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banques à privilégier l'épargne longue. Tirant les leçons de la crise financière, la
future règlementation de Bâle 3 renforce en effet considérablement leurs
contraintes de liquidité.
Volant au secours des établissements, le gouverneur de la Banque de France,
Christian Noyer, avait alors invité le gouvernement à faire preuve de «beaucoup
de prudence» dans les modalités de ce relèvement «pour ne pas déstabiliser le
financement des entreprises, le financement des ménages, le financement de la
dette publique» en provoquant un flux de capitaux vers ces livrets. Avec sa
rémunération (actuellement de 2,25%), le principal intérêt de ce produit
d'épargne populaire est d'être exonéré de toute fiscalité.
Dans un communiqué diffusé hier après-midi, la Fédération bancaire française
(FBF) réitère cette critique: elle «rappelle que cette mesure aura un impact
négatif sur la capacité des banques françaises à financer l'économie car les fonds
provenant de la collecte du Livret A ne sont pas utilisables à cet effet, alors
même qu'une nouvelle directive européenne impose aux banques d'avoir des
liquidités plus importantes pour continuer à faire du crédit aux particuliers et aux
entreprises. [...] Il est crucial que l'épargne des Français, qui est d'un montant
élevé, soit mieux orientée au service du financement à long terme de l'économie,
par une action résolue en faveur de l'épargne longue».
La forte augmentation de la collecte du Livret A depuis le début de l'année
apporte de l'eau au moulin des détracteurs de la mesure: selon les derniers
chiffres de la CDC, la collecte au cours des sept premiers mois de l'année s'est
élevée à 13,3 milliards d'euros, portant les encours totaux à 230,2 milliards
d'euros.
En outre, les ressources des fonds d'épargne gérés par la CDC atteignaient déjà
153% des prêts au logement social fin 2011, couvrant largement le ratio
minimum de 125% requis par la loi. Tirant argument de ce constat, la FBF
«s'interroge sur l'efficacité de cette mesure d'encouragement à l'épargne courte».
A l'opposé, le gouvernement estime qu'une telle surallocation est nécessaire aux
objectifs futurs du gouvernement en terme de construction de logements.
Il est difficile d'anticiper l'ampleur des transferts d'épargne craints par les
banques: en effet, seuls 8,5% des livrets A avaient atteint leur plafond fin 2011.
Mais les banques devront remplacer la ressource de bilan en se finançant sur les
marchés.
En juin dernier, le cabinet Roland Berger avait situé le surcoût d'un doublement
du plafond dans une fourchette comprise entre 480 et 730 millions d'euros. Une
hausse de 50% en deux fois aura toutefois nécessairement un effet moindre.
Mais il faudrait aussi prendre en compte, le cas échéant, l'effet qu'aurait une
baisse du taux de commissionnement versé aux réseaux par la CDC; un recul de
20 points de base, à 0,3% de l'encours, comme l'avait laissé entendre avant l'été
Cécile Duflot, la ministre du Logement, provoquerait un manque à gagner
supplémentaire évalué entre 380 et 540 millions d'euros.