La mise en place du monde
bipolaire de la guerre
froide, 1947-1949
Chapitre 1
Documents
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Naples subit d’intenses bombardements, anglais en
1940 et 1941, américains en 1942 et 1943, allemands
en 1943 et 1945. Quelles en sont les conséquences ?
Que nous apprend cette photographie sur l’Italie de
1947 ?
Logement de fortune à Naples en 1947
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Le « Mémorandum Clayton »
1
Notes préparées par William L. Clayton, sous-secrétaire d’État au
Trésor, envoyé par le président des États-Unis Harry S. Truman
pour évaluer la situation en Europe en 1947.
Les rênes de la direction des affaires du monde glissent de
plus en plus vite des mains de la Grande-Bretagne, compé-
tentes, mais aujourd’hui fort affaiblies.
Ces rênes seront reprises par les États-Unis ou par la Russie.
Si c’est par la Russie, il est pratiquement certain qu’il y aura
une guerre dans la décennie à venir, mais les chances seront
contre nous. Si c’est par les États-Unis, il est pratiquement
certain qu’on peut empêcher la guerre.
Les États-Unis doivent rapidement prendre la tête des affaires
mondiales, pour éviter le désastre.
Mais les États-Unis ne prendront pas le leadership mondial
s’il ne se produit pas un choc qui y contraigne le peuple des
États-Unis.
Pour produire ce choc, la seule chose qu’ont à faire le
Président et le Secrétaire d’État est de dire la vérité et la vérité
tout entière.
[…] À l’intérieur de tous les pays du monde oriental et dans
presque tous les pays du monde occidental, la Russie se livre à
un travail de sape.
Nous n’avons pas encore appris à faire face à cette technique
nouvelle. Mais il faut apprendre, et vite, sinon nous allons
nous trouver devant le plus grand danger de notre histoire.
Plusieurs nations dont l’intégrité et l’indépendance sont
vitales à nos intérêts et à notre sécurité sont au bord du gouffre
et peuvent être subverties d’un instant à l’autre. D’autres sont
gravement menacées. Si la Grèce, puis la Turquie tombent, le
Moyen-Orient tout entier est perdu.
La France pourrait alors capituler devant les communistes.
Si la France y passe, l’Europe occidentale et l’Afrique du
Nord y passeront. Cela ne doit pas arriver.
Il n’est pas fatal que cela arrive.
Le Secrétaire d’État* part pour Moscou. Il n’y a aucune
chance qu’il obtienne là-bas un résultat positif. […]
Nous devons foncer de toutes nos forces dans cette poli-
tique mondiale ou alors, si nous restons chez nous, consa-
crons intelligences et énergies à la préparation de la Troisième
Guerre mondiale. […]
Je pense que le Président et le Secrétaire d’État devraient
faire une déclaration commune adressée au Congrès et au
peuple américain, disant que :
1. Les États-Unis sont prêts à préserver la paix par tous les
moyens honorables. […]
4. Les attaques portées à l’intégrité et à l’indépendance d’un
pays peuvent provenir de l’extérieur ou de l’intérieur. […]
5. Les Nations unies sont organisées en vue de prévenir les
attaques externes, mais non internes. […]
7. Ces attaques, renforcées par la faim, la misère écono-
mique et la frustration, ont déjà rencontré le succès dans cer-
tains pays libérés ; le danger est maintenant grave qu’elles le
rencontrent dans d’autres pays. […]
9. L’assistance [apportée à ces pays] par les États-Unis ne
sera pas uniquement financière, mais aussi technique et admi-
nistrative […].
11. De surcroît, on demande au Congrès de prévoir la
somme de cinq milliards de dollars […] pour aider les pays
souverains à sauvegarder leur intégrité et leur indépendance.
* Ministre des Affaires étrangères aux États-Unis.
Selon William Clayton, quelle est la situation en Europe
en 1947 ? Quelles menaces repère-t-il ? Quelles solutions
propose-t-il ?