72 Manuel terrestre de l’OIE 2008
CHAPITRE 1.1.7.
LES BIOTECHNOLOGIES DANS LE DIAGNOSTIC
DES MALADIES INFECTIEUSES ET LE
DÉVELOPPEMENT DES VACCINS
INTRODUCTION
Les méthodes de biologie moléculaire ont de plus en plus d’applications dans le diagnostic des
maladies infectieuses et le développement de vaccins. Avant d’être largement utilisées, les
méthodes développées nécessitent d’être simples, sans risque, sensibles, reproductibles et
éventuellement automatisables pour faciliter le criblage d’un grand nombre d’échantillons.
Les objectifs de ce chapitre sont de fournir des considérations générales sur le sujet pour les
non-spécialistes. Deux numéros spéciaux de la Revue Scientifique et Technique de l’OIE sont
dédiés aux biotechnologies et au diagnostic des maladies animales ; ils pourront être consultés
pour une information plus exhaustive (182, 183). Ce qui suit n’est qu’un aperçu des domaines
présentés dans ce chapitre.
A. Détection des acides nucléiques
1. Réaction d’amplification en chaîne par polymérase (PCR) et PCR en temps réel ;
2. Diagnostic par polymorphisme de longueur des fragments de restriction (RFLP) et approches
liées basées sur l’ADN ;
3. Diagnostic à l’aide de sondes nucléiques et de la technique des micropuces à ADN ;
4. Extraction des acides nucléiques.
B. Détection des protéines
1. Immunohistochimie ;
2. Immunotransfert ;
3. Méthode immuno-enzymatique avec capture d’antigène (ELISA) ;
4. Immunochromatographie ;
5. Protéomique.
C. Détection des anticorps
1. ELISA de compétition (c-ELISA) ;
2. Production d’antigènes par la technologie de l’ADN recombiné.
D. Vaccins
1. Vaccins avec délétion de gènes – bactéries ;
2. Vaccins marqueurs et épreuves de diagnostic associées ;
3. Vaccins à virus vectorisés ;
4. Vaccins à base d’ADN ;
5. Autres développements en technologie vaccinale.
E. Les nanotechnologies dans le domaine du diagnostic et du développement des vaccins
1. Diagnostic
2. Développement de vaccins
Chapitre 1.1.7. — Les biotechnologies dans le diagnostic des maladies infectieuses
et le développement des vaccins
Manuel terrestre de l’OIE 2008 73
A. DÉTECTION DES ACIDES NUCLÉIQUES
1. La réaction d’amplification en chaîne par polymérase (PCR) et PCR en temps réel
La PCR utilise les propriétés réplicatives naturelles de l’ADN pouvant conduire à de grande quantité in vitro d’une
séquence désirée d’ADN à partir d’un mélange complexe de séquences hétérogènes (138). La PCR peut
amplifier plusieurs millions de fois des copies d’une région sélectionnée d’ADN d’une taille de 50 à plusieurs
milliers de paires de bases. Une discussion détaillée de la méthodologie et des applications de la PCR est
donnée dans la référence de Mullis et al. (99).
L’amplification de l’ADN par PCR est réalisée via une succession cyclique d’incubations à différentes
températures. L’ADN cible est d’abord dénaturé par la chaleur pour séparer les deux brins complémentaires afin
d’obtenir une matrice simple brin. Des amorces spécifiques (courtes molécules synthétiques d’ADN
complémentaires des deux brins d’ADN) sont ensuite hybridées à une matrice simple brin à basse température et
sont prolongées avec une ADN polymérase à une température intermédiaire. Lorsque la polymérase a synthétisé
un nouveau brin d’ADN, le produit est séparé de la matrice par chauffage à une température plus élevée. Ces
étapes suivent des cycles qui sont répétés 20 à 40 fois, permettant ainsi l’amplification de l’ADN cible. La clé de
l’amplification géométrique de la séquence d’ADN cible est au niveau de la sélection des oligonucléotides qui,
une fois prolongés, vont générer des sites complémentaires pour les oligonucléotides et permettre une
hybridation au cours d’un nouveau cycle. Pour détecter l’ARN (par ex., l’ARN viral), une copie d’ADN
complémentaire (ADNc) doit être d’abord réalisée en utilisant une transcriptase inverse (RT). L’ADNc agit ensuite
comme une empreinte pour l’amplification par PCR. Cette technique est appelée RT-PCR.
Tout produit de PCR généré a, par définition, une taille caractéristique. Son identité est généralement confirmée
en utilisant des sondes ADN (voir ci-dessous) ou des produits de digestion d’enzymes de restriction qui peuvent
être utilisés pour fournir des RFLPs (voir ci-dessus). Plus communément, depuis l’introduction de techniques
automatisées de séquençage en cycles, l’identification est réalisée via un séquençage direct des produits de
PCR. Par exemple, le séquençage a été utilisé pour le typage de la virulence du virus de l’influenza aviaire de
type A, pour lequel des motifs de structure au niveau du site de clivage du gène de l’hémagglutinine sont
associés à des marqueurs de haute pathogénicité chez le poulet (69). La sensibilité de la PCR peut être
augmentée par l’utilisation d’une seconde série d’oligonucléotides pour amplifier un sous-fragment du produit
d’amplification initial. Cette méthode est communément appelée PCR nichée et a été utilisée pour détecter de
faibles taux d’Anaplasma marginale chez des bovins infectés permanents (162). Cependant, l’utilisation de la
PCR nichée peut augmenter le taux de faux résultats positifs.
La PCR est une méthode hautement sensible pour détecter des agents infectieux dans les tissus de l’hôte et
chez les vecteurs, même lorsque seulement un petit nombre de cellules de l’hôte sont infectées. La PCR peut
cibler et amplifier une séquence d’un gène qui a été intégrée dans le génome de cellules infectées de l’hôte. La
réaction peut aussi être dirigée pour amplifier des séquences géniques virales non intégrées. Il est possible
d’utiliser la PCR pour rechercher des contaminants dans les lots de vaccins. Cependant, elle ne permet pas de
différencier les organismes vivants des organismes morts ou des fragments incomplets d’ADN génomique, et
cela peut rendre difficile l’interprétation des résultats et affecter l’applicabilité de la PCR pour cette fonction.
La PCR peut se révéler très utile dans le diagnostic des infections chroniques persistantes, comme celles
provoquées par les rétrovirus (virus de la leucose bovine, virus de l’encéphalite/arthrite caprine, etc.). Ces
maladies présentent des problèmes graves en termes de diagnostic et de prévention puisque les animaux
infectés sont une source constante d’agents transmissibles.
Quand la PCR est utilisée à des fins diagnostiques, une grande attention doit être portée pour éviter une
contamination des échantillons, du fait de la sensibilité extrême de la technique, qui peut donner facilement des
faux résultats positifs. Des études inter-laboratoires ont montré que des échantillons positifs sont toujours
détectés, mais de faux positifs sont fréquemment obtenus avec des échantillons négatifs connus. Ceci indique la
présence continue de problèmes de contamination (143). Des systèmes ont été développés pour résoudre ce
problème comme le système dUTP-UNG (d-uracile triphosphate et uracile-N-glycosylase). Ces systèmes utilisent
une réaction enzymatique pour dégrader spécifiquement les produits de PCR à partir d’une amplification
préalable (dans laquelle du dUTP a été incorporé) sans dégrader les matrices d’acides nucléiques initiales (32).
Ceci, bien sûr, n’exclue pas la contamination d’échantillons par des virus extérieurs. Une nouvelle génération de
postes de travail robotisés est maintenant disponible et des réactions de PCR peuvent être programmées avec
un tube unique ouvert une seule fois. Cela réduit nettement les risques de contamination. Il est également
important de contrôler les résultats négatifs qui pourraient être dus à la présence de substances pouvant
interférer avec la réaction dans le mélange réactionnel de la PCR ou dans l’échantillon du patient. Ce contrôle
peut s’effectuer par l’introduction d’une matrice connue pour la production d’un produit de PCR (32). La prise en
compte de ces précautions permet l’utilisation de PCR comme une option réaliste pour le diagnostic.
Chapitre 1.1.7. — Les biotechnologies dans le diagnostic des maladies infectieuses
et le développement des vaccins
74 Manuel terrestre de l’OIE 2008
Afin d’augmenter son utilité dans les diagnostics vétérinaires et pour l’identification des agents pathogènes,
l’épreuve de PCR a été très largement modifiée au cours de ces dernières années. La PCR utilisant des amorces
largement conservées est destinée à l’identification des classes d’agents pathogènes. Le meilleur exemple en est
l’utilisation des séquences du gène 16S de l’ARNr, qui est un gène bien conservé par l’évolution dans les
espèces bactériennes (58). En prenant des amorces complémentaires des régions conservées de la séquence, il
est possible de déterminer la présence de n’importe quelle classe recherchée dans un échantillon. Il convient de
noter qu’un résultat positif en PCR doit être précisé ultérieurement par hybridation avec des sondes spécifiques
d’espèce, par une analyse par digestion avec des enzymes de restriction ou par séquençage. De la même façon,
la PCR « consensuelle » est mise au point pour utiliser des amorces dégénérées qui ciblent des régions ou des
motifs d’un groupe d’agents pathogènes apparentés (173). Ainsi l’utilisation d’amorces dégénérées ayant pour
cible les régions conservées du gène de la ADN-polymérase des herpèsvirus, a-t-elle permis l’identification de
nombreux herpèsvirus non connus chez diverses espèces animales (46, 82). En revanche, la PCR multiplex est
mise au point afin d’utiliser deux (ou plus) paires d’amorces dirigées vers des séquences uniques spécifiques
d’un agent pathogène au cours d’une seule réaction pour la détection simultanément de plusieurs agents
pathogènes présentant un intérêt (47). La PCR multiplex présente l’avantage d’un haut niveau de sensibilité et de
spécificité. Cependant, il a été signalé que l’usage de la « multiplicité » risquait de réduire la sensibilité comparé à
la PCR unique, du fait de phénomènes de compétition. Il convient de garder cette remarque à l’esprit lorsqu’une
épreuve très sensible est recherchée.
Les méthodes classiques de PCR pour le diagnostic d’agents pathogènes, bactérien et viral, sont maintenant
obsolètes et, dans quelques cas, remplacées par des PCR en temps réel. Les PCR en temps réel contrôlent
l’accumulation des produits de PCR pendant la réaction d’amplification, permettant ainsi l’identification des cycles
pendant lesquels la génération de produit de PCR presque logarithmique est obtenue. En d’autres termes, la
technique peut être utilisée pour quantifier de manière fiable l’ADN ou l’ARN contenu dans un échantillon donné.
Par opposition à la PCR conventionnelle, la PCR en temps réel demande moins de manipulations, est plus rapide
que les techniques de PCR conventionnelles, utilise des tubes fermés permettant ainsi de diminuer les risques de
contaminations croisées, elle est plus sensible et spécifique, conservant ainsi un rendement de qualité et elle
procure des informations quantitatives. Dans de nombreux cas, la PCR en temps réel a montré qu’elle est plus
sensible que les méthodes de référence existantes (64, 179). Le développement récent de techniques et de
machines à PCR en temps réel portables (132) ouvre la perspective intéressante d’utilisation de ces techniques
pour des diagnostics rapides (moins de 2 h) de foyers sur le terrain.
La validation des techniques de PCR est décrite dans le Chapitre 1.1.5., « Validation et contrôle qualité des
méthodes d'amplification en chaîne par polymérase de PCR utilisées pour le diagnostic des maladies
infectieuses ». Ce chapitre traite également des témoins internes qui garantissent la validité des résultats de la
PCR.
2. Diagnostic par polymorphisme de longueur des fragments de restriction (RFLP) et
approches liées basées sur l’ADN
Les épreuves sérologiques communément employées pour identifier des micro-organismes ne sont parfois pas
suffisamment discriminantes pour distinguer des isolats d’agents pathogènes étroitement apparentés, qu’ils
s’agissent de virus, de bactéries, de champignons ou de parasites. Une procédure basée sur l’ADN offrira la
meilleure discrimination qui est souvent requise et un point de départ adéquat peut être l’analyse du
polymorphisme de longueur des fragments de restriction (RLFP).
L’approche par RLFP est basée sur le fait que les génomes d’agents pathogènes même étroitement apparentés
sont définis par des variations de la séquence. C’est ainsi, le cas quand l’ordre linéaire des nucléotides adjacents
comprenant la séquence de reconnaissance d’une enzyme de restriction spécifique dans un génome peut être
absent dans le génome d’une souche ou d’un isolat étroitement apparenté.
En pratique la procédure de RFLP consiste en l’isolement de l’agent pathogène cible, en l’extraction de l’ADN ou
de l’ARN (avec la transcription inverse en ADN) et ensuite en la digestion de l’acide nucléique avec l’un des
groupes d’enzyme de restriction. Les fragments individuels de l’ADN digéré sont ensuite séparés sur un gel
d’électrophorèse et visualisés par un marquage avec du bromure d’éthidium. Idéalement, chaque espèce révélera
un profil unique, ou empreinte. Beaucoup d’enzymes de restriction différentes peuvent être prises en compte pour
une nouvelle identification, si bien que les analyses de nombreuses empreintes moléculaires issues de digestions
avec plusieurs enzymes de restrictions individuelles peuvent être effectuées et la combinaison du meilleur groupe
de résultats permettra une différentiation complète entre espèces ou isolats. Un bon exemple de l’application de
cette technique est la différentiation entre les biotypes des virus rabiques issus du chien ou des chauve-souris
originaires d’Amérique Latine (89).
Une modification de la technique de base de RFLP est de plus grande utilité lorsqu’une réaction d’amplification
en chaîne par polymérase (PCR) est ajoutée en étape préliminaire. La méthode de PCR (décrite en détail dans la
section 1 ci-dessus) est utilisée pour amplifier une région spécifique du génome (connue par le manipulateur
Chapitre 1.1.7. — Les biotechnologies dans le diagnostic des maladies infectieuses
et le développement des vaccins
Manuel terrestre de l’OIE 2008 75
comme étant une séquence variable entre les agents pathogènes), qui sert ensuite d’empreinte ADN pour la
technique de RFLP. Cette nouvelle combinaison (PCR-RFLP) offre une meilleure sensibilité pour l’identification
d’agents pathogènes et elle est plus particulièrement utile lorsque l’agent pathogène est retrouvé en petit nombre
ou s’il est difficile à cultiver, deux facteurs qui caractérisent le parasite protozoaire intestinal Cryptosporidium spp.
La RLFP et, plus particulièrement, la PCR-RFLP sont très utiles pour le génotypage de souches de
Cryptosporidium puisqu’elles peuvent identifier des sources d’infection humaine et procurer des données sur leur
épidémiologie et leur survenue (23, 149). L’implication de souches spécifiques ou de types dans une épidémie
peut ainsi être définie et le circuit épidémiologique de l’isolat au sein d’un pays ou entre des pays peut être
compris.
Il existe de nombreux autres exemples pour lesquels les techniques de RFLP/PCR-RFLP sont utiles pour la
discrimination entre des génotypes ; par exemple, le champignon Candida (39), le virus du syndrome
dysgénésique et respiratoire du porc (166) et la bactérie Helicobacter pylori (60).
Le pathogène humain Candida krusei donne une bonne illustration de l’application générale d’un ensemble de
techniques moléculaires. Dassanayabe et al. (39) ont étudié la diversité génique de 11 isolats oraux de C. krusei
et ont identifié 5 génotypes différents en gel d’électrophorèse en champ pulsé (PFGE), 9 génotypes par RFLP en
utilisant l’enzyme HinfI, alors que les empreintes d’ADN par l’approche de l’ADN polymorphique amplifié au
hasard (RAPD-PCR pour Randomly Amplified Polymorphic DNA-PCR) a révélé 3, 8 ou 11 génotypes en fonction
des amorces utilisées.
L’incorporation de PFGE facilite la séparation de grands fragments d’ADN (jusqu’à une taille de l’ordre de la
megabase) et peut être un bon complément à l’analyse par RFLP de base. Jager et al. (72) ont utilisé une
combinaison de l’enzyme de restriction à coupe rare NotI et la PFGE pour caractériser les 80 isolats de Coxiella
burnetii obtenus sur des animaux et des humains en Europe, aux USA, en Afrique et en Asie. Ils ont distingué
20 profils de restriction différents et l’analyse phylogénétique des profils de RFLP a révélé l’évolution des relations
entre les groupes qui correspondent à des origines géographiques différentes des isolats. Aucune corrélation
entre le groupe de restriction et la virulence d’un isolat n’a été détectée dans cette étude, mais des approches
similaires sur quelques autres agents pathogènes ont permis d’établir un lien. Grigg et Boothroyd (59), par
exemple, ont identifié 3 sites de restriction au sein du locus B1 répété 35 fois, qui sont capables de faire une
distinction entre des espèces de Toxoplasma gondii du type I (virulent chez la souris) et du type II ou III (non
virulent chez la souris).
Les RFLPs sont importantes pour les études épidémiologiques, mais une interprétation plus critique des données
de RFLP implique la construction de bases de données pour déterminer si les profils de RFLP sont liés à des
facteurs tels que la virulence, la répartition de l’hôte et l’importance clinique. En pratique, il est d’usage de ne pas
se fier à un seul site de restriction, mais d’utiliser des sites localisés à plusieurs endroits au sein du génome afin
de classifier l’isolat. Une question permanente pour les praticiens vétérinaires concerne l’estimation correcte de
toutes différences moléculaires trouvées entre des isolats d’un agent pathogène sachant qu’une perte ou une
acquisition de site(s) d’endonucléase de restriction peut ne pas être associée à des différences dans la capacité
de l’agent pathogène à induire une maladie, par exemple, une différence en RFLP peut ne pas être significative
fonctionnellement, excepté comme une caractéristique distinctive.
Les marqueurs polymorphiques utilisés dans la RAPD qui caractérisent des souches uniques, etc. peuvent être
séquencés puis utilisés comme région amplifiée pour confirmation (SCAR pour Sequence-confirmed amplified
region). Ainsi la transformation de marqueurs polymorphiques anonymes en SCAR signifie qu’une seule PCR
peut être réalisée pour identifier un génome spécifique. Lewin et al. (81) ont utilisé cette approche pour identifier
19 génotypes à multilocus unique parmi les 29 souches du protozoaire Leishmania donovani.
Les techniques avec lesquelles l’ADN d’un agent pathogène peut être détecté et caractérisé continuent de
s’améliorer et d’évoluer. La dernière procédure de discrimination en date est celle du séquençage d’un génome.
Le séquençage d’une partie bien définie du génome joue un rôle important dans la caractérisation des agents
pathogènes et dans les études épidémiologiques. Le séquençage des produits amplifiés par une PCR utilisant
des amorces dégénérées ayant pour cible un gène commun à plusieurs virus de la même famille est devenu un
outil de diagnostic très utilisé, notamment pour l’identification de membres d’une famille jusqu’alors non reconnus.
Le séquençage d’amplicons du gène de l’ADN-polymérase des herpèsvirus obtenus par PCR dégénérée en est
un bon exemple (173). Dans quelques cas, le génome viral complet a été séquencé. Par exemple, l’épidémie du
syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et le séquençage du génome de 29 751 bases des coronavirus
associés (92) a révélé utilement que le virus n’est lié que modérément aux coronavirus connus, y compris 2
coronavirus humains et ne ressemble pas même étroitement aux 3 groupes précédemment connus de
coronavirus. Ce degré d’interrogation au niveau de l’acide nucléique ne sera pas disponible pour des études sur
la majorité des agents pathogènes avant plusieurs années. C’est pourquoi des techniques comme les analyses
par RFLP, PCR-RFLP, RAPD-PCR et SCAR vont continuer de jouer un rôle central dans l’identification de, et la
discrimination entre, isolats de la plupart des agents pathogènes.
Chapitre 1.1.7. — Les biotechnologies dans le diagnostic des maladies infectieuses
et le développement des vaccins
76 Manuel terrestre de l’OIE 2008
3. Diagnostic à l’aide de sondes nucléiques et de la technique des micropuces à ADN
Les recherches avec des sondes nucléiques ADN conventionnelles et les analyses par micropuces sont les deux
côtés d’une même pièce. Le mécanisme fondamental des deux méthodes est la liaison (hybridation) de l’ADN,
issus d’un échantillon suspecté de contenir un agent pathogène (l’« inconnu »), avec de l’ADN hautement
caractérisé dérivé au préalable d’un agent pathogène intéressant (l’ADN « connu »).
Lors des recherches avec des sondes nucléiques ADN conventionnelles, l’ADN (ou l’ARN) inconnu, qui est la
cible, est immobilisé sur une surface solide telle qu’un filtre. L’ADN connu, transformé en sonde après marquage
ou identification (tag) d’une manière ou d’une autre, est dans la phase liquide et est appliqué sur la cible. Dans le
diagnostic par micropuces, c’est l’ADN connu (ADN complémentaire ou oligonucléotides longs) qui est la cible,
immobilisé sur une lame de verre, et l’ADN inconnu, dans la phase liquide, qui est marqué pour en faire une
sonde.
Dans les recherches conventionnelles avec des sondes nucléiques ADN, la cible peut être des acides nucléiques
extraits de matériel clinique ou de cultures cellulaires et soit (a) ajoutés à des filtres (dot ou slot blot) ou (b),
transféré sur un filtre après gel d’électrophorèse, ce qui est moins pratique dans le contexte du diagnostic, La
quantité d’agent pathogène dans un échantillon clinique peut être trop faible pour une détection. Par conséquent,
il peut être nécessaire d’amplifier les acides nucléiques par une PCR ou par transcription reverse suivie d’une
PCR (RT-PCR), le produit de PCR sera appliqué sur un filtre. Afin de visualiser une sonde liée à sa cible, la
sonde peut être marquée avec un nucléotide radioactif ou, plus communément et plus inoffensif, identifiée de
façon non-radioactive. Par exemple, la biotine ou la biotine-psoralène peuvent être incorporées dans la sonde, la
sonde liée étant détectée par addition de streptavidine liée à une enzyme pour générer une réaction colorée ou
lumineuse (chimioluminescence).
Une micropuce est ainsi appelée parce qu’elle peut comprendre 20 000 ou plus d’ADNs connus différents,
chaque ADN étant déposé en point sur une lame de verre, pour former la puce. Chaque point ne mesure
qu’environ 10 μm de diamètre. Les ADN complémentaires de fragments de gènes sélectionnés d’agents
pathogènes peuvent être utilisés pour composer des puces (24). Cependant, si un grand nombre d’agents
pathogènes doit être recherché, il sera alors plus aisé d’un point de vue pratique d’utiliser de grands
oligonucléotides. La micropuce utilisée pour identifier le virus du SRAS comme étant un coronavirus avait des
oligonucléotides comprenant 70 nucléotides (70-mer) (178). Dans les recherches utilisant des micropuces, c’est à
partir de l’échantillon que la sonde est faite. En bref, l’acide nucléique est extrait de l’échantillon et une (RT-) PCR
est effectuée en utilisant des amorces au hasard d’oligonucléotides. De cette façon, une partie de tous les acides
nucléiques de l’échantillon – des deux origines : hôte et agent pathogène – sont amplifiés. Ces produits de PCR,
représentatifs de tous les acides nucléiques de l’échantillon, sont marqués avec un colorant fluorescent et
appliqués sur la micropuce. Dans des conditions optimisées, seul l’ADN dérivé de l’agent pathogène se liera à
l’ADN sur la lame de verre. Si l’on est intéressé seulement par la détection d’un agent pathogène particulier ou
d’un groupe d’agents pathogènes liés alors les oligonucléotides spécifiques peuvent être utilisés pour les
amplifier au sein de l’échantillon pour la production de sonde.
Les micropuces pour la détection d’agents pathogènes peuvent être élaborées pour plusieurs niveaux de
différentiation. Dans le cas de cibles d’oligonucléotides d’ADN, il faut tout d’abord définir les oligonucléotides
capables de détecter et de différencier les agents pathogènes au niveau du genre. Il faudra choisir un nombre,
peut-être 10, d’oligonucléotides avec un haut degré de conservation de séquence (oligonucléotides consensus)
au sein d’un genre donné, de telle sorte qu’une sonde préparée à partir d’un échantillon de terrain contenant un
membre de ce genre hybridera à coup sûr au moins quelques oligonucléotides, tandis qu’elle n’hybridera pas (ou
à un moindre degré) celles correspondant aux genres apparentés. Par exemple, on pourra différencier les isolats
d’Aphtovirus (fièvre aphteuse, FA) des espèces d’Enterovirus dans la famille des Picornaviridae. On pourra alors
sélectionner d’autres jeux d’oligonucléotides, placés sur la même lame de verre, capables de caractériser plus
spécifiquement un agent pathogène, par exemple pour différencier les 7 types de virus de FA, et éventuellement
pour aller au niveau du sous-type.
Dans les études conventionnelles avec des acides nucléiques, la détection d’un agent pathogène est limitée par
le nombre de sondes utilisées, alors que dans l’analyse avec micropuces seul le nombre d’ADN cible est limitant.
Si une micropuce contient 1 000 oligonucléotides différents, il faudra 1 000 sondes (et 1 000 réactions séparées)
pour obtenir le même niveau de résolution par analyse conventionnelle. Le grand avantage des analyses à
micropuces dans la recherche d’un agent pathogène est que des centaines d’agents pathogènes peuvent être
étudiés simultanément lors de l’utilisation d’une seule micropuce. Clairement, l’analyse par micropuce a un grand
potentiel lorsque l’on recherche une maladie d’étiologie inconnue, des maladies où plusieurs agents pathogènes
peuvent être présents, et lorsqu’un sous-typage est nécessaire. Pour augmenter la sensibilité dans l’identification
des agents pathogènes, les micropuces peuvent être couplées à des amplifications par PCR. Ces PCR sont
mises au point afin d’amplifier un ou plusieurs gènes conservés ou des séquences multiples, telles que des PCR
utilisant des amorces largement conservées, des PCR « consensuelles » ou des PCR multiplex comme décrites
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