Adam Smith (1723-1790) Adam Smith est le maître à penser de l'école classique, dont les principes reposent sur la valeur travail (tout bien n’a de valeur que par rapport au travail qu’il incorpore). Pour lui, la seule source de richesse, pour le peuple comme pour l'État, est le travail. I. Eléments de biographie Né au sein d'un milieu aisé, Adam Smith est élevé par sa mère – car son père est mort deux mois avant sa naissance. Doué pour les mathématiques, l'adolescent se passionne aussi pour la philosophie, qu'il découvre à travers l'œuvre de Hume. Entre 1751 et 1764, il étudie la philosophie morale à Glasgow, alors pénétrée par le mouvement des Lumières. En 1764, il entreprend un « grand tour » d'Europe. À Genève, il est reçu par Voltaire et, à Paris, où il séjourne durant l'année 1765. Il rencontre des Encyclopédistes et des économistes comme François Quesnay et Turgot. Le philosophe devient alors théoricien économique. Il publie, le 9 mars 1776, à Londres, Les Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations. L'ouvrage, articulé autour du concept de richesse nationale, exerce une influence immédiate sur le gouvernement britannique. II. Notions clés de l’auteur - La division du travail. D’après Émile Durkheim, (De la division du travail social, 1893), elle désigne la répartition des activités productives, entre des groupes spécialisés dans des activités complémentaires. La richesse des nations « naît de la division du travail ». Pour construire sa thèse, il analyse la répartition des tâches productives dans une manufacture d'épingles. La division du travail augmente l'habileté des ouvriers, ce qui permet de supprimer les temps morts. Chaque individu, après une période d'apprentissage, doit se vouer à une activité qui sera l'unique occupation de sa vie. Naturellement, chacun d’entre nous possède une fibre marchande, et la société elle-même se transforme en société commerçante. - Avantages absolus. Cette notion économique désigne, pour un pays, l'avantage qu'il détient sur un autre lorsque, pour un bien, sa production par unité de facteur est supérieure aux autres pays. Smith élargit même sa réflexion à un cadre international en formulant la loi dite « des avantages absolus » : chaque pays doit se spécialiser dans les productions qu'il réalise à coûts plus faibles que les pays étrangers. Il suffit ensuite d'importer les produits confiés à d’autres pays grâce aux recettes tirées des exportations. Le marché concurrentiel permet la régulation de l'activité économique et autorise ainsi la satisfaction des besoins collectifs. - Le marché autorégulateur. Le marché s’autorégule et maximise la production. Le consommateur et le producteur, cherchant leur intérêt individuel, participe à l'amélioration de la société. Pour permettre la croissance des richesses, le marché est autorégulateur, et l'économie ne doit pas être gênée par l'État. Mais Smith attribue trois missions à ce dernier : une mission de défense, une mission de justice et une mission de production de biens à usage collectif (fonctions régaliennes de l’Etat). - La Main invisible. Dans le domaine socio-économique, c’est une expression, due à Adam Smith, évoquant l'idée que des actions guidées uniquement par l'intérêt personnel de chacun, peut contribuer à la richesse et au bien-être de tous. L'offre et la demande sont respectivement la quantité de biens ou de services que les acteurs sur un marché sont disposés à vendre ou à acheter en fonction des prix. C’est cette loi qui permet de réguler la société. - Théoricien du libéralisme. Les rapports entre le capital et le travail permettent de comprendre la société moderne, qui, selon Smith, n'est plus tant divisée entre riches et pauvres qu'entre capitalistes et non capitalistes : l'échange du travail contre le salaire, et donc le développement du salariat, repose sur un échange du travail contre le capital – ce qui est un des fondements de l'économie politique. L'importance d'Adam Smith tient aussi au contexte économique dans lequel ce dernier mena sa réflexion : la révolution industrielle. Elle commence alors en GrandeBretagne, ce qui provoqua l'apparition d'un type de main-d'œuvre adaptée aux nouvelles industries et une ouverture des économies. Le libéralisme qui accompagnait cette révolution avait alors en Adam Smith son auteur de référence pour partir à la conquête du monde. III. Citations extraites des Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Adam Smith Smith et le marché autorégulateur : « L’homme d’État qui tenterait d’ordonner aux particuliers la manière d’employer leurs capitaux non seulement se chargerait d’un soin très superflu, mais encore assumerait une autorité qui ne pourrait être confiée avec sûreté à aucun conseil ni sénat, et qui ne serait nulle part si dangereuse qu’entre les mains d’un homme assez fou et assez présomptueux pour se croire capable de l’exercer. » Smith et la main invisible : « Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu’ils apportent à la recherche de leur propre intérêt. Nous ne nous en remettons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme. » « Chaque individu ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté [...], et ne pense qu'à son propre gain; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions. » « Chaque individu travaille nécessairement à rendre aussi grand que possible le revenu annuel de la société. » Smith, la pauvreté et les inégalités : « Assurément, on ne doit pas regarder comme heureuse et prospère une société dont les membres les plus nombreux sont réduits à la pauvreté et à la misère. La seule équité, d’ailleurs, exige que ceux qui nourrissent, habillent et logent tout le corps de la nation, aient, dans le produit de leur propre travail, une part suffisante pour être eux-mêmes passablement nourris, vêtus et logés. » « Aucune société ne peut prospérer et être heureuse, dans laquelle la plus grande partie des membres est pauvre et misérable. » « Tout pour nous et rien pour les autres, voilà la vile maxime qui paraît avoir été, dans tous les âges, celle des maîtres de l’espèce humaine. » « Les membres d’une même industrie se rencontrent rarement par plaisir ou pour se divertir, mais leur conversation aboutit invariablement sur une conspiration contre l’intérêt général ou sur un accord pour augmenter leur prix. » Smith et la valeur-travail : « Ce que chaque chose coûte réellement, à celui qui veut se la procurer, c’est le travail et la peine qu’il doit s’imposer pour l’obtenir. » « Si un pays étranger peut nous fournir une marchandise à meilleur marché que nous ne sommes en état de l’établir nous-mêmes, il vaut bien mieux que nous la lui achetions avec quelque partie du produit de notre propre industrie, employée dans le genre dans lequel nous avons quelque avantage. » « Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d’une manière bien plus efficace pour l’intérêt de la société, que s’il avait réellement pour but d’y travailler. » Smith et l’épargne : « Mais le principe qui nous pousse à épargner, c’est le désir d’améliorer notre sort ; désir qui en général, à la vérité, est calme et sans passion, mais qui naît avec nous et ne nous quitte qu’au tombeau. » IV. Texte sur la Main Invisible « A la vérité, son intention en général n'est pas en cela de servir l'intérêt publie, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté; et en dirigeant cette industrie de manière que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de commerce, à travailler pour le bien général, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très-commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guérir. » Adam Smith (1776), Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations. V. Sujets possibles Expliquer le rôle des pouvoirs publics en matière de consommations collectives à partir des travaux d'Adam Smith. (Spécialité, épreuve composée) Quels sont les effets de la division du travail ? (Tronc commun, dissertation) Quel est le rôle de l’Etat dans la pensée d’Adam Smith ? (Spécialité, épreuve composée) D’après le texte ci-dessus et grâce à vos connaissances personnelles, montrer les effets d’une régulation marchande ? (Spécialité, épreuve composée) Tout peut-il être marchandise ? (Philosophie) Le marché est-il une garantie de liberté du sujet ? (Philosophie)