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Direction Générale du Trésor
et de la Politique Économique
mée. Cette méthode est sujette, comme la précédente,
au problème lié à l’instabilité des relations structurelles
sous-jacentes mais aussi aux difficultés classiques liées
aux régressions économétriques telles que le choix des
variables explicatives et la manière dont elles sont
mesurées. Cette métode est parfois appelée BEER ou
PEER (Behavioural ou Permanent Equilibrium
Exchange Rate).
Plusieurs études concluent que le taux de change
réel chinois ne s'est pas apprécié autant que
l'effet Balassa-Samuelson ne permettait de le pré-
dire et concluent donc à sa sous-évaluation. Les
conclusions varient (voir tableau 1) de 0%8 à 49%9 en
passant par des valeurs intermédiaires10. Les écarts
s'expliquent par l'échantillon de pays utilisé pour esti-
mer l'équation ainsi que par les variables explicatives
qui y sont incluses.
Deux difficultés théoriques apparaissent dans l'appli-
cation de cette méthode au cas chinois comme le font
remarquer S. Dunaway et X. Li11. Tout d’abord la
mesure de l’effet Balassa-Samuelson nécessite que le
marché de l'emploi soit proche de l'équilibre afin que
les hausses de productivité se traduisent par une aug-
mentation des salaires et non par une diminution du
rationnement de l'offre de travail. Or dans le cas de
la Chine, le nombre de personnes sans emploi ou
sous-employées avoisine 200 millions ce qui fra-
gilise l'argument.
Deuxièmement, l’effet Balassa-Samuelson repose sur
une corrélation importante entre la variation des salai-
res et celle des prix. Or elle n’apparaît pas aussi forte
en Chine qu'elle peut l'être dans une économie de
marché classique dans la mesure où une partie des
prix est encore contrôlée par l’État et que la libé-
ralisation en cours n’intervient pas de manière
uniforme dans tous les secteurs.
Ces deux difficultés affaiblissent donc singulièrement
l’argument selon lequel l'effet Balassa-Samuelson pré-
dirait un taux de change réel supérieur à celui observé
dans la mesure où la structure actuelle de l'économie
chinoise ne lui permet pas de jouer à plein. La sous-
évaluation du taux de change est donc vraisem-
blablement inférieure à celle qui est mesurée
dans les études précédemment citées.
1.3 L'évolution récente des fondamentaux
Les estimations du taux de change réel d'équilibre
concluent toutes à une sous-évaluation mais divergent
quant à son ampleur. Elles doivent être traitées
avec prudence en raison des difficultés techni-
ques soulevées précédemment mais aussi de
l'évolution rapide de la situation. En effet, les
séries statistiques utilisées dans les études citées ci-
dessus portent pour la plupart sur 2003 ou 2004 et ne
prennent donc pas en compte l'évolution récente du
compte courant et des réserves de change chinois. La
situation a fortement évolué depuis un an. Les
réserves de change ont crû de plus de 35% en 2005
comme le montre le graphique 1. L'excédent du
compte courant est passé de 4,2% du PIB en 2004
à 7,3% en 2005 alors que les flux nets de capitaux
ont représenté un montant à peu près équivalent
(voir graphique 2). Si l'afflux de capitaux peut en par-
tie s'expliquer par l'anticipation des marchés de voir le
taux de change s'apprécier, l'augmentation de l'excé-
dent du compte courant plaide en faveur d'une sous-
évaluation réelle accrue.
Graphique 1 : réserves de change de la Banque
populaire de Chine
Source : International Financial Statistics (FMI).
8. Lee J., G.M. Milesi-Feretti, L. Ricci et S. Jayanthi (2005), «Equili-
brium real exchange rate: estimates for industrial countries and
emerging markets», mimeo IMF.
9. Coudert V. et C. Couharde (2005), «Real equilibrium exchange rate
in China», CEPII Working Paper N° 2005-01.
10.Frankel J. (2004), «On the Renminbi: the choice between adjust-
ment under a fixed exchange rate and adjustment under a flexible
rate», NBER Working Paper 11274.
Encadré 2 : l'effet Balassa-Samuelson
La productivité dans le secteur des biens échangeables
croît plus vite que celle du secteur des biens non échan-
geables en raison de la concurrence internationale. Les
salaires dans le secteur des biens échangeables augmen-
tent en proportion de la productivité, entrainant par la
suite les salaires du secteur des biens non-échangeables,
qui se retrouvent à croître plus vite que la productivité
de leur secteur. Il en résulte une augmentation des prix
relatifs des biens non-échangeables par rapport aux
biens échangeables.
En aggrégé, pour un pays «en rattrapage» dont le niveau
de la productivité est plus faible que dans le reste du
monde mais dont les gains de productivité sont forts,
ces hausses de salaires vont être plus forte qu’à l’étran-
ger ; les prix domestiques ont donc tendance à croître
plus vite que les prix du reste du monde ce qui induit
une appréciation réelle du taux de change.
11. Dunaway S. et X. Li (2005), «Estimating China's» equilibrium
«exchange rate», IMF Working Paper 05/202.
Mds $
0
300
600
900
2001 2002 2003 2004 2005