IR Marie_Antoinette_GF_BAT - Éditions Le Cavalier Bleu

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Titre partie
sommaire
Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9
Marie-Antoinette, « LA » reine de France
« Marie-Antoinette est l’Autrichienne. ». . . . . . . . . . . . . . .19
« Marie-Antoinette a eu des relations compliquées
avec sa mère l’impératrice. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
« Marie-Antoinette a été une mère admirable
et moderne. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .41
« Marie-Antoinette fut une “tête à vent”. ». . . . . . . . . . . . .51
Marie-Antoinette, la reine frivole
« Marie-Antoinette jouait à la bergère au Petit Trianon
et au Hameau. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63
« Marie-Antoinette est la reine de la mode. ». . . . . . . . . . . 73
« Marie-Antoinette a créé un style et un art de vivre. ». . . . 83
« Marie-Antoinette a vidé les caisses du royaume. ». . . . . . .93
Marie-Antoinette, la reine du scandale
« Marie-Antoinette a dit : “S’ils n’ont pas de pain,
qu’ils mangent de la brioche !” ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .103
« Marie-Antoinette a eu une sexualité débridée. ». . . . . . . .111
« Marie-Antoinette est l’instigatrice de l’affaire du collier. ».121
« Marie-Antoinette gouverne le roi et la France. ». . . . . . . .131
5
Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
« Marie-Antoinette est responsable de la chute
de la monarchie. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
« Marie-Antoinette a eu un procès inique. ». . . . . . . . . . . .155
« Marie-Antoinette a écrit son testament quelques heures
avant son exécution. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .163
« Marie-Antoinette est morte en martyre. ». . . . . . . . . . . . . 175
« Marie-Antoinette est LA victime de la Révolution
française. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183
Conclusion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .189
Annexes
Glossaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .194
Pour aller plus loin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197
Titre partie
« Marie-Antoinette est responsable
de la chute de la monarchie. »
Car c’est d’abord son Roi et son époux que Marie-Antoinette a trahi
en voulant jouer un rôle qui n’était pas le sien,
en menant des actions dont elle était incapable d’apercevoir
les conséquences. Et c’est en trahissant le Roi
qu’elle a trahi les Français.
Paul et Pierrette Girault de Coursac, Le Secret de la Reine.
La politique personnelle de Marie-Antoinette pendant
la Révolution, 1991
La marche des Parisiennes jusqu’à Versailles, le 5 octobre 1789.
Gravure. Fin du XVIIIe siècle.
La monarchie aurait-elle pu triompher de la Révolution
sans une politique personnelle de la reine ? MarieAntoinette a-t-elle conduit une politique, par définition
secrète, à l’insu du roi Louis XVI ? Aurait-elle été à ce point
insoumise à son époux, roi de France, pour élaborer des
stratégies et des « liaisons » politiques, reposant toutes sur sa
duplicité, ou préparant des plans de fuite dont elle serait à
la fois l’instigatrice, la tête pensante, et l’organisatrice, aux
dépens d’un mari apathique, qui subirait de fait autant le
« torrent de la Révolution » que le machiavélisme d’une
femme prête à tout pour garder le pouvoir et son rang, en
faisant fi des contraintes et des positions de Louis XVI ?
Dans ce cas, Marie-Antoinette serait-elle responsable de la
chute, pas si précipitée, de la monarchie en France ?
Louis XVI, trop souvent dépeint en souverain indécis,
faible, timide, n’a pas été, ou du moins pas seulement, le
jouet d’une reine au caractère fort et manipulateur. Des
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La Reine scandaleuse - idées reçues sur Marie-Antoinette
historiens comme les royalistes Paul et Pierrette Girault de
Coursac qui ont consacré tous leurs travaux historiques à
réhabiliter le roi, font de la reine une petite intrigante,
moche et sale, face à laquelle Louis XVI réagit en monarque
vertueux et très chrétien. Ils vont jusqu’à prétendre que toutes
les correspondances de la reine étaient ignorées de son
mari ; pire, qu’elle aurait fabriqué et signé de fausses lettres
du roi. Ils imputent à la reine la responsabilité de la chute
de la monarchie. Dans la réalité, difficile à établir, la reine
travaille de concert avec le roi. Il sollicite ses conseils en
particulier dans les moments les plus dramatiques, quand
son pouvoir lui échappe. Convaincue de la légitimité du
pouvoir absolu de son mari, elle suit le plus souvent les vues
politiques de Louis XVI. Ces correspondances en témoignent :
l’historien Joël Félix explique que pour comprendre l’évolution des prises de position du roi, la meilleure source est
cette correspondance fleuve que Marie-Antoinette a écrite,
pour sauver, à tout prix, le roi et la monarchie.
À la veille de la Révolution, fait inédit dans l’histoire de
la monarchie absolue, la reine est officiellement conviée
par Louis XVI à assister au Conseil du roi (à partir du
27 décembre 1788). Marie-Antoinette participe donc aux
débats qui occupent et opposent les ministres et proches
conseillers du roi à propos des questions soulevées par la
convocation des futurs États généraux (dont l’ouverture est
prévue le 5 mai 1789). Elle pousse le roi à accorder le doublement du nombre de députés représentant le tiers-état aux
États généraux contre les prétentions aristocratiques qui s’y
opposent formellement (cet appui royal laissera, néanmoins, le tiers-état sans force véritable au moment du vote
par ordre). Par contre, elle refuse, tout comme le roi, l’idée
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Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
âprement défendue par le tiers-état que les votes s’effectuent
par tête et non pas par ordre. Quand le tiers-état, à l’initiative
de l’abbé Sieyès, se proclamera Assemblée nationale (le
17 juin 1789), elle refusera, avec le roi, de reconnaître la légitimité et l’existence même de cette nouvelle représentation
de la Nation, indépendante de la personne et des fonctions
exercées par le roi seul. Elle est partisane de dissoudre
l’Assemblée nationale par la force et approuve la décision de
Louis XVI de masser des troupes, la plupart étrangères, tout
autour de la capitale dès les premiers jours de juillet : l’un
comme l’autre sont convaincus que seule la force armée les
protégera des dangers, réels ou supposés, de la capitale. Au
lendemain de la prise de la Bastille, elle organise et ordonne,
avec le roi, que leurs proches courtisans quittent le royaume
dans les délais les plus brefs. Les effigies de la reine et de certains courtisans ont été brûlées le 15 juillet au Palais-Royal,
comme celles de la duchesse de Polignac, du plus jeune frère
du roi le comte d’Artois, figure de l’Anti-Révolution et
premier membre de la famille royale qui émigre, dans un
premier temps, à la cour de Turin.
Naissance de l’Assemblée nationale (17 juin 1789)
Dès l’ouverture des États généraux (le 5 mai 1789), le pouvoir
royal explique aux députés des trois ordres, réunis dans la salle des
Menus Plaisirs à Versailles, la nécessité de voter de nouveaux
impôts pour sauver la monarchie de la banqueroute. Les députés
du tiers-état, convaincus de représenter la Nation, ne cachent pas
leur profonde désillusion : pas un mot, du roi ou du contrôleur
général des Finances Necker, banquier genevois, sur une possible
constitution écrite du royaume ou sur des réformes en profondeur
de la monarchie. Les députés du tiers exigent, en vain, que la
vérification des pouvoirs des députés ne se fasse pas par ordre
145
La Reine scandaleuse - idées reçues sur Marie-Antoinette
mais en séance plénière et collégiale, et que les délibérations, puis
les votes, aient lieu par tête et non par ordre (certains députés de
la noblesse, et même du clergé, partagent les idées libérales du
tiers-état et renforceraient donc sa position). Les semaines passent
et les États généraux demeurent dans une sorte d’impasse politique jusqu’au 17 juin où, à l’initiative d’un député du tiers, l’abbé
Sieyès, le tiers-état se proclame Assemblée nationale. Le roi, qui ne
peut accepter cette initiative qui, de fait, met à mal son pouvoir,
rappelle le tiers-état à l’obéissance et envoie des troupes chargées
de le surveiller. Il fait fermer, le 20 juin, la salle des Menus Plaisirs.
Pour contourner cette interdiction royale, les députés investissent
la salle du Jeu de Paume, située à quelques rues de la place
d’armes du château. Les députés, qui refusent de céder à la
violence, font le serment de ne pas se séparer tant qu’ils n’auront
pas doté la France d’une constitution écrite.
Trois jours plus tard, le roi tient une séance royale au cours de
laquelle il reconnaît la légitimité de certaines revendications politiques du tiers (à propos de la fiscalité ou de la liberté de la presse
par exemple) mais refuse, obstinément et avec colère, que les
députés délibèrent de façon commune ou qu’ils puissent voter
par tête et non par ordre (il rappelle que remettre en question la
société organisée en ordres, c’est remettre en cause l’existence
même de l’absolutisme politique qu’il incarne). Par ailleurs, il
reconnaît comme « illégales et inconstitutionnelles » les déclarations du tiers tenues depuis le 17 juin. À la fin de son discours, il
ordonne aux députés du tiers de se séparer. Pourtant, ceux-ci
refusent de se lever. Le lendemain, le 24, la majorité des députés
du clergé décide de se rallier au tiers-état, suivis, le 25, de dizaines
de députés de la noblesse. Le 27, c’est le roi lui-même, confronté
à une impasse politique, qui ordonne aux derniers députés nobles
et ecclésiastiques, qui ont refusé l’idée d’une Assemblée nationale,
de se rallier à cette dernière. Le rapport de forces, inédit et désormais irréversible, est en faveur de l’Assemblée et fragilise le pouvoir
ainsi que l’autorité de Louis XVI. Le 9 juillet, l’Assemblée nationale
se proclame « constituante ».
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Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
Suite aux journées d’octobre, quand les Parisiens se
rendent à Versailles pour réclamer du pain, traumatisantes
pour le couple royal qui désormais habite au palais des
Tuileries, Marie-Antoinette tente d’établir des contacts avec
des révolutionnaires et en particulier avec Mirabeau, noble
élu député du tiers-état puis siégeant à l’Assemblée constituante. Cette initiative ne serait pas, à l’origine, celle de la
reine. Contrairement à ce que les biographes de MarieAntoinette, ceux du roi et les historiens de la Révolution
écrivent habituellement, ce serait Louis XVI qui, acculé aux
difficultés politiques, solliciterait l’influence et les réseaux
du comte de Mirabeau, probablement le seul à pouvoir
défendre à l’Assemblée l’idée que le pouvoir de l’exécutif,
donc du roi, soit fort (il défend l’idée d’un veto royal
absolu). Si Marie-Antoinette, devenue « Madame Veto »,
est l’objet de tous les propos diffamatoires et avilissants,
dans ce contexte de la liberté de la presse enfin accordée, elle
est néanmoins plus libre d’agir et d’établir des contacts officieux puisqu’elle ne joue pas, a priori, de rôle politique dans
cette monarchie pressée par la Révolution. La personnalité,
le physique et la réputation de Mirabeau répugnent profondément la reine, et le roi. La cour le soupçonne d’être l’un
de ceux qui ont fomenté les journées d’octobre. Proche du
duc d’Orléans, Mirabeau a longtemps défendu l’idée que,
pour sauver la monarchie, il fallait que le duc monte sur le
trône à la place de son cousin Louis XVI.
Par l’intermédiaire du comte de La Marck, MarieAntoinette fait savoir à Mirabeau que le pouvoir royal
recherche ses conseils ainsi que son appui auprès des députés
et autres partisans de la Révolution. Profitant du voyage de
la famille royale au château de Saint-Cloud (dans lequel elle
147
La Reine scandaleuse - idées reçues sur Marie-Antoinette
résidera tout l’été 1790), la reine rencontre le célèbre tribun,
le 3 juillet vers huit heures du matin. Contrairement à ce
qui est le plus couramment écrit à propos de cette rencontre
secrète, le roi est également présent dans les jardins du
château (la reine aurait même exigé auprès du comte de La
Marck que le roi soit bien présent, effrayée qu’elle était de
rencontrer Mirabeau). Marie-Antoinette en témoigne dans
l’une de ses nombreuses lettres qu’elle envoie à son frère
Léopold II, le nouvel empereur d’Autriche : « J’ai donc vu
le monstre à une entrevue secrète avec une émotion à être
malade […]. Le roi était auprès de moi et a été fort content
de M., qui lui a paru de la meilleure foi et tout à fait
dévoué ; on croit tout sauvé. » À la fin de cet entretien,
Mirabeau s’engage à défendre la monarchie et à tout faire
pour que le pouvoir du roi soit renforcé par rapport à celui
de l’Assemblée. En échange, le couple royal lui versera des
sommes colossales : Mirabeau, toujours à court d’argent, se
vantait à la veille de sa mort de vivre dans un luxe impayé et
d’être incapable de verser leurs gages à ses domestiques.
Mirabeau a enfin obtenu ce qu’il briguait depuis des mois,
d’être le conseiller officieux de Louis XVI et MarieAntoinette. Il aurait dit, mais ce dire est probablement
faux : « Le roi n’a qu’un seul homme, c’est sa femme. »
Cette collaboration officieuse et coûteuse sera de courte
durée : devenu plus qu’impopulaire, Mirabeau décède en
avril 1791.
Si l’idée et la nécessité de la fuite avaient été suggérées au
roi à plusieurs reprises par des ministres, des conseillers et
par la reine (au lendemain de la prise de la Bastille ou le
5 octobre 1789 quand les Parisiens ont envahi Versailles),
Louis XVI s’y était alors opposé. C’est le roi qui finit par se
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Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
résoudre à fuir la capitale. Plusieurs plans lui sont soumis,
dont celui préparé par Marie-Antoinette et Fersen. Persuadé
que Paris n’est pas la France et que les provinces ne pourraient être acquises à la Révolution et à ses idées, il souhaite
gagner Metz et la frontière Est afin que les troupes du marquis de Bouillé et celles de l’Autriche postées à la frontière
(l’empereur Léopold II a envoyé des troupes aux Pays-Bas
pour mater des troubles d’insoumission à son autorité) s’organisent pour faire un coup de force. Les troupes seraient
aidées par les forces populaires de province, et rétabliraient
ainsi le roi dans ses pleins pouvoirs, ceux d’avant juin 1789.
Si tous les détails de la fuite ont été préparés par la reine et
Fersen, c’est bien le roi qui en ordonne l’exécution. Il n’est
pas donc ce souverain benêt ou manipulé par une MarieAntoinette intrigante et toute puissante.
Après l’épisode humiliant pour le roi et la monarchie de
cette fuite manquée, arrêtée à Varennes, la reine entame une
correspondance assidue avec Barnave (de juillet 1791 à janvier 1792), l’un des trois députés chargés par l’Assemblée
de ramener, et protéger, la famille royale à Paris. MarieAntoinette le reçoit régulièrement aux Tuileries, et dans le
plus grand secret. Barnave fait œuvre de pédagogie auprès
de la reine pour lui expliquer en quoi le roi doit impérativement accepter la future Constitution. Louis XVI était au
courant de cette correspondance secrète entre le député et sa
femme, il lui aurait même probablement suggéré d’entamer
un tel échange épistolier et politique. Barnave, de son côté,
outre l’idée de gagner le roi à la cause constitutionnelle, espère
que la reine convaincra l’empereur d’Autriche de reconnaître
la légitimité de la monarchie parlementaire, une fois que
Louis XVI aura signé la Constitution (septembre 1791).
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La Reine scandaleuse - idées reçues sur Marie-Antoinette
C’est après l’épisode de Varennes, quand l’Assemblée
suspend les pouvoirs de Louis XVI, et quand ce dernier rentre
dans un état de torpeur préoccupant pour son entourage,
que Marie-Antoinette joue un rôle politique de premier
ordre. Elle devient un véritable ministre pour le roi, entourée
de plusieurs conseillers secrets à son service (ce dont témoignent
ses nombreuses correspondances avec Fersen ou MercyArgenteau par exemple). À partir de juillet 1791, suite à la
fusillade du Champ-de-Mars (le 17), des voix s’élèvent pour
contester la légitimité de la royauté, même de nature constitutionnelle. L’idée que la France révolutionnaire entre en
guerre contre les principales puissances monarchiques gagne
peu à peu les députés (seul Robespierre se prononcera contre
la guerre). Le roi, poussé par la reine, défend cette idée belliqueuse : il déclare la guerre, au nom de la Nation, le 20 avril
1792 à l’Autriche. Il se laisse convaincre par MarieAntoinette de lui donner les plans de bataille français pour
qu’elle puisse les communiquer aux armées coalisées contre
la France. Très vite, les révolutionnaires soupçonnent le
couple royal d’un double jeu politique. Louis XVI et MarieAntoinette sont bien convaincus que la France en révolution, est incapable de se battre contre l’Autriche en raison de
la désorganisation profonde de son armée (un grand nombre
d’officiers fait le choix de l’émigration) et de l’état dramatique
des finances. De plus, les ministres girondins que Louis XVI
a nommés, rentrent très vite en opposition ouverte avec le
souverain : ce dernier refuse la loi sur la déportation des
prêtres réfractaires. Pour les Clubs politiques*, en particulier
celui des Cordeliers, il s’agit de montrer la duplicité du
roi qu’ils considèrent comme la marionnette du « comité
autrichien », présidé par Marie-Antoinette.
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Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
La journée du 20 juin 1792 fut une épreuve traumatisante
pour la reine : elle est bien consciente qu’elle a échappé de
peu à la mort. Profondément isolée, ne pouvant compter sur
le roi complètement abattu depuis des mois, elle prend
l’initiative, par l’intermédiaire du comte Fersen, d’exiger
des puissances coalisées contre la France, l’Autriche et la
Prusse, la rédaction d’un texte d’une agressivité inouïe à
l’égard de la Révolution et de ses représentants. Rédigé par
un émigré depuis Coblence, ville où la Contre-Révolution
tente de s’organiser, le manifeste signé par le duc de
Brunswick, commandant des troupes autrichiennes et prussiennes, précise que : « si le château des Tuileries est forcé
ou insulté, que s’il est fait la moindre violence, le moindre
outrage à leurs Majestés, le roi, la reine et la famille royale,
elles en tireront une vengeance exemplaire et à jamais
mémorable, en livrant la ville de Paris à une exécution
militaire et à une subversion totale, et les révoltés coupables
d’attentats aux supplices qu’ils auront mérités. »
Le manifeste met le feu aux poudres : si Paris est terrorisée
à la lecture de ce texte publié au début du mois d’août 1792,
les représentants de la Nation n’acceptent pas la menace et
l’intimidation armées. À l’Hôtel de ville, un comité insurrectionnel prépare la chute de la monarchie : les 7 000 soldats
des troupes de Fédérés s’allient aux sections parisiennes et se
dirigent, au son du tocsin, vers les Tuileries. Pour éviter les
tueries, Louis XVI accepte de se réfugier avec sa famille dans
la salle du Carrousel où siège l’Assemblée nationale. Le feu
nourri échangé entre les Suisses, soldats chargés de défendre
le palais, les Fédérés, la garde nationale et le peuple en armes,
fait néanmoins tomber la monarchie dans un véritable bain
de sang.
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La Reine scandaleuse - idées reçues sur Marie-Antoinette
Marie-Antoinette, la reine de la Révolution
légitime (et légale), celle de l’absolutisme. Quand MarieAntoinette trahit la Nation, consciemment et toujours en
accord avec le roi, en communiquant les plans de bataille de
la France aux puissances étrangères coalisées contre la
Révolution, elle le fait en toute quiétude, convaincue que
tous les moyens sont bons pour sauver, à tout prix, la
monarchie.
Madame Royale, le dauphin, Marie-Antoinette, Louis XVI et Mme Élisabeth.
Gravure
La politique que Marie-Antoinette a menée pour sauver
la monarchie et le pouvoir de Louis XVI, ne fut ni personnelle
ni cachée à son époux. Tout au contraire. Quand le roi lui
confie des démarches politiques, comme celle de rentrer en
contact avec les personnalités de la Révolution un temps les
plus influentes (Mirabeau puis Barnave) ou celle d’échanger
des correspondances stratégiques et dangereuses (avec les
empereurs d’Autriche ou le comte Fersen), la reine le fait
parce qu’elle est, logiquement, moins exposée que le roi à la
surveillance de la Révolution. Quand Louis XVI s’enfonce
dans la dépression, elle réagit en femme qui ne renonce, en
aucun cas, à la culture politique dans laquelle elle est née,
qu’elle incarne depuis des années et qu’elle considère,
comme le roi par ailleurs, comme la seule pensée politique
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