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INTRODUCTION
Selon Jean Pierre Vernant la question de l’origine de la philosophie peut-être comprise de
deux manières :
D’une part on peut parler d’origine dans le but de fixer les frontières qui séparent la phi-
losophie de ce qu’elle n’est pas. En fait la philosophie ne s’affirme et ne se découvre telle
qu’elle est que par opposition à ce qu’elle n’est pas et avec quoi pourtant elle est en rap-
port, en concurrence, en conflit ou même en collaboration à savoir le mythe, la religion,
la science etc.
D’autre part, nous pouvons parler d’origine dans le sens de désigner le lieu la philoso-
phie a surgit pour la première fois et se demander pourquoi ici et pas ailleurs. Dans tous
les cas il s’agit d’une question d’origine ou d’identité qui sont au fond liées.
I- Les conditions d’émergence de la philosophie : du mythe au logos
1- Le discours mythique
a- Définition
Le terme mythe peut avoir plusieurs sens mais le sens qui nous intéresse ici est celui d’un
ensemble de connaissances mises en place depuis la nuit des temps léguée par nos ancêtres et
transmises de génération en génération. Il se définit dans le contexte qui nous intéresse comme
une : « Un récit fabuleux d’origine populaire et non réfléchie dans lequel les agents impersonnels
divinités- le plus souvent des forces de la nature sont représentés sous forme d’êtres personnels dont
les actions et les aventures ont un sens symbolique ».
b- Les fonctions du mythe
Le mythe est valable pour toute la communauté dans laquelle il apparaît. Il est l’ultime
référence pour cette société et a une double fonction :
Fonction d’explication : Le mythe explique l’origine des choses, leur existence, donne un
sens au monde, fournit une vision cohérente de ce dernier. A ce titre Mircea Eliade écrit :
« Le mythe raconte une histoire sacrée, il relate un évènement qui a lieu dans le temps
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primordial, le fabuleux des commencements. Autrement dit, le mythe raconte comment
grâce aux exploits des êtres surnaturels une réalité est venue à l’existence. » Retenons
avec Mircea Eliade que le souci essentiel du mythe est le maintien de l’équilibre de
l’individu et de la société (échapper à l’angoisse existentielle, se familiariser avec le
monde).
Fonction d’organisation : C’est par le mythe que le groupe social se reconnaît, définit son
origine. Il constitue la référence fondamentale de la société. Le mythe exprime, rehausse et
codifie les croyances du groupe. Il prescrit à la société les prototypes de conduite efficaces,
ceux que les ancêtres ont effectués au commencement du monde. Dans une société régie
par le mythe, toute action est un rite : agir c’est répéter ancestral par excellence.
2- Mythe et pensée chez les grecs
Toute pensée traditionnelle est dominée par les mythes et la Grèce antique ne fait pas
exception à cette règle. En effet, jusqu’au 5 - 6ème siècle avant JC, la pensée grecque traditionnelle
était dominée par les mythes et d’autres productions de l’imagination (légendes, contes, proverbes).
La pensée se trouve contenue dans une tradition orale transmise de générations en générations.
L’ensemble du savoir était stocké dans de grands récits mythiques, historiques et légendaires,
relatifs au monde, à son origine aux dieux, aux exploits et aventures des êtres surnaturels. C’est
dans un tel contexte dominé essentiellement par l’omniprésence du mythe que va naître la
philosophie.
II- La pensée rationnelle
1- La naissance de la philosophie : l’œuvre des présocratiques
La première rupture avec la pensée mythique est l’œuvre des présocratiques (Thalès,
Pythagore, Anaximandre, Anaximène). C’est précisément au 5-6ème siècle avant JC dans la citée
grecque de Milet (Ionie) que ces penseurs vont pour la première fois abandonner la narration
mythique au profit de l’explication rationnelle pour rendre compte de la formation du cosmos et des
manifestations de la nature. Contrairement à la tradition grecque dominée par la croyance aux
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mythes, les présocratiques inaugurent à partir du 5-6ème siècle avant JC une nouvelle façon de
penser. Désormais, il n’est plus question de répéter ou de commenter les récits ou poèmes
mythologiques tels que les poèmes d’Homère. Il s’agit plutôt d’une nouvelle manière de réfléchir
sur les réalités qui entourent l’homme. C’est dans cette nouvelle manière de réfléchir que les
milésiens proposent que la raison trouve très vite incarnée. C’est cette incarnation de la raison que
Jones Burne explique lorsqu’il écrit : « Les milésiens ont ouverts la voie que la science
(philosophique) n’a qu’à suivre, cette voie : c’est la raison ». Il résulte de cela que la philosophie
repose essentiellement sur une exigence : inscrire la raison au centre de toute activité de prise en
charge du réel. On en déduit également que l’avènement de la philosophie repose sur un constat
d’échec des réponses jusqu’alors données aux préoccupations de l’homme. Qu’est ce qui explique
cet échec sinon que les réponses données sont tributaires de la mythologie ? Ce qui fait qu’elles ne
sont validées que par un acte de foi qui écarte ou proscrit toute interrogation, toute remise en cause.
Il s’agit donc d’opposer à cela l’alternative de la raison dans la recherche de la vérité. Ainsi, en se
démarquant de la tradition, en posant des problèmes nouveaux, en élaborant des outils mentaux
(raison, pensée, exigence de preuve) qu’exigeaient leurs solutions, les présocratiques inaugurent une
tradition intellectuelle nouvelle. Leur œuvre représente une innovation radicale consistant à
expliquer les phénomènes naturels en se fondant sur la raison démonstrative. Ce ne sont plus les
dieux qui gouvernent l’univers mais des principes premiers inhérents à la nature elle-même. Ces
principes sont l’eau pour Thalès, l’air pour Anaximène, le feu et l’infinie pour Anaximandre et enfin
le nombre pour Pythagore. Parmi les autre doctrines philosophiques qui tentaient à cette époque
d’expliquer le monde à cette époque on peut citer celles :
Héraclite d’Ephèse qui développe la théorie de la mobilité universelle : le principe de toute
chose selon lui est le mouvement. Tout change sans fin (Haine/Amour, Vie/Mort, Jeu-
nesse/Vieillesse etc.) A ce titre Héraclite écrit dans Fragments « Tu ne peux pas descendre
deux fois dans le même fleuve car de nouvelles eaux coulent toujours sur toi ». L’unité du
monde est l’unité des contraires. La contradiction est le fondement de toute chose, les
contraires s’opposent et se maintiennent l’une dans l’autre.
Parménide qui conteste la théorie d’Héraclite. Pour lui, le changement n’est qu’une illusion
de nos sens. Ce qui est réel c’est l’un. Il écrit « L’Etre est et le non n’être n’est pas ».
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Les sophistes ou professeurs d’éloquence comme Protagoras et Gorgias. Les sophistes en-
seignent la rhétorique (l’art de bien parler, de persuader, de convaincre sans avoir raison).
La recherche de la vérité est substituée à la recherche du succès. Autrement dit, les so-
phistes ne se soucient pas de la vérité. Ce qui importe pour eux c’est comment faire triom-
pher une opinion qu’elle qu’en soit la nature. Selon la formule de Protagoras : « L’homme
est la mesure de toute chose ». Cela signifie qu’il n’y a pas de vérité absolue, il n’ya que
des opinions relatives à celui qui les énonce. Tout est dans le langage, il suffit simplement
de savoir le manier pour convaincre.
2- La philosophie, fille de l’étonnement
Dans son ouvrage intitulé la Métaphysique A, Aristote écrit : » C’est en effet l’étonnement qui
poussa comme aujourd’hui les premiers penseurs aux spéculations philosophiques » Mais qu’est ce
que l’étonnement ? Que signifie s’étonner ? Dison de l’étonnement qu’il est une situation de
surprise, de stupeur, d’émerveillement qui engendre le doute, l’interrogation, le questionnement. De
ce point de vue, s’étonner revient à tende vers la connaissance. En effet, en s’étonnant, l’homme
prend conscience de son ignorance. Partant, il s’interroge et cherche à connaître. Autrement dit,
philosopher c’est s’éveiller en échappant aux liens de la nécessité vitale. Cet éveil s’accomplie
lorsque nous jetons un regard désintéressé sur les choses et le monde. Il y a donc une novelle
manière de voir et de penser. Et c’est précisément parce que l’étonnement témoigne du
renversement qu’effectuèrent les milésiens que ces penseurs peuvent être situés au point la
philosophie pend son origine. Cependant cela ne signifie nullement que la raison est congénital à la
Grèce antique comme semble le suggérer certains penseurs imbus d’idéologies racistes qui aurait
servi de base à la colonisation. C’est pour cette raison d’ailleurs que Léopold Sédar Senghor
dérange un peu lorsqu’il dit : « L’émotion est gre et la raison est Hélène ». Pour certains penseurs
africains comme Youssouph M.B Guissé, Senghor, comme certains théoriciens africains sont
tombés dans le pige et sont victime d’un complexe d’infériorité racial en faisant de la raison une
spécificité européenne et de l’européen lui-même un modèle dans le processus de rationalisation du
monde. Or s’agit plutôt de montrer comment les milésiens ont inaugurés un nouveau mode
d’intelligibilité en s’appuyant sur l’exigence de la raison.
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CONCLUSION :
Retenons en dernière analyse que c’est dans une intention de rationalisation du réel que les
philosophent consacrent la naissance et l’existence de la philosophie en lui fixant sa
détermination essentielle. Cela commande tout le procès du philosopher qui, selon Karl
Jaspers, « va de l’étonnement au bouleversement en passant par le doute ».
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