Jean-Paul Piriou
La comptabilité
nationale
QUATORZIÈME ÉDITION
(conforme à la nouvelle base 2000.
Données disponibles en 2005)
Du même auteur
L’Indice des prix, coll. « Repères », La Découverte, nouvelle édition, 1992.
Lexique de sciences économiques et sociales, coll. « Repères », La Découverte,
septième édition, 2004.
Nouveau Manuel, sciences économiques et sociales, terminale ES (direction avec
Pascal Combemale), La Découverte, nouvelle édition, 2003.
Nouveau Manuel, sciences économiques et sociales, seconde (direction avec Pascal
Combemale), La Découverte, 1997.
Jean-Paul Piriou, brutalement décédé le 29 février 2004, dirigeait la collection
« Repères » depuis 1987. La présente édition de ce livre a été mise à jour (chiffres de
l’année 2004, dans la nouvelle base 2000) en novembre 2005 par Jacques Bournay
et Pascal Combemale.
ISBN 2-7071-4839-3
Le logo qui figure au dos de la couverture de ce livre mérite une explication. Son objet
est d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit, tout particu-
lièrement dans le domaine des sciences humaines et sociales, le développement massif du
photocopillage.
Le code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet expressé-
ment la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or cette pratique
s’est généralisée dans les établissements d’enseignement supérieur, provoquant une baisse
brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des
œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée.
Nous rappelons donc qu’en application des articles L. 122-10 à L. 122-12 du code de
la propriété intellectuelle, toute reproduction à usage collectif par photocopie, intégra-
lement ou partiellement, du présent ouvrage est interdite sans autorisation du Centre
français d’exploitation du droit de copie (CFC, 20, rue des Grands-Augustins, 75006
Paris). Toute autre forme de reproduction, intégrale ou partielle, est également interdite
sans autorisation de l’éditeur.
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1994, 1996, 1997, 1999, 2001, 2003, 2004, 2006.
Introduction
«C
roissance du PIB »,«stagnation du revenu disponible des
ménages »,«chute de la FBCF »,«amélioration du taux de marge des
sociétés»,«besoin de financement des administrations »,etc.:les
médias nous font ingurgiter des informations économiques que nous
digérons dautant moins bien que nous manquons d’éléments de
comparaison pour apprécier limportance des chiffres cités et que nous
connaissons mal la signification des sigles utilisésouladéfinition des
notions employées. Cette omniprésence envahissante des informa-
tions économiques quantitatives peut avoir des effets pervers redou-
tables : faute den saisir le sens et la portée, nous sommes conduits à
nous en désintéresser et àconsidérer que les données économiques sont
réservées aux «experts ». Cette attitude tout àfait compréhensible
saccompagne alors souvent soit dun scepticisme désabusé(«on peut
faire dire nimporte quoi aux statistiques »), soit dune fétichisation du
chiffre et dun abandon de tout esprit critique.
Chacun peut améliorer spectaculairement sa perception des informa-
tions économiques en sinitiant àla comptabiliténationale (CN). Car
celle-ci est précisément le cadre dans lequel sont définies et quantifiées
la plupart des notions économiques que les médias véhiculent, que les
hommes politiques reprennent dans leurs débats ou leurs polémiques,
et que les économistes utilisent pour leurs analyses. Sinitier àla CN, ce
nest pas seulement en acquérir quelques rudiments. Sinitier, cest entrer
dans la logique interne de ce système de normalisation de linformation
économique questlaCN;saisirsacohérence et son intérêt, mais aussi
ses limites et ses problèmes, comprendre que la CN nest pas réductible
àune technique, mais quelle est une pratique sociale. Lunique ambi-
tion de ce livre est de permettre àchacun datteindre cet objectif et de
rejoindre ainsi le cercle malheureusement restreint des initiés.
La CN est une représentation globale, détailléeetchiffréedel’économie
nationale dans un cadre comptable.Leséléments de cette définition seront
explicités dans ce livre, mais il faut insister immédiatement sur le fait
quelaCNestunereprésentation. On entend souvent dire que la CN est
objective, quelle est la photographie du réel. Cest au moins oublier que
dun même objet il peut exister de nombreuses photos qui diffèrent par
l’éclairage, langledeprisedevue,etc.Cest surtout omettre que lobjet
quelaCNreprésente, met en scène, nest pas déjàlà, mais est construit
par la CN elle-même. En ce sens, la CN ne peut avoir un point de vue
«objectiviste »;ellenest pas un rassemblement de «données »écono-
miques (données par qui, dailleurs ? Par l’évidence, par les appa-
rences ?). La CN repose sur une démarche «constructiviste »:elle
constitue la réalitééconomique en objet. Si les faits économiques
peuvent acquérir du sens, cest parce quils ne sont plus des données
(des faits bruts) mais des résultats (des faits construits). Cette remarque
est importante car la CN renvoie àun univers qui peut nous paraître
familier, et le risque est alors grand de considérer quelle se contente
dordonner et de quantifier des phénomènes en quelque sorte natu-
rels àlaide de notions évidentes (production, consommation,
investissement).
En réalité, la CN est un produit historique au confluent de considé-
rations théoriques et de préoccupations pratiques. On pourrait lui
trouver de nombreux ancêtres (voir [Vanoli, 2002])
1
,maislinvention
de la CN proprement dite est le produit des perturbations écono-
miques et politiques de la période 1930-1945. Lampleur de la crise,
linsuffisance des statistiques disponibles pour éclairer les interven-
tions publiques et lintérêtportéaux phénomènes macroéconomiques
sous linfluence de Keynes [Combemale, 2003] orientent tout dabord
les préoccupations statistiques vers l’élaboration et l’évaluation
dagrégats, cest-à-diredegrandeurssynthétiques caractéristiques de
l’économie nationale (produit national, revenu national). Mais cest
pendant la Seconde Guerre mondiale que sont élaborés les premiers
schémas de comptes nationaux par Meade et Stone en Grande-
Bretagne, Tinbergen aux Pays-Bas et Vincent en France. Après la guerre,
le Système simplifié(1950) puis le Système normaliséde comptabiliténatio-
nale (1952) concrétisent les efforts de normalisation entrepris dans le
cadre de lOECE (Organisation européenne de coopération économique,
devenue ensuite lOCDE). Ces travaux sont repris par lONU qui publie
en 1953 le premier Système de comptabiliténationale des Nations unies
(SCN, sigle officiel).
La France fait cavalier seul. La CN sy inscrit dans une conception du
développement commune aux forces politiques et sociales trauma-
tisées par le désastre de 1940. Celles-ci sont convaincues de lincapacité
du patronat et des mécanismes du marchéàreconstruire et àdéve-
lopper l’économie. Elles considèrent la CN comme un instrument indis-
pensable de la planification et des interventions «éclairées »de l’État
1. Les références entre crochets renvoient àla bibliographie en fin douvrage.
LA COMPTABILITÉ NATIONALE4
[Fourquet, 1980]. Doùune CN originale, beaucoup plus détailléeque
celle que les Anglo-Saxons ont fait entériner par lONU.
Cette originalitéprend fin en 1976 avec lavènement du Système élargi
de CN (officiellement appeléSECN et marginalement réviséen 1987).
Il est ladaptation aux caractéristiques institutionnelles françaises du
SEC 70, Système européen des comptes. Ce dernier est lui-même ladapta-
tion àlEurope en 1970 du SCN adoptépar lONU en 1968. Dune façon
générale, le SCN 68 peut être considérécomme un aboutissement
conceptuel dans la mesure oùil résulte assez largement de la fusion des
apports anglo-saxons et français.
En 1993, lONU révise ànouveau son système. Comme la plupart
des modifications de la CN, ce changement est aussi une adaptation
aux évolutions des économies et àcelles des besoins dinformation. Il
est significatif àcet égard que le SCN 93 (nouvelle appellation du
système) prenne enfin en compte au moins partiellement limma-
tériel dans la définition de linvestissement ou bien mondialisation
oblige quil constitue une avancée significative dans lharmonisa-
tion internationale des normes des organismes internationaux eux-
mêmes. Le SCN 93 a étéen effet préparéàpartir de 1982 sous l’égide
dun groupe de travail associant lONU, le Fonds monétaire interna-
tional (dont la cinquième édition du Manuel de la balance des paie-
ments, les statistiques des finances publiques et les statistiques
financières sont désormais très proches du SCN), la Banque mondiale,
lOCDE et lOffice statistique des communautéseuropéennes (Eurostat).
Un groupe de cinq experts (allemand, américain, argentin, indien et
français, en loccurrence AndréVanoli) a jouéun grand rôle dans ces
travaux trèslourdsd’élaboration du nouveau système.
Tous les pays ont maintenant pratiquement adoptéle système de
lONU, y compris, bien évidemment, ceux auxquels les Soviétiques
avaient imposéleur «Système de la balance de l’économie natio-
nale », plus souvent appeléCPM pour comptabilitédu produit matériel
parce que la conception de la production sy limitait aux «produits
matériels »(objets, énergie) et aux services «matériels »nécessaires à
leur circulation (transport, commerce), les autres services étant exclus
duchampdelaproduction.
Le SEC 95, adaptation par lUnion européenne du SCN 93, a le statut
dun règlement européen : adoptéen juin 1996 par le Conseil de lUE
sur proposition de la Commission, il simpose àtous les pays de lUnion
(tous ont commencéàpublier des comptes conformes au SEC 95 en
1999). Il sagit non seulement de pouvoir rendre plus facilement compa-
rables les différentes économies, mais aussi de disposer d’évaluations
ne prêtant pas àcontroverses pour un certain nombre dindicateurs
sensibles : par exemple, le PNB qui constitue lassiette de la «quatrième
ressource »du budget de lUE,ouledéficit public parce quil doit obéir
INTRODUCTION 5
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