Arrêté modifiant les programmes des écoles normales primaires

18 août 1920
Arrêté modifiant les programmes des écoles normales primaires
André Honnorat
Source : BAMIP n° 2442, p. 764-813
Dans la Revue pédagogique d’octobre 1919 (« Que seront demain nos écoles normales ? », pp.
175-216), Paul Lapie commente ainsi la réforme des écoles normales : à l’entrée dans cette école,
tout doit être nouveau ; il évoque « l’écœurement » des élèves-maîtres devant les répétitions qui
leur sont imposées, « l’un des défauts les plus graves de l’organisation à tant d’égards si parfaite
de notre enseignement primaire » ; l’école normale « doit être une petite république où les élèves
font leur apprentissage de la vie sociale » ; il voudrait que la bibliothèque soit le cerveau de la
maison, ce qui n’est guère le cas…Pas question de transformer ces établissements de formation
en « instituts pédagogiques », et d’en exclure toute science et connaissance générale. Il n’est pas
sûr toutefois qu’il ait pu éviter, dans la pratique, la tentation de l’encyclopédisme.
Le Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-arts,
Vu la loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire ;
Vu le décret et l'arrêté organiques du 18 janvier 1887 ;
Vu le décret et l'arrêté du 4 août 1905 ;
Vu le décret du 18 août 1920 ;
Le Conseil supérieur de l'Instruction publique entendu,
Arrête
Art. 1. - Les programmes des écoles normales d'instituteurs et d'institutrices
annexés à l'arrêté du 4 août 1905 sont annexés à l'arrêté organique du 18 janvier
1887.
Art. 2. - Les programmes des écoles normales d'instituteurs sont modifiés
conformément au texte joint au présent arrêté.
Art. 3. - Les programmes des écoles normales d'institutrices sont identiques
à ceux des écoles normales d'instituteurs ; mais ils ne comportent ni
l'enseignement nautique, ni l'agriculture théorique, et, pour l'économie
domestique, l'hygiène, les travaux manuels (ménagers et horticoles), il est
établi (les programmes spéciaux conformément au texte joint au présent arrêté.
Art. 4. - Les programmes établis par le présent arrêté entreront en vigueur :
Le 1er octobre 1920 pour la 1re année des écoles normales ;
Le 1er octobre 1921 pour la 2e année ;
Le 1er octobre 1922 pour la 3e année.
Annexe à l’arrêté organique du 18 janvier 1887
Programmes des écoles normales d'instituteurs
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Enseignement littéraire
Psychologie, pédagogie, sociologie, morale, philosophie
scientifique
(2 heures par semaine dans chaque année)
1re année
Psychologie appliquée à l’éducation
Introduction. - Définition des faits de conscience.
Influence de l'organisme sur la vie mentale ; influence du milieu social sur la
conscience individuelle.
Unité de la vie psychologique et classification des faits de conscience.
I – L’intelligence.
1. Conscience spontanée et conscience réfléchie. Le subconscient. Difficulté
de se connaître soi-même. Conséquences pratiques.
2. Connaissance du monde extérieur. - Sensations et perceptions. Erreurs des
sens : illusions, rêves, hallucinations. L’éducation des sens.
3. Représentation du passé : la mémoire. - Mécanisme psychologique du
souvenir. L'association des idées. - Conditions de l'acquisition, de la
conservation, du rappel et de la reconnaissance des souvenirs. - Les types
mnémoniques : visuels, auditifs, moteurs. Les diverses sortes de mémoires.
Les défaillances de la mémoire : l'oubli, l'altération des souvenirs.
L'éducation de la mémoire. Règles pédagogiques.
4. Représentation de l'avenir. Elle est nécessaire pour l'action. Mécanisme de
la prévision. Ses erreurs. Conséquences pratiques tirées de l'incertitude de la
prévision.
5. L'imagination.
L'invention scientifique. La création poétique et artistique. L'imagination
chez l'enfant. Son goût pour les récits, les contes, le merveilleux. - Dans quelle
mesure et par quels moyens peut-on cultiver l'imagination de l'enfant ?
6. L'attention. - Attention spontanée et attention volontaire. - La distraction
et la fatigue intellectuelle. - Éducation de l'attention : moyens propres à l'exciter
et à la fixer.
7. Les idées abstraites et les idées générales. - Comment elles se forment.
Les idées générales et les mots. Degrés divers d'abstraction et de généralisation.
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Leurs dangers ; le psittacisme. Nécessité d'employer dans l'enseignement la
méthode intuitive et concrète.
8. La croyance. Facteurs psychologiques et facteurs sociaux de nos
affirmations, de nos négations et de nos doutes.
9. Le raisonnement. - Ses formes spontanées : le raisonnement intuitif, le
raisonnement par analogie. - Ses formes réfléchies : induction et déduction. -
Étude des erreurs les plus fréquentes du jugement et de raisonnement. L'esprit
critique. L'éducation du jugement et du raisonnement.
10. Le langage et la pensée. Le style.
II. La sensibilité
1. Le plaisir et la douleur. - Comment régler chez l'enfant l'amour du plaisir ;
comment l'endurcir à la douleur.
2. Les émotions. - Leur rapport à l'organisme. - Les émotions de l'enfant : la
peur, la timidité, la colère. Leur traitement.
3. Les tendances personnelles. - L'instinct de conservation. Les besoins
organiques ; comment la vie sociale les transforme. L'amour de la propriété ;
ses manifestations chez l'enfant. Le besoin d'indépendance. L'amour-propre et
ses dérivés. Le besoin d'activité. Les jeux des enfants.
4. Les tendances altruistes : La sympathie, la pitié, l’amitié, l’amour.
5. Les tendances impersonnelles. La curiosité et l'amour de la science.
L'admiration et l'amour du beau ; la culture du goût. Le sentiment religieux. Le
sentiment moral.
6. Les passions. Comment elles se forment. Moyens de triompher d'une
passion.
III. L’activité
1. Mouvements réflexes et actions instinctives.
2. L'habitude. Les habitudes corporelles et l'éducation physique. Les
habitudes intellectuelles et morales.
3. La volonté. Son mécanisme. Comment son empire s'établit sur les
mouvements, les sentiments, les pensées. La maîtrise de soi. Éducation de la
volonté.
4. Le caractère. - Éducation du caractère.
5. La personnalité humaine.
Observations et expériences1
Mesure de la taille, du poids, de la force, de la capacité respiratoire des
élèves de l'école d'application.
Mesure de leur vue, de leur ouïe, de leur odorat, de leur toucher. Mesure de
leur mémoire.
Étude des rêves d'avenir des enfants.
1 Cette liste est donnée à titre d’indication.
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Mesure des degrés et de la nature de l'imagination chez les élèves de l'école
d'application.
Mesure de l'attention et de la fatigue intellectuelle à divers moments de la
journée scolaire.
Étude des assertions émises par les enfants et recherche de leurs motifs.
Expériences sur le jugement et le raisonnement des enfants (tests Binet-
Simon).
Observations sur le langage des enfants, leur vocabulaire, leur syntaxe à
divers moments de leur vie scolaire.
Étude des tempéraments et des caractères des écoliers. Suivre leur
développement et leurs modifications pendant la scolarité.
Pédagogie générale
1. L’éducation. - Son but moral et social. Dressage et éducation. Légitimité
de l'action de l'éducateur. Son efficacité. Limites de sa puissance.
2. L'éducateur. - Fondement de son autorité. - Qualités physiques
intellectuelles et morales nécessaires à l’éducateur. Peuvent-elles s'acquérir ?
L'éducation de l'éducateur.
3. L'élève. - Les diverses étapes du la vie physique, intellectuelle et morale
de l'enfant. - Diversité des types intellectuels et des caractères. - Nécessité
d'adapter les méthodes aux divers âges et aux diverses natures.
4. L'élève (suite). - Psychologie de la classe. La contagion mentale dans la
classe. Les règles de l'éducation collective ne sont pas celles de l'éducation
individuelle.
5. L'ordre, condition de l'action éducatrice. Comment peut-on l'obtenir ? La
discipline. Comment peut-on la concilier avec le respect de 1a personnalité de
l'enfant ? - Examen des théories relatives aux sanctions pédagogiques. Examen
des sanctions employées à l'école.
6. La préparation de la classe. Pourquoi et comment on doit y procéder.
7. Installation des élèves dans la classe : répartition des places d'après les
aptitudes physiques (vue, ouïe, etc.), intellectuelles (cours de degrés différents)
et morales des élèves.
8. Répartition des exercices entre les divers jours de la semaine et 1es
diverses heures de la journée en tenant compte des oscillations de l'attention et
de la fatigue intellectuelle. Organisation pédagogique d'une classe comportant
plusieurs divisions.
9. La leçon : la parole et le livre. Dans quelle mesure faut-il user de l’une et
de l'autre ? A quelles conditions leur action est-elle efficace ?
10. Les méthodes intuitives, directes, actives. Leurs procédés et leurs
avantages. L'enseignement par l'action. - Les méthodes attrayantes : dans quelle
mesure faut-il en user ?
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11. Les formes diverses de l'interrogation : interrogation socratique et
interrogation de contrôle ; interrogation à date fixe ou à date indéterminée.
Révisions. - Difficultés de l'interrogation et qualités nécessaires à
l'interrogateur.
12. Les devoirs écrits. Leur nombre, leur étendue. Doivent-ils être préparés
en classe ? Dans quelle mesure ? Correction individuelle des copies ou cahiers.
La correction orale doit être collective.
13. Les compositions, concours et distributions de prix : quelle est leur
valeur pédagogique ? Dans quelle mesure doit-on faire appel à l’émulation ?
14. L’action du maître hors de la classe : récréations et promenades scolaires.
15. Action combinée des parents et des maîtres.
2e année
Notions de sociologie appliquée à la morale et à l’éducation
(1 heure par semaine)
Introduction. La société. L’homme ne peut vivre solitaire. Influence de la vie
sociale sur la vie matérielle, intellectuelle et morale de l'être humain. Loi
sociale et loi morale. Classification des sociétés.
I. Sociologie économique
Groupements ayant pour fin la satisfaction des besoins matériels.
Corporations, associations professionnelles, coopératives. La famille et l'État
dans leur rôle économique.
Les formes de la production dans les diverses sociétés humaines. Le travail
(travail intellectuel d'invention et de direction, travail manuel ou musculaire).
La condition des travailleurs. Relations réciproques des divers agents
contribuant à la production. La division du travail.
Les formes de l'échange dans les diverses sociétés humaines. La valeur et le
prix. Concurrence et monopole. La monnaie. Le crédit.
La rémunération du travail. L'épargne. Formes diverses de la propriété.
Influence des transformations économiques sur les institutions, les mœurs,
les idées.
Les effets moraux de la division du travail : la solidarité. - Son influence sur
l'éducation : nécessité d'une double éducation, générale et spéciale, pour
quiconque participe à la vie économique moderne.
II. Sociologie domestique
Les diverses formes de la famille. Comment elle a perdu certaines de ses
fonctions primitives ?
Constitution de la famille : le mariage, son caractère moral et social.
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