Chapitre 1.1.7. — Les biotechnologies dans le diagnostic des maladies infectieuses
et le développement des vaccins
76 Manuel terrestre de l’OIE 2008
3. Diagnostic à l’aide de sondes nucléiques et de la technique des micropuces à ADN
Les recherches avec des sondes nucléiques ADN conventionnelles et les analyses par micropuces sont les deux
côtés d’une même pièce. Le mécanisme fondamental des deux méthodes est la liaison (hybridation) de l’ADN,
issus d’un échantillon suspecté de contenir un agent pathogène (l’« inconnu »), avec de l’ADN hautement
caractérisé dérivé au préalable d’un agent pathogène intéressant (l’ADN « connu »).
Lors des recherches avec des sondes nucléiques ADN conventionnelles, l’ADN (ou l’ARN) inconnu, qui est la
cible, est immobilisé sur une surface solide telle qu’un filtre. L’ADN connu, transformé en sonde après marquage
ou identification (tag) d’une manière ou d’une autre, est dans la phase liquide et est appliqué sur la cible. Dans le
diagnostic par micropuces, c’est l’ADN connu (ADN complémentaire ou oligonucléotides longs) qui est la cible,
immobilisé sur une lame de verre, et l’ADN inconnu, dans la phase liquide, qui est marqué pour en faire une
sonde.
Dans les recherches conventionnelles avec des sondes nucléiques ADN, la cible peut être des acides nucléiques
extraits de matériel clinique ou de cultures cellulaires et soit (a) ajoutés à des filtres (dot ou slot blot) ou (b),
transféré sur un filtre après gel d’électrophorèse, ce qui est moins pratique dans le contexte du diagnostic, La
quantité d’agent pathogène dans un échantillon clinique peut être trop faible pour une détection. Par conséquent,
il peut être nécessaire d’amplifier les acides nucléiques par une PCR ou par transcription reverse suivie d’une
PCR (RT-PCR), le produit de PCR sera appliqué sur un filtre. Afin de visualiser une sonde liée à sa cible, la
sonde peut être marquée avec un nucléotide radioactif ou, plus communément et plus inoffensif, identifiée de
façon non-radioactive. Par exemple, la biotine ou la biotine-psoralène peuvent être incorporées dans la sonde, la
sonde liée étant détectée par addition de streptavidine liée à une enzyme pour générer une réaction colorée ou
lumineuse (chimioluminescence).
Une micropuce est ainsi appelée parce qu’elle peut comprendre 20 000 ou plus d’ADNs connus différents,
chaque ADN étant déposé en point sur une lame de verre, pour former la puce. Chaque point ne mesure
qu’environ 10 μm de diamètre. Les ADN complémentaires de fragments de gènes sélectionnés d’agents
pathogènes peuvent être utilisés pour composer des puces (24). Cependant, si un grand nombre d’agents
pathogènes doit être recherché, il sera alors plus aisé d’un point de vue pratique d’utiliser de grands
oligonucléotides. La micropuce utilisée pour identifier le virus du SRAS comme étant un coronavirus avait des
oligonucléotides comprenant 70 nucléotides (70-mer) (178). Dans les recherches utilisant des micropuces, c’est à
partir de l’échantillon que la sonde est faite. En bref, l’acide nucléique est extrait de l’échantillon et une (RT-) PCR
est effectuée en utilisant des amorces au hasard d’oligonucléotides. De cette façon, une partie de tous les acides
nucléiques de l’échantillon – des deux origines : hôte et agent pathogène – sont amplifiés. Ces produits de PCR,
représentatifs de tous les acides nucléiques de l’échantillon, sont marqués avec un colorant fluorescent et
appliqués sur la micropuce. Dans des conditions optimisées, seul l’ADN dérivé de l’agent pathogène se liera à
l’ADN sur la lame de verre. Si l’on est intéressé seulement par la détection d’un agent pathogène particulier ou
d’un groupe d’agents pathogènes liés alors les oligonucléotides spécifiques peuvent être utilisés pour les
amplifier au sein de l’échantillon pour la production de sonde.
Les micropuces pour la détection d’agents pathogènes peuvent être élaborées pour plusieurs niveaux de
différentiation. Dans le cas de cibles d’oligonucléotides d’ADN, il faut tout d’abord définir les oligonucléotides
capables de détecter et de différencier les agents pathogènes au niveau du genre. Il faudra choisir un nombre,
peut-être 10, d’oligonucléotides avec un haut degré de conservation de séquence (oligonucléotides consensus)
au sein d’un genre donné, de telle sorte qu’une sonde préparée à partir d’un échantillon de terrain contenant un
membre de ce genre hybridera à coup sûr au moins quelques oligonucléotides, tandis qu’elle n’hybridera pas (ou
à un moindre degré) celles correspondant aux genres apparentés. Par exemple, on pourra différencier les isolats
d’Aphtovirus (fièvre aphteuse, FA) des espèces d’Enterovirus dans la famille des Picornaviridae. On pourra alors
sélectionner d’autres jeux d’oligonucléotides, placés sur la même lame de verre, capables de caractériser plus
spécifiquement un agent pathogène, par exemple pour différencier les 7 types de virus de FA, et éventuellement
pour aller au niveau du sous-type.
Dans les études conventionnelles avec des acides nucléiques, la détection d’un agent pathogène est limitée par
le nombre de sondes utilisées, alors que dans l’analyse avec micropuces seul le nombre d’ADN cible est limitant.
Si une micropuce contient 1 000 oligonucléotides différents, il faudra 1 000 sondes (et 1 000 réactions séparées)
pour obtenir le même niveau de résolution par analyse conventionnelle. Le grand avantage des analyses à
micropuces dans la recherche d’un agent pathogène est que des centaines d’agents pathogènes peuvent être
étudiés simultanément lors de l’utilisation d’une seule micropuce. Clairement, l’analyse par micropuce a un grand
potentiel lorsque l’on recherche une maladie d’étiologie inconnue, des maladies où plusieurs agents pathogènes
peuvent être présents, et lorsqu’un sous-typage est nécessaire. Pour augmenter la sensibilité dans l’identification
des agents pathogènes, les micropuces peuvent être couplées à des amplifications par PCR. Ces PCR sont
mises au point afin d’amplifier un ou plusieurs gènes conservés ou des séquences multiples, telles que des PCR
utilisant des amorces largement conservées, des PCR « consensuelles » ou des PCR multiplex comme décrites