Rapport
INTRODUCTION
DécidéàMaastricht,lepassageàl’eurole1erjanvier19991constitueunactedefoi.
L’europortelapromessededevenirunemonnaiederéserveetderéférencemondiale.Les
acteurséconomiqueseuropéensquiparticipentauxéchangessurlecontinentpourrontenfin
payer leurs salaires, leurs charges, leurs impôts et vendre leur production dans la même
monnaie et n’auront plus à se prémunir contre les risques de change. Les prix seront
comparablesd’un pays àl’autre etlefranchissementdes frontières ne donneraplus lieu à
échange coûteux de devises. C’est la fin des si désastreuses «dévaluations compétitives».
L’euro doit concourir à l’objectifques’estfixél’Europededevenir «l’économielaplus
compétitivedumonde».
Ayantfranchilecapdesondixièmeanniversaire,l’euroseportebienetafficheune
insolenterobustessealorsquelazoneeuron’enfinitpasdesedébattredanslacrise.
Aceparadoxe,s’ajouteunconstattroublant:parmilespaysmembresdel’Unioneuropéenne,
ceuxquiontgardéleurmonnaienationale,parchoixoudansl’attentedelaqualification,se
portentaussibien,sinonmieux,quelesdétenteursdelamonnaieunique.Etpourtant,l’étape
monétaire était venue à son heure dans la feuille de route européenne, tant l’instabilité
monétaire menaçait d’implosion le marché unique au début des années1990,dufaitdes
dévaluationscompétitivesquibrisaientlacroissanceetpropageaientlechômage.
Cescirconstancessignentunbilandécevantdontilseraitcommoded’attribuerla
responsabilitéàlaconceptiondelamonnaieunique.Lesresponsableseuropéensontfait
unpari,sansentirertouteslesconséquences,commes’ilsnevoulaientpass’avouerquel’on
franchissait avec l’euro une étape politique décisive. L’abandon des monnaies nationales
constituaitbienunpremierpartageimplicitedesouveraineté,aveclacréationd’uneBanque
centraleeuropéenne,d’essencefédérale.Ledéfiétaitd’envergure:commentfairenaître,en
Europe,unemonnaieorphelined’Etat?
C’estdanscecontexteinéditdevideinstitutionnelqu’aétéconçulerèglementde
copropriétédel’euro,ce«Pactedestabilitéetdecroissance»,ensemblededisciplines
budgétairesconformesauxengagementsédictésparletraitédeMaastricht.S’ilestvraique
les dispositions relatives à la stabilité primaient largement les considérations susceptibles
d’activerlacroissance,celle‐ciétantsupposéerésulterdelastabilité,nousétionsconvenus
d’instituerunorganedecoordination.Conscientdecesimpératifs,enseptembre1996,àla
veille de l’Ecofin informel de Dublin, nous publiions avec TheoWaigel,leministredes
finances allemand, une tribune dans l’InternationalHeraldTribune,sousformedemiseen
garde:«Noussommesplusquejamaisconvaincusquel’Unionmonétaireeuropéenneseraun
grandsuccès(…).LesgouvernementsdesEtatsmembresdevraienttravaillerensembleplus
étroitementetéchangerleurspointsdevuesurlaconjonctureéconomiqueetlespolitiquesqu’il
convientd’adopterenconséquence.Etceauseind’unConseilinformeldestabilité».Cespropos
s’efforçaientdepréfigurerunegouvernanceéconomiquedelafuture zone euro, dans la
perspective du Conseil européen de décembre 1996, sous présidence irlandaise, qui allait
entérinerlepacteetpréparerlestermesdutraitéd’Amsterdam.
Lesfragilitésetlesambiguïtésvontêtremasquéesjusqu’audéclenchementdelacrise
desdettessouveraines.Lesmajoritésnouvelles,enItalie,enEspagne,auRoyaume‐Uni,en
France comme en Allemagne reprennent les engagements de leurs prédécesseurs. Chacun
litique qu’exige la novation fondamentale introduite par lafeint d’ignorer la mutation po
‐3‐
1L’euroestnotremonnaiecommunedepuisle1
er janvier 1999 et notre monnaie unique, mise en circulation,
depuisle1erjanvier2002.