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4GRESEAÉchos N°37
Janvier-février-mars 2003
Un rapport
controversé
que ce plaidoyer pour une politique
tournée vers les exportations non seu-
lement soulève les questions de fond
et d’opportunité politique (comme
soutien apparent aux thèses de
l’OMC), mais est entouré de telle-
ment de “conditions” pour qu’il
devienne réalité, qu’il apparaît un peu
surréaliste.
Un large tour d’horizon
Si la question de la promotion des
e x p o rtations des pays en voie de
développement comme moyen de
réduire la pauvreté reste très contro-
versée, il y a dans le document
d’Oxfam International un large tour
d’horizon des autres problèmes que
posent les rapports Nord-Sud.
Oxfam International montre, à juste
titre nous semble-t-il, que les pays du
Nord ont de facto “triché” pour ce qui
c o n c e r ne l’Accord Multifibres et
continuent à biaiser pour ce qui
concerne les subventions aux expor-
tations des produits agricoles.
La question du rôle des multinatio-
nales est abordée par un examen cri-
tique de ce que signifient pour le Sud
les Investissements Directs Etrangers
: le caractère insuffisant des codes de
conduite adoptés par un cert a i n
nombre de multinationales conduit
Oxfam International à proposer en la
matière une réglementation contrai-
gnante. “ Les gouvernements du Nord
devraient établir (en suivant leurs
directives pour les Entreprises multi-
nationales) des mécanismes plus effi-
caces pour l’analyse, le contrôle et le
suivi, afin de tenir les entreprises mul-
tinationales responsables de leurs
actions dans les pays en développe-
ment”.
Les gouvernements, estime encore
Oxfam International, devraient éta-
blir un protocole international juridi-
quement contraignant, basé sur les
Principes des Nations Unies sur les
Droits humains pour les Entreprises
commerciales (actuellement à l’état
de projet) afin de régir la production,
le commerce et la consommation.
Le rapport d’Oxfam aborde égale-
ment les règles du commerce interna-
tional et en particulier celles de
l’OMC. “De bonnes règles en matière
de commerce international peuvent
créer un cadre favorable à la diminu-
tion de la pauvreté. De mauvaises
règles auront l’effet inverse. Elles peu-
vent empêcher les gouvern e m e n t s
d’élaborer les stratégies nécessaires
pour faire ouvrir le commerce en
faveur des pauvres. Nombre des dis-
positions de l’OMC sont de mau-
vaises règles”.
Et le rapport de critiquer en particu-
lier l’accord ADPIC (sur la propriété
intellectuelle) et les accords AGCS
sur le commerce des services. A pro-
pos de l’ADPIC par exemple Oxfam
International déclare que : “L’accord
ADPIC constitue un acte de fraude
institutionnalisé sanctionné par les
règles de l’OMC… Les pays en déve-
loppement perdront près de 40 mil-
liards de dollars par an, sous forme de
paiements de licences supplémen-
taires aux entreprises transnationales
basées dans les pays du Nord”.
Le rapport aborde également la ques-
tion des matières premières et, last
but not least, la nécessité des
réformes nationales (comme la réfor-
me agraire, les inégalités de reve-
nus…) au niveau de chaque pays en
voie de développement.
De la nécessité du
dialogue
Les thèmes du rapport d’Oxfam
International sont vitaux et c’est donc
une bonne chose qu’une organisation
aussi importante qu’Oxfam
International aie mis noir sur blanc ce
qu’elle en pense et ce qu’elle pense
qu’il faut en faire. Même si dans plu-
sieurs domaines, les orientations pro-
posées sont et doivent être contes-
tées.
Il n’empêche que la communauté des
ONG a tout intérêt à entamer sur ces
d i ff é rents thèmes un dialogue
constructif, où il ne s’agit pas de
compter les perdants et les gagnants,
mais de faire avancer d’abord la
réflexion et les solutions les plus adé-
quates ensuite.
On regrettera d’autant plus le ton un
peu professionnel, un peu “il n’y a
qu’à…” que prend parfois le rapport
d’Oxfam. On regrettera en particulier
la présentation un peu sommaire et
caricaturale du monde des pro et anti-
mondialisation. Mais ça ne devrait
pas empêcher le dialogue de se pour-
suivre ou de s’ouvrir sur ces différents
thèmes”. C’est aussi ce que le GRE-
SEA espère pouvoir faire en organi-
sant l’Université des Alternatives.
1. “Deux poids, deux mesures”, Commerce, glo-
balisation et lutte contre la pauvreté, Oxfam
International, mai 2002.
P rotectionnisme : p o l i t i q u e d e
p rotection de la pro d u c t i o n
nationale contre la concurrence
é t r a n g è re, notamment par des
m e s u res douanières. (Le Petit
Larousse illustré –1996)
Protectionnisme : politique éco-
n o m i q u e qui vise à pro t é g e r
l’économie nationale contre la
c o n c u rrence étrangère par des
mesures diverses (droits de doua-
ne, contingents, formalités admi-
nistratives, normes, etc.) (le Petit
Robert 2002)
Le protectionnisme est l ’ e n-
semble des mesures d’origine
étatique qui consistent à limiter,
à interd i re, à contrôler ou à
influencer les échanges interna-
tionaux. Le protectionnisme est
donc le résultat d’un pouvoir de
contrainte publique qui vient
i n t e rf é rer avec les pro c e s s u s
d’échange fondés sur la libre
volonté de ceux qui sont directe-
ment concernés par ces échanges.
(Salin P., « libre-échange et pro-
tectionnisme », PUF, Paris, 1991)