Surface approx. (cm²) : 1465
SAUF Sl LE CONTRAT EST LE MOYEN POUR LE SOUSCRIPTEUR
D'EFFECTUER UNE DONATION INDIRECTE OU SAUF Sl SA VOLONTÉ
EST SÉRIEUSEMENT SUJETTE À CAUTION, LA REMISE EN CAUSE
DE LA CLAUSE BÉNÉFICIAIRE EST ASSEZ DIFFICILE À OBTENIR.
1 Article L 132 24 du code
des assurances, alinea premier
« Le contrat d assurance cesse
d avoireffet a I égard
du bénéficiaire qui sete
condamne pouravoirdonne
volontanement la mort
a I assure ou au contractant »
2 Issues de la loi rï200V 1?75
du 17 decembre 2007
(JO du 18 decembre 200?)
3 Article G du code civil
« On ne peut déroger par des
conventions particulières,
aux lois qui intéressent I ordre
public et les bonnes mœurs »
4 Civ 1= 3 fevrier 1999,
n'96
ll
946
5 (.article!. 331 4 du code
de I action sociale
et des familles contient
une disposition similaire
6 Civ
le,lc
juillet2003,
n'OO
15?86
7 Civ I ', 4 novembre 2010
n'0721303
8 Article 909 du code civil,
in fine
9 Article 909 alinea 2
du code civil
10 Article 910 du code civil
11 Article L 443 E du code de
I action sociale et des familles
12 Article 414 i du code civil
« Pourfaire un acte valable
il faut etre sam d esprit
C est a ceux qui agissent
en nullité pourcette cause de
prouver I existence d un trouble
mental au moment de I acte »
13 Cass , ch mixte,
23 novembre 2004,
n'0113 592,n°Q2 ll 352
n'0217S07etn°03 13673
14 Voir notamment
Cass ch mxte, 21 decembre
2007,n'0612769
15 Com, 26 octobre 2010,
n°09 70927
par la chambre mixte de la Cour
de cassation Par ces arrêts, la Cour
de cassation a ainsi clairement
confirmé que le caractère exagéré
des primes devait s'apprécier au
moment du versement et au regard
de l'âge et des situations patrimoniale
et familiale du souscripteur
Lappréciation prétoriale
de la disproportion
C'est donc au demandeur à l'action
qu'il appartient d'établir quelle était
la situation patrimoniale et familiale
du souscripteur lors du versement
des primes II doit ainsi être en
mesure de justifier d'une dispropor-
tion entre les sommes versées sur
le contrat et la situation patrimoniale
du souscripteur à l'époque du ver-
sement Bien que ce critère de la
disproportion semble être l'élément
d'appréciation principal, l'utilité de
l'opération, ainsi que le but poursuivi
par le souscripteur, sont également
pris en considération
Lanalyse de la jurisprudence dé-
montre que les juges disposent d'un
large pouvoir d'appréciation dans
l'application de ces critères Ainsi,
il n'existe pas de logique mathéma-
tique ce qui permet aux magistrats
de s'adapter au cas par cas et de faire
usage de leur pouvoir modérateur
pour apprécier « l'exagération »
La clause bénéficiaire du contrat
peut encore être remise en cause du
fait d'une requahfication de lassu-
rance vie en donation indirecte,
laquelle est régie par les dispositions
de l'article 894 du code civil
« La donation entre vifs est un acte
par lequel le donateur se dépouille
actuellement et irrévocablement de
la chose donnée en faveur du dona-
taire qui l'accepte »
Le code général des impôts, en son
article 784, précise, quant à lui, que
« les parties sont tenues de faire
connaître, dans tout acte constatant
une transmission entre vifs à titre
gratuit et dans toute déclaration
de succession, s'il existe ou non des
donations antérieures consenties à
un titre et sous une forme quelconque
par le donateur ou le défunt aux
donataires héritiers ou légataires »
Par nature, le contrat d'assui ance vie,
qui intègre le mécanisme de la stipu-
lation pour autrui, se détache de la
notion de libéralité et échappe ainsi a
l'imposition quelle engendre, puisque
le bénéficiaire recueille directement
de lassureur une somme qui est répu-
tée n'avoir jamais fait partie du patri-
moine du souscripteur Le code des
assurances affranchit d'ailleurs las-
surance vie des règles de forme qui
régissent la donation
Si, par son régime, le contrat d'assu-
rance vie s'émancipe donc indubi-
tablement de la notion de donation
indirecte, il existe néanmoins un
risque de requahfication le contrat
dassurance vie peut être requalifie en
donation si les circonstances dans
lesquelles son bénéficiaire a été dési-
gné révèlent la volonté du souscrip-
teur de se dépouiller de manière irré-
vocable<I4> Tel est le cas, par exemple,
de la souscription neuf mois avant le
décès du souscripteur atteint
d'un cancer, dont l'état de sante s'est
aggravé régulièrement, ces éléments
démontrant «l'absence d'aléa au
moment de la souscription des
contrats, ainsi que le caractère illu-
soire de la faculté de rachat, et la
volonté actuelle et irrévocable du
souscripteur de se dépouiller» au
profil du bénéficiaire13'
Les trois critères jurisprudence^ à
retenir sont ceuxd'un dessaisissement
immédiat et irrévocable, ainsi que
d'une intention libérale La réunion
de ces trois critères entraîne la
requahfication, avec pour consé-
quence un assujettissement aux
droits de mutation à titre gratuit La
requahfication concerne presque
exclusivement les cas de souscription
tardive, lesquels peuvent également
être à l'origine de l'application de la
théorie de l'abus de droit, qui reste
cependant d'application résiduelle
Effets sur la sécurité
juridique du contrat
Ces différentes hypothèses de remise
en cause pourraient paraître cho-
quantes en ce qu'elles conduisent
à ne pas respecter la volonté du sous-
cripteur de gratifier une personne
en parLicuher
Lanalyse des cas de figure répertoriés
plus haut permet cependant d'affir-
mer que l'objectif poursuivi n'est
certainement pas de faire fi de la
volonté du souscripteur, maîs de
s'assurer que l'assurance vie n'est
pas utilisée de telle manière quelle
s'en trouverait profondément
«dénaturée» En pratique, le prin-
cipe de liberté contractuelle atta-
ché à la désignation du bénéficiaire
est d'ailleurs grandement préservé
par une application stricte et parci-
monieuse des critères permettant
d'aboutir à une remise en cause
de la désignation
Ainsi, sauf si le contrat dassurance
vie ne constitue qu'un habillage per-
mettant au souscripteur d'atteindre
un tout autre objectif (primes mani-
festement exagérées, donation indi-
recte, abus de droit ), et sauf à ce que
la volonté de ce dernier soit sérieu-
sement sujette à caution (incapacités
de recevoir, altération du consen-
tement ), la remise en cause est assez
difficile à obtenir Les souscripteurs
peuvent donc être rassurés •