communication et soins - Catalogue en ligne Centre de

publicité
ABSTRACTS
Jeudi 14 et vendredi 15 novembre 2013
Hôpital Européen Georges Pompidou - Paris
Communication et soins :
la nécessaire interaction...
Recherche - Méthodes de communication
et nouvelles technologies - Facteurs
facilitant ou limitant : soins médicaux,
organisation, environnement, installation
... pour le bien être de la personne
et de son entourage.
Grand Partenaire
COMMUNICATION ET SOINS :
LA NÉCESSAIRE INTERACTION
TOUT
AU LONG DE LA VIE, LES SITUATIONS D’INFIRMITÉ
MOTRICE CÉRÉBRALE
ET DE
POLYHANDICAP NÉCESSITENT DES SOINS COMPLEXES ET DIVERSIFIÉS QUI SE DÉROULENT
DANS DIFFÉRENTS LIEUX ET NÉCESSITENT DE NOMBREUX INTERVENANTS
NE CONNAISSENT PAS OU MAL LE PATIENT
IMC
: LA PLUPART
OU POLYHANDICAPÉ, LUI QUI EST
PRESQUE TOUJOURS INCAPABLE DE S’EXPRIMER VERBALEMENT.
CETTE SITUATION PARADOXALE A LONGTEMPS OBÉRÉ L’EFFICIENCE DES SOINS ET EN A
AGGRAVÉ LA DIFFICULTÉ AINSI QUE L’INCONFORT PHYSIQUE ET PSYCHOLOGIQUE POUR
LA PERSONNE HANDICAPÉE, SA FAMILLE ET LES SOIGNANTS.
L’OBJECTIF
DU CONGRÈS DES
14
ET
15
NOVEMBRE
2013
EST DE FAIRE LARGEMENT
CONNAÎTRE LES AMÉLIORATIONS CONSIDÉRABLES QUE LES PROGRÈS RÉCENTS DE LA
RECHERCHE ET DES TECHNIQUES DE COMMUNICATION ONT APPORTÉ AU BIEN-ÊTRE DE
LA PERSONNE HANDICAPÉE ET DE SON ENTOURAGE FAMILIAL, ÉDUCATIF ET SOIGNANT.
JEUDI 14 NOVEMBRE MATIN
MODERATEUR : PR THIERRY BILLETTE DE VILLEMEUR, FÉDÉRATION DU POLY ET DU MULTIHANDICAP
9H00
OUVERTURE DES JOURNÉES
PR THIERRY BILLETTE DE VILLEMEUR
Introduction : La communication processus cognitif et
linguistique
9H30
COGNITION, COMMUNICATION, IMAGERIE
PR LAURENT COHEN, GH PITIÉ-SALPÊTRIÈRE, PARIS
10H05
10H15
DISCUSSION
Recherche : recensement des actions de recherche
ÉVALUATION DE LA COMMUNICATION DES PATIENTS POLYHANDICAPÉS ET PRINCIPAUX AXES
DE RECHERCHE DE LA FÉDÉRATION DU POLY ET DU MULTIHANDICAP
DR MARIE-CHRISTINE ROUSSEAU, CHARGÉE DE RECHERCHE POUR LA FÉDÉRATION PLH/MLH, HÔPITAL SAN
SALVADOUR, HYÈRES
10H30
10H50
11H20
DISCUSSION
PAUSE
COGNITION, PERCEPTION, ACTION ET ÉMOTION
GENEVIÈVE PETITPIERRE, PROFESSEUR DES UNIVERSITÉS, UNIVERSITÉ DE FRIBOURG, SUISSE
11H45
QUAND ALLER AU DEVANT DE CEUX QUI NE PARLENT PAS, EN PRENANT APPUI SUR LEUR
“GÉNIE RELATIONNEL”, PARTICIPE DE L’AMELIORATION DE LEUR ETAT DE SANTÉ
ANNE-MARIE ASENCIO, JEAN-YVES BARREYRE, CEDIAS-CREAHI ÎLE-DE-FRANCE
12H05
INTERFACE CÉRÉBRALE - BRAIN COMPUTER
SALVADOR CABANILLES, ERGOTHÉRAPEUTE, PFNT, HÔPITAL RAYMOND-POINCARÉ, GARCHES
12H20
12H40
DISCUSSION
DÉJEUNER SESSION POSTERS
JOURNÉES D’ÉTUDES POLYHANDICAP - 14 ET 15 NOVEMBRE 2013 - HÔPITAL EUROPÉEN GEORGES POMPIDOU - PARIS
JEUDI 14 NOVEMBRE APRÈS-MIDI
MODÉRATEUR DR ELISABETH ZUCMAN, PRÉSIDENTE D’HONNEUR, GROUPE POLYHANDICAP FRANCE
Méthodes de communication et nouvelles technologies
14H00
PRÉMICES DE LA COMMUNICATION AVEC L’ENFANT POLYHANDICAPÉ
MARIE-THÉRÈSE CASTAING, CHEF DU SERVICE ÉDUCATIF, SESAD EXTERNAT, CESAP, PARIS
14H20
MODALITÉS DE LA COMMUNICATION EN FONCTION DES DIFFÉRENTS CERCLES RELATIONNELS
D’APRÈS LES TRAVAUX DE SARAH BLACKSTONE
JUSTINE PITTE, ORTHOPHONISTE, HÔPITAUX DE SAINT-MAURICE
14H40
ADAPTER LA COMMUNICATION EN FONCTION DES SITUATIONS DE SOINS ET DES CONCEPTS
ELISABETH CATAIX-NEGRE, C-RNT, APF
15H10
DISCUSSION
Les outils
15H30
LE KIT DE COMMUNICATION AP-HP
NADÈGE RENAUX, MISSION HANDICAP - DMA, AP-HP
15H50
OUTILS TECHNOLOGIQUES DE COMMUNICATION AMÉLIORÉE ALTERNATIVE
SAMUEL POUPLIN, ERGOTHÉRAPEUTE, PFNT, HÔPITAL RAYMOND POINCARÉ, GARCHES
16H10
COMMENT RECUEILLIR LA RÉPONSE DE L’ENFANT ET QU’EN FAIT-ON ? : QUESTION
CONCRÈTE ET ETHIQUE
MARIELLE LACHENAL, PARENT, ASSOCIATION ISAAC FRANCOPHONE, FORMATRICE “MAKATON” ET “SIGNE AVEC MOI”
16H30
17H00
DISCUSSION
CLÔTURE
VENDREDI 15 NOVEMBRE MATIN
MODÉRATEUR : PHILIPPE ROSSET, DIRECTEUR, CENTRE DE RESSOURCES MULTIHANDICAP, PARIS
Facteurs facilitants ou limitants : organisation, environnement,
installation, soins médicaux,
9H00
FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX FACILITANTS (POSTURES, REGARD, DÉTENTE, INSTALLATION
APPAREILLAGE, …)
PHILIPPE TOULLET, INSTITUT MOTRICITÉ CÉRÉBRALE
9H20
L’ÉCOLE MATERNELLE : UN ESPACE PRÉCISÉMENT PROFITABLE À L’ENFANT POLYHANDICAPÉ
LAURE BIDEAU, ORTHOPHONISTE, SSAD LES TOUT PETITS, LES MOLIÈRES (91)
9H40
L’IMPORTANCE DU REGARD DANS LA COMMUNICATION
CHRISTINE AKTOUCH, ORTHOPTISTE, BORDEAUX
10H00
TROUBLES DU COMPORTEMENT ET
COMMUNICATION DANS LE POLYHANDICAP
DR DENISE THUILLEAUX, PSYCHIATRE, HÔPITAL MARIN D’HENDAYE
10H20
10H40
DISCUSSION
PAUSE
FLASHEZ POUR ACCÉDER
DIRECTEMENT AU SITE DE LA
MISSION HANDICAP DMA
DE L’AP-HP
us
Comptes-rend
r
s Journées su
te
n
e
d
é
c
ré
p
s
e
d
handicap
www.aphp.fr/
JOURNÉES D’ÉTUDES POLYHANDICAP - 14 ET 15 NOVEMBRE 2013 - HÔPITAL EUROPÉEN GEORGES POMPIDOU - PARIS
11H10
TABLE RONDE
Communication et soins : témoignages de parents et patients
MODÉRATEUR : MICHEL HOULLEBREQUE, APF/HANDAS
“DOCTEUR, PARLEZ-MOI À MOI !”
PASCALE FAGOT, ISAAC FRANCOPHONE, TÉMOIGNAGE, AVEC APPAREIL DE COMMUNICATION
TÉMOIGNAGE “TROUVER LES VOIES POUR ÉCOUTER LA VOIX”
SYLVIE TENENBAUM, RÉFÉRENTE DU GROUPE NATIONAL ELOCUTION ET COMMUNICATION, APF, AVEC ASSISTANTE DE
COMMUNICATION
L’AVENTURE DE LA PRÉSENCE À L’AUTRE AU QUOTIDIEN
YANNICK LABBE, PERSONNE RÉSIDANTE, JEAN-MARIE LEFRANC, PARENT, JEAN-FRANÇOIS POILVET, PROFESSIONNEL,
FOYER KER-SPI, ADIMC 22, PLÉRIN, CÔTES D’ARMOR
PARTAGER LES SAVOIRS POUR PARTAGER LES SOINS
DR ELISABETH ZUCMAN, PRÉSIDENTE D’HONNEUR, GROUPE POLYHANDICAP FRANCE
À LA RENCONTRE DES PLUS FRAGILES
ETIENNE GUILLUY, CADRE DE SANTÉ, HÔPITAL LA ROCHE GUYON
12H30
13H00
DISCUSSION
DÉJEUNER SESSION POSTERS
VENDREDI 15 NOVEMBRE APRÈS-MIDI
LES SOINS MEDICAUX
MODÉRATEUR DR ANTOINE GASTAL, HÔPITAUX DE SAINT-MAURICE
14H00
EXPRIMER ET FAIRE FACE À LA DOULEUR CHEZ L’ENFANT POLYHANDICAPÉ OU IMC
MARC ZABALIA, PROFESSEUR DE PSYCHOLOGIE DE L'ENFANT ET DE L'ADOLESCENT UNIVERSITÉ DE CAEN BASSENORMANDIE
14H20
VENTILATION ET COMMUNICATION
PR BRIGITTE ESTOURNET, HÔPITAL RAYMOND POINCARÉ, GARCHES
14H35
INCIDENCE DE L’ÉPILEPSIE SUR LA COMMUNICATION DE LA PERSONNE POLYHANDICAPÉE
DR SOPHIE MATHIEU, HÔPITAL LA ROCHE-GUYON
14H55
MOUVEMENTS ANORMAUX ET COMMUNICATION
DR DIANE DOUMMAR, HÔPITAL ARMAND TROUSSEAU, PARIS
15H15
INTÉRÊT DE LA TOXINE BOTULIQUE DANS LE TRAITEMENT DU BAVAGE ET DE LA DYSTONIE
ORO-MANDIBULAIRE ET LARYNGÉE
DR MYRIAM COHEN, ORL, FONDATION OPHTALMOLOGISTE ADOLPHE DE ROTHSCHILD, PARIS
15H35
COMMUNICATION ET SOINS PALLIATIFS AVEC LA PERSONNE, LA FAMILLE ET L’ÉQUIPE
DR ELISABETH GRIMONT-ROLLAND, FANNY NAVARRO, PSYCHOLOGUE, HÔPITAL SAN SALVADOUR, HYÈRES
16H00
16H30
DISCUSSION
CLÔTURE
Comité scientifique
MISSION HANDICAP DMA ASSISTANCE PUBLIQUE-HÔPITAUX DE PARIS
avec le concours de : Les Amis de Karen / Notre-Dame de Joye - Apetreimc APF/HANDAS - ARIMC-IDF - CDI-IMC - Centre de Ressources Multihandicap IDF CESAP - CESAP Formation - CLAPEAHA - FEHAP - FHF - Fondation John Bost - La
Fondation Motrice - GPF - Hôpital National Saint-Maurice - Société Française
de Neuropédiatrie - Les Tout-Petits - UNAPEI
JOURNÉES D’ÉTUDES POLYHANDICAP - 14 ET 15 NOVEMBRE 2013 - HÔPITAL EUROPÉEN GEORGES POMPIDOU - PARIS
Comité Journées d’études Polyhandicap 2013
n AVALE Anne, Hôpitaux Saint-Maurice
MISSION HANDICAP
Mission
Handicap -- DMA
DPM
n BILLETTE DE VILLEMEUR Thierry, Armand Trousseau,
AP-HP, Fédération du Poly et du Mulihandicap AP-HP
n BOUTIN Anne-Marie, CESAP
n BRISSE Catherine, La Roche Guyon, AP-HP, CESAP
n CAMBERLEIN Philippe, CESAP
n CATAIX-NEGRE Élisabeth, C-RNT, APF
n COURTOIS Gérard, Les Tout-Petits, GPF
n DELRIEU Charlotte, APF
n DESGUERRE Isabelle, Necker-Enfants Malades, AP-HP
n DORISON Nathalie, Hôpital Armand Trousseau, AP-HP
n ESTOURNET Brigitte, Raymond Poincaré, AP-HP
n FAILLIE Claire, Centre de Ressources Multihandicap
n FAIVRE Henri, CLAPEAHA
n GAILLARD Émilie, La Fondation Motrice
n GAMBRELLE Aliette, UNAPEI
n GARREAU Bernard, Fondation John Bost
n GASTAL Antoine, Hôpitaux Saint-Maurice
n GRIMONT-ROLLAND Élisabeth, San Salvadour, AP-HP
n HENNEBELLE Dorothée, Hôpitaux Saint-Maurice
n HERTZ-PANNIER Lucie, La Fondation Motrice
n HOULLEBREQUE Michel, APF/HANDAS
n LE JOLY Sarah, Espace Événementiel
n MATHIEU Sophie, La Roche Guyon, AP-HP
n NITSCHMANN Laure, APETREIMC, Institut Motricité
Cérébrale
n PERAZZO Laurent, FEHAP
n PLIVARD Christine, CESAP Formation
n PONSOT Gérard, Société Française de Neuropédiatrie
n QUENTIN Véronique, Hôpitaux Saint-Maurice
n RABOURDIN Marie, APF/Handas
n RECH Célia, Raymond Poincaré, AP-HP
n RENAUX Nadège, DMA, AP-HP
n RONGIERES Monique, Groupe Polyhandicap France
n ROSSET Philippe, Centre de Ressources Multihandicap
n ROUSSEAU Marie-Christine, San Salvadour, AP-HP
n SOUDRIE Brigitte, Hôpital Marin d’Hendaye, AP-HP
n TOULLET Philippe, Institut Motricité Cérébrale
n ZUCMAN Élisabeth, GPF
LES AMIS DE KAREN
NOTRE-DAME DE JOYE
QUAND ALLER AU DEVANT DE CEUX QUI NE PARLENT PAS,
EN PRENANT APPUI SUR LEUR “GÉNIE RELATIONNEL”,
PARTICIPE DE L’AMÉLIORATION DE LEUR ÉTAT DE SANTÉ
ANNE-MARIE ASENCIO, JEAN-YVES BARREYRE, CEDIAS-CREAH Île-de-France
1. Que disent les familles et les professionnels du sanitaire (SSR) et du médico-social de
la prise en compte de la dimension relationnelle, à travers la communication, dans les
soins ?
Nous avons pu constater, dans le cadre d’une récente recherche-action sur « les besoins,
les attentes et les modes d’accompagnement des personnes en situation de handicap complexe » que nous avons menée (commanditée par le CLAPEAHA et financée par la CNSA et
la section Economie sociale de Chorum) , que ce qui pourrait apparaître comme une évidence concernant la nécessaire interaction entre la communication et les soins pour le bien
être de la personne et de son entourage, était loin de l’être.
En effet, dès les premiers échanges avec des familles, celles-ci ont pointé l’incapacité de l’environnement et en particulier de certains professionnels, du soin davantage que de ceux
mobilisés pour l’accompagnement médico-social, à s’adapter à des profils particuliers pour
entrer en relation avec les personnes en situation de handicap complexe. Les familles regrettent en particulier cette distance si fréquente que les professionnels adoptent avec ces
personnes, par méconnaissance de l’impact de leurs atteintes et déficiences sur leur fonctionnement cognitif sensori-moteur et affectif, par peur de la différence. Mais aussi par méfiance à leur égard, parce qu’elles semblent détenir une expertise plus grande que celle des
professionnels sur la « clinique » de leur enfant ou de leur proche. Les familles évoquent
ainsi ce qu’elles qualifient de « véritable barrière invisible », de « ligne difficile à franchir »,
de « cloison » entre leur proche et les professionnels, en particulier soignants qu’ils soient
généralistes, spécialisés ou hospitaliers.
Cette attitude est d’autant plus dommageable pour ces personnes, compte tenu de leurs
difficultés dans la perception du monde qui les entoure ou de leurs limitations dans l’émission de messages compréhensibles par un inconnu, que toute interaction avec autrui nécessitera un interlocuteur bienveillant ayant la volonté d’entrer en contact avec elles et de
s’adapter à leurs modes possibles de communication. « Rester à distance » enferme d’emblée la personne dans le silence, la laisse se débrouiller seule pour trouver du sens dans les
actes médicaux, paramédicaux ou les activités éducatives. Cette attitude peut être ainsi
source de peur.
Extrait du focus group famille :
« Souvent ma fille a peur parce qu’on ne lui explique pas. Alors elle est tétanisée. Je leur (aux professionnels
du soin) dis qu’ils doivent lui expliquer, prendre le temps, faire doucement. Mais non, il n’y a rien à faire. Alors
elle les griffe. Alors qu’il suffisait qu’ils prennent leur temps. Mais ils ont refusé, ils sont arrivés en renfort à
deux, ils l’ont empoignée comme une bête. Elle s’est débattue, les a griffés. J’ai dit : arrêtez tout, je m’en vais
avec ma fille. »
« En plus, ils nous demandent de sortir, en nous disant ça se passera mieux si vous n’êtes pas là. On leur (aux
professionnels du soin) explique pourtant 10 000 fois. Et on leur explique notamment qu’il faut tout expliquer
à notre fils avant de lui faire quoique ce soit. »
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Par cette distance, qui conduit à l’absence totale de communication, les professionnels font
de la personne handicapée un objet. Les familles parlent ainsi d’une vraie « maltraitance »
de leur proche, d’un manque de « respect », d’une perte d’humanité.
Extrait du focus group famille :
« Quand un professionnel a cette aptitude (à vouloir comprendre et communiquer) : quel bonheur ! Mais c’est
rarement le cas. Un kiné est venu chez nous, il lisait en même temps qu’il faisait la rééducation ! »
« Il faut tout de même souligner que les soignants manquent souvent de psychologie. Notre fils est allé aux urgences. Ils devaient lui faire une perfusion. Il s’y est repris à trois fois. J’étais énervée. Il me dit : mais ça ne lui
fait pas mal. Et je lui réponds : mais vous ne voyez donc pas comment il essaye de se tourner vers le mur pour
vous échapper. Et lui de répéter : mais est-ce qu’il sent ce que je lui fais ? »
« Certains professionnels n’ont pas de respect pour mon fils alors qu’il est intelligent, en tout cas avec une capacité de compréhension bien supérieure à celle qu'il peut exprimer (…) Il communique dès qu’on lui prête un
peu d’attention. Le crédit que nous les parents on leur accorde n’est jamais accordé de la même façon par des
tiers. Les gens leur parlent souvent comme à des débiles ou pas du tout ! »
« Et mon mari qu’ils prennent comme un sac à patates parce qu’ils sont toujours pressés et là ils ont le
pouvoir, ce n’est pas lui qui va leur dire quelque chose, il ne pourra pas leur donner une baffe, les griffer ou les
mordre. Après quand je le retrouve, il a été cogné de partout, il a des bleus. C’est de la maltraitance ! »
De leur côté des professionnels intervenant dans un accompagnement médico-social au
long cours auprès de ces personnes et qui essayent avec les soignants de mettre en place
des stratégies intersectorielles adaptées pour faire face à la problématique de santé de ces
personnes, sont parfois amenés, après une intervention chirurgicale, à favoriser leur réintégration la plus rapide possible sur leur lieu de vie institutionnel afin de réduire autant que
faire se peut, les effets secondaires négatifs des périodes d’hospitalisation sur la qualité des
liens engagés avec elles. Certains établissements médico-sociaux prennent même l’option
de se « sanitariser » davantage pour répondre aux besoins de soins plus techniques de leur
public, en raison de la difficulté de mobilisation des acteurs hospitaliers et libéraux autant
que de besoin pour le suivi de l’état de santé et dans le souci d’accueillir au plus vite et au
mieux les résidants chez lesquels ils constatent souvent des effets négatifs d’une prise en
charge hospitalière inadéquate, en termes d’escarres ou de décompensation psychique, par
exemple.
Il en est de même des professionnels soignants de SSR pour personnes polyhandicapées
rencontrés dans le cadre de cette étude qui constatent qu’alors même que le sanitaire occupe une place importante dans l’accompagnement de ces personnes, voire de plus en plus
importante du fait de l’allongement de leur espérance de vie, les durées d’hospitalisation
sont de plus en plus courtes notamment en lien à l’insuffisance de moyens dans les services
hospitaliers. Or l’accompagnement sanitaire des personnes polyhandicapées nécessite du
temps et des moyens en personnel. D’une part pour diagnostiquer, dépister et traiter les effets de l’intrication de plusieurs déficiences et les épines irritatives physiques occasionnées,
et d’autre part parce qu’il est fondamental que le personnel soignant ait les moyens et le
temps d’expliquer absolument tout à la personne en situation de handicap complexe.
Extrait de l’entretien avec un médecin de médecine physique et rééducation :
« J’ai souvenir d’un jeune IMC qui ne voulait absolument pas d’une intervention d’arthrodèse. Nous lui avons
donné toutes les explications jusqu’à ce que nous découvrions qu’il était paniqué par les prises de sang. A partir
du moment où nous lui avons expliqué que nous serions là et qu’il ne sentirait rien, qu’il ne lui arriverait rien, il
est parti vaillant à son intervention. Mais tant que nous n’avions pas compris cela, c’était très, très, très compliqué. Et pourtant c’est un jeune qui arrivait à s’exprimer mais qui n’osait pas dire qu’il était paniqué par les
prises de sang. »
C’est un positionnement éthique qui demande un engagement dans la relation, une attention à l’autre dans ses moindres manifestations, un respect de ses choix et la nécessité de
travailler à son adhésion (échanges avec la personne, mises en situation, adaptation, possibilité de mise en sens, réajustement du protocole réfléchi en équipe, etc.). Ce positionnement professionnel est d’autant plus important que les personnes polyhandicapées avec
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
une grande précarité physique ne peuvent remettre en cause les soins ou l’accompagnement
qui leur sont apportés que sous la forme de crise aigue comportant souvent un risque vital.
Or tenir ce positionnement exige de la part des professionnels un travail de réflexion, résultat
du travail transdisciplinaire, de réunions d’analyse de pratique et de temps d’échanges en
dehors de la présence de l’enfant. Mais ces temps de travail ne sont plus pris en compte.
Pour éviter le burn-out et permettre aux professionnels de rester capables d’empathie, capables de travailler à l’adhésion du jeune, ces temps de réflexion sont nécessaires car ils permettent à chacun de se remettre sans arrêt en question, de reprendre sans arrêt les
problématiques, de s’interroger sur le bien fondé de telle pratique et sur ce qu’il faudrait
apporter de différent.
Cette recherche-action a également permis de prendre la mesure des initiatives menées par
les différents acteurs pour améliorer l’accès aux soins et la qualité de l’accueil des personnes
dans les services de santé : mise en place de réseaux conventionnés entre le secteur médicosocial et le secteur sanitaire, préparation des hospitalisations, outils de liaison, kit de communication, mise en place d’équipe d’évaluation spécialisée comme l’Unité Mobile
d’Evaluation et de Suivi des handicaps dans le 76, ou l’équipe médicale de prise en charge
globale pour les personnes en situation de handicap Handisoins dans le 86. De même, il
est important de signaler la diffusion des recommandations de bonnes pratiques professionnelles éditées par l’ANESM concernant « l’accompagnement à la santé de la personne
handicapée » (juillet 2013) et le rapport établi par Pascal Jacob sur « l’accès aux soins et à
la santé des personnes handicapées » (avril 2013).
Pour autant, malgré toutes ses initiatives, il est apparu essentiel, au-delà ou en-deçà des
moyens matériels et humains mis en place au niveau institutionnel, des modalités de travail
mises en œuvre au niveau partenarial, de prendre en compte au niveau interindividuel la
nécessité d’engagement relationnel de chaque professionnel amené à être en relation avec
une personne en situation de handicap complexe.
2. Quels enseignements ont pu être tirés de sept entretiens menés avec des personnes
avec des déficiences multiples et de fortes limitations de communication à propos de la
communication qui est au cœur du processus de construction du sentiment d’exister de
tout être humain ?
Un des résultats de la recherche-action citée précédemment, a été de ne plus envisager la
communication uniquement sous l’angle de l’interaction et de l’intercompréhension, mais
de considérer que ce qui se joue à travers la communication et les échanges relationnels
entre une personne dont les déficiences multiples et imbriquées ont altéré ses capacités de
communication , ses parents et les professionnels en proximité avec elle, apparait comme
le vecteur essentiel pour permettre à cette dernière d’éprouver un sentiment d’exister. Parce
que la communication n’est pas possible si la personne n’est pas inscrite symboliquement
dans un espace et si elle ne peut pas se penser en tant qu’être de relation.
Dans le cadre de cette étude, nous avons mené sept entretiens avec des personnes atteintes
de déficiences multiples et de fortes limitations en matière de langage et de communication
en expérimentant une nouvelle approche dans la technique de ces entretiens par une adaptation des conditions de la rencontre et des échanges afin d’explorer avec elles les chemins
possibles de la rencontre, en tant qu’interlocutrices non spécialisées et non familières. Dans
l’analyse de ces entretiens nous avons pris appui sur le modèle développé par François Flahault qui a repéré trois piliers essentiels pour soutenir le processus de construction d’un
sentiment d’exister : le don d’un « lieu d’être », des soutiens corporels et langagiers et le
soutien indirect d’un monde « commun ».
Nous avons pu observer qu’en dépit de leurs atteintes sensori-motrices et neurologiques
qui créent un rapport au monde singulier, et derrière ce qui pouvait apparaître comme «
un masque du silence » , ces personnes communiquent et se montrent souvent avides d’interactions sociales. Elles communiquent sur un mode multimodal : regards, sonorités, tou-
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
chés, odorat, mouvements, mimiques, silence, attitudes, rythmes, etc. Elles conjuguent le
fait de ne pas avoir accès à une communication verbale (dominante dans notre culture) et
de vivre dans un environnement saturé de messages multi-sensoriels que les spécificités de
leur fonctionnement (sensoriel, organique et neuronal) ne leur permettent pas toujours de
réguler en termes de flux, et de métaboliser au niveau du sens. Les personnes rencontrées
étaient d’emblée présentes dans le processus relationnel qui se créait avec elles. Elles se sont
avérées très interactives (excepté les trois personnes avec TED), notamment en termes d’appétence pour entrer dans l’échange et pour explorer les objets proposés ou repérés. Elles
ont témoigné de capacités à faire et à exprimer des choix, à explorer et varier leurs modalités
d’observation et d’expérimentation.
Les parents rencontrés, dans le cadre de cette recherche-action, ont accepté et dit apprécier
notre positionnement de chercheurs quant à notre postulat de départ d’une rencontre et
d’un échange possibles avec leur proche. Ils ont considéré que nous reconnaissions ainsi
d’emblée leur proche dans son humanité. Peut-être se sont-ils sentis eux-mêmes reconnus
dans le rôle fondamental qu’ils jouent dans le processus de construction d’un sentiment
d’exister lorsqu’il leur a été demandé non seulement leur accord mais aussi celui de leur
proche ou tout au moins, dans un premier temps, son adhésion au projet, puisqu’il s’agissait de s’adresser directement à lui. Lorsque nous leur avons également demandé de situer
leur proche dans son histoire, son identité et ses désirs ; d’envisager ensemble quelles pourraient être les conditions relationnelles et matérielles les plus propices aux échanges et quel
pourrait être le professionnel le mieux situé. Enfin, lorsque nous avons reconnu d’emblée
la portée de leur soutien durant l’entretien afin de rendre les échanges possibles.
Lors des entretiens avec leur proche, les parents ont toujours adopté une attitude de soutien
tant par leur approche et proximité corporelles, que dans leurs échanges de regards, dans
leurs paroles d’encouragement, dans l’attention portée au moindre signe de leur proche,
dans l’interpellation humoristique sur tel ou tel aspect du dialogue. Ils ont littéralement «
porté » la rencontre tout en respectant la consigne de ne pas parler, répondre ou interagir
en lieu et place de leur proche (consigne parfois rappelé au cours de l’entretien). Ce sont
eux qui ont instauré un climat de confiance et de sécurité suffisant avec les nouvelles interlocutrices de leur proche pour que ce dernier se sente en mesure d’explorer avec elle, les
chemins possibles de la rencontre. Ce sont eux qui ont d’emblée montré à leurs interlocutrices par quelles modalités corporelles et langagières ils signifiaient à leur proche le respect
de son existence, de sa façon d’être dans son rapport au monde. Ils ont également montré
leurs capacités à découvrir leur proche sous un nouvel angle, surpris par moments des capacités de ce dernier à entrer de façon soutenue et adaptée dans un échange avec des personnes étrangères. Ils ont apprécié son enthousiasme dans le jeu, les pères de façon plus
spontanée alors que les mères semblaient se sentir dans un premier temps un peu dépossédées de leurs prérogatives avant de percevoir les apports de l’ouverture des échanges avec
un tiers.
Sur les trois professionnels rencontrés, deux ont été particulièrement à leur aise, dont une
aide-médico-psychologique (AMP) dans une maison d’accueil spécialisé et un moniteur
dans un centre de loisirs à parité . Ce sont des professionnels qui ont témoigné d’emblée
d’une proximité relationnelle avec la personne atteinte de déficiences multiples. Malgré les
aspects stigmatisant de ces atteintes, ces professionnels témoignaient dans leur façon d’être,
de lui parler et de faire, d’une relation établie de personne à personne. Les termes de « respect » et d’ « attention réciproque » peuvent être employés pour décrire le type de relation
établie entre ces deux personnes.
C’est sans doute l’entretien avec un homme de 38 ans présentant un polyhandicap qui illustre le mieux comment cette rencontre à la maison d’accueil spécialisé avec ses parents,
deux professionnelles et les chercheures, lui a permis de s’affirmer dans son existence sociale.
En effet, il a non seulement de façon explicite travaillé à construire une empathie en mobi-
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
lisant l’ensemble des membres du groupe présent (parents, professionnels, chercheures)
mais il a réussi à faire comprendre ses préférences et il a témoigné, quelques semaines après
l’entretien, de son souhait de renouveler l’expérience en rapprochant ses parents des professionnels. Cette expérience avec les chercheures a créé un espace qui lui était offert pour
prendre la parole. C’était la première fois que ses parents et des professionnels de proximité
étaient réunis autour de lui, dans un positionnement partagé d’aidants à la communication.
Ce positionnement conjoint et partagé a sans doute participé au fait que ce jeune homme
souhaite prolonger l’entretien. Non seulement la durée de l’échange a été beaucoup plus
longue que l’entourage ne l’avait escomptée (56 minutes), mais il y a eu une progression
dans l’intensité et le choix des modalités d’interaction, avec une amélioration du processus
d’intercompréhension. C’est un de ceux avec qui l’entretien aura duré le plus longtemps, et
c’est lui qui en a décidé ainsi, au grand étonnement de son entourage, un peu déstabilisé.
Au cours de l’entretien, ce jeune homme a réussi au prix d’un effort évident, à hocher la
tête pour dire « oui » alors que parents et professionnels débattaient sur la signification de
ses mouvements de tête. C’est par ses mouvements corporels - soit la tête, soit le corps qu’il a indiqué une réaction selon les propos tenus. Ce qui a orienté une des hypothèses de
la chercheure - sur sa propre position - validée par les observations de la mère, ou une autre
hypothèse sur l’opportunité d’une plus grande proximité avec l’AMP, à partir de l’expérience
acquise lors de la première rencontre . De la même manière, il a répondu à la demande directe de l’AMP qui l’a progressivement encouragé à utiliser la main pour dire « oui ». Après
un décryptage de ses différentes modalités d’expression par ses deux parents et après avoir
donné la main pour dire « oui » à l’AMP, il parvient à donner directement la main à sa première interlocutrice pour lui dire « oui », et plus tard il fera de même avec sa deuxième interlocutrice. Ses différentes modalités d’expression iront en évoluant jusqu’à ce qu’il « opine
du chef » pour signifier qu’il préfère continuer à s’entretenir avec la chercheure en position
d’observatrice, plutôt qu’avec la chercheure en position d’interlocutrice. Il s’agit d’un moment essentiel où il a réussi à démontrer à tous qu’il était en mesure de poser ainsi un choix
entre deux personnes et à le faire comprendre à son interlocutrice principale en utilisant un
autre mode d’expression, plus conventionnel : en faisant « oui » avec un signe de la tête.
Dans cette dynamique d’échanges, les protagonistes ne se sont pas sentis en concurrence
les uns avec les autres autour de l’interprétation la plus légitime, dynamique qui semblait
être dominante entre les parents et les professionnels avant cette rencontre élargie. Ils ont
construit ensemble et avec la personne, les moyens qui ont permis à celle-ci de faire comprendre son point de vue et de le faire respecter. Le fait que les chercheures aient valorisé le
point de vue, le savoir-faire et le savoir-être des parents et des professionnels de proximité,
a permis à ces derniers de se sentir reconnus dans leurs compétences et de pouvoir d’autant
mieux soutenir le processus d’intercompréhension qui a ainsi pu se développer au cours de
la rencontre. Quelques semaines après l’entretien exploratoire mené dans le cadre de la recherche-action, ce jeune homme a réussi à signifier à ses parents venus lui rendre visite à la
MAS où il vit, qu’il préfèrerait ce jour-là partager avec eux un moment sur son « unité de vie
», en compagnie des autres résidents et professionnels plutôt que de partir tout de suite se
promener à l’extérieur de l’institution, comme à l’accoutumé. L’AMP qui a relaté cet évènement aux chercheures, relie l’attitude nouvelle chez ce jeune homme aux effets de l’entretien
mené avec lui, durant lequel celui-ci a pu montrer pour la première fois à l’ensemble des
acteurs réunis, dont ses parents, qu’il était en capacité de faire des choix et de les exprimer.
Durant les échanges, les chercheures ont pris en compte le rôle actif de la personne, ont
respecté ses initiatives, ses intérêts et son rythme. Elles ont cru en ses potentialités . Elles
ont essayé de se placer dans une « perspective de seconde personne », c’est-à-dire de se placer du point de vue de la personne tout en lui donnant la possibilité de se placer elle aussi
du point de vue de son interlocutrice . Elles se sont engagées dans la relation en faisant
preuve d’empathie, de qualités d’observation et de disponibilité. Elles se sont laissées guider
par la personne pour entrer dans un processus partagé, dans une recherche d’intercompréhension en s’ouvrant à d’autres schémas de pensée, ce qui leur a permis de découvrir des
capacités jusque-là inexplorées (et ce éventuellement de part et d’autre). Elles ont ainsi es-
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
sentiellement pris appui sur la dynamique des personnes en essayant de construire des zones
d’attention conjointe qui puissent être les plus pertinentes possibles. Elles ont essayé de
faire place à l’expérience vécue par la personne et à ce qu’elle pouvait en signifier elle-même
sans renoncer à utiliser le langage verbal avec elle. Elles ont essayé de lui signifier quelque
chose de leur désir de lui parler.
Pour construire un processus d’intercompréhension, l’engagement relationnel et affectif de
chacun des acteurs (personne, proches familiaux et professionnels, chercheures) a été important. Les prémisses de ce travail de construction d’un espace discursif montrent que les
signes qui ont permis de baliser la rencontre ont été construits par les personnes atteintes
de déficiences multiples avec altération des capacités de communication. Ils ont été symbolisés par les proches et les chercheures. Et ils ont été validés, ou non, par les personnes.
Pour réaliser ce travail d’arpenteur, les protagonistes ont suspendu tout jugement de la réalité, ils ont mobilisé tous les canaux sensoriels dans l’échange et non plus seulement les
codes communicationnels langagiers, ils ont pris conscience de façon permanente du primat
du principe essais-erreurs dans leur démarche et ils ont renoncé au temps social prescrit
pour communiquer. Mais face aux fluctuations des capacités et des limitations de communication de la personne impactant les échanges, suivant l’évolution de son état d’attention,
de fatigue ou de santé, ce sont les capacités de ses interlocuteurs à faire le premier pas, à
s’engager sensoriellement et physiquement dans les échanges, à donner des signes de
confiance, de réassurance et de sécurité, qui se sont avérées indispensables pour initier et
maintenir un processus de recherche de compréhension réciproque, y compris au moment
où il s’agissait de savoir terminer un échange.
En conclusion…
Il est possible de repérer à travers l’illustration donnée par ce type d’entretien (1 seul entretien avec une personne non familière) que la recherche d’une dynamique de communication avec les personnes en situation de handicap complexe est possible pour tout un
chacun et qu’elle est fondamentale pour que les personnes en situation de handicap complexe puissent se sentir exister et reconnues dans leur existence et leur appartenance au
monde commun.
Il parait essentiel de souligner que la recherche de ce processus communicationnel concerne
les deux interlocuteurs, et qu’en la matière la personne en situation de handicap est proactive et en attente d’un engagement relationnel de la part de son interlocuteur au développement « typique » alors que les résultats de la recherche-action font apparaître par ailleurs
(enquêtes auprès de 21 établissements et services médico-sociaux et 1 SSR) que la performance ou la non performance communicative est le plus souvent attendue uniquement du
côté des personnes en situation de handicap complexe.
Les résultats de la recherche-action ont montré également que d’autres facteurs de complexité sur le registre de la communication étaient liés d’une part, au niveau de cohésion
entre l’ensemble des interlocuteurs et d’autre part, au niveau de cohérence de leurs actions
de communication dans la mise en œuvre d’une stratégie communicationnelle, définie avec
la personne en situation de handicap complexe.
Aussi, il apparaît :
• d’une part, qu’une démarche communicationnelle globale et cohérente, intégrée au quotidien de vie de la personne et prenant en compte l’ensemble des acteurs concernés, devrait
pouvoir être inscrite dans une vision stratégique de l’établissement ou du service d’accompagnement médico-social (en mobilisant une organisation de travail spécifique ainsi que
des moyens humains et financiers nécessaires à son développement, des formations et des
modalités de coopération avec les familles) ;
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
• et d’autre part, que cette stratégie communicationnelle devrait être diffusée et prise en
compte par l’ensemble des acteurs (membres de la familles, membres de l’équipe pluridisciplinaire de l’établissement ou du service médico-social, équipes d’accueil sur les temps de
vacances, de répit, équipes le relais, lors des changement de structure) y compris bien entendu les équipes de soins (généralistes, hospitaliers, soin préventif, curatif ou de rééducation, services généraux ou spécialisés ...).
C’est bien l’ensemble des acteurs, des interactions entre ces acteurs, et du cadre dans lequel
ils interagissent qui participent au processus de production de la complexité du handicap
et sur lesquels il serait nécessaire d’agir.
1. J-Y Barreyre (sous la direction de), A-M Asencio, C Peintre, P Fiacre, Les situations de handicap complexe :
besoins, attentes et modes d’accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d’action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, recherche-action nationale commanditée par le CLAPEAHA,
financée par la CNSA et la Section Economie sociale-CHORUM, réalisée par le CEDIAS-CREAHI Ile de France,
février 2013, 192 p. (Rapport et recherche documentaire sur le site Internet du CEDIAS CREAHI Ile-de-France).
2. Anne-Marie Asencio, « La communication au cœur du processus du sentiment d’exister », in Vie Sociale n°3/2013,
Erès.
3. Personnes dites « en situation complexe de handicap» avec altération des capacités de décisions et d’action dans
les actes essentiels de la vie quotidienne et qui n’ont pu acquérir un minimum d’autonomie.
4. Des personnes avec soit un polyhandicap, soit un plurihandicap, soit un TED.
5. François Flahault, Le sentiment d’exister. Ce soi qui ne va pas de soi, Paris, Descartes & Cie, 2002.
6. Elisabeth Zucman, « Souffrances partagées : la question des limites », Les Cahiers de l’Actif, n° 356-357, 2007.
7. Depuis 2004, 9 centres de loisirs pour enfants handicapés et valides ont été mis en place à Paris : dans le 5e et le
19e arrondissement avec les associations Loisirs Pluriel, et dans les 9e, 12e, 14e, 17e, 18e et 20e arrondissements
directement gérés par la Ville de Paris. Des animateurs qualifiés accueillent les enfants le mercredi et pendant les vacances scolaires, et organisent des activités en petits groupes mixtes. La Ville de Paris a le projet d’ouvrir un centre
de loisirs à parité dans chaque arrondissement parisien.
8. Première rencontre où l’AMP lui avait demandé de lui donner la main pour confirmer son oui, ce qu’il avait fait.
9. Telles que les décrivent des auteurs comme E. Zucman, G. Saulus, E. Pickler (se reporter à la recherche documentaire citée au début de cet article).
10. Jacques Souriau, « Comprendre et communiquer avec ceux qui ne parlent pas », in Vie Sociale, n°3/2013, Erès.
11. Michael Tomasello, Constructing a language. A usage-based theory of language acquisition, Cambridge, Harvard
university press, 2003.
12. Jürgen Habermas, De l’éthique de la discussion (1991), Paris, Flammarion, coll. « Champs », 1999.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
MODALITÉS DE LA COMMUNICATION EN FONCTION DES
DIFFÉRENTS CERCLES RELATIONNELS
D’APRÈS LES TRAVAUX DE SARAH BLACKSTONE
JUSTINE PITTE, orthophoniste, Hôpitaux Saint-Maurice
Présentation du questionnaire des « échanges sociaux »
L’évaluation du niveau de compétence communicationnelle est une étape essentielle de la
prise en charge, notamment orthophonique, des personnes sans parole. De cette évaluation
émergeront les besoins en rééducation et/ou réadaptation de la communication de la personne.
Cette réadaptation va permettre l’amélioration qualitative et quantitative des interactions
entre les personnes utilisant une aide technique de communication et leur entourage, et en
élargissant, un enrichissement de la personne dans ses divers domaines de vie : social et relationnel, affectif, psychique…
Sarah Blackstone et Mary Hunt Berg (Berkeley, USA) ont mis au point un questionnaire intitulé « social networks » visant à guider les interventions éducatives et rééducatives pour
développer les capacités de communication sur le long terme, en tenant compte de la dynamique des interactions.
Cet outil doit favoriser l’implication des familles dans l’identification des objectifs de communication.
Il se présente sous forme d’inventaire :
- des partenaires de communication et de leurs spécificités (ex : celui avec qui la personne
passe le plus de temps)
- des divers moyens d’expression employés par la personne (ex : gestuelle)
- des sujets de conversations appréciés par la personne
Tous ces éléments sont répertoriés selon différents cercles de communication, des partenaires de vie les plus proches (ex : parents) aux plus éloignés (ex : commerçant) sur le plan
relationnel.
Au final, l’analyse de tous les éléments recueillis permet d’établir le « portrait » de communicateur de la personne à un moment de sa vie et de son développement :
- le communicateur émergent qui ne dispose pas de moyen fiable pour communiquer de
façon symbolique
- le communicateur dépendant du contexte qui n’est efficace que dans certains contextes
et avec certains partenaires familiers
- le communicateur indépendant qui peut interagir avec des partenaires familiers et non familiers, sur n’importe quel sujet de conversation et dans tous les contextes.
Cette analyse de la personne et de sa communication va permettre de proposer un projet
éducatif et rééducatif adapté :
- pour le communicateur émergent : accéder à la communication symbolique
- pour le communicateur dépendant du contexte : augmenter l’accès au vocabulaire, développer les habiletés de langage et l’alphabétisation
- pour le communicateur indépendant : améliorer l’utilisation des technologies de sup-
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
pléance à la communication, les stratégies visant à accélérer la construction de messages,
accroître les options de communication (facebook®, mails, MSN®, Skype™…)
En outre, on mettra en place un accompagnement et si besoin des sessions de formation
de l’entourage.
Adaptation à l’activité hospitalière auprès d’enfants sans parole
Le questionnaire des échanges sociaux est un outil complémentaire des batteries habituelles
d’évaluation linguistique dans la prise en charge des patients sans parole ; cet outil étant
de base trop long et complexe à faire passer, C.Béra, orthophoniste, a pris l’initiative de le
modifier afin de pouvoir l’exploiter dans notre pratique (mémoire d’A. Odiau-Lamisey dirigé
par C.Béra).
Les modifications apportées sont :
- fonctionnalité améliorée
- 2 versions : famille/professionnels
- contenu modifié
On dispose ainsi actuellement d’un support pédagogique pour famille/professionnels qui
formalise l’entretien autour des aspects communicationnels.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
ADAPTER LA COMMUNICATION EN FONCTION DES
SITUATIONS DE SOINS ET DES CONCEPTS ABORDÉS
ÉLISABETH CATAIX NEGRE, Ergothérapeuthe, conseillère en communication alternative, APF C-NRT
Introduction
La loi du 31 juillet 1991 sur la réforme hospitalière consacre le droit à l’information.
"Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information
loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose, sur
les traitements qui lui sont prescrits, leur utilité, leurs conséquences, les risques fréquents
ou graves prévisibles.. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension.
Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas
» (art 35 et 36).
Une relation équilibrée doit s’établir afin de permettre au malade d’exprimer sa volonté tout
au long du processus de soin, compte tenu des informations que lui donnent les professionnels de santé et des choix qu’ils préconisent, et de respecter sa décision.
L'usager en situation de handicap peut se faire accompagner par une personne de confiance
qu'il aura désignée.
Aux Etats-Unis, on lit dans les textes de la The Joint Commission (2010).
“Une bonne compréhension entre les patients et les prestataires de soins, permet l’échange
mutuel d’informations, et permet aux patients de participer activement à leur prise en charge
de l'admission jusqu’à la sortie, tout en permettant que les responsabilités des patients et
des prestataires soient bien comprises de part et d’autre”
Plus récemment, « la loi de Février 2005 a introduit une approche du handicap radicalement
nouvelle dans notre société. Cette approche n’a pas encore développé toutes ses conséquences… on constate aujourd’hui, … que les professionnels de santé n’ont pas été préparés
à accueillir et à prendre en charge les personnes handicapées dans leurs spécificités.» (Rapport Pascal Jacob, 2013).
On sait par ailleurs que les personnes en situation de handicap de façon générale, sont moins
bien soignées alors qu’elles sont plus vulnérables. Par ex., le taux de cancers chez les personnes
à mobilité réduite est plus élevé que dans la population générale. Et l’espérance de vie d’une
personne avec handicap mental est inférieure de 20 ans à celle de la population générale.
De nombreux partenaires travaillent à l’amélioration de l’accès aux soins pour les personnes
les plus démunies et en difficulté de communication, mais il n’existe actuellement pas de
démarche officielle d’aide à la communication au niveau national. Les outils créés sont très
atomisés, et relèvent d’initiatives locales. Tout nouvellement créé, le groupe de travail interassociatif CoActis Santé démarre un projet fédérateur en ce sens.
Améliorer la communication à l’hôpital pour les personnes vulnérables, c’est dans un
premier temps, l’adapter.
En analogie avec l’accessibilisation de la cité dont le but est d’améliorer les déplacements
de tous, il s’agit ici d’engager un processus d’accessibilisation de l’information. Autrement
dit, rendre accessibles les informations concernant la personne, sur les deux versants Réception / Expression.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Ce processus ne va pas sans modifier l’environnement de l’hôpital, autant sur le plan matériel qu’humain, lors des consultations, lors des soins, lors des explications etc.
Les situations sont différentes selon les patients et selon la gravité des atteintes …
Les moyens de communication alternatifs personnels
Les personnes avec AVC, TC, aphasies , IMC, IMOC, LIS, SLA, trachéotomie, avec une déficience temporaire ou permanente, ont souvent déjà quelques outils de communication
alternative comme des tableaux de lettres ou de mots, des systèmes d’épellation alphabétique, des images et pictogrammes, ou même des appareils de communication…
Mais malgré tous les moyens de CAA qu’on peut mettre en place :
Les patients viennent plus souvent à l’hôpital, ils y restent + longtemps. On observe un impact sur la qualité des soins, une insatisfaction des personnes et des parents. Et les parents
restent les traducteurs privilégiés.(Young, Mc Cormick, Gilbert, Burcke, Fehlings, Wedge.
Reasons for hospital admission among for youth and young adults with CP
Archives of Physical Medecine and Rehabilitation 2007 ; 88 : 696-702)
On reconnait également que les situations de vulnérabilité de communication entrainent
des risques médicaux importants (Cohen et al., 2005), comme des symptômes imprévus
passés sous silence (Joint Commission, 2007), ou, tout aussi important, la non observation
/adhésion des conseils thérapeutiques (Andrulis et al., 2002; Flores et al., 2003).
“Les patients avec problèmes de communication ont probablement trois fois plus de risques
de subir un effet secondaire évitable que les patients sans ces difficultés”(Bartlett, G. et al.).
Les raisons évoquées sont principalement (Hemsley, Lee, Munro, Seedat, Bastock, Davidson.
(Australie, 2012) Supporting communication for children with cerebral palsy in hospital)
•
Manque d’informations sur les capacités et moyens de la personne
•
Manque de Temps
•
Manque de savoir faire
En sachant qu’aucun dispositif normalisé n’existe (aux EU et encore moins en France) pour
prendre en compte les patients avec communication vulnérable
Les difficultés sont encore bien plus grandes quand il y a très peu d’expression alternative
spontanée avec pictos ou signes…
Les personnes avec déficience intellectuelle, autisme, polyhandicap, aphasies globales, syndromes divers, maladies rares etc…
John Costello, orthophoniste à l’hôpital pour enfants de Boston dans le service de communication alternative, notait lors de sa conférence Isaac en Juillet 2012 à Paris à propos des
enfants en âge préscolaires (2 – 5 ans), donc pourquoi pas chez les personnes avec polyhandicap, que « La pensée magique peut conduire les enfants à penser que la douleur,
l’hospitalisation, les soins, sont une punition pour des mauvaises conduites vraies ou imaginaires ... ils croient que la douleur est de la faute de quelqu'un…”
Une raison de plus pour accompagner ces personnes de façon plus claire, avec les explications et les professionnels adéquats.
« Quel que soit l’environnement, la communication avec des enfants avec besoins complexes en communication ne passe que
•
par un aménagement de l’environnement rendu + accessible
•
par des partenaires habiles, expérimentés, « futés » !
•
par l’introduction de moyens de CAA : signes, images et pictogrammes, appareils
technologiques »
(Beukelman DR, Mirenda P.: « Augmentative and alternative communication : supporting
children and adults with complex communication needs (3ème ed) ed : P. Brookes, 2012)
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Dans cette démarche les parents devraient être les premiers aidants. Ils disent pourtant :
•
leur peur de l’incapacité de leur enfant à communiquer ses besoins basiques
•
leur peur que leur enfant ne se sente abandonné,
•
ou ne soit pas capable de les appeler
Ils se sentent inutiles, incapables d’aider leur enfant dans cette période de détresse
Il est donc à l’évidence nécessaire de mettre en place des moyens supplétifs, conçus et utilisés
en amont avec eux.
En amont, mieux informer, mieux s’informer.
Un outil basique : le Passeport, pour ne plus être « sans papiers »
C’est un livret ou carnet, un dépliant, descriptif, qui donne des informations positives sur
la communication de la personne et facilite la relation avec des personnes nouvelles.
Le passeport contient, en écrit, et aussi en images et /ou pictos
• Comment elle communique
• Comment elle dit OUI et NON
• La liste de ses signes en photos…
• Ce qu’elle aime
• De quoi elle aime parler
• Comment il faut lui parler
• Comment s’installer avec elle
• Ce qu’elle peut faire seule
• Ce pour quoi elle a besoin d’aide
• Ce qu’elle n’aime pas
• Les situations d’urgence
• Les personnes ressources
En amont également, se positionner mieux.
Se donner du temps, sans lequel avec toutes les meilleures intentions du monde, on ne peut
pas rentrer en communication avec les plus vulnérables :
Se présenter, nom et fonction, rôle dans l’équipe, disponibilité.
Chercher le regard, se mettre à niveau, s’assoir.
Chercher le contact, et des informations non verbales (respiration, regard, mouvements,
mimiques …)
S’adresser à cette personne même si la réponse ou les commentaires viennent de l’accompagnant.
Ne pas parler de la personne à la troisième personne en sa présence. S’adresser à elle.
Lui dire ce pour quoi elle est là, les soins envisagés, ses possibilités de demandes, d’appel.
Lui montrer les dispositifs d’appel, lui faire essayer, rendre cela possible si possible !
Renforcer toute cette attention verbale avec des moyens à créer, à confectionner, sous forme
de photos ou illustrations (voir ci-dessous pour certaines formes d’outils), de poupées et
de jeux à mettre en scène.
Car comme nous allons le voir, les bonnes paroles, aussi bien prononcées soient-elles, «
s’envolent », alors que les images peuvent « rester ». Donc une possibilité d’y revenir à un
autre moment, de son initiative ou de celle de l’équipe soignante ou de la famille.
Parler de la douleur et de tous les moyens en œuvre pour l’éviter ou la diminuer.
Expliquer, expliquer encore.
Après avoir pris connaissance d’un passeport, conçu en amont avec les parents, les
équipes, et évoqué, demandé, conseillé lors des consultations préalables, il est plus facile
pour l’équipe soignante de s’adresser à la personne de façon plus adaptée, éventuellement
avec des moyens de communication alternatifs.
La question est : de quels moyens disposent les services ? Et s’ils existent, encore faut il les
avoir à disposition.
Ou mieux : se servir des moyens personnels du patient ! Sortir le cahier de vie s’il en a un, ou
son classeur, son appareil, sans attendre qu’il le demande. Chercher pour cela une personne
ressource.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
On proposera un aménagement de la chambre, des murs, de l’environnement général du
service, pour offrir des images à désigner, à regarder, dans la chambre, des albums de photos, les trombinoscopes de l’équipe soignante etc…
Chercher l’échange, en commentant les images, et informer, en désignant les supports
graphiques en même temps qu’on parle.
Une meilleure compréhension ouvre la porte à une possible expression.
On pourra ainsi faire mieux connaissance (connaitre la personne comme elle est quand elle
va bien !), et converser un peu plus.
Avec les enfants, faire des jeux de rôle, introduire des référents de jeux (nounours, poupée
à soigner). Avec tous, montrer images, photos, objets.
Et aborder les questions du séjour hospitalier et des soins, toujours en désignant les supports graphiques adaptés. Pour évoquer :
• Les consignes
• Ce qui est prévu, attendu, ce qui va se passer
• Les personnes présentes
• Nommer les gens, leur fonction (trombinoscope)
• Représenter le temps et les déroulements
• Avoir des sujets de conversation
• Evoquer de bons moments, distraire, etc.
Et avant et au cours même des soins..
• Prévenir des gestes
• Annoncer les étapes
• Nommer les soins …
• Annoncer les intervenants
• Utiliser les livrets et outils sparadrap…
• Pour tous ces éléments, dessiner, montrer des objets, des photos, désigner, mimer, faire
sur objets, sur jouets…
• Utiliser le kit de communication APHP
En pratique
L’aidant y « met les mains ». Il désigne et signe en même temps qu’il parle
Même si la personne comprend, elle a besoin qu’on lui montre comment dire autrement ….
C’est une responsabilité médicale, sociale, et institutionnelle.
Quand et pour quoi faire ?
Utiliser ces moyens, en sollicitant l’attention conjointe, dès qu’on parle à la personne, pour
renforcer la compréhension mais aussi pour l’inviter à répondre sur le même canal. Quand
on désigne le support graphique, la personne voit dans l’instant comment on dit, comment
se dit telle ou telle chose, et peut souvent y revenir, même s’il n’a pas bien compris ou perçu
la représentation, car elle est nouvelle.
Des outils efficaces : les fiches de dialogue
Les fiches de dialogue (à créer pour tous mais surtout pour les plus démunis) offrent du
vocabulaire disponible dans une situation donnée, des informations précises, pour une annonce ou des explications prévues d’avance, avec les mots qui vont être prononcés, souvent
importants et parfois compliqués à exprimer et comprendre.
Ce vocabulaire est présenté sur objets, jeux, en images ou en pictogrammes.
Il est désigné par le partenaire valide au cours de la conversation, en même temps qu’il
s’adresse à la personne en parlant.
Ces fiches sont à fabriquer en fonction des différents hôpitaux, mais il existe également des
fiches téléchargeables sur internet, pour décrire des problèmes médicaux, des soins, les antécédents, accompagner l’interrogatoire du médecin ou de l’assistante sociale, ou recueillir
le consentement éclairé du patient en réanimation cardio-respiratoire. Outils certes adaptés
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
plutôt aux personnes avec aphasie, qu’aux personnes avec polyhandicap. Mais le principe
serait le même : montrer en parlant, le plus ajusté possible.
On a par exemple depuis très récemment les outils Sohdev pour les soins de l’oralité, qui
sont proposés sous forme de fiches explicatives (parcours d’un soin), ou de pictogrammes
isolés.
Si une personne utilise des signes
C’est toujours plus difficile car les signes sont la plupart du temps incompréhensibles à
priori par une personne non initiée. Ils sont souvent très personnels. Il est donc indispensable, s’ils sont utilisés par le patient, d’en afficher la liste sur les murs de la chambre, de la
diffuser pour que tous les soignants s’y réfèrent un minimum lors de leurs conversations
avec lui, voire de « traduire » les fiches de dialogue en « pictosignes » pour faciliter les explications par une personne ne connaissant pas les signes.
Conclusion
Volonté politique, économique… ?
Les textes de loi ont beau être là pour affirmer l’importance d’une communication efficace,
aucun service spécialisé (comme celui de l’hôpital pour enfants de Boston) n’existe pour
créer et généraliser outils et pratiques.
Or ces pratiques demandent effectivement au sein même de l’hôpital, des professionnels
spécialistes des aides à la communication, pour assurer au moins la fonction d’assistant
de communication si les outils ne sont pas suffisamment efficaces.
Il y a un besoin d’expertise: avec nécessité de formation du personnel. C’est une responsabilité à long terme
En améliorant l’accompagnement des patients vulnérables et ceux avec polyhandicap, on
créé des dispositifs et des outils utiles pour la population bien plus large des personnes valides avec difficultés de compréhension, avec vocabulaire médical restreint, les étrangers allophones ou de culture très différentes.
Les recherches (www.patientprovidercommunication.org) prouvent que mieux prendre en
compte la vulnérabilité de la communication est productif, non seulement en termes médicaux, mais également en termes économiques !
La qualité des soins est améliorée, et les séjours raccourcis et moins fréquents : donc un
impact net sur le coût final des soins.
Ce ne sera pas la première fois qu’un dispositif prévu pour les personnes en situation de
handicap rend service à un nombre bien plus large de personnes…
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Ressources
www.isaac-fr.org
Outils de communication / Fiches de dialogue (Marie Julien, Aurélie Bouly, Nathalie Simon…)
Outils de communciation / Pictogrammes et tableaux sur la santé
Grandes thématiques CAA / Diaporama Sarah Blackstone, John Costello
www.sparadrap.com
Association Sparadrap. Dico Santé. Le « Poster qui parle ».
http://rnt.over-blog.com
Site ressources Nouvelles technologies
Délégations APF de région, gratuit sur demande dans les délégations APF régionales www.apf.asso.fr
ou téléchargeables sur le blog http://unikom.blogs.apf.asso.fr/ : Dépliant APF « Je Comm’Unique ! »
« Comment éviter le surhandicap de communication à l’hôpital »
http://handicap.aphp.fr/kit-de-communication-avec-les-patients/
Kit de communication APHP
http://www.sohdev.org/
Outils téléchargeables, fiches explicatives + mallette pédagogique pour la santé orale
A l’étranger. Recherches et outils dans le monde :
www.patientprovidercommunication.org
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
COMMENT RECUEILLIR LA RÉPONSE DE L’ENFANT ET
QU’EN FAIT-ON ? QUESTION CONTRÈTE ET ÉTHIQUE
MARIELLE LACHENAL, parent, Association Isaac Francophone, formatrice “Makaton” et “Signe
avec moi”
Je vais parler de mes nombreuses places, médecin, formatrice au programme de communication Makaton depuis plus de 15 ans, membre de Isaac, formatrice à la communication
gestuelle avec les bébés en crèche, mais la principale peut-être est celle d’être la mère de
Géraldine, qui a un handicap intellectuel, et de multiples misères, qu’on appelle pluri handicap. Elle n’a aucun mot, mais parle avec ses mains et tous les moyens possibles. Je partage
l’aventure de sa vie depuis 23 ans, et je pense que j’ai acquis au fil des jours une réelle compétence, tissée par mon amour pour elle et par mon acharnement à lui donner des outils
pour comprendre et parler, et mon acharnement aussi à décortiquer le quotidien pour elle
; très simplement, je me dis parfois pour me justifier que Freud, Piaget et d’autres ont élaboré leur pensée en regardant vivre leurs enfants.
On parlera ici du quotidien, des galères, opérations, contraintes du quotidien, pas de soins
palliatifs, pas de fin de vie. Je parlerai d’enfants, mais sans m’accuser de ne pas voir ma fille
grandir, je pense que mon propos est valable pour tout âge. Et que les pistes sont larges et
sont envisageables pour beaucoup.
Je ne peux partager que mes tâtonnements, pas mes certitudes. Qui peut avoir de certitudes ?
Si ce n’est…
En parlant après l’intervention sur les outils technologiques, je vous propose d’abord un
superbe outil de haute technologie : nous, vous, moi.
Nous sommes le meilleur outil de communication alternative et augmentée possible.
Gayle Porter, créatrice du concept du PODD (classeur de communication) parle de « Smart Partner
operating system »
Nous, en tant que système fonctionnant à partenaire humain futé, avons de nombreuses
qualités : on ne se casse pas, on ne tombe pas en panne, on n’a pas besoin de recharger
nos batteries( ou en tout cas pas les électriques) ; on ne craint pas la pluie ni les éclaboussures, on a un grand stock de vocabulaire disponible . En plus, nous avons la capacité d’observer , de chercher à résoudre les blocages et les problèmes, on peut lire les mouvements
du corps et l’expression faciale, on peut s’aider sur le contexte pour donner du sens à des
messages incomplets, on peut parfois prendre le temps… comme le dit Jacques Souriau,
seul le partenaire humain futé peut entremêler le comment faire et le comment être, peut
négocier avec l’enfant le sens de ce qu’il veut dire, peut essayer de voir le monde à travers
les yeux de l’enfant.
Il faut reconnaître que notre système de partenaire futé n’est pourtant pas parfait ! On oublie
souvent comme c’est compliqué de comprendre la parole, on parle trop vite, avec des mots
trop compliqués, on pose trop de questions, on ne prend pas le temps, on ne laisse pas le
temps de comprendre, d’évoquer, de penser et de répondre.
Lors d’une récente rencontre avec une personne du cresam, j’ai vraiment mesuré que ce qui
était premier était l’engagement dans la relation et dans la communication, le partage d’expériences de vie.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Pour nous, il est aussi parfois difficile de nous de se brancher sur l’enfant, d’allumer nos
neurones miroirs devant un enfant, ou plus encore un adulte handicapé, pour nous aider à
comprendre de l’intérieur ce qui se dit, se vit. Si Edgar Morin a pu dire,« On ne mesure pas
le chagrin d’un enfant à la salinité de ses larmes, mais en se rappelant nos larmes d’enfants.
» ce n’est pas toujours évident. Ça fait partie de ce qu’il faut accepter aussi ! je ne suis pas
elle ! et je ne peux pas imaginer jusqu’où vont ses peurs, ses besoins de réassurance.
On ne donne son avis qu’à une personne de confiance et qu’on connaît
On donne son consentement à une personne et non à quelque chose
Donc pas d’avis demandé par un inconnu, que l’enfant ne connait pas, qui ne le connaît
pas. Voire qui en a peur.
D’abord recueillir la parole pour de petites choses sans importance
On ne peut recueillir la parole de l’enfant que si on utilise ses moyens de communication et
de soutien à la pensée : mots parlés, signes, pictogrammes, mais aussi photos, images, objets… il s’agit à la fois de parler la même langue et de partager le même langage.
On ne peut pas donner son avis sur quelque chose de grave si on ne le donne pas sur ce qui
est peu important
Choisir son dessert, choisir la comptine qu’on va chanter, le livre qu’on va lire (y-a-t’il des
livres sur l’étagère ?) Choisir par quelle jambe commencer la kiné ; quel tee-shirt ?
Quand on donne un choix moins visualisable facilement, il faut s’assurer que la proposition
a été comprise : si l’enfant a une mémoire de travail trop courte, il va avoir tendance à répéter la dernière proposition, et gare alors si ce n’était pas son choix ! Avec toujours pour
nous l’obsession de permettre de comprendre ce dont on parle ; attention aussi au piège,
qui est de prendre pour argent comptant le premier oui, qui est juste un « oui, je sais que
tu me parles »
Choisir, et aussi apprendre à donner mon avis sur de petites choses, sans importance : sur
les activités de l’emploi du temps ; Donner son avis sur le projet de week-end
Et si l’enfant manifeste un refus, est-ce que nous l’acceptons toujours ? Au moins quand il
n’y a pas d’enjeux majeurs : refuser la peinture, protester de rester assis pendant que les autres font de la gym, ce n’est pourtant pas une menace à l’ordre établi !
Tout en rappelant qu’il faut être vigilant et ne pas poser de question quand ce n’est pas la
peine. » on va se coucher ??? », inutile « on va se coucher. »
Ensuite, apprendre à dire aussi qu’on a mal, pour de tout petits bobos, apprendre à dire
qu’on a peur, pour de toutes petites peurs ;
Ce n’est pas le jour de la grande panique et de la douleur terrible que les signes seront disponibles s’ils ne l’ont jamais été avant.
Et toujours bien sûr, en s’appuyant sur les moyens de communication , de pensée de l’enfant ;
Attention, il n’existe pas d’enfant sans ses parents, et avant de vérifier si l’enfant a compris,
vérifier ce qui a été dit aux parents et compris par les parents ! j’ai trop vu de médecins n’expliquant rien, parlant à leur micro, j’ai signé mon accord pour quelque chose que je n’avais
pas compris, tout médecin que je suis, j’ai signé mon accord d’envoyer mon enfant à la
mort, sans sentir l’engagement du médecin avec moi. Est-ce vraiment un avis recueilli ?
On ne peut donner son avis que sur ce qu’on comprend
On ne peut vraiment comprendre qu’en lien avec son expérience, en lien avec son histoire
On ne peut donner son avis que sur ce qu’on peut se représenter
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Et ensuite….Comment informer l’enfant ?comment adapter nos explications à ses capacités,
tenir compte de son besoin de savoir, ou pas, de ce qu’il sait déjà, ou de ce qu’il ressent
déjà et qu’il a déjà compris ?
Attention aussi à la question tu as compris, comme pour la vue ou l’audition, ce qu’on ne
perçoit pas n’existe pas, et donc un enfant est totalement incapable de dire ce qu’il n’a pas
compris, puisque par définition, ça n’existe pas ! il pourra dire oui, à ce qu’il a compris,
sans que vous puissiez en avoir une idée !
Et pour comprendre , il faut aussi forcément pouvoir se projeter dans l’avenir. Ce qui est
compliqué pour tout le monde, mais plus encore pour tant d’enfants avec un handicap,
qui vivent surtout dans le présent, le ici et le maintenant ; et dont l’avenir le plus lointain
envisageable est Noel ou l’anniversaire. Un sacré défi. Comment dire » c’est pour que tu
ailles bien quand tu seras grande, vieille… » si ce futur est juste incompréhensible !
On voit bien qu’il s’agit surtout d’associer, d’informer, et d’être attentifs aux réponses de
l’enfant. Et du coup, on voit bien que donner son avis n’est pas forcément consentir. Mais
poser des questions, comprendre le mieux possible, Pouvoir dire ses inquiétudes, ses peurs,
Pouvoir choisir ses réassurances.
Comment faire pour que l’enfant ait moins peur et soit plus « partenaire » des soins.
Je vais donner quelques exemples vécus avec ma fille, qui a eu une succession d’interventions
chirurgicales lourdes et douloureuses.
L’informer de la prochaine, certes, mais sans lui demander son avis, on n’a pas le choix.
L’informer , en sachant qu’elle a eu des expériences catastrophiques, de rejet , de douleur
non prise en compte, et qu’elle a eu de moins mauvaises expériences aussi ; et qu’elle se
souvient des deux.
L’informer et lui permettre de poser des questions, de comprendre et de sentir notre engagement à ses côtés, la promesse que tout sera fait pour qu’elle ait le moins peur et le moins
mal possible.
On a ainsi ressorti ses livres de sa vie, les photos des opérations précédentes, parlé de ce
qui s’était passé, de ses jambes malades, de son dos malade.
J’ai rédigé à partir des images du dico- santé de sparadrap un livret explicitant les choses
dans le détail, en insistant sur ce qu’elle avait pu exprimer à partir de ses signes et de son
classeur de communication podd : l’importance d’avoir une chambre, de connaître le prénom du brancardier. J’ai aussi rédigé une sorte de scénario social de la prise en compte de
la douleur ; on s’engage à tout faire.
Il ne s’agissait pas du tout qu’elle soit d’accord ! mais qu’elle comprenne et soit associée.
Elle aurait été opérée même pas d’accord, même avec un refus majeur ! Toute la préparation
a vraiment permis que tout se passe le mieux possible !
Il y a aussi des outils qui permettent de donner son avis, comme les Talking mats, qu’Isaac
francophone introduit en France. ( www.talkingmats.com )
La démarche Talking mats consiste à proposer à la personne des items, dans un même sujet
abordé, que la personne positionne sur une échelle visuelle analogique. Il s’agit d’un outil
d’aide à la réflexion, qui permet ensuite de donner son avis.
A l’occasion d’un tapis sur les activités, Géraldine avait dit qu’elle n’aimait pas aller en rééducation, et confirmait ainsi des manifestations parfois violentes. Il y avait un réel refus
de ses prises en charge paramédicales, il faut dire qu’elle les accumule ! kiné, orthophonie,
orthoptiste, instructrice en locomotion, voire pourquoi pas quand ça va mal, psy …sans
compter le dentiste, le podologue, l’appareilleur, l’audio prothésiste…
Et souvent comme parents, on s’est posé la question de la validité de toutes ces prises en
charge, on pensait qu’elle en avait vraiment besoin, mais si c’était une sorte d’acharnement
thérapeutique, pour réparer on ne sait quoi ? C’est une question majeure et jamais simple
. et avant de tout arrêter, on a utilisé les Talking mats.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Le Talking mats sur « comment ça va dans ta vie pour… marcher, parler, écouter, regarder… » montrait que tout allait bien. Pourquoi diable alors faire toutes ces prises en charge,
elle n’en comprenait pas l’utilité, puisque sa vie lui va finalement assez bien, Un troisième
tapis a porté sur le fonctionnement du corps « comment ça va pour tes yeux, tes oreilles,
ta bouche, tes jambes » et là, elle a dit que ça n’allait pas. Elle sait bien que ses yeux, ses
oreilles, ses jambes, son dos, sa parole ne vont pas si bien que ça ! et du coup, dans son accompagnement au quotidien, j’insiste plus sur ce que lui apportent ses rééducateurs, et ça
va mieux
Il s’agissait ici de mettre en lien ce qui se passe avec ce qu’elle connaît des difficultés de sa
vie ; lui parler de son handicap, pas seulement au moment d’une opération ; avec le risque
de la voir dire sa souffrance de son handicap, comme dans cet épisode où elle a demandé
un plâtre dur autour de son cou, pour réparer sa parole cassée. Si on peut tout réparer,
pourquoi ne répare t’on pas sa bouche !
Il est intéressant de signaler que les Talking mats ont un kit tout prêt pour aborder avec des
personnes la question de la gastrostomie.
Il n’empêche que la vie se chargera de nous obliger en permanence à nous poser la question
de l’information, du recueil de sa parole. Elle a encore des tempêtes à traverser. Certaines seront inévitables et pour d’autres, encore et encore, nous devrons nous poser la question de sa
qualité de vie, de son avis malgré tout. Jusqu’où devons nous l’ennuyer pour son bien ??…
La question n’est donc pas tant celle de son consentement, mais de notre engagement avec
elle. De lui montrer qu’on est là avec elle, sur ce chemin de vie parfois compliqué, mais souvent aussi lumineux et apaisé. Ensemble.
La loi rappelle qu’il faut informer : La circulaire sur l’hospitalisation des enfants de
1983 stipule «… En dehors des admissions en urgence, l’hospitalisation devra être préparée de façon
à réduire l’anxiété de l’enfant et de sa famille. Cela implique qu’un membre de l’équipe médicale et
soignante explique à l’avance à l’enfant et à ses parents : la raison de l’hospitalisation, sa durée très
approximative, la nature des examens ou des soins.» «Pour favoriser la participation des mineurs et
des majeurs sous tutelle à la prise de décision les concernant, ils sont informés des actes et examens
nécessaires à la prise en charge de leur état de santé, en fonction de leur âge et de leurs capacités
de compréhension, indépendamment de l’indispensable information donnée à leurs représentants
légaux.». De plus, la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002, relative à l’autorité parentale,
énonce de façon plus générale : «[…] Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité».
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
“DOCTEUR, PARLEZ-MOI À MOI !”
PASCALE FAGOT, Isaac Francophone, Témoignage, avec appareil de communication
Docteur pourquoi vous êtes tétanisé devant mon handicap ? Parlons-en ! Il faut être plus décontracté …
Je suis atteinte d’une Spondylarthrite inflammatoire,
Donc je fais souvent des séjours à l’hôpital dans le même service depuis des années.
Au début, ni le rhumatologue, ni le personnel médical, ne savaient que je comprenais ( ou
n’imaginaient que je comprenais…) Le rhumatologue s’adressait directement à ma mère en
m’ignorant complètement.
J’avais un tableau de lettres avec kikoz (je ne sais pas si vous en avez déjà entendu parler?) Ce
Que j’utilise c’est un pointeur lumineux à la tète. C’est assez pratique quand les i .m.c. ou
d’autres malades sont couchés sans pouvoir s’exprimer.
Au bout de plusieurs semaines mon rhumatologue a commencé à savoir comment faire pour
communiquer avec moi. Il prenait mon tableau le kikoz et on était parti pour un tour !
Maintenant il me parle tout à fait normalement.
Depuis deux ans et demi j’ai un éco, l’appareil avec lequel je vous parle.
Pour cette machine il faut une certaine installation mais avec une table d’hôpital un peu inclinée et une ficelle on y arrive.
Il faut quand même que ma mère soit là pour m’installer.
C’est un peu amusant avec le rhumatologue.
On discute assez vite, et surtout je donne mon option. Et ça c’est important de donner notre
option, sur ce qu’on va nous faire comme traitement.
On se sent moins angoissé.
Imaginez un instant que vous êtes prisonniers de votre corps et sans parole. Comment réagiriez-vous ?
Le message que j’aimerais vous faire passer : essayez de communiquer avec les malades par
n’importe quel moyen. C’est la moitié de la guérison
Donc c’est du temps gagné sur la qualité des soins, pas du temps perdu pour vous qui travaillez
avec un chronomètre dans les poches !! je plaisante quoique !
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
EXPRIMER ET FAIRE FACE À LA DOULEUR CHEZ L’ENFANT
ATTEINT DE POLYHANDICAP OU DE PARALYSIE CÉRÉBRALE
MARC ZABALIA, professeur de Psychologie de l’Enfant et de l’Adolescent, Université de Caen
Basse-Normandie
La douleur est un phénomène complexe qui dépasse largement la dimension nociceptive et
qui est classiquement décrite comme la synthèse de quatre dimensions (sensori-discriminative, cognitive, comportementale et émotionnelle). Evaluer la douleur d’une personne
implique bien sûr un minimum d’empathie mais aussi des capacités d’identification à l’autre
auxquelles peuvent s’opposer des attitudes défensives mobilisées face à la déficience. Il est
difficile de s’identifier à celui à qui l’on ne veut pas ressembler. La crainte de ce qui est différent peut être inconsciemment combattue par un fort désir de réparation. L’ambivalence
face au handicap risque de venir interférer avec des pratiques objectives d’évaluation. Par
ailleurs, les données de l’expérience clinique ainsi que les études épidémiologiques montrent
qu’un même stimulus nociceptif ou qu’une même lésion peut entraîner des sensations douloureuses différentes selon les sujets. On sait que les variations dépendent de nombreux
facteurs tels que l’âge, le sexe ou la culture, et que les seuils de sensibilité peuvent varier
aussi selon le contexte psycho-affectif.
La nécessité d’une évaluation objective de la douleur ne fait alors aucun doute. Elle est seule
garante de l’adaptation du traitement à la nature et à l’intensité de la douleur. Elle permet
de communiquer une information fiable à tous les acteurs de la prise en charge de l’enfant.
Enfin, l’existence d’outils validés pour mesurer la douleur permet de sensibiliser et de former
les professionnels à son repérage et à son traitement.
La définition de la douleur proposée par l’International Association for the Study of Pain met l’accent sur l’expression par le sujet lui-même : « la douleur est une expérience subjective sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel,
ou décrite en termes d'un tel dommage ». Cette définition a malencontreusement contribuée
aux inégalités d’accès aux protocoles d’évaluation pour les populations vulnérables (nouveau-né, nourrissons, personnes en situation de handicap et personnes âgées sans communication), à tel point qu’il a semblé nécessaire d’ajouter récemment à la définition l’idée
que l’absence de plainte ne signifie pas pour autant une absence de perception de la douleur : « l'incapacité à communiquer verbalement n’interdit pas aux individus la possibilité
d’éprouver de la douleur ni le besoin de recevoir un traitement approprié pour la soulager.
La douleur est toujours subjective» (www.iasp-pain.org). Un accès inégal à l’évaluation et
au traitement de la douleur est aujourd’hui considéré comme une abrogation des droits
fondamentaux (Cousins, Brennan et Carr, 2004).
Douleur et déficience intellectuelle
La littérature suggère que la douleur est fréquente chez les personnes atteintes de déficience
intellectuelle, mais elle est rarement traitée activement (Stallard et al., 2001). Les études
dans ce domaine montrent également que cette population a deux fois et demi plus de problèmes de santé comparée à la population générale (van Schrojenstein Lantman-De Valk,
2000). Les personnes atteintes de déficiences sévères ou profondes sont plus fréquemment
atteintes de maladies invalidantes ou de problèmes médicaux complexes associés à des difficultés de communication. Ces problèmes médicaux, liés directement ou indirectement à
la déficience, nécessitent souvent des interventions douloureuses. Les douleurs ont des origines multiples et sont autant causées par les atteintes physiques et les problèmes médicaux
propres à la déficience qu’à l’absence de repérage et de prise en charge des problèmes de
santé courants (Ehde et al., 2003).
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Le risque d’accidents traumatiques est également plus élevé dans cette population, en particulier chez ceux qui sont valides (Breau et al., 2004). Les traumatismes sont plus sévères
et nécessitent un traitement plus long que ceux des personnes sans déficience (Braden,
Swanson, Di Scala, 2003). Même lorsqu’elle est repérée la douleur est parfois difficilement
prise en charge en raison de la complexité de certaines situations médicales.
Les enfants qui manifestent des comportements d’auto-mutilation montrent des réactions
à la douleur comparables à celles des autres enfants. La présence de douleurs chroniques
peut être liée à la localisation et à fréquence des auto-mutilations (Breau et al., 2003). Des
travaux ont suggéré que l’auto-mutilation pouvait être une conséquence de douleurs chez
les personnes atteintes de déficience intellectuelle sévère et être le résultat de leur incapacité
à communiquer (Danov & Symons, 2005). La douleur peut être identifiée grâce aux comportements non-verbaux chez les adultes qui présentent des comportements d’auto-mutilation. Cela contredit l’idée d’une insensibilité à la douleur dans cette population (Symons,
Harper, McGrath, Breau & Bodfish, 2009).
Les personnes atteintes de déficience intellectuelle ont un risque élevé de maladies liées au
vieillissement, y compris le cancer, car leur espérance de vie augmente. Mais identifier les
signes et les symptômes du cancer dans cette population reste un défi pour l’entourage et
les soignants. L’information sur la santé et la prévention du cancer ne sont pas optimum
dans cette population (Hanna, Taggart & Cousins, 2001) alors qu’identifier les symptômes
est un enjeu pour un diagnostic précoce. En France, entre 100 000 et 400 000 personnes
atteintes de déficience intellectuelle développent un cancer au cours de leur existence, et
7000 nouveaux cas sont attendus chaque année. Comparée à la population générale, les
enfants atteints de Trisomie 21 présentent un risque élevé de leucémie alors que le risque
de tumeurs solides est moindre chez les adultes (Hasle, Clemmensen & Mikkelsen, 2000;
Hermon et al., 2001). Il y a une prévalence élevé de cancer de l’estomac, d’ulcère gastrique
et de lymphome dans cette population (Hogg & Tuffrey-Wijne, 2009).
La douleur est le symptôme le plus fréquent dans les situations de cancer. La douleur est
habituellement évaluée de modérée à sévère et provoque souvent de la détresse (Hedstrom
et al., 2003). Les douleurs cancéreuses et les douleurs liées aux traitements sont des phénomènes multi-dimensionnels. Une prise en charge pluridisciplinaire de la douleur est
conseillée et les recommandations internationales préconisent que la douleur soit évaluée
à l’aide d’outils scientifiquement validés. Les enfants et leur famille doivent être compris
dans leur singularité en prenant en compte la variabilité inter-patient dans la réponse aux
antalgiques.
Douleur et Paralysie cérébrale
Pour la plupart des personnes atteintes de paralysie cérébrale, la douleur est un phénomène
chronique. La douleur est quotidienne, d’une intensité allant de modérée à sévère et
concerne l’ensemble du corps et plus particulièrement les hanches, les genoux et les pieds
chez les plus jeunes. La douleur touche souvent plusieurs parties du corps simultanément,
et peut durer plusieurs mois.
L’étude prospective réalisée par la Fondation Motrice en 2008 a identifié la prise en charge
de la douleur comme un des principaux enjeux de la recherche concernant la population
atteinte de paralysie cérébrale. La douleur est une expérience fréquente dans cette population, les personnes évoquent tout autant les douleurs liées à l’atteinte que celles qui résultent
de soins ou d’interventions médicales (Fauconnier et al., 2009 ; Houlihan et al., 2004 ;
Dickinson et al., 2007 ; Parkinson et al., 2010 ; Wake, Salmon et Reddihough, 2003). De
nombreuses pratiques de kinésithérapie sont connues pour être douloureuses. Mais la recherche sur ce sujet est encore peu développée, elle s’est concentrée sur les soins et procédures médicales plus invasives.
Les parents d’enfants atteints de paralysie cérébrale rapportent que les exercices d’étirement
réalisés à la maison sont les activités les plus douloureuses de la journée et que les mobilisations passives réalisées par les kinésithérapeutes sont elles aussi très souvent douloureuses
(Hadden et von Baeyer, 2002 ; 2005). Les adultes atteints de paralysie cérébrale évoquent
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
les étirements parmi les plus mauvais souvenirs de leur enfance (Kibele, 1989). L’étude
SPARCLE2 a mis en évidence que la moitié des enfants atteints de paralysie cérébrale rapportent des douleurs lors des prises en charge de kinésithérapie (Colver et Dickinson, 2010).
Auto-évaluation de la douleur et déficience intellectuelle légère et
moyenne
Les enfants et adolescents atteints de déficience intellectuelle légère et moyenne sont en
mesure d’évoquer et d’évaluer l’intensité de douleurs passées de façon comparable à celle
d’enfants typiques de même niveau de développement (Zabalia, Jacquet et Breau, 2005).
Ils utilisent un vocabulaire qui indique l’évolution de l’intensité douloureuse (un peu mal,
j’avais un bleu, c’était rouge, ça a saigné, la peau toute noire, fait la grimace, pleurer, crier,
appeler l’ambulance) et des termes adaptés à la situation évoquée. Ils sont en mesure de
produire jusqu’à neuf mots pour décrire la nature de la douleur, un nombre de mots qui
correspond à celui des enfants non déficients d’âge de développement équivalent. La présence de ces compétences indique qu’elles ne dépendent pas exclusivement du niveau du
développement cognitif. On ne peut donc pas systématiquement renoncer à une auto-évaluation de la douleur à partir du simple fait que l’enfant est atteint de déficience intellectuelle.
Les enfants porteurs de déficience intellectuelle connaissent des stratégies de faire-face à la
douleur (Zabalia et Duchaux, 2007). Les stratégies de faire-face sont des réponses cognitives
et comportementales manifestées par les patients au cours d’un événement douloureux.
Dans une situation où les sujets eux-mêmes rapportent des douleurs passées, les enfants
atteints de déficience intellectuelle sont en mesure d’évoquer plusieurs stratégies de faireface. Comparées à une population typique, l’auto-instruction cognitive (quand j’ai mal je
pense à quelque chose d’agréable) est moins évoquée au profit de la recherche d’un support
social (quand j’ai mal, j’appelle papa, maman ou une autre personne), indépendamment
de l’âge, du sexe et du niveau de déficience. Le recours à un soutien social paraît être une
stratégie pertinente pour cette population compte-tenu des difficultés d’adaptation et d’autonomie, bien qu’elle soit considérée comme une stratégie passive vis-à-vis de la douleur.
Si les travaux concernant les capacités d’auto-évaluation de la douleur des enfants et adolescents atteints de déficience moyenne et légère restent rares, ils mettent en évidence un
potentiel important d’expression et d’évaluation de la douleur. Ils connaissent le phénomène
douloureux, évoquent spontanément des stratégies de faire-face adaptées. Les capacités
impliquées dans l’hypno-analgésie et la relaxation semblent préservées (imagerie mentale,
mémoire bibliographique, Zabalia et Esquerré, 2009).
Quelques éléments pour choisir un outil d’évaluation
L’auto-évaluation semble souhaitable dès que la communication verbale avec l’enfant est
possible et dès que ses capacités de compréhension des échelles le permettent.
Avec l’Echelle Visuelle Analogique (EVA) les enfants atteints de Trisomie 21 produisent deux
fois plus de cotations extrêmes (0 ou 10) que les enfants du groupe témoin, soit presque la
moitié des évaluations. Par ailleurs, cette échelle n’est pas validée lors d’une hétéro-évaluation produite par un soignant excepté pour les nourrissons (Taddio et al., 2009). L’échelle
des visages (Faces Pain Scale-Revised, Hicks et al., 2001) donne de meilleurs résultats. Le
pourcentage de cotations extrêmes est équivalent à celui du groupe contrôle (un quart des
mesures). Il est indispensable d’utiliser une échelle de référence validée (pour l’échelle visuelle
analogique une réglette de 10 cm avec triangle rouge et ancrage verbal) car on en connaît
les scores seuils : > 3 douleur modérée, > 6 douleur intense (www.pediadol.org). L’échelle
des visages (Faces Pain Scale-Revised) peut être théoriquement proposée dès l’âge de 4 ans
dans la population typique donc théoriquement dès 4 ans d’âge de développement.
Les échelles d’hétéro-évaluation sont des outils permettant l’évaluation du sujet par un tiers,
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
généralement un professionnel de santé, plus rarement un proche de l’enfant. L’échelle Face
Legs Activity Cry Consolability (FLACC, Malviya et al., 2006) est une échelle d’observation
utilisable de la naissance à 18 ans. La version anglophone est validée en situation post-opératoire. Elle ne comporte que cinq items ce qui permet une passation rapide mais limite
grandement sa sensibilité. Le score est compris entre 0 et 10 mais on ne connaît pas les
scores seuils des différentes intensités douloureuses. Par extension, on utilise les scores seuils
des échelles en 10 points, mais cela n’en assure pas la validité. La population de l’étude de
validation ne comprend que des personnes atteintes de déficience intellectuelle. Si certains
items ne sont pas applicables, la validité du score n’est plus garantie. Il existe une version
francophone modifiée pour les enfants handicapés. Si la qualité de la traduction ne fait
aucun doute, la version francophone n’est pas statistiquement validée.
L’échelle Douleur Enfant San Salvadour (DESS Collignon, Guisiano et Combes, 1999) est
une échelle d’observation qui comporte dix items, le score est compris entre 0 et 40 et elle
est applicable de 2 ans à l’âge adulte. L’étude de validité a été réalisée avec une population
de personnes atteintes de polyhandicap. On connait les scores seuils (2 - 6 = score de traitement). La particularité de l’échelle DESS est qu’elle nécessite l’accès à des informations
collectées auprès des proches de la personne. Si elle n’est pas applicable en urgence et difficilement applicable pour des non familiers ou en l’absence de familiers, elle dispose de
qualités pour évaluer les douleurs chroniques.
La Grille d’Evaluation de la Douleur-Déficience Intellectuelle (GED-DI Zabalia et al., 2011)
est la version francophone de la Non-Communicating Children’s Pain Checklist-Postoperative Version (NCCPC-PV Breau et al., 2002). Il s’agit d’une échelle d’observation de trente
items. Le score est compris entre 0 et 90 et elle est applicable de la naissance à l’âge adulte.
Cette échelle a été validée en situation post-opératoire avec une population d’étiologie variée
comprenant des personnes atteintes de déficience intellectuelle, de paralysie cérébrale ou
de troubles autistiques. Les scores seuils (6-11) sont identiques à ceux de la version anglophone. Cette échelle comporte de nombreux items afin d’augmenter sa sensibilité en tenant
compte du fait que tous les items ne sont pas applicables à tous les sujets en raison de la
grande hétérogénéité de la population en situation de handicap. Cependant, l’étude de validation a été réalisée en tenant compte de ce phénomène. Le score reste valide lorsque tous
les items ne sont pas cotés. De fait, le temps de passation demeure limité (5 minutes). Cette
échelle est utilisable sans connaissance préalable de la personne évaluée. Enfin, la version
anglophone a montré une bonne consistance lors d’évaluation de douleurs iatrogènes.
Que faire pour soulager la douleur ?
Il existe aujourd’hui de nombreuses données concernant les effets délétères des douleurs
répétées sur le développement de l’enfant ainsi que sur sa compliance aux soins ultérieurs
(pour revue von Baeyer et Tupper, 2010). Ces éléments soulignent l’intérêt d’élaborer des
pratiques de prévention et de prise en charge de la douleur liées aux soins. Les évaluations
et les soins ne peuvent pas tous être exempts de douleurs mais les obligations éthiques engagent les praticiens à proposer des méthodes qui favorisent l’émergence de stratégies de
faire-face et minimisent la douleur. Par ailleurs, outre les effets bénéfiques pour les patients
et leur famille, réduire la douleur augmente la tolérance au soin, réduit la durée du soin et
diminue les conséquences néfastes des douleurs répétées sur le développement de l’enfant.
Les interventions de masso-kinésithérapie pour soulager la douleur englobent un grand
nombre de traitements (massages, neurostimulation transcutanée…). L'une des premières
études pour documenter la douleur des enfants atteints de paralysie cérébrale avait mis
l'accent sur l’intérêt des exercices physiques après une chirurgie (Reynell, 1965). Les prise
en charge kinésithérapiques sont évidemment courantes dans la vie des personnes atteintes
de paralysie cérébrale mais elles consistent rarement à soulager la douleur (Engel, Kartin et
Jensen, 2002), elles peuvent être en elles-mêmes une source de douleur (Miller, JohannMurphy et Pitten Cate, 1997 ; Hadden et von Baeyer, 2005). Pourtant, les méthodes impliquant des dimensions physiques sont recommandées dans les traitements des douleurs
chroniques (Rakel et Barr, 2003 ; American Society of Anesthesiologists, 2010).
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
La relaxation musculaire progressive implique une détente de différentes parties du corps,
parfois après une brève période de contraction. Elle a été utilisée pour traiter la migraine
pédiatrique (Fichtel et Larsson, 2004), la fibromyalgie juvénile (Walco et Ilowite, 1992),
l'arthrite rhumatoïde juvénile (Walco, Varni et Ilowite, 1992), et la douleur abdominale
fonctionnelle (Youssef, Rosh, Loughran, et al., 2004). Cautela et Groden (1978) ont publié
un manuel adapté aux enfants porteurs de handicaps, mais la technique n'est pas appropriée pour les personnes ayant des limitations physiques sévères et qui ont peu de contrôle
du mouvement volontaire.
Le biofeedback, grâce à la visualisation des signaux physiologiques, permet une inversion
délibérée de l'excitation physiologique par auto-suggestion et par la conscience corporelle.
Cette rétroaction physiologique permet d’atteindre et maintenir un état de relaxation
(Critchley, Melmed, Featherstone et al., 2002). Les logiciels modernes ont conduit au développement d'un certain nombre de programmes adaptés aux enfants (Schwartz et Andrasik, 2003). Le biofeedback a montré son efficacité pour le traitement des migraines chez
l’enfant, seul ou en association avec d'autres techniques psychologiques (Holden, Deichmann, Levy, 1999), ainsi que pour l'arthrite rhumatoïde juvénile (Lavigne, Ross, Berry, et
al., 1992). Engel et al. (2004) ont réalisé une étude de biofeedback avec trois adultes atteints
de paralysie cérébrale et une déficience intellectuelle légère. Bien que les participants aient
signalé une certaine diminution de la douleur, les mesures physiologiques ne correspondent
pas. Les résultats sont mitigés. Les auteurs suggèrent que la spasticité engendre un retour
perturbateur lors du biofeedback.
Les exercices de respiration et la respiration abdominale profonde sont utilisés depuis très
longtemps pour soulager la douleur iatrogène chez l’enfant (Powers, 1999). Elles sont souvent associées à d'autres techniques. Une seule étude a mesuré l’effet des exercices de respiration sans autres techniques de relaxation pour traiter la douleur chronique chez l’enfant
(Weydert, Shapiro, Acra, et al., 2006). Ils sont moins efficaces que la combinaison de l'imagerie guidée et de la relaxation musculaire progressive pour des douleurs abdominales récurrentes. Néanmoins, 21% des enfants avaient moins de jours douloureux après un mois
de suivi et 45% après deux mois. Ainsi, cette technique peut être une option pour les personnes qui ne sont pas en mesure de bénéficier d’autres techniques.
La relaxation comportementale a été développée par Poppen (Schilling DJ, Poppen1983 ;
Poppen, 1998). Cette procédure très structurée est applicable à des personnes atteintes de
déficience intellectuelle parce qu'elle nécessite peu de contrôle verbal et que la formation
dispensée aux personnes atteintes de déficience intellectuelle est adaptée à leur niveau de
fonctionnement intellectuel. La relaxation comportementale peut être appropriée pour les
personnes atteintes de limitations physiques. Certaines adaptations sont possibles si la personne ne peut pas adopter certaines postures ou en cas de spasticité (Breau, Lotan et Koh,
2006). La relaxation a montré son intérêt dans la prise en charge des douleurs chroniques,
dans la prévention des douleurs iatrogènes et la gestion du stress. La décontraction musculaire a un effet antalgique direct, elle a de plus l’avantage de permettre un investissement
positif du corps. Elle peut rapidement être pratiquée de façon autonome y compris chez de
jeunes enfants, ce qui renforce le sentiment de contrôle et d’efficacité du sujet face à la douleur. Elle est facile d’accès et constitue une approche centrée sur le corps pertinente associée
à des pratiques kinésithérapiques. De nombreux praticiens sont familiarisés avec les principes et les techniques de la relaxation.
La plupart des experts de la prise en charge de la douleur suggèrent que presque tous les
traitements disponibles pour soulager la douleur peuvent être utilisés avec les personnes atteintes de déficience intellectuelle en tenant compte de leurs caractéristiques mentales et
physiques (Koh et al., 2004; Long, Ved & Koh, 2009).
Une prise en charge multidisciplinaire est hautement recommandée pour augmenter les effets synergiques de plusieurs options thérapeutiques (pharmacologiques et non-pharmacologiques). Les approches comportementales des prises en charge psychologiques de la
douleur sont souvent utilisées avec de jeunes enfants car elles nécessitent divers niveaux de
développement cognitifs. La relaxation ou les techniques de respiration peuvent être appropriées pour les personnes atteintes de déficience intellectuelle puisqu’elles sont utilisées avec
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
des enfants au développement typique dès l’âge de 5 ans. La distraction est couramment
utilisée pour prendre en charge les douleurs iatrogènes et elle est plus efficace chez les plus
jeunes (Piira et al., 2006; Cohen, 2008). La distraction peut-être pertinente pour les personnes atteintes de déficience intellectuelle, mais elle l’est plus encore lorsque la personne
est engagée dans une activité (manipuler un jouer, souffler sur des bulles…).
Une étude a d’ailleurs cherché à savoir si les enfants et adolescents atteints de déficience
intellectuelle légère et moyenne pouvaient a priori bénéficier des protocoles d’hypno-analgésie (Zabalia et Esquerré, 2009). La plupart des techniques employées entre 6 et 12 ans
(penser à un lieu favori, à son hobby, écouter une histoire) impliquent l’imagerie mentale
et la mémoire autobiographique. Les résultats de l’étude montrent que les enfants sont en
mesure de générer des images mentales lorsqu’ils écoutent une histoire. La mémoire autobiographique peut être mobilisée pour évoquer les évènements personnels. Donc, l’hypnoanalgésie semble être une option accessible aux personnes atteintes de déficience
intellectuelle avec un âge de développement supérieur à 4 ans comme c’est le cas pour les
enfants au développement typique.
Chez l’enfant, l'auto-hypnose permet la réduction de la douleur abdominale (Anbar, 2001;
Sokel, Devane & Bentovim, 1991) et des maux de tête (Engel, 1990; McGrath et al., 1988).
L'imagerie guidée a été utilisé pour la douleur post-opératoire chez les enfants dès l'âge de
7 ans (Huth, Broome & Good, 2004), et pour des douleurs abdominales récurrentes dès
l'âge de 5 ans (Ball et al., 2003). Une préparation est nécessaire aux enfants atteints de déficience intellectuelle bien que ceux qui se situent dans des niveaux légers d’atteinte peuvent
être capables d'apprendre des scripts qu'ils utilisent par la suite de manière autonome
(Breau, Lotan & Koh, 2011).
Conclusion
Des soignants semblent avoir encore des réticences à reconnaître la pertinence et l’efficacité
des traitements antalgiques dans la population atteinte de déficience intellectuelle. Même
lorsque la douleur est évaluée, ces personnes reçoivent moins d’antalgique que les personnes
de la population générale (McGuire et al ., 2010). La douleur est un phénomène complexe
et subjectif ; l’auto-évaluation reste le meilleur rempart contre les malentendus et les idées
reçues. Les enfants et les adolescents atteints de déficience intellectuelle légère et moyenne
sont en mesure d’évaluer et de faire-face à douleur si on les accompagne de façon adaptée.
Lorsque la communication est impossible, il est nécessaire d’avoir recours à des outils d’hétéro-évaluation validés et adaptés aux handicaps. C’est la condition pour que la mesure
soit objective, répétable et transmissible. Comme tout outil de mesure, ces échelles d’évaluation de la douleur présentent des intérêts et des limites qu’il faut savoir identifier afin
d’en faire un usage pertinent. La prise en charge de la douleur doit être une priorité et ne
plus constituer un obstacle au développement et au bien-être des personnes vulnérables.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
References
American Society of Anesthesiologists Task Force on Chronic Pain Management and the American Society of
Regional Anesthesia and Pain Medicine (2010) Practice guidelines for chronic pain management: an updated
report by the American Society of Anesthesiologists Task Force on Chronic Pain Management and the American
Society of Regional Anesthesia and Pain Medicine. Anesthesiology, 112, 810–33.
Anbar RD. (2001) Self-hypnosis for the treatment of functional abdominal pain in childhood. Clin Pediatr
(Phila) 40: 447-51.
Ball TM, Shapiro DE, Monheim CJ, Weydert JA. (2003) A pilot study of the use of guided imagery for the treatment of recurrent abdominal pain in children. Clin Pediatr (Phila) 42: 527-32.
Braden K, Swanson S, Di Scala C. (2003) Injuries to children who had preinjury cognitive impairment: a 10year retrospective review. Arch Pediatr Adolesc Med 157: 336-340
Breau LM, Camfield C, Symon DN, Bodfish JW, McKay A, Finley GA et al. (2003) Pain and self-injurious behaviour in neurologically impaired children. J Pediatr 142: 498-503.
Breau LM, Camfield CS, McGrath PJ and Finley GA. (2003) The incidence of pain in children with severe cognitive impairments. Arch Pediatr Adolesc Med 157: 1219-26.
Breau LM, Camfield CS, McGrath PJ, Finley GA. (2004) Risk factors for pain in children with severe cognitive
impairments. Dev Med Child Neurol 46: 364-371.
Breau LM, Finley GA, McGrath PJ, Camfield CS. (2002) Validation of the Non-Communicative Pain checklistPostoperative Version. Anesthesiology 96: 528-535.
Breau LM, Lotan M, Koh JL (2011) Pain in Individuals with Intellectual and Developmental Disabilities. In D.R.
Patel, D.E. Greydanus, H.A. Omar, J. Merrick, Neurodevelopmental Disabilities: Clinical Care for Children and
Young Adults (pp 255-276); Springer Netherlands
Cohen LL. (2008) Behavioral approaches to anxiety and pain management for pediatric venous access. Pediatrics
122/3: S134–S39
Collignon P, Guisiano B, Combes JC. (1999) La douleur chez l’enfant polyhandicapé. In : Ecoffey C, Murat I.
éd. La douleur chez l’enfant. Flammarion Médecine Science : Paris pp. 174-178
Colver A.F., Dickinson H.O. (2010) Study protocol: Determinants of participation and quality of life of adolescents with cerebral palsy: a longitudinal study (SPARCLE2). BMC Public Health, 10:10.
Critchley HD, Melmed RN, Featherstone E, et al. (2002) Volitional control of autonomic arousal: a functional
magnetic resonance study. Neuroimage, 16, 909–19.
Dickinson H.O., Parkinson K.N., Ravens-Sieberer U., et al. (2007) Self-reported quality of life of 8-12-year-old
children with cerebral palsy: a cross-sectional European study. Lancet, 369, 2171-8.
Ehde DM, Jensen MP, Engel JM, Turner JA, Hoffman AJ, Cardenas DD. (2003) Chronic pain secondary to disability: a review. Clin J Pain 19 : 3-17.
Engel JM, Jensen MP, Schwartz L. (2004) Outcome of biofeedback-assisted relaxation for pain in adults with
cerebral palsy: preliminary findings. Appl Psychophysiol Biofeedback, 29, 135–40.
Engel JM, Kartin D, Jensen MP. (2002) Pain treatment in persons with cerebral palsy: frequency and helpfulness.
Am J Phys Med Rehabil, 81, 291–96.
Engel JM. (1990)Relaxation training in treating recurrent non-malignant pediatric headaches. Phys Occup Ther
Pediatr 10: 47-71.
Fauconnier J., Dickinson H.O., Beckung E., et al. (2009) Participation in life situations of 8-12 year old children
with cerebral palsy: cross sectional European study. BMJ, 338, b1458.
Fichtel A, Larsson B. (2004) Relaxation treatment administered by school nurses to adolescents with recurrent
headaches. Headache, 44, 545–54.
Hadden K.L., von Baeyer, C.L. (2002) Pain in children with cerebral palsy: common trigger and expressive behavior. Pain, 99, 281-288.
Hadden KH, von Baeyer CL. (2005) Global and specific behavioral measures of pain in children with cerebral
palsy. Clin J Pain 21/2: 140-146.
Hanna LM, Taggart L, Cousins W. (2011) Cancer prevention and health promotion for people with intellectual
disabilities: an exploratory study of staff knowledge. J Intellect Disabil Res 55/3: 281–291.
Hasle H, Clemmensen IH, Mikkelsen M. (2000) Risks of leukaemia and solid tumours in individuals with Down’s
syndrome. Lancet 355:165-69.
Hedstrom M, Haglund K, Skolin I, Von Essen L. (2003) Distressing events for children and adolescents with
cancer: Child, parent and nurse perceptions. J Pediatr Oncol Nurs 20/3: 120-132.
Hermon C, Alberman E, Beral V, Swerdlow AJ. (2001) Mortality and cancer incidence in persons with Down’s
syndrome, their parents and siblings. Ann Hum Genet 65:167-76.
Hicks CL, von Baeyer CL, Spafford PA, van Korlaar I et al. (2001) The Faces Pain Scale-Revised: toward a common metric in pediatric pain measurement. Pain 93:173-83
Hogg J, Tuffrey-Wijne I. (2009) Cancer and intellectual disability: A review of some key contextual Issues. J Appl
Res Intellect Disabil 21:509-18.
Holden EW, Deichmann MM, Levy JD. (1999) Empirically supported treatments in pediatric psychology: recurrent pediatric headache. J Pediatr Psychol, 24, 91–109.
Holmes JA and Stevenson CA. (1990) Differential effects of avoidant and attentional coping strategies on adaptation of chronic and recent-onset pain. Health Psychol 9: 577-84.
Houlihan CM, O'Donnell M, Conaway M, Stevenson RD. (2004) Bodily pain and healthrelated quality of life
in children with cerebral palsy. Developmental Medicine & Child Neurology, 46, 305-10.
Huth MM, Broome ME and Good M. (2004) Imagery reduces children’s post-operative pain. Pain 110: 439-48.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
International Association for the Study of Pain. IASP pain terminology. Consulté le 17 janvier 2012. URL:
http://www.iasp-pain.org/AM/Template.cfm?Section=Pain_Defi...isplay.cfm&ContentID=1728
Kibele A. (1989) Occupationnal therapy’s role in improving the quality of life for persons with cerebral palsy.
AM J Occup Ther, 43, 371-377.
Koh JL, Fanurik D, Harrison RD, Schmitz ML, Norvell D. (2004) Analgesia following surgery in children with
and without cognitive impairment. Pain 111: 239–44.
Lavigne JV, Ross CK, Berry SL, et al. (1992) Evaluation of a psychological treatment package for treating pain
in juvenile rheumatoid arthritis. Arthritis Care Res, 5, 101–10.
Long LS, Ved S, Koh JL. (2009) Intraoperative opioid dosing in children with and without cerebral palsy. Paediatr
Anaesth 19: 513–20.
Malviya S, Voepel-Lewis T, Burke C, Merkel S, Tait AR. (2006) The revised FLACC observational pain tool: improved reliability and validity for pain assessment in children with cognitive impairment. Paediatr Anaesth
16(3) : 258-265.
McGrath PJ, Humphreys P, Goodman JT, Keen D, Firestone P, Jacob P and Cunningham SJ. (1988) Relaxation
prophylaxis for childhood migraine: a randomized placebo-controlled trial. Dev Med Child Neurol 30: 626-31.
McGuire BE, Daly P and Smyth F. (2010) Chronic pain in people with an intellectual disability: under-recognised
and under-treated? J Intellect Disabil Res 54: 240-5.
Miller AC, Johann-Murphy M, Pit-ten Cate IM. (1997) Pain, anxiety, and cooperativeness in children with cerebral palsy after rhizotomy: changes throughout rehabilitation. J Pediatr Psychol, 22, 689–705.
Parkinson K.N., Gibson L., Dickinson H.O., Colver A.F. (2010) Pain in children with cerebral
Piira T, Hayes B, Goodenough B, von Baeyer CL. (2006) Effects of attentional direction, age, and coping style
on cold-pressor pain in children. Behav Res Ther 44: 835–48.
Poppen R. (1998) Behavioral relaxation training and assessment. 2nd ed. Thousand Oaks, CA: Sage.
Powers SW. (1999) Empirically supported treatments in pediatric psychology: procedure-related pain. J Pediatr
Psychol, 24, 131–45.
Rakel B, Barr JO. (2003) Physical modalities in chronic pain management. Nurs Clin North Am, 38, 477–94.
Reynell JK. (1965) Post-operative disturbances observed in children with cerebral palsy. Dev Med Child Neurol,
7, 360–76.
Schilling DJ, Poppen R. (1983) Behavioral relaxation training and assessment. J Behav Ther Exp Psychiatry, 14,
99–107
Schwartz MS, Andrasik F. (2003) Biofeedback: a practitioner’s guide. 3rd ed. New York: Guilford.
Sokel B, Devane S and Bentovim A. (1991) Getting better with honor: individualized relaxation/self-hypnosis
techniques for control of recalcitrant abdominal pain in children. Fam Systems Med 9: 83-91.
Stallard P, Williams L, Lenton S, Velleman R. (2001) Pain in cognitively impaired, noncommunicating children.
Arch Dis Child 85(6) :460–462.
Symons FJ, Danov S. (2005) A prospective clinical analysis of pain behavior and self-injurious behavior. Pain
117/3: 473–477.
Symons FJ, Harper VN, McGrath PJ, Breau LM, Bodfish J.W. (2009) Evidence of increased non-verbal behavioral
signs of pain in adults with neurodevelopmental disorders and chronic self-injury. Res Dev Disabil 30/3: 521–
528.
Taddio A, O’Brien L, Ipp M, Stephens D, Goldbach M, Koren G. (2009) Reliability and validity of observer
ratings using the visual analog scale (VAS) in infants undergoing immunization injections. Pain 147(1): 141–
146.
von Baeyer C.L., Stupper S.M. (2010) Procedural pain management for children receiving physiotherapy. Physiother Can, 62, 327-337.
Wake M., Salmon L., Reddihough D. (2003) Health status of Australian children with mild to severe cerebral
palsy: cross-sectional survey using the Child Health Questionnaire. Developmental Medicine & Child Neurology,
45, 194-9.
Walco GA, Ilowite NT. (1992) Cognitive-behavioral intervention for juvenile primary fibromyalgia syndrome. J
Rheumatol, 19, 1617–19.
Walco GA, Varni JW, Ilowite NT. (1992) Cognitive-behavioral pain management in children with juvenile rheumatoid arthritis. Pediatrics, 89, 1075–79.
Weydert JA, Shapiro DE, Acra SA, et al. (2006) Evaluation of guided imagery as treatment for recurrent abdominal pain in children: a randomized controlled trial. BMC Pediatr, 6, 29.
Youssef NN, Rosh JR, Loughran M, et al. (2004) Treatment of functional abdominal pain in childhood with
cognitive behavioral strategies. J Pediatr Gastroenterol Nutr, 39, 192–96.
Zabalia M, Breau LM, Wood C, Lévêque C, Hennequin M, Villeneuve E et al., (2011) Validation francophone
de la grille d’évaluation de la douleur - déficience intellectuelle – version post-opératoire. Can J Anesth/J Can
Anesth 58: 1016–1023.
Zabalia M, Duchaux C. (2007) Stratégies de faire-face à la douleur chez des enfants porteurs de déficience intellectuelle. Revue Francophone de la Déficience Intellectuelle 17 : 53-64.
Zabalia M, Esquerré F. (2009) Prerequisite abilities for the use of hypnosis for pain management in children
with cognitive impairment. J Pain Manage 2: 63-69.
Zabalia M, Jacquet D, Breau LM. (2005) Rôle du niveau verbal dans l'expression et l'évaluation de la douleur
chez des sujets déficients intellectuels. Douleur et Analgésie 2: 65-70.
Zabalia M., Breau L.M., Wood C., Lévêque C., Hennequin M., Villeneuve E., Fall E., Vallet L., Grégoire M.-C. et
Breau G. (2011) Validation francophone de la grille d’évaluation de la douleur - déficience intellectuelle – version
post-opératoire. Canadian Journal of Anesthesia / Journal canadien d’anesthésie, 58(1), 1016-1023.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
L A COMMUNICATION EN FIN DE VIE AUPRÈS D’ENFANTS
POLYHANDICAPÉS
QUELS MOTS POUR LE DIRE ?
DR ÉLISABETH GRIMONT-ROLLAND, Hôpital San Salvadour
La confrontation à la maladie de l’autre, à sa douleur et à celle de sa famille, à la mort réveille en nous un sentiment de souffrance et nous confronte à notre propre vulnérabilité.
La confrontation des soignants à la fin de vie de la personne polyhandicapée est une épreuve
à plusieurs titres :
- En raison de la fragilité de la personne polyhandicapée sans communication verbale, ou
« dyscommunicant » ayant des difficultés pour entrer en communication avec l’autre
- En raison des compétences techniques et humaines spécifiques nécessaires à toute personne soignante auprès de ces personnes
- Enfin, en raison de la relation triangulaire qui doit s’instaurer entre la personne malade/la
famille/les soignants, qu’en est-il alors de l’autonomie de la personne puisque il faudra
écouter la parole du tiers.
Alors que notre société a mis à l’écart la question de la mort, que les citoyens meurent en
majorité à l’hôpital, il m’a semblé important d’évoquer avec les soignants leur ressenti lors
de ces situations de fin de vie et de mort imminente, les aspects communicationnels souvent
complexes et hétérogènes qu’ils peuvent rencontrer.
Comment dire certains mots douloureux, interdits, tabou, anxiogènes, parfois mots libérateurs ?
Ces paroles de soignants, rencontrés dans le cadre d’un travail personnel expriment les difficultés qu’ils rencontrent dans l’accompagnement de fin de vie d’enfants et d’adultes polyhandicapés lorsqu’il faut mettre des « mots » sur les « maux », de patients sans parole.
Le contexte de l’étude est un travail ayant pour titre : « Démarche palliative auprès d’enfants polyhandicapés et connaissance de la loi Léonetti ».
Nous avons rencontré un panel large de professionnels (230 soignants dont 12 médecins
et 218 para-médicaux) répartis au sein des unités de soins pédiatriques et adultes ainsi que
des soignants rééducateurs transversaux, pour une enquête de type « un jour donné ». Ce
questionnaire comportait des questions ouvertes et fermées, abordant entre autres :
- la connaissance de la loi Léonetti
- les représentations et les perceptions que se font les soignants des soins palliatifs
- les difficultés rencontrées par les soignants au cours de l’exercice de leur profession
- le « poids des mots » de la fin de vie
A la question : Définissez en 2 ou 3 mots votre perception des soins palliatifs, les mots les
plus cités sont « soulagement de la douleur », « soutien et accompagnement de la famille ».
A la question utilisez-vous l’expression « soins palliatifs » avec les parents ? Seulement 28 %
des soignants nous disent pouvoir les prononcer, et à la question évoquez-vous la mort de
l’enfant avec ses parents, seuls 23 % des soignants y parviennent.
Quels sont les mots employés par les soignants pour parler de la fin de vie avec les parents ?
Prise en charge de la souffrance physique et/ou morale revient le plus souvent (34 % des
soignants), accompagnement, fin de vie uniquement par 8 % des soignants.
A la question qu’est-ce qui vous posent le plus de problèmes dans la prise en charge en
soins palliatifs, les difficultés majeures résident dans les rencontres avec les familles, s’expriment dans les problèmes relationnels équipe/famille, et dans les difficultés à faire face à
la mort d’autrui.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Alors que le débat sur l’euthanasie est de nouveau d’actualité depuis un an, que le professeur
Sicard a rendu son rapport en décembre 2012, qu’un débat public aura peut-être lieu, il
m’a semblé important d’interroger les soignants sur le sens du mot « euthanasie ». La définition attendue était celle donnée par l’observatoire de la fin de vie : « Situation où un tiers
met intentionnellement fin à la vie d’une personne à sa demande, afin de faire cesser une situation qu’elle
juge insupportable ». 60 % des soignants en donnent une définition exacte, alors que 40 % des
personnes évoquent les mots « euthanasie passive », « euthanasie active ». Ces termes largement
usités dans le monde des soins, mais également dans la littérature, les médias ont largement
contribués à semer le doute dans l’esprit des soignants et du citoyen. Il faut dire qu’il n’est
pas aisé de s’y retrouver dans le vocabulaire employé : « euthanasie passive », « obstination déraisonnable », « double effet », « faire mourir », « sédation terminale », « dignité », « abandon médical »,
« aide au mourir », « mourir dans la dignité »….
Qu’exprime le citoyen en fin de vie ? : « Je ne veux pas souffrir », « je ne veux pas être abandonné ».
Le soignant est citoyen lui-même et exprime ces deux notions de « non abandon » et de soulagement de la douleur qu’il met en application par une prise en charge holistique de la
personne (soulagement de la douleur, antalgie, confort, soutien, accompagnement, prise
en compte et traitement de la souffrance physique, morale et ou psychique), et une prise
en charge compassionnelle (libération, délivrance, soulagement). Ces mots, expressions de
la souffrance partagée des soignants, nous interpellent, et nous invitent à un accompagnement permanent de ces soignants afin qu’ils ne basculent pas dans ce qui pourrait être une
« euthanasie par compassion ».
La mort mot « indicible », reste tabou, elle fait peur, dans notre société où tout est encore
fait pour la nier, puisque 70 % des personnes adultes mais aussi des enfants meurent à l’hôpital. Comment annoncer à des parents la fin proche de leur enfant ? Comment faire une
nouvelle annonce de l’aggravation, alors qu’ils ont vécu ces années sous le joug d’annonces
successives ?
Comment trouver les mots justes devant des parents effondrés, comment proposer le principe de « juste présence » évoquée par E Lévinas et repris par E. Hirsch) ? C’est souvent ne
rien dire, écouter, entendre, soutenir, parfois de sa simple présence sans parole.
Les représentations conscientes ou inconscientes que la fin de vie fait jaillir en nous, avec
ces associations possibles telles que mort, douleur, souffrance, peur, décès, angoisse, expliquent la tenue d’un discours parfois négatif de la phase palliative marquée par son issue
fatale. Afin d’accompagner au mieux les soignants, une psychologue intervient au sein des
unités de soins et nous avons proposons annuellement un programme de formations spécifique aux soins palliatifs.
Qu’en est-il de la parole du patient, de la famille, où comment notre psychologue accompagne ces personnes ?
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
COMMENT ACCOMPAGNER UNE PERSONNE AVEC
JUSTESSE ET TENIR COMPTE DE SES DÉSIRS QUAND LA
PAROLE N’EST PLUS ?
FANNY NAVARRO, psychologue, Hôpital San Salvadour
Cette problématique me renvoie au principe de bienfaisance qui se traduit par la volonté
de faire le bien du patient, « le bien que l’on fait à autrui comme on le ferait pour soi-même dans sa
conscience éclairée de [soignant] » selon l’idée de Dominique FOLSCHEID en 1997. Mais la notion de « bien », c’est avant tout le patient qui la définit. Penser que « ceci ou cela est bon
pour lui » nous met en position paternaliste, c’est un glissement possible notamment
lorsque l’on accompagne un patient qui ne communique pas verbalement. Nous nous devons alors d’être attentifs à ne pas faire de confusions entre nos besoins et les siens, entre
notre plaisir et le sien car nous ne pensons pas à sa place. Nous ne pouvons pas nous
contenter de bien faire, mais faire là où le patient en est.
Comment être le plus juste et le plus perceptif avec un patient polyhandicapé ? Il me semble
que l’on n’est pas négligeant quand on se questionne, quand on doute, quand on travaille
ensemble dans le sens d’une amélioration, avec un projet commun de confort du patient.
Il est tout aussi indispensable de se connaître suffisamment, dans ses capacités et ses fragilités, et de se questionner en permanence sur ce que l’on fait, ce que l’on est auprès de
l’autre. Sinon, comme le dirait Emmanuel HIRSH, on se retrouve dans « une situation d’imposture ».
Alors, quand la parole n’est plus...
L’accompagnement des personnes polyhandicapées est pour moi la clinique du détail :
s’agissant d’une communication non verbale, elle demande une observation fine et un travail avec les proches pour repérer les petits signes perceptibles. Par exemple, Alvin, lui, apprécie le souffle de l’air sur son front et les petits massages du visage, des mains, des pieds…
et quand il pousse des « aaaaaaah » et qu’il mâchonne, cela nous encourage à continuer.
Une personne polyhandicapée adresse la plupart du temps des messages pouvant être
étranges et incompréhensibles, en fonction de ses capacités. Elle nous donne l’impression
de vivre dans un monde à part auquel nous n’avons pas accès.
Communiquer reste cependant un besoin fondamental à sa survie et à son bien-être. Il est
donc nécessaire de focaliser notre attention sur les moyens de communication utilisés par
le patient afin de l’accompagner au plus près de sa demande. Par exemple, pour Alia, le
moment où l’on se quitte est toujours douloureux, elle nous le témoigne par une grimace
et de petits gémissements. Ses grands yeux verts nous interrogent. Comme un rituel, nous
mettons des mots sur ce départ, parlons du moment où nous nous retrouverons et l’invitons
à repenser à ce moment partagé. Alors elle semble accepter la séparation et nous pouvons
partir Ces personnes nous invitent à échanger sur un mode différent, nous sommes amenés
à développer la dimension non verbale présente dans notre quotidien, que nous avons tendance à laisser échapper, à ne pas considérer dans son rôle primordial, au profit du langage
verbal, plus commun. C’est alors nous, doté du langage verbal, qui sommes handicapés
dans l’échange. Avec Jules par exemple, si l’on se fie aux apparences, on a l’impression de
le déranger, de ne pas être les bienvenus. Jules ne dit pas grand-chose mais quand il n’est
pas accord, on le sait (il dit « non » et puis des noms d’oiseaux), et puis, quand il ne parlait
plus du tout, il me touchait les jambes avec son pied et répondait par un « rrrrh » à mes
sollicitations verbales, et depuis son lit, il me raccompagnait du regard jusqu’à la porte de
sa chambre, m’indiquant encore un tout petit peu le chemin.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Chacun son langage, autant de langages que de patients pour qui le verbal n’existe pas ou
plus. De notre côté, nous devons être attentifs et repérer notre propre communication non
verbale comprenant nos gestes, notre regard, nos mimiques bien entendu mais aussi, l’intonation de notre voix, ajuster notre hauteur par rapport à celle du patient, notre posture,
notre rythme global. Il en est de même avec leur famille dans le but de créer un lien de
confiance
La dimension non verbale occupe une place capitale (90% du message) même quand la
personne accède au langage. Pour les familles qu’il m’est donné de rencontrer, beaucoup
d’expressions, d’émotions passent par le regard (triste, impuissant, complice, parfois malicieux), une poignée de main intense et bien d’autres signes.
… la voix de la famille
J’illustrerai mon propos par l’accompagnement de la famille de Kenny, 18 ans, atteint d’une
cytopathie mitochondriale qui est une maladie neurodégénérative rare pour laquelle aucun
traitement n’existe. La demande de suivi a été faite par le père. Je rencontre la famille de
Kenny composée du père, de la mère et de ses deux petits frères. Puis, j’accompagnerai les
parents et chacun des deux frères au fil de leur demande.
La position des parents est mise à mal, menace de s’effondrer dans cette situation extrême.
Voici quelques caractéristiques présentes au travers du suivi de ces parents.
-Beaucoup de questions se bousculent : « comment Kenny vit-il son hospitalisation ? Son état de
santé ? Ses symptômes ? Que peut comprendre son frère de 8 ans à propos de la mort ? »
Ces questions n’attendent pas tant de réponses qu’un lieu d’écoute et de dépôt de la souffrance, pour partager le poids de la situation et parce que la maison n’est pas toujours le lieu
où l’on ose parler de tout ça. - Ils expriment un sentiment de culpabilité : « est-ce que j’ai été trop
sévère avec Kenny ? On ne peut pas venir tous les jours, quelle notion du temps a Kenny ? Va-t-il nous en
vouloir ? Je ne me sens pas de reprendre le travail maintenant, mais quel exemple pour mes enfants ! »
-Tendance à la généralisation de l’angoisse : la peur qu’il arrive malheur aux autres enfants,
liée à la situation actuelle et aux éventuelles pertes antérieures. Le monde devient menaçant.
-L’anticipation de la perte de leur enfant : présente dans leur esprit, ils se représentent mentalement des scènes de décès, d’enterrement et verbalisent un désir de fuite face à la violence
de la situation. -Cette violence se retrouve dans les mots utilisés : les parents s’autorisent à
évoquer la situation en des termes crus chargés d’une grande souffrance, du vide et de l’insupportable. Ma position se doit d’être des plus déculpabilisantes. -La notion d’attente est
présente : dans un contexte de fin de vie qui se prolonge, avec des épisodes de « mieux »,
comme c’est souvent le cas dans les pathologies neurodégénératives, le rythme psychique
peut difficilement s’ajuster à ces mouvements de hauts et de bas. Les parents pensent et
évoquent la notion d’euthanasie pour accélérer la fin et diminuer l’attente intenable. C’est
d’abord une demande d’aide. Le fait de le verbaliser sans risque de jugement est déjà un
soulagement et les détourne assez vite de cette idée.
-Enfin, le sentiment d’impuissance est omniprésent et se manifeste comme il peut, avec les
ressources de chacun. Ce qui compte, à mon sens, c’est que les parents puissent se laisser
aller et dire ce qu’ils ne pourraient se permettre de dire à l’entourage, aux amis.
La parole permet de mettre au dehors. Ces pensées et paroles déposées ici permettent plus
de disponibilités psychiques au chevet de leur enfant. Et si les familles réagissent avec agressivité ou attaquent l’équipe, c’est la plupart du temps une voie de dégagement et d’expression de l’angoisse. Les soignants représentent l’hôpital, même avec le meilleur des accueils,
ils renvoient à la condition de maladie. Le simple fait de demander aux parents comment
ils vont, comment ils s’en sortent suffit à reconnaître leur épuisement et les revaloriser sur
leur place auprès du proche malade. L’aide aux familles passe par l’écoute et l’implication
dans le projet de soin.
Et les frères et sœurs ?
Régine SCELLES en 1997 met en relief la position douloureuse des frères et sœurs de l’enfant
polyhandicapé qui vivent fréquemment le « délaissement », voire la « négligence » de leurs
parents débordés par la situation de polyhandicap, centrés, à juste titre, sur leur enfant ma-
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
lade, qui plus est en soins palliatifs. Dans cette situation, la fratrie se retrouve face à la souffrance des parents avec lesquels il est difficile de parler du frère ou de la sœur malade. Les
enfants ont tendance à protéger les parents et les rôles s’inversent. De plus, la relation avec
le frère ou la sœur malade peut être mise à mal car sa situation renvoie à la propre mort de
chacun, mais aussi à un possible fantasme de contagion (« on a le même sang, les mêmes
gênes ») ou bien encore à des sentiments ambivalents à l’égard du frère malade (comme la
protection, l’agressivité, la culpabilité, la honte). La communication avec la fratrie a pour
but l’expression des émotions, l’explication de ce qui se passe, connaître le sens que donne
chacun des membres sur ce qui se passe et le maintien du lien avec la personne malade. En
ce sens, dans l’accompagnement de la famille, l’idée c’est de différencier, séparer la souffrance fraternelle de la souffrance parentale, en proposant par exemple des espaces de parole différents, des interlocuteurs différents si possible.
… une voie pour l’équipe
La présence de la famille et son discours sont un bien précieux, une aide fondamentale pour
l’accompagnement du patient en soins palliatifs. Cependant, il semble important de réfléchir à l’écart qui existe entre ce que l’on pense bon pour le patient et ce qui l’est réellement,
entre le paraître et l’être, entre ce que voit la famille et ce que vit le patient. C’est ce que
l’on nomme les niveaux de réalité. D’un côté, nous avons le patient avec son âge, son parcours, son histoire, sa maladie, ses angoisses. D’un autre, nous avons sa famille avec le vécu
subjectif de chacun des membres, une position face à la maladie du proche, ses angoisses,
etc. D’un autre encore, il y a les équipes, les services, le monde institutionnel, son histoire,
son projet de soins, ses règles, les obstacles, les limites.
Je retiendrai alors la notion de « partenaires » utilisée par Elisabeth ZUCMAN en 2011 pour
définir ce que peut être l’accompagnement d’une famille dont l’enfant polyhandicapé relève
de soins palliatifs et le lien qui se crée entre les membres de la famille et les soignants. Les
parents, la fratrie nous enseignent l’histoire de leur enfant et nous transmettent des éléments
sur son vécu, ses habitudes, ses préférences, ses goûts, ce qui peut lui donner du plaisir. Ils
ont aussi un rôle de traducteur et de porte-parole : que signifie tel mouvement ? Comment
exprime-t-il la douleur ? Ils peuvent nous apporter leur savoir-faire avec leur enfant notamment au niveau de la communication. De son côté, le soignant donne des informations sur
l’enfant, à partir de ses observations, de son savoir-faire professionnel et de l’échange avec
ses collègues. Ces transmissions régulières, formelles ou spontanées, concourent à élaborer
ensemble, tout savoir confondu, des idées de projets réalisables pour relever le quotidien
de l’enfant et restituer à la famille sa place à ses côtés.
En guise de conclusion et pour compléter mon propos…
J’ai souhaité aborder la notion de triangulation, développée en psychanalyse, entre autres
par WINNICOTT, et reprise par Elisabeth ZUCMAN dans l’analyse des liens patient-famille¬équipe en situation de polyhandicap.
La première relation triangulaire a lieu normalement dans la relation mère-bébé par la présence d’une figure paternelle comme tiers pour que l’enfant ne soit plus dans une relation
fusionnelle, se vive en tant qu’individu séparé et puisse ensuite s’autonomiser. C’est une
triade père-mère-enfant. Une seconde relation triangulaire a lieu pour l’enfant polyhandicapé : c’est l’intervention des professionnels de santé en tant que tiers, soit patient-familleéquipe soignante. La difficulté rencontrée dans cette triade là, comme le décrit Elisabeth
ZUCMAN, est liée à la notion de dépendance à l’autre et donc de grande proximité quotidienne qui réduit alors l’espace de liberté du patient. On comprend donc que le rôle de
tiers est difficile à tenir dans ce cas puisque le patient est dépendant de la figure soignante.
Partant de ces observations, j’émets alors l’hypothèse que le suivi psychologique de la famille
peut assurer une fonction de tiers nécessaire dans le milieu institutionnel, à condition que
les membres de cette famille en soit demandeur : l’un des rôles du psychologue est de rendre
compréhensible les vécus de chacun (selon les différents niveaux de réalité), soit une triade
patient/famille-psychologue-équipe soignante. En effet, le psychologue recueille la parole
des parents, constituée des éléments psychiques bruts, désirs et fantasmes inconscients.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Puis, il va la transformer, l’élaborer pour ensuite la restituer : en premier lieu aux parents
pour soutenir leur réflexion et, d’une autre façon, tout en respectant la notion de confidentialité, à l’équipe soignante pour une meilleure compréhension de l’autre et un accompagnement singulier du patient.
Abstrats Journées d'Etudes Polyhandicap Imc 2013
Téléchargement