
– Ainsi, toute augmentation du bien-être agrégé de la population, entendu
comme somme des utilités individuelles, et plus largement de la "taille du
gâteau", engendrera une augmentation du bien-être de la société et sera
donc jugée acceptable.
– La croissance, mesurant cette augmentation de bien-être, est donc un ob-
jectif.
– L’assimilation peut paraître troublante : qu’en est-il de la distribution des
richesses pendant le processus de croissance ? Les situations individuelles
sont-elles toutes améliorées ? Y a-t-il un gain universel, ou pouvons nous
trouver des agents "perdant", voyant leur situation personnelle se détério-
rer ?
– L’objectif de croissance comme critère de bien être est tout entier issu de
la théorie néoclassique.
Rappelons-nous que cette théorie présuppose une situation concurrentielle,
dite pure et parfaite. Les agents sont supposés identiques, ayant les mêmes
préférences, les mêmes capacités de production, et résolvent leurs pro-
grammes d’optimisation de manière indépendante. Il n’y a donc aucune
interaction. Nous verrons par la suite que cette hypothèse d’homo oecono-
micus a une conséquence : si tous les agents sont identiques, on peut donc
assimiler l’économie à un agent représentatif qui résout un programme
intertemporel.
Dans ces conditions, l’éventuelle hétérogénéité des agents individuels est
ignorée et l’économie aboutit fatalement à une situation dans laquelle ne
se pose aucun problème de redistribution. Tout le monde y gagne, puisqu’il
su¢ t de diviser le gain total par le nombre d’individus de la société pour
déterminer les gains individuels. Ainsi, la croissance est alors fatalement
bonne pour l’économie4.
Si assimiler la croissance à un critère de bien-être est un jugement de valeur,
il doit bien exister d’autres critères. De fait nous trouverons d’autres dé…nitions
et problématiques liées à la croissance :
– La croissance potentielle est celle que peut supporter le système productif
sans surchau¤e : plus clairement elle correspond à la croissance possible
sans augmentation du niveau général des prix, i.e. sans in‡ation. Cette
notion précise la première dans la mesure où elle …xe un nouvel objectif à
atteindre. Il s’agit en quelque sorte d’une optimisation sous contrainte.
– La notion de croissance soutenable est di¤érente. Elle est à relier au
concept de développement durable. Le rapport Brundtland (conférence de
4Il ne s’agit pas de nier les inégalités de l’économie. Simplement, le modèle n’est pas fait
pour cela.
L’étude explicite de la redistribution tout au long du processus de croissance nécessitera des
hypothèses plus …ne sur les comportements individuels. Il s’agira notamment des modèles à
générations imbriquées. Et dans de tels modèles, la croissance n’est plus fatalement optimale
au sens de Pareto puisque dans certaines situations, elle peut conduire à des détériorations
de situations individuelles. Dans le cas d’agents hétérogènes tels que représentés dans les
modèles de GI, la croissance peut devenir non optimale au sens de Pareto si la redistribution
des ressources qui en est issue détériore la situation de certains sur le long terme.
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