du 31 mars, dernière le 23 avril, reprise de L'Italiana in gé par Raphäel Pichon. Du 20 au 30 mars, Platée de Rameau toujours diriAlgeri de Rossini, version Andrei Serban dirigée par Riccardo Frizza : gé par William Christie et mise en scène par Robert Carsen réunira Marcel
pour ce nouveau cast, Ildebrando d'Arcangelo, Jaël Azzaretti, Anna Beekam dans le rôle titre, Simone Kermes (La Folie), Virginie Thomas
Pennisis, Nahuel di Pierro, Varduhi Abrahmayan et Tassis Christoyannis. (Thalie) et Cyril Auvity (Mercure, Thepsis).
Poursuite du cycle Convergence avec L'Histoire du soldat de Stravinsky
A Versailles le 8 mars, exécution de l'oratorio Herculanum de
les 5 et 6 mars (Jacques Bonaffé et l'EIC dirigé par Marius Stieghorst).
Félicien David par Hervé Niquet et le Brussels Philharmonic avec
Au TCE, le 2 mars, Vladimir Jurowski dirigera la 9ème Symphonie Véronique Gens (Lilia), Karine Deshayes (Olympia), Edgaras Montvidas
de Beethoven avec le London Philharmonic Orchestra et les solistes (Hélios), Nicolas Courjal (Nicanor, Satan) et Julien Véronèse (Magnus).
Emma Bell, Anna Stephany, John Daszak et Gerald Finley. Le 11 mars, Le 9 mars Sir John Eliot Gardiner dirigera l'English Baroque Soloists et
place aux Fêtes de l'hymen et de l'amour de Jean-Philippe Rameau pla- les solistes Silvia Frigato, Emanuela Galli, Nicholas Mulroy et Krystian
cées sous la direction de Hervé Niquet et du Concert Spirituel avec Adam dans Les Vêpres pour la Vierge de Monteverdi. Les 19, 21 et 23
Chantal Santon-Jeffery (Orthésie, Orie), Carolyn Sampson (L’Amour, Artaserse de Vinci, dans une mise en scène signée Silviu Purcarete avec
Memphis), Blandine Staskiewicz (L’Hymen, une Egyptienne), Jennifer Max Emanuel Cencic (Mandane), Franco Fagioli (Arbace), Vince Yi
Borghi (Mirrine), Reinoud Van Mechelen (Un berger égyptien, Osiris), (Artaserse), Juan Sancho (Artabano), Valer Sabadus (Semira) et Yuriy
Mathias Vidal (Un Plaisir, Agéris, Aruéris), Tassis Christoyannis Mynenko (Megabise), Diego Fasolis dirigeant le Concerto Köln. Le 28
(Canope), Alain Buet (Le Grand Prêtre, un Egyptien). Le 13 aura lieu le mars enfin La Resurrezione de Haendel par René Jacobs et Le Cercle de
80ème anniversaire de l'Orchestre National de France dirigé par Riccardo l’Harmonie avec Sophie Karthäuser (Maria Maddalena), Sunhae Im
Muti en compagnie de Bernarda Fink : au programme Rossini, Chausson (Angelo), Jeremy Ovenden (San Giovanni Evangelista), Sonia Prina
et Scriabine. Le 18 version concertante du Chevalier à la rose de Richard (Maria Cleofa) et Johannes Weisser (Lucifero).
Strauss dirigé par Kirill Petrenko à la tête de l'Orchestre de l’Opéra de
Concert exceptionnel de la soprano Soile Isokoski le 20 mars au
Munich : Soile Isokoski (La Maréchale), Sophie Koch (Octavian), Mojca Musée d'Orsay : au programme des œuvres de Schumann, Strauss, Wolf et
Erdmann (Sophie), Peter Rose
Sallinen accompagnées au piano
(Ochs) et Martin Gantner (Faninal)
par Ilkka Paananen.
feront partie de la distribution.
La Salle Gaveau propose en
L'Orchestre de chambre de Paris,
création mondiale L'échange
dirigé par Joseph Swensen, jouera
d'Antoine d’Ormesson auteur du
Chausson et Schumann avec la
livret et de la musique, spectacle
mezzo Ann Hallenberg le 19.
réalisé par Brigitte de La
La Salle Pleyel accueille les
Chauvinière et dirigé par Sébastien
12 et 13 l'Orchestre de Paris dirigé
Billard,
avecYété
Queiroz
par Marek Janowski et la soprano
(Marthe), Ksenija Skacan, (Echy
Anja Harteros dans un programElbernon), Rémy Poulakis (Louis
me consacré à Richard Strauss
Laine), Jean-Louis Serre (Thomas
(Mort et Transfiguration, Lieder
Pollock Nageoire), Orchestre de
«La Fanciulla del West» avec Nina Stemme (Minnie) et Marco Berti (Dick
orchestrés, Métamorphoses et
solistes
HI.14, les 3, 4 et 5 mars.
Johnson). Crédit : Opéra national de Paris/ Charles Duprat
Scène finale de Capriccio). Le 14,
l'Orchestre Philharmonique de Radio France sera placé sous la direction
Ailleurs en France : A Marseille, création mondiale de Colomba de
de Esa-Pekka Salonen pour interpréter les Gurre-Lieder de Schönberg Jean-Claude Petit du 9 au 16 mars, avec Marie-Ange Todorovitch dans le
avec Katarina Dalayman (Tove), Michelle DeYoung (Waldtaube), Robert rôle-titre, héroïne haute en couleur imaginée par Prosper Mérimée. Dans
Dean Smith (Waldemar), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Klaus-Narr), la fosse Claire Gibault et la régie Charles Roubaud.
Gábor Bretz (Le paysan) et Barbara Sukowa (récitante). Le 19, la Passion
Vu et entendu : Nina Stemme s'impose comme la Minnie de sa généselon saint Jean de Bach sera dirigée par Masaaki Suzuki à la tête du ration dans la Fanciulla del West de Puccini, qui fait enfin son entrée au
Bach Collegium Japan avec Joanne Lunn, Damien Guillon, Gerd Türk et répertoire de l'Opéra Bastille. A ses côtés Claudio Sgura et Marco Berti,
Peter Kooij. Emmanuel Krivine et l'Orchestre du Conservatoire de Paris dirigés de mains de maître par Carlo Rizzi (4 février).
François Lesueur
accompagneront le 22 la soprano Brigitte Pinter dans une sélection
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chronique des concerts
Ombres et couleurs
Une fois n'est pas coutume, il faut passer le périphérique et
prendre la direction du château de Versailles pour aller
entendre un des concerts-événement de ce début d'année :
l'interprétation du 6e livre de Madrigaux de Monteverdi
par l'ensemble des Arts Florissants sous la direction de
Paul Agnew.
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violoniste Gil Shaham dans un concerto à la mémoire d'un ange d'Alban
Berg qui, sans vraiment convaincre par les reliefs et la caractérisation des
interventions solistes, aura au moins les qualités orchestrales digne d'un des
plus grands ensembles actuels. La 6e Symphonie «Pathétique» de
Tchaikovski sonne sous la baguette de Jansons avec une liberté inouïe,
débarrassée de tout pathos superflu. Les cuivres sont soutenus par des pupitres de cordes à la sonorité très effilée, presque latine par endroits. Le chef
letton ménage son effectif dans les moments de tension extrême, jouant avec
maestria de l'art du ritardando dans la valse avant d'ouvrir les grandes eaux
furibondes du finale.
Impossible d'oublier le passage des Wiener Philharmoniker tant la simple annonce de leur passage suffit à créer
Avec ce concert se poursuit l'intél'événement. Nouvellement nommé
grale du chef-d'œuvre de la musique
directeur musical du Teatro alla Scala,
madrigaliste italienne du XVIe, magnifiRiccardo Chailly dirige les Viennois
quement servie dans l'écrin du Salon
dans un programme Sibelius-Bruckner
d'Hercule avec Véronèse en compagnon
de toute beauté. Après une Finlandia à
d'écoute. Construit en deux grandes secla fragilité palpable, c'est au tour de
tions symétriques qui le divisent naturelChristian Tetzlaff d'entrer en scène pour
lement en deux parties, ce livre se prête
interpréter le célébrissime concerto pour
admirablement au concert, d’autant qu’il
violon du compositeur finlandais. Avec
enchaîne une multitude de contrastes,
beaucoup de liberté dans les tempi et les
tant au niveau des effectifs (chant
attaques, le violoniste allemand se fraie
accompagné ou a cappella, chant soliste
un chemin vers un finale très lumineux
ou partie chorale), que des sentiments
et sans compromis. Dans la sixième
exprimés (lamentation, passion…). Les
symphonie d'Anton Bruckner, le chef ne
explications de Paul Agnew nous guicherche pas à dissimuler les maladresses
dent dans ce corpus foisonnant avec
dans l'instrumentation et l'écriture, partiPaul Agnew
beaucoup d'à-propos et de précision.
culièrement dans le dernier mouvement.
Mention spéciale au second lamento (la
Sans jamais céder à la tentation de faire
Sestina), articulé autour de mots-clés qui sont repris alternativement par voler en éclats les intervalles dynamiques, Chailly propose une vision quasichaque pupitre de soliste et tressés avec une magnificence harmonique à chambriste, rendue très séduisante par l'équilibre des pupitres entre eux.
couper le souffle.
Débuts brucknériens remarqués pour Daniele Gatti à la tête de son
Mitsuko Uchida est une pianiste qui sait se lancer des défis à la hauteur
National de France au Théâtre des Champs-Élysées. L'orchestre relève le de son immense talent. Ils sont rares les pianistes qui auraient choisi en predéfi d'une Quatrième Symphonie «Romantique» d'une difficulté et d'une mière partie de récital la sonate D.668 de Schubert pour se préparer à plonampleur dynamique peu communes. Le chef milanais ne transige pas avec ger par la suite dans les méandres redoutables des Variations Diabelli de
Beethoven. Le toucher est très orides aspérités expressives qui mainginal, à mille lieues des broyeurs
tiennent le discours dans un serioso
d'ivoire qui affrontent généralement
de bon aloi. Comme il l'avait
ce genre de monument. On frémit
démontré avec son intégrale
au début à l'idée qu'elle puisse venir
Mahler, Gatti est le chef qu'il fallait
à bout d'une pareille entreprise mais
pour ouvrir à l'orchestre des perbientôt l'assurance gagne l'auditoire
spectives esthétiques ambitieuses,
et dès la mi-parcours, on sait que
loin des sentiers battus.
l'inspiration ira crescendo. Les
variations les plus virtuoses font
Le TCE accueillait l'espace
davantage penser à l'agilité d'un
d'un week-end deux formations
Mozart plutôt qu'à celle de
prestigieuses, l'Orchestre de la
Beethoven mais lorsque réapparaît
Radio Bavaroise et le Philharle thème qu'on croyait disparu après
monique de Vienne – le premier
tant de déferlantes de notes, le cliplacé sous la baguette de Mariss
mat redevient apaisé et le public se
Jansons et le second sous celle de
lève pour une ovation bien méritée.
Riccardo Chailly. La première soiMitsuko Uchida
David Verdier
rée donnait l'occasion d'entendre le
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ANTOINE (01.43.38.74.62)
u Fabrice Luchini lit Céline : Voyage
au bout de la nuit - jusqu’au 12 mars
u Love Letters de A. R. Gurney m.e.s. Benoît Lavigne - du 6 au 30
mars
ATELIER (loc. 01.46.06.49.24)
u Savannah Bay / Le Square /
Marguerite et le Président de M.
Duras - m.e.s. Didier Bezace - jusqu’au 9 mars
u Femme non-rééducable de Stefano
Massini - Mémorandum théâtral sur
Anna Politkovskaïa - m.e.s. Arnaud
Meunier - du 13 mars au 28 mai
BOUFFES DU NORD
(loc. 01.46.07.34.50)
u Te craindre en ton absence de
Marie NDiaye - m.e.s. Georges
Lavaudant - du 4 au 8 mars
CHAILLOT (01.53.65.30.00)
ACCUEIL DE STUDIO 7
(spectacles en russe surtitré)
u Le Songe d’une nuit d’été d’après
William Shakespeare - m.e.s. Kirill
Serebrennikov - du 14 au 9 mars
u Metamorphosis d’après «Les
Métamorphoses» d’Ovide - m.e.s.
David Bobée - du 21 au 28 mars
COLLINE (rés. 01.44.62.52.52)
u Liliom de Ferenc Molnár - m.e.s.
Galin Stoev - du 6 mars au 4 avril
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u Une femme de Philippe Minyana m.e.s. Marcial Di Fonzo Bo - du 20
mars au 17 avril
COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES
(01.53.23.99.19)
u Ensemble et séparément de
Françoise Dorin - m.e.s. Stéphane
Hillel - avec Jean Piat et Marthe
Villalonga - jusqu’au 13 avril
COMÉDIE FRANÇAISE
SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15)
u Antigone de Jean Anouilh - m.e.s.
Marc Paquien - jusqu’au 2 mars
u Psyché de Molière - m.e.s.
Véronique Vella - jusqu’au 4 mars
u Le Songe d’une nuit d’été de
Shakespeare - m.e.s. Muriel MayetteHoltz - jusqu’au 15 juin
u Un chapeau de paille d’Italie
d’Eugène Labiche - m.e.s. Giorgio
Barberio Corsetti - jusqu’au 13 avril
u Andromaque de Jean Racine m.e.s. Muriel Mayette-Holtz - jusqu’au 31 mai
STUDIO-THÉÂTRE (01.44.58.98.98)
u L’île des esclaves de Marivaux m.e.s. Benjamin Jungers - du 6 mars
au 13 avril
VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00)
u La visite de la vieille dame de
Dürrenmatt - m.e.s. Christophe Lidon
- jusqu’au 30 mars
GAÎTÉ-MONTPARNASSE
(01.43.22.16.18)
u Des journées entières dans les arbres de Marguerite Duras - m.e.s.
Thierry Klifa - avec Fanny Ardant jusqu’au 30 mars
GUICHET MONTPARNASSE
(01.43.27.88.61)
u Lettre d'une inconnue de Stefan
Zweig - m.e.s. William Malatrat - jusqu’au 5 avril
HÉBERTOT (01.43.87.23.23)
u Des fleurs pour Algernon de Daniel
Jeyes, Gérard Sibleyras - m.e.s. Anne
Kessler - jusqu’au 30 mars
u Le Roi se meurt d’Eugène Ionesco m.e.s. Georges Werler - avec Michel
Bouquet, Juliette Carré - jusqu’au 30
mars.
ODÉON EUROPE (01.44.85.40.40)
u Les Fausses Confidences de
Marivaux, avec Isabelle Huppert m.e.s. Luc Bondy - jusqu’au 23 mars.
ATELIERS BERTIER
u Tartuffe de Molire - m.e.s. Luc
Bondy - du 26 mars au 6 juin
PORTE SAINT-MARTIN
(01.42.08.00.32)
u Roméo et Juliette de William
Shakespeare - m.e.s. Nicolas
Briançon - jusqu’au 9 mars
RANELAGH (loc. 01.42.88.64.44)
u Comtesse de Ségur née
Rostopchine de Joëlle Fossier - m.e.s.
Pascal Vitiello - avec Bérengère
Dautun - jusqu’au 30 mars.
RIVE GAUCHE (01.43.35.32.31)
u La trahison d'Einstein de ÉricEmmanuel Schmitt - m.e.s. Steve
Suissa - avec Francis Huster et JeanClaude Dreyfus - jusqu’au 30 mars
ROND-POINT (0.892.701.603)
u Occident de Rémi De Vos - m.e.s.
Dag Jeanneret - du 5 mars au 6 avril
u Love and Money - de Dennis Kelly m.e.s. Blandine Savetier - du 6 mars
au 6 avril
u Paroles gelées d’après Rabelais m.e.s. Jean Bellorini - du 7 mars au 4
avril
THÉÂTRE LABORATOIRE
(01.43.40.79.53)
u L’Adieu à l’automne d’après Jon
Fosse - m.e.s. Elizabeth Czerczuk création musicale Matthieu Vonin jusqu’au 16 mars.
THÉÂTRE DE PARIS
(01.42.80.01.81)
u La contrebasse de Patrick Süskind
- m.e.s. Daniel Benoin - avec Clovis
Cornillac - jusqu’au 8 mars
Théâtre du Vieux Colombier
La visite de la vieille Dame
Après des décennies d’absence, Claire Zahanassian revient à Güllen, la petite ville de son enfance, pour y fêter ses noces avec un huitième mari. Toute la
communauté espère que la richissime vieille dame
relancera l’activité de la ville plongée depuis longtemps
dans la misère. Mais si elle accepte de céder des
sommes colossales, c’est à une seule condition : que
l’on tue Alfred Ill, son amour de jeunesse qui l’a reniée
après l’avoir mise enceinte. Bannie par une morale hypocrite, elle a vécu hantée par son désir de vengeance,
qu’elle est aujourd’hui décidée à accomplir. Tout au
long de cette épopée, l’amoralité de la vieille dame va
contaminer la ville entière. Comme dans un conte moderne, suivant sa propre idée de la justice, elle va
déclencher une véritable chasse à l’homme.
C’est le metteur en scène Christophe Lidon qui
s’attelle à la mise en forme de cette critique sociale
élaborée par Friedrich Dürrenmatt; il est aidé en cela
par plusieurs acteurs de la Comédie-Française, dont
Danièle Lebrun, Christian Gonon, Samuel Labarthe et
Didier Sandre, qu’il retrouve pour cette création.
. Jusqu’au 30 mars 2014
«La Visite de la vieille dame» © Cosimo Mirco Magliocca
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Location : 01 44 39 87 00/01
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b e a u x - a r t s
Musée Maillol
Le Trésor de Naples
Pour sa première sortie hors d’Italie, le trésor de San Gennaro sera l’hôte du musée Maillol à Paris !
Cette collection de joaillerie figure parmi les plus importantes du monde, comparable par sa valeur aux Joyaux de la couronne de France ou
d’Angleterre mais, contrairement à ces derniers, cette collection appartient au peuple de Naples.
Un peu d’histoire : San Gennaro, grand patron de la ville de Naples, est mort en martyr lors des persécutions de Dioclétien; son sang, recueilli dans
deux ampoules, se liquéfie trois fois par an, aux mêmes dates depuis des siècles, un
phénomène que, même aujourd’hui, la science ne peut expliquer.
Le 13 janvier 1527 un contrat insolite est établi devant notaire entre le peuple
de Naples et le Saint, mort depuis plus de mille deux cents ans. En échange de sa
protection contre les éruptions du Vésuve et la peste, les Napolitains s’engagent à
constituer et à garder un trésor dans la chapelle qu’ils lui ont construite et dédiée
dans la cathédrale. Aujourd’hui ce culte n’a rien perdu de sa vigueur.
Ce sont les chefs-d’œuvre les plus importants du Trésor de San Gennaro, réalisés et accumulés au cours des siècles, qui seront montrés lors de l’exposition du
musée Maillol. Parmi ceux-ci, le «collier de San Gennaro», spectaculaire assemblage de bijoux réalisé entre le XVIIe et le XIXe s., rassemble les dons d’illustres
souverains comme Charles V de Bourbon, Joseph Bonaparte, Marie-Caroline de
Habsbourg, sœur de Marie-Antoinette, ou encore la reine Marie-Amélie de Saxe,
auxquels ont été ajoutés ceux de Napolitains anonymes, mettant ainsi à égalité peuple et souverains.
Michele Dato «Collier de San Gennaro», 1679 (ajouts jusqu’en 1879)
Or, argent et pierres precieuses. H.60 ; L.50 cm
Naples, Museo del Tesoro di San Gennaro © Matteo D’Eletto
Atelier Grognard
Rueil Malmaison
l LES PEINTRES DU PAYSAGE PROVENÇAL – jusqu’au 17 mars.
Bibliothèque Nationale
l VERDI, WAGNER ET L’OPÉRA DE
PARIS – jusqu’au 16 mars.
Centre culturel suisse
l OLIVIER MOSSET – jusqu’au 30
mars.
l AUGUSTIN REBETEZ – Du 28 février
au 30 mars.
Centre Pompidou
l LE SURRÉALISME ET L’OBJET – jusqu’au 3 mars
l CLAUDE SIMON, photographe –
jusqu’au 10 mars.
l DONATION FLORENCE ET DANIEL
GUERLAN, œuvres sur papier – jusqu’au 31 mars.
Cité du cinéma, St.Denis
l STAR WARS IDENTITIES – du 15
février au 30 juin.
Ecole sup. des beaux-arts
l LE PAYSAGE À ROME ENTRE 1600 ET
1650 – jusqu’au 2 mai.
Fondation Cartier pour l’art
contemporain
l AMÉRICA LATINA 1960-2013, photographies – jusqu’au 6 avril
Grand Palais
l BILL VIOLA – du 5 mars au 21
juillet
l MOI, AUGUSTE, EMPEREUR DE ROME
a
g
. A voir du 19 mars au 20 juillet 2014
– du 19 mars au 13 juillet
l ROBERT MAPPLETHORPE – du 26
mars au 13 juillet.
Hôtel de Ville
l BRASSAÏ, pour l’amour de Paris –
jusqu’au 8 mars.
Institut du Monde arabe
l « VOUÉS À ISHTAR. SYRIE, JANVIER
1934, ANDRÉ PARROT DÉCOUVRE
MARI » – jusqu’au 4 mai
Jeu de Paume
l ROBERT ADAM - L’endroit où nous
vivons – jusqu’au 18 mai
l MATHIEU PERNOT - La Traversée –
jusqu’au 18 mai
La Maison Rouge
l IL ME FAUT TOUT OUBLIER - Berlinde
de Bruyckere et Philippe
Vandenberg – jusqu’au 11 mai
l L’ASILE DES PHOTOGRAPHIES Mathieu Pernot et Philippe
Artières – jusqu’au 11 mai
Musée des arts décoratifs
l DANS LA LIGNE DE MIRE, SCÈNES DU
BIJOU CONTEMPORAIN EN FRANCE –
jusqu’au 2 mars
l SECRETS DE LA LAQUE FRANÇAISE : LE
VERNIS MARTIN – jusqu’au 8 juin.
Musée Carnavalet
l ROMAN D’UNE GARDE-ROBE, de la
Belle Époque aux années 30 – jusqu’au 16 mars
Musée Cernuschi
l OBJECTIF VIETNAM - Photos de
e
n
l’Ecole française d’ExtrêmeOrient – du 14 mars au 29 juin
Musée Cognacq-Jay
l FEUILLES D'HISTOIRES, vie quotidienne et grands événements à travers
l'éventail en France (XVIIIe s) – jusqu’au 9 mars
Musée Dapper
l INITIÉS, BASSIN DU CONGO &
MASQUES DE ROMUALD HAZOUMÈ –
jusqu’au 6 juillet
Musée Eugène Delacroix
l DELACROIX EN HÉRITAGE. Coll.
Étienne Moreau-Nélaton – jusqu’au 17 mars.
Musée Jacquemart-André
l DE WATTEAU À FRAGONARD, LES
FÊTES GALANTES – du 14 mars au 21
juillet
Musée du Louvre
l LE FONDS PHOTOGRAPHIQUE DES
ANTIQUAIRE
GEORGES JOSEPH
DEMOTTE ET LUCIEN DEMOTTE – jusqu’au 25 mars.
l NEW FRONTIER III - Portraits
anglo-américains à l’heure de la
Révolution – jusqu’au 28 avril
l LE CIEL EST PAR-DESSOUS LE TOIT…
Dessins pour les plafonds parisiens du Grand Siècle – jusqu’au
19 mai
Musée du Luxembourg
l JOSÉPHINE – du 12 mars au 29
d
a
juin
Musée Maillol
l LE TRÉSOR DE SAN GENNARO – du
19 mars au 20 juillet
Musée Marmottan-Monet
l LES IMPRESSIONNISTES EN PRIVE. 100
chefs-d’œuvre de collectionneurs
– jusqu’au 6 juillet
Musée de l’Orangerie
l LES ARCHIVES DU RÊVE, DESSINS DU
MUSÉE D'ORSAY : CARTE BLANCHE À
WERNER SPIES – du 26 mars au 30
juin
Musée d’Orsay
l GUSTAVE DORÉ (1832-1883).
L’imaginaire au pouvoir – jusqu’au
11 mai
Musée Zadkine
l VOYAGE DANS L'ANCIENNE RUSSIE –
jusqu’au 13 avril
Petit Palais
l CARL LARSSON - L’imagier de la
Suède – du 7 mars au 7 juin
Petit de Tokyo
l L’ÉTAT DU CIEL [partie 1] – jusqu’au
7 septembre.
Pinacothèque
l GOYA ET LA MODERNITÉ – jusqu’au
16 mars
l LA DYNASTIE BRUEGHEL – jusqu’au
16 mars
l CHU TEH-CHUN, LES CHEMINS DE
L'ABSTRACTION – jusqu’au 16 mars
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m é m e n t o
GENEVE
concerts
90
u mardi 4.3. : Jazz Classics. JOSHUA
REDMAN QUARTET «BALLADS». Victoria
Hall à 20h30 (loc. 0900.800.800 /
Ticketcorner, Fnac, Manor..)
u 5.3. : Série Prélude. OSR, dir.
Philippe Béran (Vivaldi, Honegger,
Mendelssohn). Victoria Hall à 20h
(Tél. 022/807.00.00 / [email protected])
u 6.3. : Concert klezmer de l'ENSEMBLE HOTEGEZUGT avec MICHEL
BORZYKOWSKI. Théâtre Alchimic (rés.
022/301.68.38)
u 8.3. : Concert Fondation Patiño
avec les solistes de l’Académie
Menuhin. MAXIM VENGEROV, direction
et violon. OLEG KASKIV, violon ( Bach,
Vivaldi, Piazzolla, Tchaïkovsky, SaintSaëns et Fauré. Victoria Hall à 20h30
(Concert gratuit sur invitation (à retirer chez Globus))
u 9.3. : Musique sur Rhône.
ENSEMBLE DE MUSIQUE DE CHAMBRE DE
L’OSR (Fauré, Mozart, Brahms). BFM,
salle Théodore Turettini à 11h (Tél.
022/807.00.00 / [email protected])
u 9.3. : AUTOUR DE HEINZ HOLLIGER.
Stefan Wirth, piano. Julien
Dieudegard, violon. Olivier Marron,
violoncelle (Holliger, Schumann).
Espace Fusterie à 11h (billets 45
min. avant le concert / ou rés. sur :
www.contrechamps.ch/reserver)
u 10.3. : Concert Sauvage no. 2. UN
VIOLONCELLE FOU (Machaut, Catherin,
Monteverdi, Castello, Feldman,
Merula). Comédie de Genève à
19h30 (sur place 1 h avant / rés.
[email protected])
u 12.3. : Série Symphonie. OSR, dir.
Neeme Järvi, VADIM REPIN, violon,
TRULS MØRK, violoncelle (Tchaïkovski,
Brahms, Chostakovitch). Victoria
Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 13.3. : Concert de chants judéoespagnols. KEREN ESTHER (chant),
PACO CHAMBI (guitare), SYLVAIN
FOURNIER (percussion). Théâtre
Alchimic (rés. 022/301.68.38)
u 13.3. : Migros-pour-cent-culturelclassics. ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE
MONTRÉAL, dir. KENT NAGANO, MARCANDRÉ HAMELIN, piano (Wagner,
Hefti, Liszt, Berlioz). Victoria Hall à
20h (loc. SCM 022/319.61.11)
u 14.3. : Série Répertoire. OSR, dir.
Neeme Järvi, VADIM REPIN, violon,
TRULS MØRK, violoncelle (Tchaïkovski,
Brahms, Prokofiev). Victoria Hall à
20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 14 et 16.3. : INTÉGRALE DES
CONCERTOS BRANDENBOURGEOIS de
Bach, par le Geneva Camerata.
Isabelle Burkhalter, présentation.
Musée d’Art et d’Histoire, le 14 à
19h, le 16 à 16h (sur place 1 h avant
le concert / rés. [email protected])
u 15.3. : Concert en Famille n°3. LE
MONDE DE MOZART, dir. David
Greilsammer. Salle Frank Martin à
11h (sur place 1 h avant / rés. [email protected])
u 16.3. : ORCHESTRE DE LA HAUTE
ÉCOLE DE MUSIQUE DE GENÈVE, dir. Karl
Anton Rickenbacher (R. Strauss,
Messiaen, Mahler). Victoria Hall à
11h (rens. 0800.418.418, billets :
Alhambra, Grütli)
u 17.3. : Temps & Musique. QUATUOR
BRENTANO (Mozart, Chostakovitch,
Beethoven). Conservatoire de
Genève à 20h (billetterie : Service
culturel Migros, Migros Nyon-La
Combe, Stand Info Balexert)
u 18.3. : Classiques Alternances.
SILVIA CHIESA, violoncelle & MAURIZIO
BAGLINI, piano (Brahms, Schubert,
Cilea, Rachmaninoff). Victoria Hall à
20h (Billetterie : points de vente Ville
de Genève & Service cult. Migros)
u 20.3. : AU CŒUR DU PRINTEMPS.
Geneva Camerata, dir. David
Greilsammer (Vivaldi, Piazzolla).
Salle Frank Martin (sur place 1 h
avant le concert / rés.
[email protected])
u 20.3. : SAN FRANCISCO SYMPHONY
ORCHESTRA, CHŒUR DE FEMMES DE
L’ORCHESTRE DE PARIS, MAÎTRISE DE
PARIS, dir. Michael Tilson Thomas.
SASHA COOKE, mezzo-soprano
(Mahler). Victoria Hall à 20h (loc.
Service culturel Migros Genève,
Stand Info Balexert)
u 21.3. : CHRONOS & THANATOS.
Ensemble Contrechamps, dir.
Michael Wendeberg, Mélody
Loulédjian, soprano (Grisey,
Ferneyhough). Maison Communale
de Plainpalais à 20h / 19h : présentation de Marc Texier (billetterie
ouverte 45 min. avant le concert /
ou rés. sur : www.contrechamps.ch)
u 21.3. : ORCHESTRE DES NATIONS
UNIES, dir. Antoine Marguier. ELISSO
BOLKVADZE, piano (Rossini, SaintSaëns, Dvorak). Victoria Hall à 20h
(loc. Espace Ville de Genève, Grütli,
Genève Tourisme, Cité Seniors,
Centrale Billetterie T 0800 418 418)
u 24.3. : Les Grands Interprètes.
MENAHEM PRESSLER, piano; dir.
Romain Mayor (Schubert, Kurtag).
Victoria Hall à 20h (tél.
022/322.22.40 ou : [email protected])
a
g
u 26.3. : Hors-Série. LE CHANT SACRÉ
GENÈVE. L’OCG, dir. Romain Mayor.
CLÉMENCE TILQUIN soprano, DIEGO
INNOCENZI orgue (Mendelssohn,
Farkas, Villard). Victoria Hall à 20h30
(loc. Service culturel Migros)
u vendredi 28.3. : Jazz Classics.
HIROMI. Victoria Hall à 20h30 (loc.
0900.800.800 / Ticketcorner)
u Dimanche 30.3. : Amarcordes.
TRÉSORS DE LA MUSIQUE FRANÇAISE DU
18E SIÈCLE. Ensemble Fratres
(Couperin, Rameau, Le Roux).
Château de Dardagny 18h (réservation sur http://www.amarcordes.ch/)
u 30.3. : ORCHESTRE NATIONAL DE
LYON, dir. Eivind Gullberg Jensen,
EMMANUELLE RÉVILLE, flûte, ELÉONORE
EULER-CABANTOUS, harpe, KUMIKO
SHUTO, biwa, KIFU MITSUHASHI, shakuhachi (Debussy, Takemitsu). Victoria
Hall à 11h (rens. 0800.418.418,
billets : Alhambra, Grütli)
u 30.3. : QUATUOR SCHUMANN (ensemble invité). CHRISTIAN FAVRE, piano;
FRÉDÉRIC
ANGLERAUX,
violon;
CHRISTOPH SCHILLER, alto; FRANÇOIS
GUYE, violoncelle (Mozart, Fauré).
Musée d’Art et d’Histoire, salle des
Armures, à 11h (billets sur place 1
heure avant le concert ou préloc.
points de vente Ville de Genève)
LE CABARET LATINO - à 21h30
Les Ateliers d’ethnomusicologie à La
Parfumerie (infos : www.adem.ch)
u 7.3. : CLUBE DO CHORO (Brésil) IVONNE GONZALEZ (Cuba)
u 8.3. : MICHELE MILLNER (Chili) PALENQUE LA PAPAYERA (Colombie)
u 14.3. : LIEN Y REY (Cuba) - NARCISO
SAUL QUINTETO (Argentine)
u 15.3. : ORISHA OKO (Cuba) MICHELANGELO4TET (Brésil)
u 21.3. : EL VINAL (Argentine) - LUNA
LUNA (Chili)
u 22.3. : ROLY BERRIO (Cuba) - BARRIO
OSCURO (Argentine/Espagne)
théâtre
u Jusqu’au 2.3. : BOURLINGUER de
Blaise Cendrars, m.e.s. Darius
Peyamiras. Le Poche-Genève, sam à
19h, dim à 17h (loc. 022/310.37.59)
u Jusqu’au 2.3. : NOTA BÉBÉS de et
m.e.s. Guy Jutard, de 1 à 3 ans.
Théâtre des Marionnettes, nombreuses séances de 20 min. (rés.
022/807.31.07)
u Jusqu’au 2.3. : PORTRAIT JENS VAN
Théâtre du Crève-Cœur
Faisons un rêve
La Compagnie Anthéa Sogno est accueillie à Cologny pour y présenter
«Faisons un rêve» de Sacha Guitry, une pièce dans laquelle l’auteur se
révèle, selon les dires de la metteuse en scène « irrésistible de séduction et
d’intelligence. Il est brillant, drôle, fin, plein de tendresse, bon, généreux,
enfantin, très inspiré, amoureux, vivant, jouant, aimant, rêvant…»
«Faisons un rêve» avec Christophe de Mareuil (lui) et Anthéa Sogno (elle)
Comment séduire la femme d’un ami avec la complicité bien involontaire du mari ?Tel est le thème de cette pièce, l’une des plus célèbres de
Sacha Guitry. C’est une exploration de la mécanique du désir, bouleversant
les corps et les âmes en une folle journée. Les dialogues sont brillants, les
acteurs vifs, virevoltants et précis,… et le public jubile.
. Jusqu’au 9 mars 2014
du mercredi au samedi 20h30; dimanche 17h00 (relâche lundi et mardi)
Réservations : +41 22 786 86 00
e
n
d
a
m
DAELE. Danse et musique avec Jens
Van Daele et l’Ensemble Batida. Le
Galpon (rés. au 022/321.21.76 au
plus tard 2 heures avant le début de
l’événement - mail: [email protected])
u Jusqu’au 2.3. LE COMBAT ORDINAIRE
de Manu Larcenet, Compagnie
L'outil de la ressemblance, m.e.s.
Robert Sandoz. Théâtre du Loup,
sam à 19h, dim à 17h (rés.
022/301.31.00)
u Jusqu’au 5.3. : GUERRE ET PAIX de
Léon Tolstoi, m.e.s. Piotr Fomenko.
Théâtre de Carouge, Salle FrançoisSimon, à 19h tous les soirs (billetterie : 022/343.43.43 - [email protected])
u Jusqu’au 8.3. : MADEMOISELLE ELSE
par tg STAN - Ingmar Bergmann.
Théâtre Saint-Gervais, Salle
Marieluise Fleisser, mar-jeu-sam à
19h, mer-ven à 20h30
(loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Jusqu’au 8.3. : APRÈS LA RÉPÉTITION
par tg STAN - Ingmar Bergmann.
Théâtre Saint-Gervais, Salle
Marieluise Fleisser, mar-jeu-sam à
19h, mer-ven à 20h30
(loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Jusqu’au 8.3. : SCÈNE DE LA VIE
CONJUGALE par tg STAN - Ingmar
Bergmann. Théâtre Saint-Gervais,
Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Jusqu’au 9.3. : LES POÈTES MAUDITS
- BAUDELAIRE, VERLAINE ET RIMBAUD.
Conception, m.e.s. et jeu : Alain
Carré. Théâtre du Crève-Cœur,
Cologny (rés. 022/786.86.00)
u Jusqu’au 15.3. : ANDROMAQUE 10 43 d'après Jean Racine, m.e.s.
Kristian Frédric. Le Grütli, Grande
salle (sous-sol), mar-jeu-sam à 19h,
mer-ven à 20h, dim à 18h. Relâche
lun
([email protected]
/
022/888.44.88)
u Jusqu’au 23.3. : LE BRUIT DU MONDE
par la Paradoxe Compagnie, m.e.s.
Yves Pinguely, création. Théâtre des
Amis (rens. 022/342.28.74)
u 4, 8, 9, 12, 14, 15, 16.3. : LOLA FOLDING de Marc Jeanneret, musique
Simon Aeschimann, création, dès 8
ans. Théâtre Am Stram Gram,mar +
ven à 19h, sam + dim 17h, merà 15h
(Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 4 au 6.3. : LES FONDATEURS S'INSTALLENT par Julien Basler et Zoé
Cadotsch. Théâtre de l’Usine (rés.
022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch)
u Du 4 au 23.3. : LE CHAT DU RABBIN
a
g
d'après Joann Sfar, m.e.s. Sarah
Marcuse. Théâtre Alchimic, mar et
ven à 20h30; mer, jeu, sam et dim à
19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Du 4 au 22.3. : OH LES BEAUX JOURS
de Samuel Beckett, m.e.s. Anne
Bisang. La Comédie de Genève,
relâche lun et dim 9.3., mar-ven 20h,
mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. :
022/320.50.01 / [email protected])
u Du 4 au 23.3. : LES LARMES DES HOMMES de Mia Couto, d’après Le Fil des
missangas, m.e.s. Patrick Mohr.
Théâtre de La Parfumerie, ma-mer-je
à 20h, ve-sa à 19h, di à 17h (rés.
022/341.21.21)
u Du 5 au 23.3. : Carrefours transalpins. Les 5 et 6 à 20h : QUARTETT LE RELAZIONI PERICOLOSE de Heiner
Müller, pièce jouée en italien, m.e.s.
Valter
Malosti.
Production
Fondazione del Teatro Stabile di
Torino. Avec Laura Marinoni et
Valter Malosti. / Les 8 à 20h et 9 à
18h : MERCI DE NE PAS DONNER À MANGER AUX ANIMAUX de Florent Otello,
par la Coe La Galerie. / Les 15 et 16:
VIENTO MUCHO VIENTO. Par La cabra
compagnie; chor., textes et dir.
Valeria Alonso / Du 17 au 21 :
Atelier de création, La cabra cia /
Les 18 et 19 : LINE d’Israël Horovitz,
par le Teatro Due Parma, m.e.s.
Walter Le Moli, pièce jouée en italien. / Les 22 et 23 : PESO PIUMA /
POIDS PLUME. Conception, m.e.s. et
interprétation Michela Lucenti. Le
Galpon (rés. au 022/321.21.76 au
plus tard 2 heures avant le début de
l’événement - mail : [email protected])
u Du 5 au 26.3. : CHAPERON ROUGE
CARTOON de et m.e.s. Guy Jutard,
dès 5 ans. Théâtre des
Marionnettes, mer à 15h, sam à 17h,
dim à 11h et 17h (réservations
022/807.31.07)
u Du 11 au 29.3. : LAS VANITAS par la
Compagnie Chris Cadillac et Marion
Duval. Théâtre Saint-Gervais, Salle
Isidore Isou, 7ème étage - L’Atelier,
mar-jeu-sam à 20h30, mer-ven à 19h
(loc. 022/908.20.20 ou www.saintgervais.ch)
u 12, 13 et 14.3. : Midi Théâtre! TRIPES STORY, conception Latifa
Djerbi. Espaces "bar" de la Petite et
de la Grande salle à 12h (rés. sur
www.grutli.ch)
u Du 18 au 23.3. EASTWARD
d'Arnaud Gonnet et Martin
Roehrich. Théâtre de l’Usine (rés.
022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch)
u Du 18.3. au 6.4. : BIENTÔT VIENDRA
e
n
é
m
e
de Line Knutzon, m.e.s.
Sophie Kandaouroff. Le Grütli,
Petite Salle (2ème étage), à 20h, dim
à 18h. Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88)
u du 19.3. au 13.4. : FAISONS UN RÊVE
de S. Guitry, m.e.s. Anthéa Sogno.
Théâtre du Crève-Cœur, Cologny
(rés. 022/786.86.00)
u 21, 22, 23, 25.3. : LE RÊVE D'ANNA
d'Eddy Pallaro, m.e.s. Bérangère
Vantusso, dès 7 ans. Théâtre Am
Stram Gram, ven + mar à 19h, sam +
dim à 17h (Loc. 022/735.79.24 et
Service Culturel Migros)
u Du 21.3. au 6.4. : LA DOUBLE
INCONSTANCE de Marivaux, m.e.s.
Philippe Mentha. Théâtre de
Carouge, Salle François-Simon, mar,
mer, jeu et sam à 19h / ven à 20h /
dim à 17h
(billetterie :
022/343.43.43 - [email protected])
u Du 24.3. au 13.4. : IRRÉSISTIBLE de
Fabrice Roger-Lacan, m.e.s. Claude
Vuillemin. Le Poche-Genève, lun et
ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim
à 17h, mardi relâche (rens./rés. /loc.
022/310.37.59)
u 25.3. : Les Théâtrales. COMME S’IL
EN PLEUVAIT de Sébastien Thiéry,
m.e.s. de Bernard Murat. Avec
Pierre Arditi, Évelyne Buyle,
Christophe Vandevelde, Véronique
Boulanger. BFM à 20h30 (Rés.
022/364.30.30 ou points de vente
Fnac)
u Du 25.3. au 6.4. : CABARET LEVIN #3
de Hanokh Lein, m.e.s. Hervé
Loichemol et Nalini Menamkat. La
Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim
17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected])
u Du 27.3. au 16.4. : L’ANNIVERSAIRE
de Harold Pinter, m.e.s. Jean-Gabriel
Chobaz. Théâtre Alchimic, mar et
ven à 20h30; mer, jeu, sam et dim à
19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Du 29.3. au 13.4. : VOYAGE EN
POLYGONIE de et m.e.s. François
Parmentier, dès 3 ans. Théâtre des
Marionnettes, mer à 15h, sam à 17h,
dim à 11h et 17h (réservations
022/807.31.07)
LE TEMPS
opéra
u 1, 2, 4, 6, 7, 8, 10.3. : NABUCCO de
Giuseppe Verdi, OSR, dir. John
Fiore, m.e.s. Roland Aeschlimann.
Grand Théâtre à 19h30, dim à 15h
(billetterie : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
u 21, 22.3. : SIEGFRIED OU QUI DEVIENDRA… de Peter Larsen, musique de
d
a
n
t
o
Richard Wagner, avec les solistes en
résidence au Grand Théâtre de
Genève. Grand Théâtre, le 21 à
19h30, le 22 à 15h et 19h30 (loc.
022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
u 28, 29.3. : DELUSION OF THE FURY de
Harry Partch, Ensemble Musikfabrik,
m.e.s. Heiner Goebbels. Bâtiment
des Forces Motrices à 19h30 (billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
u 30.3. : JONAS KAUFMANN, ténor,
HELMUT DEUTSCH, piano. Grand
Théâtre à 19h30 (loc. 022/322.50.50
et www.geneveopera.com/)
danse
u Du 5 au 16.3. : ADC. UTÉRUS, PIÈCE
D'INTÉRIEUR de Foofwa d'Imobilité.
Salle des Eaux-Vives, 82-84 r. EauxVives, à 20h30 (billets : Service culturel Migros, Stand Info Balexert,
Migros Nyon La Combe)
u 27 et 28.3. : ADC. THE STAGES OF
STAGING de Alexandra Bachzestis.
Salle des Eaux-Vives, 82-84 r. EauxVives, à 20h30 (billets : Service culturel Migros, Stand Info Balexert,
Migros Nyon La Combe)
divers
u 6.3. : ANGÉLIQUE KIDJO. Théâtre du
Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com)
u 7.3. : CARLA BRUNI. Théâtre du
Léman à 20h00 (loc. www.theatreduleman.com)
u 8.3. : CELTIC LEGENDS, nouveau
spectacle. Théâtre du Léman à 20h
(loc. www.theatreduleman.com)
u 9, 16, 23, 30.3. et 6.4. :
Laboratoire spontané. LA BRIOCHE
DES MIOCHES de Sandra Korol, m.e.s.
Jean Liermier, dès 5 ans. Théâtre Am
Stram Gram à 10h (Loc.
022/735.79.24 et Service Culturel
Migros)
u 15 et 16.3. : MUMMENSCHAZ 4families. Bâtiment des Forces motrices
(billets : TicketCorner 0900.800.800)
u 18 et 19.3. : JAMAIS 2 SANS 3, avec
Liane Foly. Théâtre du Léman, 20h30
(loc. www.theatreduleman.com)
u 20.3. : GORAN BREGOVIC & HIS
WEDDING & FUNERAL BAND. Théâtre
du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com)
u 28.3. : Laboratoire spontané.
RENCONTRE AVEC YVES BONNEFOY, dès
10 ans. Théâtre Am Stram Gram à
19h (Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
91
m
é
m
LAUSANNE
concerts
92
u 3 et 4.3. : O.C.L., dir. et violon
FRANK PETER ZIMMERMANN (Mozart).
Salle Métropole à 20h (Billetterie :
021/345.00.25)
u 4.3. : Les Entractes du mardi.
DELIA BUGARIN, ANNA VASILYEVA,
ALEXANDER GRYTSAYENKO et EDOUARD
JACCOTTET, violon, JANKA SZOMORMEKIS et KARL WINGERTER, alto,
PHILIPPE SCHILTKNECHT et LIONEL
COTTET, violoncelle (R. Strauss,
Mendelssohn Bartholdy). Salle
Métropole à 12h30 (Billetterie de
l’OCL: Tél. 021/345.00.25)
u 9.3. : Les Concerts du dimanche.
OCL, dir. Bertrand De Billy, DAVIDE
BANDIERI,
clarinette,
CURZIO
PETRAGLIO, cor de basset
(Mendelssohn Bartholdy, Cherubini).
Salle Métropole à 11h15 (Billetterie :
021/345.00.25)
u 13.3. : OSR, dir. Neeme Järvi,
VADIM REPIN, violon, TRULS MØRK, violoncelle (Tchaïkovski, Brahms,
Prokofiev). Théâtre de Beaulieu à
20h15 (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected] ou chez Passion
Musique)
u 23.3. : Les Concerts J.S. Bach de
Lutry. LES CANTATES DU JEUNE J.S.
BACH. Orfeo Vokalensemble avec
Orfeo Barokorchester Salzbourg,
dir. Michi Gaigg. Temple de Lutry à
17h (Billets : Hug Musique, GrandPont 4, ou à l'entrée du Temple dès
16h le jour du concert / rés. Point I,
Quai Gustave Doret, 1095 Lutry,
Tél. 021 791 47 65)
u 30.3. : Les Concerts du dimanche.
ORCHESTRE DE LA HAUTE ÉCOLE DE
MUSIQUE DE LAUSANNE, dir. Benjamin
Levy, Solistes des classes de chant
de l’Hemu (Ravel). Salle Métropole à
11h15 (Billetterie : 021/345.00.25)
théâtre
u Jusqu’au 2.3. : L’ANNIVERSAIRE
d’Harold Pinter, m.e.s. Jean-Gabriel
Chobaz. Pour les 30 ans du Théâtre
du Projecteur. Pulloff théâtres, sam à
19h, dim à 18h (rés. 021/311.44.22
ou www.pulloff.ch)
u Jusqu’au 8.3. : YVONNE, PRINCESSE
BOURGOGNE de Witold
DE
Gombrowicz, m.e.s. Genevière Guhl.
La Grange de Dorigny, ma-je-sa à
19h / me-ve à 20h30 / di à 17h (rés.
021/692.21.24)
e
n
t
u Du 4 au 14.3. : RICHARD III de
William Shakespeare, m.e.s. Laurent
Fréchuret. Vidy-Lausanne, salle
Charles Apothéloz, mar-mer-jeu-sam
à 19h, ven à 20h30, dim à 17h30 (rés.
021/619.45.45 - www.billetterievidy.ch)
u du 4 au 16.3. : LA DOUBLE INCONSTANCE de Marivaux, mise en scène :
Philippe Mentha – Production
Théâtre Kléber-Méleau. Théâtre
Kléber-Méleau, ma/me/je/sa à 19h,
ve à 20h30, di 17h30 (rés.
021/625.84.29)
u Du 5 au 23.3. : BOURLINGUER de
Blaise Cendrars, m.e.s. Darius
Peyamiras, avec Jean-Quentin
Châtelain.
Vidy-Lausanne, La
Passerelle, à 20h, dim à 18h, relâche
lun (loc. 021/619.45.45)
u 6, 7 et 9.3. : AYITI. Prod. La
Charge du Rhinocéros, m.e.s.
Philippe Laurent. Espace culturel
des Terreaux, jeu à 19h, ven à 20h,
dim à 17h (loc. www.terreaux.org/)
u Du 11 au 16.3. : MERCEDES-BENZ
W12 de et m.e.s. Marie Fourquet,
création. L’Arsenic, ma, je, sa 19h /
me, ve 20h30 / di 18h ([email protected] / 021/625.11.36)
u Du 11 au 22.3. : JOURNAL DE MA
NOUVELLE OREILLE de et avec Isabelle
Fruchart, adapt. et m.e.s. Zabou
Breitman. Chapiteau Vidy-L, à
20h30, ven à 19h, dim à 17h, lun
relâche (loc. 021/619.45.45)
u Du 11 au 30.3. : MISTERIOSO-119 de
Koffi Kwahulé, m.e.s. Cédric Dorier.
Vidy-Lausanne, salle Rene Gonzalez,
à 19h30, dim à 18h30, lun relâche
(loc. 021/619.45.45)
u Du 12 au 30.3. : LE PETIT PRINCE
ÉCARLATE de Marcel Cremer, m.e.s.
Sylvie Kleiber, création, dès 7 ans. Le
petit théâtre, me et di à 17h / ve à
19h / sa à 14h et 17h (rés. www.lepetittheatre.ch)
u Du 13 au 16.3. : COUVRE-FEUX de
Didier-Georges Gabily, m.e.s.
Ludovic Chazaud. La Grange de
Dorigny, ma-je-sa à 19h / me-ve à
20h30 / di à 17h
(rés.
021/692.21.24)
u Du 18 au 23.3. : SEULE LA MER
d’Amos Oz, m.e.s. Denis Maillefer.
Vidy-Lausanne, salle Charles
Apothéloz, mar-mer-jeu-sam à 19h,
ven à 20h30, dim à 17h30 (rés.
021/619.45.45 - www.billetterievidy.ch)
u Du 18 au 23.3. : LABORATOIRE
D’ORACLES 2 - TOUT IRA BIEN par
Malika Khatir, Stéphane Blok et
Fiamma Camesi, création. L’Arsenic
, ma, je, sa 19h / me, ve 20h30 / di
18h ([email protected] /
021/625.11.36)
a
g
o
u Du 18.3. au 6.4. : OCCUPÉ-BESETZT
de Catherine Favre. Pulloff théâtres,
mer + ven à 20h, mar, jeu + sam à
19h, dim à 18h (réservations
021/311.44.22 ou www.pulloff.ch)
u Du 20 au 22.3. : JOUE-MOI QUELQUE
CHOSE de John Berger, m.e.s.
Michele Millner. La Grange de
Dorigny, ma-je-sa à 19h / me-ve à
20h30 / di à 17h
(rés.
021/692.21.24)
u Du 27 au 29.3. : FOUCAULT 71 par le
Collectif F71. La Grange de Dorigny,
ma-je-sa à 19h / me-ve à 20h30 / di
à 17h (rés. 021/692.21.24)
divers
u 22.3. : SÉRIE OPÉRA 2/3 - OTHELLO.
Performance. Concept et musique
Christian Garcia - B000M CIE (CH),
Création. L’Arsenic, le foyer, à 21h
([email protected]
/
021/625.11.36)
danse
u Du 5 au 9.3. : LES ANIMAUX, chor.
Young Soon Cho Jaquet, création.
L’Arsenic, me, ve 20h30 / je, sa 19h /
di 18h ([email protected] /
021/625.11.36)
u 20.3. : MUTANT SLAPPERS & THE
PLANET BANG par Kylie Walters,
Joseph Trefeli et KMA. L’Arsenic à
22h
([email protected] /
021/625.11.36)
u Du 28 au 30.3. : TARAB, chor.
Laurence Yadi et Nicolas Cantillon.
L’Arsenic ([email protected] /
021/625.11.36)
opéra
u 9.3. : CARTE BLANCHE À CÉDRIC
PESCIA, Cédric Pescia, piano,
Sebastian Geyer, baryton (Schubert).
Opéra de Lausanne (Billetterie :
021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h
/ en ligne et infos : www.opera-lausanne.ch)
u 11.3. : Conférence Forum Opéra.
LUISA MILLER, par Georges Reymond
u 13.3. : Conférence Université.
LUISA MILLER. Conférencière: Mila de
Santis. Lieu annoncé ultérieurement
(www.unil.ch/lettres)
u 21, 23, 26, 28, 30.3. : LUISA MILLER,
dir. Roberto Rizzi Brignoli, Orchestre
de Chambre de Lausanne, m.e.s.
Giancarlo del Monaco. Opéra de
Lausanne (loc. : 021/315.40.20, lunven de 12h à 18h / en ligne et infos :
www.opera-lausanne.ch)
e
n
AILLEURS
annecy
BONLIEU SCÈNE NATIONALE aux Haras
d’Annecy, sauf mention contraire
(rens./rés. 04.50.33.44.11 / [email protected])
u Du 19.3. au 13.4. : MONSTRATION de
Johann Le Guillerm, installation,
création
u Du 18 au 30.3. : SECRET de et
m.e.s. Johann Le Guillerm, Cirque
u 21.3. Eglise Sainte-Bernadette :
MUSIQUE SACRÉE DU XXE SIÈCLE par
l'Orchestre des Pays de Savoir, dir.
Nicolas Chavin, Chœurs et solistes
de Lyon, dir. Bernard Tétu (Britten,
Poulenc, Fauré)
u 21.3. MC2 Grenoble : ORFEO ED
EURIDICE par Christoph Willibad
Gluck, musique
u 25 et 26.3. : REQUIEM DE SALON de
et m.e.s. Andrea Novicov
u 27.3. Cathédrale St-Pierre :
ALPBAROCK, Musique
u Du 28.3. au 25.5. : ESCARGOPOLIS
par la Compagnie 2 rien merci,
Cirque, Installation
u Du 28 au 30.3. : MAZUT de et avec
Camille Decourtye et Blaï Mateu
Trias, Cirque
u Du 28 au 30.3. : POUR LE MEILLEUR ET
POUR LE PIRE par le Cirque Aïtal,
conception et interprétation Kati
Pikkarainen et Victor Cathala
annemasse
RELAIS CHÂTEAU-ROUGE à 20h30
sauf mention contraire (loc.
+33/450.43.24.24)
u 21.3. : LOÏC LANTOINE et YOANNA,
Chanson française
u 22.3. : LES REVENANTS d’après
Henrik Ibsen, m.e.s. Thomas
Ostermeier
u 26 et 27.3. : HHHH de Laurent
Binet, m.e.s. Laurent Hatat
u 29.3. : MUSIQUE SACRÉE DU 20E SIÈCLE, Chœurs et solistes de Lyon,
Bernard Tétu et l'Orchestre des Pays
de Savoie
fribourg
THÉÂTRE EQUILIBRE à 20h (billetterie :
Fribourg Tourisme 026/350.11.00 /
[email protected])
u 4.3. à 19h30 : GALA EN HOMMAGE À
NIJINSKY, par les étoiles du ballet
russse.
u 9.3. à 11h : LE GRAND POURQUOI
d'après Wolf Erlbruch, m.e.s. Muriel
d
a
m
é
m
e
Hommage à Nijinsky
Une soirée de gala aura lieu au théâtre Equilibre dans le
cadre des festivités du bicentenaire des relations diplomatiques
entre la Russie et la Suisse.
Pour célébrer le début de ces festivités, l’Ambassade de
Russie et les étoiles du ballet russe participeront à une cérémonie officielle devant des personnalités de ces deux pays, ainsi
que pour un hommage à Nijinsky, qui sera interprété par les
plus prestigieux danseurs du ballet russe, membres du Bolchoï,
du Théâtre Mariinsky, du Théâtre impérial Mikhailovsky, du
théâtre académique du ballet Leonid Yakobson et du Boris
Eifman Ballet St Petersburg, notamment : Anastasiya
Stashkevich, Denis Rodkin, Vyacheslav Lopatin, Evgeny
Ivanchenko et Nina Zmievets.
Quelques places réservées au public sont mises en vente.
. mardi 4 mars 2014 à 19h30
THÉÂTRE DES OSSES (rés. 026/469.70.00)
u Jusqu’au 23.3. : RIDEAU! de et
m.e.s. Gisèle Sallin
la chaux-fds
ARC EN SCÈNES. CENTRE NEUCHÂTELOIS
DES ARTS VIVANTS sauf mention
contraire (loc. 032/967.60.50 ou
www.arcenscenes.ch/)
u 6 et 7.3. TPR : TU TIENS SUR TOUS LES
FRONTS de Christophe Tarkos, m.e.s.
Roland Auzet
u 14.3. : STEFANO DI BATTISTA / SYLVAIN
LUC, Jazz
u 14.3. : Série Parallèles. MARC
PANTILLON, piano, ANNE-LAURE
PANTILLON, flûte (Widor, Bonis,
Poulenc, Debussy, Sancan, Jolivet).
Salle Faller à 20h15
u 19.3. : LOLA FOLDING de Marc
Jeanneret, m.e.s. Brico Jardin
u 25 et 26.3. TPR : ENCORE, de et
chor. Eugénie Rebetez
a
g
THÉÂTRE DU PASSAGE. A 20h, di à 17h
(loc. 032/717.79.07)
u 1er, 4 et 7.3. : TOSCA de Puccini,
dir. Facundo Agudin, Choeur Lyrica
u Du 13 au 15.3. : SWEET POTATOES de
Philippe Sabres, Cie Sugar Cane
u 18, 19, 21, 22, 23.3. : LAURENT
NICOLET : J’AI TROP D’AMIS !, m.e.s.
Jean-Alexandre Blanchet
u 20 et 21.3. : BRITANNICUS de Jean
Racine, m.e.s. Jean-Louis Martinelli
u 28.3. : EMIGRANT, chants du Friûl
de Nadia Fabrizio
Anastasiya Stashkevich et Viacheslav Lopatin
Photo de Damir Yusupov / Bolshoi
u 27.3. : Série Parallèles. ASHOT
KHACHATOURIAN, piano (Beethoven,
Chopin, Prolofiev). Salle Faller du
Conservatoire à 20h15
martigny
u Du 27 au 29.3. : SWEET POTATOES de
Philippe Sabres, m.e.s. Frédéric
Mairy. Cie Sugar Cane, Neuchâtel.
Théâtre Alambic, Hôtel-de-Ville 4, à
19h30, sa : suppl. éventuelle à 19h
(rés./loc. 027/722.94.22)
meyrin
THÉÂTRE FORUM MEYRIN à 20h30 sauf
mention contraire
(loc. 022/989.34.34)
u 4 et 5.3. : LA DIVINE COMÉDIE - DE
L’ENFER AU PARADIS de D. Alighieri,
par Emiliano Pellisari Studio
u 10 et 11.3. : SEULE LA MER d'Amos
Oz, m.e.s. Denis Maillefer, par le
Théâtre en Flammes
u 13.3. à 19h : CONCERTO, VOUS AVEZ
DIT CONCERTO?, Orchestre de
Chambre de Genève, dir. Philippe
Béran. Dès 6 ans
u 20.3. : VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
de Céline, par Jean-François Balmer
u 22.3. à 15h30 : PLEASE, CONTINUE
(HAMLET), Cie Yan Duyvendak
u 26.3. à 19h : J'AVANCE ET J'EFFACE
d'Alexis Armengol, par le Théâtre à
cru. Dès 8 ans. Théâtre musical
u 29.3. ou 11.4. à 18h30 : HorsScène / Balades poétiques. LES
PETITES FUGUES, proposé par Dorian
Rossel et la Cie STT
u 1.4. : A L’ENVERS par Scopène
e
o
neuchâtel
Réservations : Fribourg Tourisme et Région, au 026/350.11.00
givisiez
t
u 28.3. : L'APPRENTI MAGICIEN de et
avec Sébastien Mossière
u 30.3. : INCIDENCE CHORÉGRAPHIQUE
avec les danseurs de l'Opéra de
Paris, dir. Bruno Bouché
Théâtre Equilibre, Fribourg
Imbach. Au Nouveau Monde /
Chocolat Show
u 11.3. : ORCHESTRE DE CHAMBRE
FRIBOURGEOIS, Concert 3, dir. Laurent
Gendre, OLIVER SCHNYDER, piano
(Gershwin, Dvorák)
u 13.3. : VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
d'après Céline, m.e.s. Fr. Petit
u 15.3. : TOSCA de Puccini, dir.
Bernard Colomb, Lyrica
u 19.3. : SUIVRONT MILLE ANS DE CALME,
chor. Angelin Preljocaj, Ballet
Preljocaj, danse
u 24.3. : COMME S'IL EN PLEUVAIT de
Sébastien Thiéry, m.e.s. Bernard
Murat
n
n
monthey
THÉÂTRE DU CROCHETAN à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u 14 et 15.3. : 120 MINUTES PRÉSENTE:
LA SUISSE de Vincent Kucholl et
Vincent Veillon
u 16.3. : Concert quatuor à cordes
et piano par le QUATUOR DE GENÈVE
(Mozart, Janacek, Dvorak)
u 20.3. : COLORS OF TIME, Thierry
Lang, piano
u 27.3. : CORPS DE WALK par la
Compagnie Carte Blanche, chor.
Sharon Eyal, Danse
u 29.3. : LES LARMES DES HOMMES de
Mia Couto, m.e.s. Patrick Mohr
morges
THÉÂTRE DE BEAUSOBRE à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u 6.3. : THOMAS FERSEN
u 5.3. : PIERRE RICHARD III de et avec
Pierre Richard, m.e.s. Christophe
Duthuron
u 11.3. : RIDEAU! Théâtre des Osses,
m.e.s. G. Sallin, chor. Tane Soutter
u 13.3. : 120 SECONDES PRÉSENTE : LA
SUISSE de et avec Vincent Veillon et
Vincent Kucholl, m.e.s. Denis
Maillefer et Antonio Troilo
u 14.3. : JAËL MALLI, ELÉONORE ET
BILLIE BIRD
u 22 et 23.3. : LA TRILOGIE DES ÎLES par
la Compagnie Irina Brook, m.e.s.
Irina Brook
u 18.3. : JONATHAN LAMBERT, Humour
u 20.3. : MARC DONNET-MONAY,
Humour
u 26.3. : COMME S'IL PLEUVAIT de
Sébastien Thiéry, m.e.s. B. Murat
d
a
THÉÂTRE DU POMMIER
(tél. 032/725.05.05)
u 22 et 23.3. à 17h : LE GRAND
POURQUOI d'après Wolf Erlbruch,
m.e.s. Muriel Imbach
u Du 27 au 29.3. / je 20h, ve-sa
20h30 : L’INTERROGATOIRE de Jacques
Chessex par la Cie l’Oranger, m.e.s.
Laurent Gachoud
nyon
USINE À GAZ sauf mention contraire
(loc. 022/361.44.04)
u 5.3. à 15h : LE GRAND POURQUOI
d'après Wolf Erlbruch, m.e.s. Muriel
Imbach. Cie La Bocca della Luna
u 16.3. : Les Matinales. QUATUOR
BRENTANO (Mozart, Beethoven).
Grande salle de la Colombière à
11h15 (billetterie : Service culturel
Migros, Migros Nyon-La Combe,
Stand Info Balexert)
u 19.3. : LA LÉGENDE DU PONT DU
DIABLE d'après Alexandre Dumas et
Meinrad Lienert, m.e.s. Julien
Mégroz et Cyrill Greter, conte musical et sculptural dès 6 ans
u 20.3. : ITALIE BRÉSIL 3 À 2 par la
Compagnie Tandaim, Théâtre
u 27 et 28.3. : Z. FORFAIT ILLIMITÉ par
la Compagnie Extrapol, Théâtre
onex
SPECTACLES ONÉSIENS, salle communale à 20h30 (loc. 022/879.59.99
ou SCM 022/319.61.11)
u 6 et 7.3. : FRÉDÉRIC RECROSIO, One
man show
u 9 et 12.3. : Récrés-spectacle. A
L'AIDE!, Marionnettes & ombres chinoises, dès 4 ans
u 27 et 28.3. : LES FRÈRES TALOCHE
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En tournée
Doute
«Doute» © David Marchon
La pièce de John Patrick Shanley mise en scène par
Robert Bouvier en 2012 - et qui a a valu à ce dernier de nombreux éloges lors de sa création, tant pour sa mise en scène
que pour son jeu d’acteur - part en tournée en Suisse
romande.
Sur scène : Quatre personnages pris dans la tourmente
d’une rumeur. La directrice d'une école catholique, sœur
Aloysius (Josiane Stoléru), reproche à la jeune sœur James
sa façon trop enthousiaste et spontanée de donner ses cours.
Elle voit aussi d'un mauvais œil la complicité qui unit le père
Flynn (Robert Bouvier) et un jeune élève noir. Elle va alors
lancer une rumeur ... Cette pièce percutante ébranle nos certitudes. Shanley traque les affres que connaissent des personnages confrontés à un soupçon qui vient bouleverser leur vie.
. Le 12 mars, Sion – Théâtre de Valère (location 027/323.45.61)
. Le 13 mars, Yverdon – Théâtre Benno Besson (location 024/423.65.84)
. Le 14 mars, Avenches – Théâtre du Château (location 026/676.99.22)
. Le 15 mars, Romont – Bicubic (location sur : www.bicubic.ch)
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plan/ouates sion
ESPACE VÉLODROME, sauf avis
contraire (loc. 022/888.64.60)
u 6 et 7.3. La Julienne : LA COMPAGNIE DES SPECTRES par Zabou
Breitman, Théâtre
u 21.3. La Julienne : MEDUOTERAN,
les Balkans sublimés, Concert
pully
L’OCTOGONE, à 20h30 sauf mention
contraire (loc. 021/721.36.20)
u 11.3. Pour l'Art et le Lutrin : CYCLE
1 – QUATUOR MEREL avec RUTH ZIESAK,
soprano
(Mozart,
Schubert,
Schoenberg)
u 15.3. : COLORS OF TIME, Thierry
Lang, piano, et l'Orchestre de chambre fribourgeois et les vocalistes de
l'Accroche-cœur, Musique
u 18.3. : VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
d’après Céline, m.e.s. Fr. Petit
u 22.3. hors saison : Amdathtra
musiques du monde – TURQUIE
u 27.3. : COMME S'IL EN PLEUVAIT de
Sébastien Thiéry, m.e.s. Bernard
Murat, Théâtre
sierre
LES HALLES à 19h30
(rés./loc. 027/722.94.22)
u 1.3. : SEULE LA MER, de Amos Oz par
le Théâtre en Flammes, m.e.s. Denis
Maillefer. Création en résidence
u 15 et 16.3. à 17h : LE GRAND
POURQUOI d'après Wolf Erlbruch,
m.e.s. Muriel Imbach
THÉÂTRE DE VALÈRE à 20h15, sauf mention contraire (loc. 027/323.45.61)
u 12.3. : DOUTE de John Patrick
Shanley, m.e.s. Robert Bouvier
u 21.3. : L'ETOURDI d'après Molière
et Philippe Cohen, m.e.s. François
Marin
u 25.3. : UNE SOCIÉTÉ DE SERVICES de
et m.e.s. Françoise Bloch
thonon-évian
MAISON DES ARTS, ESPACE MAURICE
NOVARINA à 20h30, sauf mention
contraire (loc. 04.50.71.39.47 ou en
ligne : billetterie.mal-thonon.org)
u 18.3. / Espace des Ursules à
14h30 et 20h : L’ILIADE de Homère
par la Cie Claude Brozzoni
u 20 et 21.3. / Théâtre du Casino,
Evian : LÉTÉE de Stéphanie Jaubertie,
m.e.s. Maud Hufnagel
u 21 et 22.3. / Espace des Ursules :
JEUX À TROIS MAINS de et m.e.s. Dario
Moretti (Bartók). Horaire : ven 21 à
9h30 et 15h / sam 22 à 10h
u 25.3. / Espace Tully à 20h : LES
LARMES DES HOMMES d’après «Le Fil
des Missangas» de Mia Couto,
m.e.s. Patrick Mohr
u 27 et 28.3. /Théâtre du Casino à
20h, Evian : DOM JUAN de Molière,
m.e.s. René Loyon
u 29.3. / Grange au Lac à 20h,
Evian : ORCHESTRE DES PAYS DE SAVOIE,
dir. Bernard Tétu, CHŒURS ET SOLISTES
DE LYON-BERNARD TÉTU (Britten,
Poulenc, Fauré)
a
g
vevey
THÉÂTRE. À 19h30, dim à 17h
sauf mention contraire (rés.
021/925.94.94 ou L@billetterie)
u 6 et 7.3. : TOUT MON AMOUR de
Laurent Mauvignier, dès 14 ans
u 9.3. : Oriental-Vevey. CH.AU FAIT
SES BRUNCHS. Concert-brunch par la
Cie CH.AU. Conservatoire de
Musique (rés. au 021 923 74 50)
u 11.3. : TOSCA de Puccini, dir.
Facundo Agudin, m.e.s. Robert
Bouvier, dès 14 ans
u 13.3. : FRÉDÉRIC RECROSIO / Je suis
vieux (pas beaucoup mais déjà),
Humour, dès 16 ans
u 15.3. : Midi, Théâtre! / MENU DU
JOUR: CARTE BLANCHE par la
Compagnie Les Faiseurs de rêve
u 18.3. : Arts & Lettres. QUATUOR
ZEHETMAIR (Janácek - Schubert Debussy)
u 21.3. : LES ENCOMBRANTS FONT LEUR
CIRQUE de et m.e.s. Claire Dancoisne
u 23.3. : SCHERZO À TROIS MAINS par le
Teatro All'Improviso, m.e.s. Dario
Moretti, dès 3 ans
u 30.3. : RIDEAU! de et m.e.s. Gisèle
Sallin, dès 14 ans
villars s/glâne
ESPACE NUITHONIE, Salle Mummenschanz à 20h (loc. Fribourg Tourisme
026/350.11.00 / [email protected])
Nuithonie: 026 407 51 51
u Du 12 au 22.3. : QUAND LES TRAINS
PASSENT,
m.e.s. Isabelle-Loyse
Gremaud
e
n
u 14.3. : I BI NÜT VO HIE / JE NE SUIS PAS
D'ICI de Carlos Henriquez, humour
u 23.3. : PÉPITO, musique Jacques
Offenbach, m.e.s. Isabelle Renaut,
Compagnie Cantamisù
u 27 et 28.3. : SEULE LA MER d'Amos
Oz, m.e.s. Denis Maillefer
yverdon
THÉÂTRE BENNO BESSON sauf mention
contraire (loc. 024/423.65.84)
u 6 et 7.3. : PIERRE AUCAIGNE EN PLEINE CRISE, m.e.s. Jean-Luc Barbezat
u 13.3. : DOUTE de John Patrick
Shanley, m.e.s. Robert Bouvier
u 19.3. : L'ETUDIANTE ET MONSIEUR
HENRI d'Ivan Calbérac, m.e.s. José
Paul
u 26.3. : RIDEAU! Par le Théâtre des
Osses, m.e.s. Gisèle Sallin
THÉÂTRE DE L’ECHANDOLE
(loc. 024/423.65.84 ou 024/423.65.89
une heure avant le spectacle)
u 8 et 9.3. : JÉRÉMY FISHER par la Cie
De Facto, m.e.s. Nathalie Sandoz
u 13 et 14.3. : HAUTE-AUTRICHE, Cie
des Ombres, m.e.s. Jérôme Richer
u 19.3. : HAY BABIES, chanson
u 21.3. : CARNETS DE ROUTE : BAMAKOYVERDON-MANAGUA, de et m.e.s.
Thierry Crozat
u 22.3. : BLUE TIRED HEROES par
Massimo Furlan
u Du 27 au 29.3. : FESTIVAL RÉGION(S)
EN SCÈNE(S) 2014
d
a
Théâtre
Théâtre
Danse
Seule la mer
+¢BWBODFFUK¢FĴBDF
Sfumato
Amos Oz – Denis Maillefer
Théâtre à cru
Rachid Ouramdane – L’A
10 et 11 mars à 20h30
26 mars à 19h
8 et 9 avr. à 20h30
Musique
Cirque
Concerto, vous avez dit
concerto ?
À l’envers
Philippe Béran – L’OCG
Scorpène
13 mars à 19h
1er avr. à 20h30
Une expérience de magie mentale
forum-meyrin.ch5I¨¡USF'PSVN.FZSJO1MBDFEFT$JOR$POUJOFOUTļļĽļł.FZSJO
#JMMFUUFSJFĿļĽĽńŃńľĿľĿEVMVBVWFEFļĿIŸļŃI
4FSWJDFDVMUVSFM.JHSPT(FO§WF4UBOE*OGP#BMFYFSU.JHSPT/ZPO-B$PNCF
IRRÉSISTIBLE
DE FABRICE ROGER-LACAN
MISE EN SCÈNE CLAUDE VUILLEMIN
ÉQUIPE ARTISTIQUE FRANÇOIS NADIN
MADELEINE PIGUET RAYKOV
ÉLÉONORE CASSAIGNEAU
DAVIDE CORNIL, CHARLOTTE FERNANDEZ
PIETRO MUSILLO, KATRINE ZINGG
PRODUCTION LE POCHE GENÈVE
THÉÂTRE LE POCHE
(C o m é d i e s a rca s t i q u e )
www.lepoche.ch / 022 310 37 59 / location Service culturel Migros
24 MARS > 13 AVRIL 2014
CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE / PHOTOGRAPHIE AUGUSTIN REBETEZ
LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE)
LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD)
PARTENAIRES MEDIAS : LEPROGRAMME.CH & NOUVELLES
Madeleine Piguet Raykov, comédienne
François Nadin, comédien
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