Clignotements sensoriels de la musique.

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EN RÉVERBÉRATION.
Clignotements sensoriels de la musique.
MATTHIEU GUILLOT.
… car on peut écouter sans entendre,
comme on peut regarder sans voir.
I. Stravinsky, Chroniques de ma vie.
Car, je le répète, la musique se voit.
I. Stravinsky, Poétique musicale.
Le son fait perdre la vue ou il la fascine.
M. Serres, Les cinq sens.
ES RAPPORTS DE CONCURRENCE ENTRE LE VOIR ET L’ENTENDRE,
L
que Jean-Luc Evard a relevés avec une grande acuité en de
nombreux passages de ses récents essai et article, plaidant
du même coup pour une réhabilitation méthodique de l’oreille
contre le règne consacré, autoritariste du regard1, touchent au
premier chef la musique dans la visée perceptive que déploie
chaque auditeur. Or, on constatera en les observant de près que
l’histoire et la nature de l’écoute musicale, loin de s’ordonner en
Nous renvoyons en parallèle à ses Métaphonies, Éditions de la Revue
Conférence, 2013, ainsi qu’à « Par écho », Conférence n° 36, printemps
2013, pp. 381-387.
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ligne directe entre auditeurs et œuvres en une pure et simple relation d’écoutants à écoutées, viennent nous évoquer et nous rappeler à l’inverse son sinueux cheminement, les subtiles interférences
qu’elle subit et qui la brouillent sous diverses formes. En particulier, une permanente ambiguïté d’emprise perceptive, un tiraillement quasi perpétuel entre l’oreille et l’œil, qui ne sauraient en
apparence se résoudre que par un hypothétique ajustement.
Invisible par excellence, irreprésentable, ne se donnant qu’entendue, la musique est par essence absence d’images, elle est
l’absence d’icône qui se montre. Mais, comme dans un rêve, elle
suscite des images et les met en mouvement. « La musique, en un
sens, a un pouvoir descriptif nul, et, en un sens, un prodigieux
pouvoir d’évoquer », résumait ainsi Alain en une parfaite formule2. Lorsque Canetti évoque les « arabesques acoustiques
autour de Dieu » qu’il croit reconnaître dans les litanies des
mendiants aveugles de Marrakech3, il énonce aussi bien l’image
même d’un chant virtuel. Et, à leur tour, les images sonores qui
découlent de la musique incitent au rêve, ou à la rêverie, et à
l’envolée vers elle.
Igor Stravinsky rejetait pourtant avec fermeté l’idée selon
laquelle l’écoute de la musique se ferait « sans une part active de
l’œil », critiquant vertement à cette occasion ceux qui, parmi les
auditeurs, préfèrent « l’absence de distractions visuelles » leur
permettant de « s’adonner à des rêvasseries sous le bercement des
sons ». Et d’ajouter, sévère : « C’est là ce qu’ils aiment bien mieux
que la musique elle-même »4. Les « rêvasseries » qu’évoque le compositeur, et contre lesquelles son sérieux et son métier exigeant
s’élèvent avec raison — mais aussi contre lesquelles tout auditeur
a dû sans doute lutter âprement au moins une fois, sinon bien
Alain, Vingt leçons sur les Beaux-Arts, Gallimard, 1931, pp. 88-89.
E. Canetti, Les voix de Marrakech, Albin Michel, 1980, p. 34.
4
I. Stravinsky, Chroniques de ma vie, Gonthier/Médiations, 1971, pp. 8283.
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souvent — ne sont certes que de regrettables dégradations d’un
état d’écoute plus noble, un état attentif et pleinement conscient,
qui demeure, si l’on peut dire, les oreilles sur terre, ancré dans la
matérialité des gestes instrumentaux, des conduites corporelles,
et dans leur juste considération vis-à-vis de la notation musicale
— la partition de l’œuvre. Dans le meilleur des cas, l’attitude de
l’interprète rentre en symbiose parfaite avec elle.
L’œil contre l’oreille.
Stravinsky, qui ne conçoit donc pas l’appréhension de la
musique sans le secours du regard, critique ici le principe d’évasion
de l’auditeur moyen, lui demandant au contraire sa participation, sa
collaboration volontaires (voire volontaristes !) au processus de compréhension de l’œuvre musicale. À croire qu’il ne porte que des
jugements défavorables sur l’oreille, ne lui faisant aucune confiance.
Et pourtant, malgré le point de vue stravinskyen qui est celui d’un
compositeur, d’un créateur, parfaitement compréhensible et défendable, pour nous, auditeurs qui l’écoutons — placés donc du côté
opposé —, la musique est bel et bien d’abord ce que Ernst Bloch
appelait si justement un « bonheur d’aveugles » : bonheur dans
lequel « les yeux, émus, se ferment », mais « l’obscurité qui les remplit rappelle ou évoque quelque chose »5. Ce qui ne recouvre pas ici
E. Bloch, Le Principe Espérance, tome III, Gallimard, 1991, pp. 173-174.
Ouvrons ici une parenthèse pour préciser que l’auditeur n’est pas seul
à fermer les yeux, on le sait : l’interprète et le chef d’orchestre en effet,
alors qu’ils exécutent l’œuvre, et pour des motifs qui ne sont pas exactement semblables (concentration, inspiration, sensibilité — et au pire,
excès de manières, jeu d’acteur destinés à « impressionner l’auditeur
par des moyens extra-artistiques », note Stravinsky [loc. cit.]), sont aussi
amenés à clore le regard, en certaines circonstances. Reste alors à analyser les causes qui diffèrent entre les deux positions opposées vis-à-vis
de l’œuvre musicale, jouée, ou écoutée.
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le niveau d’une rêvasserie passive : bien au contraire, celui d’une
compréhension aiguë de l’œuvre à un moment donné.
Que voyons-nous lorsque nous écoutons (et que les paupières
soient ouvertes ou closes n’importe pas ici) ? Par exemple le temps
passé, le nôtre, car si le temps ordinaire se disloque sous l’effet,
l’action des forces rythmico-mélodiques, c’est que la musique est
mémoire : une sépulture du temps, qui repose désormais, au-dessus de laquelle l’auditeur se recueille et médite, s’échappant en
toute liberté parmi ses souvenirs pour fuir son présent. Et si Alain
jugeait que la musique est une « bonne historienne », c’est bien,
écrivait-il, parce qu’elle « conduit en magicienne dans les chemins du souvenir »6. Voilà pourquoi peut-être Stravinsky maudissait les « rêvasseries » qui en découlent tout naturellement.
Dans sa ferme conviction, et sûr de son jugement, Stravinsky
oublie sans doute trop vite que le regard de l’auditeur porté sur la
gestuelle instrumentale du musicien risque de brouiller et de perturber une part de l’écoute. Aussi peut-on contredire la position
qu’il défend : une concentration légèrement trop accentuée de la
vision risque à tout moment de manquer et masquer une part de
l’audition. D’autant que le jeu musical s’accompagne parfois plus
ou moins d’une part de théâtralité : face à son public, le musicien
donne aussi à regarder — s’exprime et s’épand par le corps, se
donne en spectacle comme personnage-personnalité (Stravinsky
ne reconnaît-il pas la « gesticulation superflue de l’exécutant »7 ?).
Mais une extériorisation excessive noie le contenu musical —
risque propre par nature à la forme du spectacle total de l’Opéra,
dans laquelle la musique passerait au second plan au profit du
livret, de l’action dramatique. N’allons pas jusqu’à introduire ici
l’aphorisme de Roger Judrin : « Les sots n’entendent que par les
yeux »8 : ce serait se tromper de débat et fausser une perspective
6
7
8
Alain, Système des Beaux-Arts, Idées-Nrf, 1963, pp. 113 et 135.
Loc. cit.
R. Judrin, Chemin de braise, Lausanne, Éd. de l’Aire, 1981, p. 131.
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appelée de toute façon à se réajuster. Il y a bien, on le comprend,
un difficile équilibre à rétablir entre la nécessité de regarder l’interprète, et celle, tout aussi justifiée, de se passer de la vision pour
que l’oreille conserve ses prérogatives premières, somme toute
naturelles — et qu’il nous paraît ainsi étrange de devoir rappeler.
Mais si, entre l’œil et l’oreille, les sens interfèrent sans cesse
de la sorte, c’est aussi que diverses sollicitations assaillent chacun.
Ainsi se résumerait donc la tension conflictuelle : voir la musique
en l’écoutant, ou l’écouter sans la voir. Or, en la matière, l’assise
de l’oreille comme de l’œil flotte au gré de la musique, chaque
organe étant requis par alternance, par intermittence, par séries
de clignotements, et ce en fonction du type d’écoute que l’auditeur précisément leur délègue.
Aussi bien Jerome Stolnitz nous le rappelle, qui va dans le sens
de Stravinsky : « Tout le monde sait comme il est facile de commencer à penser à d’autres choses pendant qu’on joue de la musique, de
sorte que nous n’en sommes réellement conscients que de temps à
autre. Raison de plus donc pour que nous devions exercer nos facultés à apprécier sa richesse et sa profondeur. C’est comme cela seulement que nous pouvons empêcher notre expérience de devenir,
selon la fameuse expression de Santayana, “une rêverie somnolente
accompagnée de frissons nerveux” ». Et c’est justement dans notre
attitude face à l’œuvre musicale, en exerçant une « attention discernante », souligne Stolnitz, que nous parvenons à apprécier sa plénitude9. Stravinsky n’hésite pas à insister lourdement sur ce point :
« Dans la musique, plus que dans toute autre branche de l’art, la compréhension n’est donnée qu’à ceux qui y apportent un effort actif ».
Mais n’impose-t-il pas là une trop rude et trop sévère contrainte ?
N’écarte-t-il pas, en les pré-sélectionnant, de futurs auditeurs qui ne
possèderaient pas une connaissance suffisante, « un certain degré de
développement musical et de culture intellectuelle » ? C’est qu’en
J. Stolnitz, « L’attitude esthétique », in Danielle Lories (prés.), Philosophie analytique et esthétique, Méridiens Klincksieck, 1988, pp. 109-110.
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défendant avec vigueur la musique vivante, par laquelle l’auditoire
observe les musiciens jouer, il critique surtout la musique diffusée et
enregistrée qu’il n’hésite pas à qualifier de « mensonge musical »10.
Là encore, les ardeurs du compositeur se relativisent lorsqu’on
prend la peine de relire les analyses fines et détaillées de Gisèle Brelet, qui viennent infirmer ses dires. Selon elle, à l’inverse, « la
musique enregistrée peut être musique vivante » car « il est des
disques où l’exécutant, invisible de corps, est intensément présent
par son âme et par l’intériorité de ses gestes, recueillis par les
sons ». Or, en concert, précise-t-elle — l’argumentaire de Stravinsky
s’effondre ici —, l’interprète « vous impose sa présence corporelle et
spirituelle, vous possède par le pouvoir de son geste, vous tient sous
son empire, et agit directement sur vous ». Le coup de grâce tombe
lorsque Brelet écrit que les « gestes visibles » de l’instrumentiste, par
lesquels la musique « s’extériorise », sont « au service d’un geste invisible, confondu avec le déploiement même de l’arabesque sonore ».
Qu’en conséquence, « le geste musical est avant tout […] geste invisible et presque immatériel […] geste de l’âme, rebelle à l’objectivation »11. Voilà pourquoi les faveurs de l’oreille reprennent ici leurs
droits, écartant les dangers d’une mainmise oculaire sur la musique.
Parenthèse : artifices de visibilité.
Quant aux musiques populaires de notre époque, qu’il faut
bien évoquer pour leurs travers, notamment les renversements
10
Op. cit., pp. 164-165 et 176. Sur ce dernier point, il faut évidemment se
replacer dans le contexte de l’époque (les années 1930) pour mieux
resituer les affirmations du compositeur et les discuter. Dans les dernières pages de sa Poétique musicale (Plon, 1952), Stravinsky revient sur
ce devoir visuel envers l’œuvre musicale.
11
G. Brelet, L’Interprétation créatrice, P.U.F., 1951, tome II, pp. 409 et 408,
et tome I, p. 11.
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insensés qu’elles opèrent des pôles œil-oreille, force est de reconnaître qu’elles ne peuvent être que vues et qu’elles n’existeraient
pas sans la vision, cette « pulsion scopique » qu’évoque J.-L. Evard.
Au point qu’en elles s’est installée une dictature triomphante de
l’œil tenant l’oreille en esclavage : le premier, en quelque sorte, galvanise la seconde. Car si le clip vidéo apporte une visibilité à la formulation audio d’une chanson, sa version première, visibilité qui
n’est autre que support promotionnel à son « lancement » sur le
« marché », il empiète en même temps sur les propriétés du seul
terrain sonore en le noyant sous l’implacable force de séduction et
d’entraînement des images. Noyade qu’aucun sauvetage désormais
n’évite plus puisque l’image est devenue la condition même de la
survie du son — sa bouée. L’arrogance ou l’ineptie du « tape-à-l’œil
» vient recouvrir la pauvreté du contenu, ou plutôt du vide musical
dans une débauche de moyens mis à la disposition du chanteur. La
mise en scène et le spectacle volent au secours du pauvre petit air à
fredonner, ou du rythme binaire, à quoi se réduit la chansonnette,
sans autre ambition finale que d’accéder aux brillances de la visibilité — à la mémoire visuelle de l’image-emprise qui s’incruste dans
les têtes. D’où, point critique et terminal, la dilution de la faible
sphère sonore dans la puissance de l’océan des images, univers
oculaire, qui l’engloutit tout entière. L’éclipse du son apparaît dans
toute son évidence ! Dans ce cas précis, c’est parce que tout son se
couple à une imagerie parasite que la sphère audiovisuelle globale
prend toute son ampleur dans le débordement, l’empiètement de
chaque domaine l’un sur l’autre.
Musiques du regard, écritures aphones.
Reprenons ici le cours de notre démonstration antérieure.
N’apparaît-il pas dès lors quelque peu paradoxal que l’histoire de la
musique ait connu une période de son écriture dénommée musique
pour les yeux ? Que, à partir de l’Ars subtilior (fin de la période
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médiévale) jusqu’aux madrigalismes maniéristes de la Renaissance,
des graphies extravagantes et sophistiquées (à la manière approximative, si l’on veut, des calligrammes d’Apollinaire) viennent enluminer avec préciosité les partitions des interprètes, à qui elles se
destinent exclusivement ? De telles initiatives, chez les compositeurs de ces œuvres certes fort élitistes, en seront une illustration
marquante. Quelques siècles plus tard, E. Varèse condamnera la
« musique de papier » de son temps (les années 1950), musique « lue
mais qui, auditivement, n’a aucune signification » : pour lui, en
toute logique, la musique, en tant que « phénomène physique », a
« besoin de sons pour exister » car le son est l’essence musicale —
rappel indispensable en une époque cultivant le goût majoritaire
de l’écriture à outrance12. Il est vrai que la musique écrite s’enfermera dans un fétichisme des signes et de la notation (on parlera de
« partitions graphiques » au sujet des œuvres mobiles et aléatoires,
plus proches de dessins abstraits ou de cartographies cryptophoniques) poussé jusqu’aux hiéroglyphes hermétiques — ainsi en estil du compositeur Brian Ferneyhough et de ses « caprices cabalistiques et névroses optiques » (Philippe Schoeller).
Le sacre de l’oreille.
La musique n’a-t-elle pas à lutter en elle-même et par ellemême, par ses ressources internes, contre sa sur-exposition au
regard intrigué qui l’observe dans ses moindres recoins ? Ne doitelle pas, résolue, se parer d’un voile qui la protège des interférences visuelles ? S’il convient de prendre Stravinsky à contrepied, c’est non seulement pour défendre l’auditeur pratiquant
12
Georges Charbonnier, Entretiens avec Edgard Varèse, P. Belfond, 1970,
p. 88. Au sujet de la surenchère de l’écriture dans l’histoire de la
musique, nous renvoyons à François-Bernard Mâche, Musique, Mythe,
Nature, Méridiens Klincksieck, 1991, pp. 94-97.
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une écoute légèrement distanciée, « survolante », qui serait parfois
susceptible d’entendre mieux, ou davantage, qu’un auditeur
attentif fixant des yeux son objet avec effort et crispation, mais
aussi parce que la création musicale a depuis évolué sous des
formes inattendues, qui ne correspondent plus aux seuls interprètes auxquels s’attachait le compositeur. Cette lutte, la musique
acousmatique (diffusée par amplification) l’a de fait contournée :
son auditeur, n’ayant absolument rien à voir en l’absence de tout
interprète, peut se concentrer tout entier sur l’écoute des sons
produits par des enceintes positionnées autour de lui ou face à
lui. La sollicitation de l’oreille atteint son sommet. Musique qui
promeut une écoute aveugle par essence — celle-là même, souvenons-nous, dont Canetti aimait à user face aux voix humaines.
Selon ce modèle, tout un pan de l’écoute musicale se rangerait
ainsi sous la maxime de saint Bernard : « Tu désires voir, écoute :
l’audition est un degré vers la vision »13.
Cependant, tout ne saurait être aussi simple et se réduire à
une bipolarité sensorielle tranchée. « Quand un homme écoute
une symphonie, son oreille perçoit les sons, mais derrière eux et
par eux, à travers cette transparente rosace que leurs entrelacs
dessinent soudain et font doucement luire en la découpant dans
l’opacité du silence, notre esprit perçoit la musique ». Que ce soit
l’esprit qui accueille la musique, par le biais des sons frappant
l’oreille, comme le fait entendre ici Charles Mauron14, dessine une
perspective subtile, à la fois plus ambitieuse et plus précise de
l’acte auditif considéré dans son intelligence sensible. Peut-être
Mauron détiendrait-il l’un des mots provisoires de la fin : la musique
passe par l’esprit qui en fait la synthèse, et voici évanoui comme
par enchantement le vieux clivage œil/oreille — quels que soient les
degrés d’attention auditive ou visuelle ! Mais on y soupçonnerait
Citée par Raymond Court, in Le Voir et la Voix, Éd. du Cerf, 1997,
p. 113, avec son commentaire développé autour d’elle.
14
Sagesse de l’eau, R. Laffont, 1945, p. 66.
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un probable subterfuge fait pour échapper à la délicatesse tendue
des deux rivaux. Dans cette lutte, Michel Serres rappelle toutefois
que la mythologie nous apporte en définitive une réponse étonnante, mais vérifiable par chacun : l’œil est vaincu par l’oreille car
la musique fait pleurer — les larmes obstruent la vision15. Bouleversante révélation de l’écoute au contact de l’élément sonore,
seule avec l’invisible qu’elle rencontre.
Matthieu GUILLOT.
15
Cf. Les cinq sens, Grasset, 1985, pp. 46-47.
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