BEING PHILIPPE GOLD
ASSOIFFÉS
L’ENFANCE DE LART - DOIGTS D’AUTEUR DE MARC FAVREAU
LAVARE
LE LAC AUX DEUX FALAISES
ANTIGONE AU PRINTEMPS
LES ZURBAINS 2017
Cahier d’hiver
Théâtre Denise-Pelletier 1716 DIRECTION ARTISTIQUE CLAUDE POISSANT
LES CAHIERS / NUMÉRO 98
Ce cahier jette sur l’hiver comme sur nos spectacles un
peu plus de lumière. Joëlle Bond, comédienne, auteure
et commissaire de ces pages, nous propose une façon
réjouissante d’aborder ces œuvres qui souvent, grâce
à leur humour, flirtent avec la légèreté. Mais en réalité,
quand on s’y abandonne, ces spectacles affichent tous
sous le rire ambiant le courage infléchissant qui naît du
tragique. Il y a donc dans cette récréation littéraire plein
de détours pour y faire son chemin.
Mais qu’y a-t-il sur nos scènes et dans ces pages en cet
hiver 2017 ?
L’eau. Murdoch et Norvège ont figé au fond de l’eau une
histoire d’amour intemporelle que rend plausible deux
choses, d’abord l’adolescence, ce tremblement éphémère
et puissant, puis la fiction, ce projecteur sur nous-même
qui intensifie si bien le réel. Dans nos pages, le metteur
en scène Benoît Vermeulen et le comédien Benoît Landry
tracent le parcours d’ASSOIFFÉS tandis que le journaliste
Philippe Couture nous dessine un portrait de son auteur
Wajdi Mouawad. Pour l’occasion, Marc-Antoine Cyr
imagine Michel Tremblay, qui comme Murdoch, vivrait
dans la fiction de ses personnages.
Le ciel. Ti-gars, à la conquête de lui-même, rencontre les
éléments qui sont là au bout de ses doigts. En mettant
les pieds dans LE LAC AUX DEUX FALAISES de Gabriel
Robichaud, nous posons notre regard vers le haut.
Maxime Robin évoque pour nous un peu de ce réalisme
magique.
L’esprit. Celui du mot, celui de Marc Favreau, celui de
L’ENFANCE DE LART qui redonne à l’auguste Sol un peu
de ce qu’il nous a légué, l’intelligence du discours et
sa candide poésie. Yves Dagenais nous parle de Sol le
clown. Kim Yaroshevskaya de Favreau, l’homme. « Si tous
les poètes voulaient se donner la main, ils toucheraient
enfin des doigts d’auteur ! »
Le sang. À chaque fois qu’Antigone reparaît sur nos
scènes, il y a toujours une cause. Puis une déchirure. Avec
ANTIGONE AU PRINTEMPS, Nathalie Boisvert clame-t-elle
l’espoir ? Défie-t-elle les mythes en choisissant le sang de
nos érables pour écrire le printemps 2012 ? Qu’en pense
le chef d’Option Nationale et professeur de philosophie
Sol Zanetti ? Et qui peut résumer Antigone ?
L’argent. Oui oui oui LAVARE de Molière. Je l’ai lu à 14 ans et
je l’aime encore autant. Son péché capital est contagieux.
Et comme le plus laid de tous nos défauts illumine bien
tous les autres, chez Molière, les disciples de la bonté et
de la bienveillance ne payent pas de mine et ont bien
peu d’intérêt. Louis-Karl Tremblay nous révèle, avec
son abécédaire, beaucoup de son créateur. Et alors que
cet Harpagon a 360 ans, la sociologue Julia Posca nous
présente l’avare du nouveau millénaire. Puis trois acteurs
« modernes » répondent à une question classique.
Moi. Philippe Gold propose une version améliorée de
Philippe Boutin. Et Philippe Boutin est déjà si attentionné
et positif qu’on peut se demander what is exactly BEING
PHILIPPE GOLD ? Mélange explosif, gonflage d’égo ou désir
d’un don absolu de soi-même ? Ses amis Emmanuel
Schwartz et Christophe Payeur nous parlent de Boutin-
Gold et l’auteur-acteur Jean-Philippe Durand s’amuse des
icônes pop qui ont un nom d’emprunt.
Fin de conte. Un vingtième et dernier opus des
ZURBAINS est une bonne raison pour publier un de ces
contes notoires, Allah Maak. Rébecca Déraspe fait un
portrait du Théâtre Le Clou, coupable inventeur de ces
Zurbains, d’Assoiffés et de plus de vingt-cinq ans d’art et
d’adolescence.
Et Maxime Beauregard-Martin invite à la même table
les jeunes metteurs en scène Philippe Boutin, Nicolas
Gendron et Frédéric Sasseville. Tandis que le dessinateur
en résidence de la saison Patrice Charbonneau-Brunelle
se confie à notre commissaire.
Bonne lecture, fol hiver !
Claude Poissant, directeur artistique
© Jean-François Brière
FOL HIVER
2
© Julie Artacho
TABLE DES MATIÈRES
4 L’expérience de l’espace
7 De théâtre et de rébellion
9 Being Philippe Gold
10 Mon ami Philippe Gold
11 Pop et pseudonymes
13 Assoiffés
14 Carnet de création d’Assoiffés
17 Le sourire de l’animateur
19 Wajdi Mouawad : celui par qui le théâtre québécois
a élargi les frontières
21 Une trouée
23 L’Enfance de l’art - Doigts d’auteur
de Marc Favreau
24 Sol, la quintessence de la poésie et de l’absurde
26 Quelques souvenirs de Marc Favreau
28 L’Avare
29 Abécédaire
36 Ce qui nous consume : réflexion sur l’avarice
moderne
38 L’épiphanie de soi-même
40 Chère Queen of Versailles
42 Pourquoi jouer les classiques ?
43 Le Lac aux deux falaises
44 Embrasser l’inexplicable
46 Antigone au printemps
47 Antigone : figure universelle
49 De Antigone... au printemps
51 Les Zurbains 2017
52 Ma petite déclaration d’amour au Théâtre Le Clou
54 Allah Maak
58 Équipe et C.A. du TDP
Des fois, je suis comédienne, des fois, auteure, des fois, traductrice et, d’autres fois...
« fille de comm » de théâtre. On pourrait penser que c’est simplement une façon
d’arrondir mes fins de mois. On va pas se mentir, ça aide, mais c’est surtout parce que
j’y trouve un immense plaisir alliant mes deux passions : le théâtre et... être scolaire !
J’aime fouiller le théâtre, annoter mes lectures, imaginer des façons différentes et
accessibles d’aborder le moment théâtral. Aller au théâtre en 2017, c’est un geste
fort, qui nous arrache à notre Netflix et nous demande de braver le verglas pour aller
rencontrer ce qu’on ne connaît pas. Je vous souhaite, avec ces auteurs, metteurs en
scène, acteurs et concepteurs formidables, une rencontre à la hauteur de celle que
j’ai eu cet automne en côtoyant leurs univers : un petit bout de magie et d’instant
qui nous arrache, justement, à nos gris impôts et gluantes bottes d’hivers.
ISSN 2369-5374 /
BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DU
CANADA INC
Théâtre Denise-Pelletier
4353, rue Sainte-Catherine Est,
Montréal (Québec) H1V 1Y2
Administration : 514 253-9095
Billetterie : 514 253-8974
denise-pelletier.qc.ca
Les Cahiers du Théâtre Denise-
Pelletier sont publiés sous la
direction de Julie Houle, avec
le soutien d’Anaïs Bonotaux-
Bouchard. La rédaction de ce
Cahier est coordonnée par Joëlle
Bond. Nous remercions les
équipes de production, auteurs
et metteurs en scène qui ont
facilité la réalisation de ce
numéro des Cahiers.
MOT DE JOËLLE BOND
Coordonnatrice invitée du Cahier d’hiver 2017
Le Théâtre Denise-Pelletier est membre des Théâtres associés inc. (TAI) et de l’Association
des diffuseurs spécialisés en théâtre (ADST).
Partenaire médiaPartenaire de saisonLe Théâtre Denise-Pelletier (TDP) tient à remercier
Partenaire de saison
Joëlle Bond
Comédienne et auteure dramatique, Joëlle Bond obtient son diplôme du
Conservatoire d’art dramatique de Québec en 2008. Un an plus tard, dans le
cadre des Chantiers du Carrefour international de théâtre 2009, elle présente
son premier texte, Charme. Cette traversée sans prétention de l’héritage féminin
construit depuis les années 1940 lui vaut la Bourse Première Œuvre de Première
Ovation, prix désigné à un auteur de la relève pour un premier texte dramatique.
Avec sa compagnie, le petit luxe, elle présente Le Cardigan de Gloria Esteban en
2010 et Charme en 2013 à Premier Acte. Comme comédienne, on a pu la voir,
entres autres, dans Tom à la ferme, Détour de chant, Laurier-Station, Frontières et
Le Cas Joé Ferguson. Elle contribue aussi au texte de La fête sauvage de Véronique
Côté au Théâtre de Quat’sous en décembre 2015.
Joëlle œuvre aussi à titre de traductrice, surtout dans les domaines de la comédie
musicale et du théâtre. Sur les planches, on lui doit les versions françaises de
Sweeney Todd, Les quatre filles du Docteur March, Peter Pan et Grace.
3
Patrice, tu es le premier à faire une résidence du
genre au Théâtre Denise-Pelletier. Comment as-tu été
approché pour ce projet-là ?
PCB : C’est ma proposition, en fait ! J’avais assisté Claude
Poissant lors d’un laboratoire au Centre National des Arts
avec les Petites cellules chaudes, qui a mené, par la suite,
à la création du iShow. Pendant tout le laboratoire, j’avais
dessiné les acteurs, observé leur façon de travailler,
collectionné les morceaux de texte, et ça a donné un
genre de recueil qui témoignait du travail à la fin. J’ai
donc proposé à Claude de refaire l’expérience à Denise-
Pelletier, avec tous les spectacles de l’année. Je trouve que
les traces que ça va laisser peuvent être intéressantes,
surtout parce que le TDP a une mission éducative.
ENTREVUE
L’EXPÉRIENCE
DE L’ESPACE
Joëlle Bond rencontre Patrice Charbonneau-Brunelle,
artiste en résidence.
POURQUOI ?
Le projet de Patrice est si singulier qu’il m’a paru
important de partager avec vous une portion
de son travail avant la fin de sa résidence au
printemps 2017.
- J. Bond
Le dessin, ç’a toujours été une passion ?
PCB : Oui, c’est ce qui m’a amené vers la scénographie,
à la base. Et, curieusement, on est de moins en moins
là-dedans maintenant, on est plus dans l’installation, on
travaille sur Photoshop. C’est formidablement efficace,
mais on perd la notion méditative du dessin, je trouve.
L’été dernier, j’ai découvert le travail de Juhani Pallasmaa,
un architecte qui parle de l’importance du travail manuel,
de l’incarnation de l’extérieur par le corps à travers le
dessin... Il encourage le dessin, parce qu’il laisse des
traces de ton processus, de tes hésitations, ce qui permet,
au final, d’aller plus loin dans ton idée. Il y a la notion
de temps aussi. Le dessin prend du temps, il t’oblige à
choisir ce que tu veux représenter, ce n’est pas une photo
de répétition où tous les acteurs sont fixés sur l’image
en un instant. Ce n’est pas une reproduction de l’instant,
mais une suggestion.
© Julie Artacho
4
Le Timide à la cour : présentation de la maquette aux acteurs
L’Écolière de Tokyo : Miro fait son pré-set en chantant
L’Écolière de Tokyo : spectateurs à la discussion
Comment se passe le travail jusqu’à présent ?
PCB : Très bien ! Je suis allé voir tous les spectacles,
à des moments différents du processus : avant la
représentation, après, en répétition... et, parfois, pendant
le spectacle !
Pendant ? Mais... il ne fait pas trop noir ?
PCB : Oui ! C’est un exercice de dessin à l’aveugle, alors ça
donne ce que ça donne, mais ça fait partie du processus,
de faire certaines expériences sans attendre de résultats.
Pallasmaa, justement, parle de l’hégémonie de la vision,
du fait que la vision prend parfois tellement de place
qu’on s’empêche d’utiliser nos autres sens pour avoir
accès à l’expérience totale de l’espace. L’idée, c’est un peu
de documenter le processus de création des spectacles,
sans le faire de manière exhaustive. J’aimerais pouvoir
être là tout le temps, bien sûr, ou du moins être là plus
souvent qu’une ou deux périodes de trois heures, mais,
comme tout le monde, je n’échappe pas au reste de la vie
qui continue !
5
1 / 59 100%