4-A PROPOS DE L’ŒUVRE :
Lili Marleen a eu un parcourt très chaotique comme le révèle la chronologie de son histoire :
-1- Le texte.
En avril 1915, avant son départ pour le front russe, le jeune élève-officier Hans Leip, écrit le
poème «Lied eines jungen Wachpostens» Chanson d'une jeune sentinelle »).
-2- L’échec commercial.
En 1939, Lale ANDERSEN enregistre une adaptation musicale de ce poème composée par
Norbert SCHULTZE. Le disque n’est vendu qu’à 700 exemplaires.
-3- Le second souffle.
En 1941, la chanson oubliée est retrouvée et diffusée par la radio militaire allemande. Elle
devient un succès auprès des troupes de la Wehrmacht éloignées de leurs foyers.
-4- L’interdiction.
Joseph Goebbels, ministre de la propagande, tente d’abord de l’interdire sous prétexte
qu’elle ramollirait l’ardeur des soldats sur le front. Mais la chanson est fendue en haut lieu par
des gens influents comme Erwin Rommel (le Renard du désert).
-5- Premier détournement.
Ne parvenant ni à interdire, ni à détruire la chanson, la propagande nazie va tenter de la
récupérer. Goebbels oblige Lale Andersen à la chanter en anglais dans les territoires occupés, afin
d’affaiblir le moral des troupes alliées. Mais contre toute attente, la chanson devient un succès
auprès des soldats britanniques qui la réclament autant que les soldats allemands.
-6- Une chanteuse condamnée.
Suite à son refus d’interpréter la chanson à Varsovie, Lale Andersen est interdite de scène et
de radio par la Gestapo.
-7- Deuxième détournement.
Cyniquement, Goebbels détourne alors une seconde fois la chanson d’amour en la parodiant sous
la forme d’une marche nazie guillerette que les Einsatzgruppen (groupes d'intervention du IIIème
Reich) diffusent pendant leurs missions d’extermination de masse des populations civiles.
A écouter sur le site : !""#$%%&&&'()*"*+,'-).%&/"-!012343567(89:;
-8- La revanche.
En 1943 la chanteuse antinazie Marlène Dietrich qui s’était exilée aux Etats-Unis,
transforme cette chanson en hymne à la liber: le disque interdit par Goebbels devient alors un
succès mondial.
Musiques et musiciens ayant souffert de l’idéologie nazie
!L’extermination des ennemis du Reich passait aussi par l’extermination de la culture. En témoigne
l’affiche de l’exposition de Düsseldorf de 1938 "Entartete musik" musique dégénérée »)
Entre 1933 et 1945, les Nazis appelaient "Musique dégénée" toute musique qui ne
correspondait pas aux normes de l’art officiel et qui s’éloignait de l’idéal aryen, de la « race » dite
supérieure. Dans sa jeunesse, Hitler était un artiste raté, ayant une culture musicale lacunaire, il
désignait donc comme « dégénérée » :
- la musique des années trente, qui allait de la musique atonale (Arnold Schoenberg,
Igor Stravinsky), au jazz (George Gershwin)
- toute musique qui ne se prêtait pas à la récupération politique ou à la propagande (c’est le cas
de « Lili Marleen »)
- toute musique non germanique ou de compositeur juif.
Paru en 1934, le "Lexique des juifs en musique" recensait tous les musiciens "juifs" ou
"demi-juifs". Les nazis pouvaient ainsi plus facilement les persécuter et interdire leur musique.
Y figurait de grands noms de la musique occidentale comme Félix Mendelssohn-Bartholdy
(1809/1847). Ainsi, sa Marche nuptiale (extraite de la musique de scène du "Songe d’une
nuit d’été") très populaire grâce au cinéma, a été détrônée pendant le IIIème Reich par celle de
l’opéra "Lohengrin" de Richard WAGNER (1813/1883), le compositeur fétiche d’Adolphe Hitler.
Depuis la mort du Führer, la marche nuptiale de Mendelssohn est redevenue incontournable dans
les cérémonies de mariage et cohabite avec celle de Wagner.
Une musique au service de l’idéologie nazie
!
"La musique est le seul, de tous les arts, qui ait collaboré à l’extermination des Juifs organisée par les Allemands
de 1933 à 1945…c’est en musique que ces corps nus entraient dans la chambre
…Le fascisme est lié au haut-parleur… "
(« La haine de la musique » de Pascal Quignard, 1996, les éditions Calmann-Lévy.)
Hitler vouait un culte à la Tétralogie de Richard Wagner ""L'Anneau du Nibelung "
est un cycle de 4 opéras : l’Or du Rhin, La Walkyrie, Siegfried, Le Crépuscule des dieux# dont le livret,
inspiré des légendes germaniques et du mythe du surhomme, a été récupéré par la doctrine
nationaliste nazie. « Nacht und Nebel niemand gleich ! » (« Nuit et brouillard, plus personne ! ») est une
expression du nain Alberich dans « l’Or du Rhin » que les nazis utiliseront dans un décret de 1941
pour faire disparaître les déportés.
Les œuvres de Wagner étaient diffusées en Allemagne partout et par tous les moyens de
l’époque : concerts symphoniques, émissions de radio, fanfares. Même les camps de la mort
possédaient leurs propres orchestres qui accompagnaient les déportés marchant vers les chambres à
gaz et les charniers. En 1993, le cinéaste juif Woody Allen aura cette célèbre réplique dans son film
« Meurtre mystérieux à Manhattan » : « Quand j’écoute trop Wagner, j’ai envie d’envahir la Pologne ! »
Les films de propagande nazie ont utilisé la Chevauchée des Walkyries (Prélude du
3ème acte de l’opéra « Die Walküre ») pour glorifier les attaques aériennes de la Luftwaffe.
En 1979 Francis Ford Coppola s’en inspirera dans son film « Apocalypse now » où il utilisera
cette même page de « la Walkyrie » pour accompagner les raids sanguinaires des hélicoptères
américains sur les villages vietnamiens.
La Tétralogie a beaucoup influencé le cinéma d’aventure où le caractère héroïque des scènes
d’action est rehaussé par un orchestre symphonique imposant et où les objets, les idées et les
personnages sont habillés de motifs musicaux appelés LEITMOTIVS. Ainsi John William a
parsemé sa musique pour « Star Wars » de motifs conducteurs à la manière de Richard Wagner.
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Die Walküre
Deuxième opéra de la TÉTRALOGIE
« La Walkyrie » est le deuxième des quatre drames lyriques (littéralement : pièces de théâtre
chantées ou opéra) qui constituent Der Ring des Nibelungen (L'Anneau du Nibelung) du
compositeur allemand Richard Wagner (1813-1883). L’œuvre fut crée à Munich en 1870.
La Walkyrie dans la mythologie
L'étymologie de Walkyrie signifie « qui choisit les abattus ». Dans la mythologie nordique, les
Walkyries étaient des divinités guerrières. Revêtues dune armure, elles volaient à cheval au-dessus
des batailles en distribuant la mort parmi les guerriers, puis elles emmenaient l’âme des héros au
Walhalla, le paradis des Vikings.
« Walkyries » de Johannes Gehrts (1855-1921)
La Chevauchée des Walkyries
Cette pièce symphonique est le prélude du IIIème acte de l’opéra « La Walkyrie ». Le rythme
dactylique du thème principal accompagne la chevauchée céleste des déesses guerrières.
Les descentes chromatiques évoquent les cavalières plongeant du ciel pour ramasser les corps
des guerriers morts au combat.
A écouter et voir sur le site : !""#$%%&&&'()*"*+,'-).%&/"-!0123456/7898:&;<,/"*=,2=,>/",8?
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?La Walkyrie et le IIIème Reich
Adolphe Hitler adulait cette œuvre de Wagner pour son caractère épique magnifiant le courage
et l’esprit de sacrifice qu’il exigeait de tous ses soldats. « Walkyrie » est également le nom de code
d’un plan approuvé par le Fürher et initialement conçu pour mobiliser l’armée de réserve lors de
troubles intérieurs. En juillet 1944, des résistants allemands tenteront un coup d’Etat en retournant
le plan Walkyrie contre Hitler. Un film éponyme de 2008 retrace ce complot historique qui échoua.
5-LE CARACTERE :
Chaque version de « Lili Marleen » exprime un caractère qui lui est propre et évoque des
sentiments très différents selon ses interprétations : chanson d’amour pour les uns, de guerre ou de
propagande nazie pour d’autres et enfin hymne à la liberté.
1) La version de Marlene Dietrich a un caractère langoureux et sentimental parce
que :
- le rythme de la mélodie est rubato dérobé », sans rigueur, souple), et syncopé (décalé par
rapport à la pulsation de l’accompagnement)
- son phrasé (son articulation) est legato, (les notes sont liées)
- l’harmonisation (l’art de combiner simultanément des sons différents) est celle des duos amoureux : un
contrechant parallèle (ici instrumental), à la tierce de la mélodie principale, jusqu’à la dernière
phrase où les deux voix se retrouvent à l’unisson
- une formation instrumentale comprenant un orchestre à cordes et un piano l’accompagne.
2) La version parodiée par la Gestapo est martiale, sautillante et guillerette parce
que :
- son rythme pointé rigoureux (c’est un rythme de marche) est marqué par un phrasé
staccato très sec (les notes sont détachées)
- la formation instrumentale et vocale est constituée d’une fanfare (cuivres et percussions,
familiers des défilés militaires) accompagnant un chœur masculin.
6-L’ANALYSE TECHNIQUE :
Le type d’écriture :
C’est une monodie accompagnée avec un contrechant (ou contrepoint)
homorythmique parallèle à la tierce : les deux parties progressent parallèlement et sont
espacées d’un intervalle de tierce (trois notes), sauf la dernière phrase qui est homophone.
L’écriture est verticale car les deux voix chantent simultanément des notes différentes.
L’accompagnement instrumental est écrit au-dessus de la portée : les accords utilisent une
notation simplifiée anglo-saxonne :
C : accord de Do majeur,
Am7 : accord de La septième mineure,
Dm7 : accord de septième mineure,
G7 : accord de Sol septième de dominante, etc.
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