1 Charte éthique pour le recueil, la conservation et l`utilisation de

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Charte éthique pour le recueil, la conservation et l'utilisation de matériel corporel
humain dans le cadre de la recherche scientifique, établie par le groupe de travail BWB
Groupe de travail "Recommandations éthico-légales" BWB »
Les biobanques ont comme principale mission, la collecte, la conservation et la mise à
disposition de matériel corporel humain (MCH). Il peut s’agir de matériel prélevé spécifiquement
dans un but de recherche (usage primaire) ou de matériel corporel résiduel (cf. Loi 12/2008 Art 2 33°).
Le recueil et l'utilisation d'échantillons biologiques sont subordonnés au respect des règles éthicolégales.
A travers leurs activités, les biobanques exercent une fonction publique en participant au
progrès de la recherche scientifique dans l'intérêt général de la population. Il est fortement
recommandé que la constitution et les activités des biobanques soient régulées au niveau national et
international aux moyens de procédures standardisées et des critères de qualités partagés.
La présente charte est rédigée afin de garantir le bon usage du matériel biologique et des
données associées et la protection de droits de patients, la confidentialité et la protection de la vie
privée.
Cette initiative a pour but de développer une série de recommandations concernant des aspects
critiques liés à l’obtention et l'utilisation du matériel corporel humain pour la recherche scientifique.
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Article 1 :
Conservation de matériel à destination des soins du patient
Une partie suffisante et pertinente du matériel corporel humain doit être stockée en réserve au bénéfice
du donneur pour permettre d’établir, parfaire ou compléter ultérieurement le diagnostic ou le
traitement du donneur (cf. loi 12/2008 art 8§1).
Article 2 :
Information et droit d’opposition du patient
L’information et le consentement du patient peuvent prendre différentes formes en fonction du cadre
dans lequel est effectué le prélèvement.
Usage primaire d’un échantillon
L’usage primaire consiste en tout usage de MCH pour lequel le donneur a spécifiquement donné son
consentement dans le cadre du prélèvement. Par exemple, des prélèvements effectués de manière
spécifique pour un projet de recherche dont la finalité a été précisée et pour lequel un avis positif a été
émis par un comité d’éthique tel que visé dans la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur
la personne humaine.
L’information doit être délivrée par un médecin ou un professionnel de la santé en mesure d’apporter
les explications aux patients si nécessaire.
Le consentement doit être éclairé (information donnée sur les procédures spécifiques au projet prélèvement et obtention de données cliniques-, l’usage et les objectifs du projet), daté, signé et contre
signé par la personne qui présente le consentement.
Le patient doit avoir donné son accord (consentement signé) préalablement au prélèvement et le cas
échéant à toute autre procédure supplémentaire s'écartant de la pratique clinique de routine (effectuée
pour sélectionner les sujets, acquérir des données cliniques, et/ou caractériser le MCH).
Le consentement peut être révoqué à tout moment avant que le MCH n’ait subi la première opération
qui suit son obtention. Le consentement doit être conservé dans le dossier médical du patient (Loi
19.12.2008 ; art10 ; §5).
L’obtention du MCH et des données cliniques associées se fera dans le respect des principes de la
Déclaration d'Helsinki, et de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne
humaine et dans la mesure du possible dans le respect des ICH-GCP (International Conference on
Harmonisation - Good Clinical Practice).
Usage secondaire d’un échantillon
L’usage secondaire consiste en tout usage de MCH autre que celui pour lequel le donneur a donné son
consentement dans le cadre du prélèvement. Par exemple des prélèvements effectués dans le cadre
d’un projet de recherche (usage primaire) mais réorienté vers un autre projet de recherche que celui
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pour lequel le donneur a donné son consentement. Le donneur doit être averti et son consentement
écrit explicite doit être obtenu par le gestionnaire de la biobanque.
S’il est impossible de demander le consentement sur l’utilisation secondaire, ou lorsque cette demande
serait exceptionnellement inappropriée, il peut être procédé à cette utilisation secondaire après qu’un
Comité d’Ethique visé à l’article 11, §3 alinéa 2 de la loi du 7 mai 2004 (relative aux expérimentations
sur la personne humaine) ait émis un avis positif sur l’utilisation du matériel corporel humain (cfr. Loi
dec 2008 Art 20§1).
Matériel corporel humain « résiduel »
Il s’agit d’une partie du matériel corporel humain prélevée en vue de l’établissement du diagnostic, du
traitement ou du suivi de la maladie du patient qui, après qu’une partie suffisante et pertinente ait été
conservée pour établir, parfaire ou compléter le diagnostic ou le traitement du donneur sur la base de
nouvelles données scientifiques, est redondante par rapport à ces objectifs et qui pourrait dès lors être
détruite (loi 19.12.2008, art 2 ; 33).
Deux conditions à son utilisation pour la recherche scientifique doivent être réunies :
- le patient doit avoir été correctement informé de l’utilisation qui sera faite de son matériel
corporel humain résiduel et des données associées ;
- le patient n’a pas exprimé d’opposition à l’utilisation de son matériel corporel humain et des
données associées à des fins de recherche,
Le consentement du patient est donné selon le principe de l’absence d’opposition (ou opting out), cela
signifie que le consentement est réputé avoir été donné pour autant que le patient ou son représentant
légal n’aient pas communiqué préalablement à toute opération effectuée avec ce matériel corporel
humain, leur refus (loi 19.12.2008 ; ch V Art20 §2).
Le patient est informé par écrit de ses droits via un document d’information à l’admission dans
l’hôpital et/ou des informations sur le site web de l’hôpital. Le patient a le droit d’émettre son
opposition à tout moment pour autant que les échantillons n’aient pas encore été utilisés (pour ce faire,
un formulaire d’opposition doit être accessible). Cette opposition doit figurer dans le dossier médical.
Afin de s'assurer que le patient ait été dument informé et qu'il ait eu la possibilité de s'opposer, un
formulaire de consentement peut être présenté au patient.
Il revient à l’équipe médicale de juger du moment le plus adapté pour informer le patient et lui faire
signer un consentement. Ce formulaire sera signé, conjointement par le médecin et le patient, et
conservé dans le dossier médical du patient.
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Prélèvements lors d’autopsie
Les prélèvements effectués après le décès du patient doivent répondre à la législation concernant le
prélèvement et la transplantation d’organes. Le consentement est supposé être donné pour autant que
le patient ne s’y soit pas opposé de son vivant (loi du 13 juin 1986 ; art 10-14).
Tout prélèvement de MCH dans un but de recherche scientifique doit être effectué sous la
responsabilité d’un médecin dans un hôpital agréé, tel que visé dans la loi sur les hôpitaux coordonnée
le 7 août 1987, ou dans un hôpital exploité par le Ministère de la Défense nationale (loi 19.12.2008 art
4 §1) cependant si le prélèvement de MCH est exclusivement destiné à l’obtention de celui –ci par une
biobanque notifiée, il peut avoir lieu en dehors d’un hôpital visé ci-dessus.
Article 3 :
Volontés du patient
Le formulaire d'information et/ou consentement ainsi que la lettre d'opposition du patient devraient
être conservé dans le dossier médical ou dans le dossier correspondant au protocole clinique.
Article 4 :
Utilisation du matériel
Contractualisation
Toute utilisation de matériel corporel humain doit faire l’objet d’un partenariat entre la biobanque et le
laboratoire utilisateur. Ce partenariat se présentera sous la forme d’un contrat ou d’une convention
dans lequel seront précisés notamment les objectifs du programme de recherche. Il peut s’agir d’un
partenariat simple avec uniquement mise à disposition de matériel corporel humain ou d’un partenariat
approfondi comprenant un programme scientifique commun.
Tout transfert de matériel et de données doit être formalisé sous la forme d'un accord explicite
(Material Transfert Agreement, MTA) afin de préciser le nombre d'échantillons transmis, le motif du
transfert et le principe de non-utilisation des échantillons après la fin de l'étude concernée. Cet accord
de transfert peut être inclus dans la convention ou le contrat.
La convention et/ou l’accord de transfert de matériel (MTA) forme une convention de transfert de
matériel qui définit non seulement le transfert réel de matériel corporel humain et des données
cliniques associées (si nécessaire), mais également les droits et les engagements de la biobanque, et du
laboratoire utilisateur en ce qui concerne le matériel et les données associées.
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Ces documents devraient traiter les points suivants :
a) Les parties contractantes: la biobanque, le nom de l'entité juridique, l'adresse, le nom de la personne
responsable et sa fonction et le destinataire, les fonctions, nom de l'institution, adresse.
b) les intitulés et les objectifs du programme de recherche;
c) les conditions de transfert:
- les délais définis par les deux parties;
- indiquer avec précision le type et la quantité du matériel biologique;
- le conditionnement;
- le transport;
- les données de traçabilité,
d) les conditions de l'utilisation du matériel corporel humain ou des dérivés: le laboratoire utilisateur
pourra utiliser le matériel biologique à des fins de recherches et dans le cadre du programme du
partenariat. Toute autre utilisation est interdite. Le laboratoire utilisateur ne pourra en aucun cas
vendre le matériel biologique.
e) la nature du matériel biologique: tissu, dérivés, sang, plasma etc.
f) le stockage, la conservation et la traçabilité par le laboratoire utilisateur conformément à la
législation en vigueur;
g) la propriété intellectuelle: modalité de résolution des conflits éventuels;
h) la confidentialité : préciser le champ et la durée de l’obligation de confidentialité de chaque partie;
elle sera étendue à tout sous-traitant auquel chaque partie pourrait faire appel (en prévoir les
modalités) et dont elle restera en tout état de cause entièrement responsable;
i) les publications;
j) les dispositions financières: préciser les frais de préparation/mise à disposition ainsi que les frais de
transport;
k) si des résultats d’analyses générant des informations ayant des conséquences significatives pour l’
état de santé du patient, un rapport relatif aux résultats de la recherche doit être rédigé par le
laboratoire utilisateur à destination du gestionnaire de la biobanque afin que ce dernier puisse gérer la
communication envers le patient.
La biobanque et le laboratoire utilisateur (et leurs établissements respectifs) devraient être d'accord sur
les conditions du MTA avant l'expédition.
Avantages
Les échantillons de MCH ne peuvent pas être vendus; néanmoins une compensation financière
couvrant les frais de préparation, stockage et transport de l'échantillon peut être demandée. Le donneur
peut recevoir une indemnité pour les frais qui sont la conséquence du don.
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Cession des échantillons
Il est fortement recommandé que les biobanques mettent en place des règles explicites définissant
clairement toutes les procédures impliquant la mise à disposition des échantillons. Ces
recommandations devraient définir les critères d'acceptation minimale que les équipes de recherche
doivent accomplir afin d'obtenir les échantillons ainsi que les critères de priorité en cas de demandes
multiples.
L’accès aux matériels biologiques humains et aux données devrait être fondé sur des critères objectifs
et clairement énoncés, et être en conformité avec le consentement éclairé des participants, si
applicable.
Les conditions d’accès des chercheurs devraient être fixées par une convention d’accès. La convention
d'accès doit remplir quelques objectifs:
- une visibilité de l'activité de la biobanque soutenant les activités de recherche;
- une définition claire et consensuelle des processus de mise à disposition des échantillons;
- une transparence des règles d'accès aux collections pour les différents utilisateurs potentiels;
- un retour d'information générale sur l'utilisation du matériel.
La convention d'accès doit respecter les obligations légales en vigueur.
Les conflits d'intérêts peuvent être diminués si la stratégie scientifique concernant la mise à disposition
est clairement définie. Cette stratégie établit les priorités en fonction de l'origine de l'utilisateur et de
l'organisation. Pour définir des critères de priorité à appliquer aux demandes d’accès, la biobanque
peut tenir compte, par exemple, de ses objectifs et de la faisabilité de l’étude proposée, de son bienfondé et d’une évaluation des qualifications du chercheur devant mener à bien la recherche proposée.
La biobanque doit être dotée d’une structure de gouvernance, les responsabilités relatives à sa gestion
devraient y être définies. La structure de gouvernance devrait prévoir un mécanisme d’analyse des
demandes d’accès aux matériels biologiques humains, aux informations et/ou aux données qu’elle
détient. La surveillance peut être scientifique, éthique, sociale et /ou réglementaire. Ces mécanismes
peuvent ainsi prendre la forme de comités d’examen interne, de comités d’éthique, de comités
scientifiques, de comités consultatifs scientifiques, etc.
La Convention d'accès doit définir les obligations et recommandations de l'utilisateur:
- retour des résultats (bruts) de la recherche au propriétaire des ressources en vue de les enrichir selon
les conditions préétablies;
- publication des résultats de la recherche et/ou diffusion auprès d’un public plus large, et de citer la
biobanque dans les publications;
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- l’obligation d’agir en respectant les termes du consentement donné par les participants, et toutes les
procédures à suivre à cas de retrait du consentement ;
- l’obligation d’agir conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables, et le cas
échéant d’obtenir une approbation éthique ;
- l’obligation de préserver la confidentialité et/ou de maintenir l’anonymisation (et de ne pas tenter
d’identifier ou de recontacter les participants) ;
- interdiction de transfert des données et matériels vers des tierces parties sans amendement de la
convention d’accès;
- le retour ou l’élimination des échantillons résiduels à la fin d’un projet ;
Publications
Les biobanques sont les plateformes assurant l'accumulation, le partage et le transfert des
connaissances et technologies. Il nous paraît important qu’elles exigent des équipes de recherche ayant
utilisé le matériel un feed-back sur les tests afin de rendre les informations obtenues disponibles pour
la communauté scientifique. Il est recommandable, pour les mises à disposition, de favoriser les
équipes de recherche ayant des publications dans des revues scientifiques lues par un public large.
La biobanque devrait exiger de l'utilisateur des rapports périodiques sur les découvertes et
l'avancement des recherches. La quantité et la qualité des articles scientifiques résultant des recherches
sur le matériel constitueront la meilleure garantie du bon usage du matériel pour les patients ayant
participé à la collection.
L'ensemble de ces missions se décline dans une démarche d'évaluation permanente et dans des
conditions de rigueur, de transparence et de sécurité optimales.
Article 5 :
Sécurité-protection des données
Pour leur utilisation dans des projets de recherche scientifique, les échantillons sont généralement
accompagnés de données personnelles du patient.
L’accès et l’utilisation des données personnelles se fait en accord avec la loi relative à la protection de
la vie privée à l’égard des traitements de données à caractères personnel (8/12/1992).
Des précautions doivent être prises afin de sécuriser l’accès à ces données.
Le système de gestion informatique des échantillons et données associées doit être sécurisé. Un
nombre limité de personnes aura accès à la base de données et des niveaux d’accès seront établis en
fonction des utilisateurs (coordinateur, gestionnaire, techniciens n’ont pas les mêmes droits d’accès).
L’utilisateur accepte le règlement de bonne conduite et de respect de la vie privée de personnes en ne
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consultant que les dossiers nécessaires à son travail. Il s’engage au respect du secret médical
concernant les dossiers auxquels il a accédé.
Le personnel doit être formé aux mesures de sécurité et avoir signé un engagement de confidentialité.
Tout transfert d'échantillons accompagnés de données doit faire l'objet d’un codage afin de respecter la
vie privée des patients et bloquer l'accès des chercheurs à toute donnée qui pourrait identifier les
patients sans l’accord explicite de ces derniers.
Avant de libérer du matériel et données, le gestionnaire de la biobanque s’assurera que le projet de
recherche a fait l'objet d'un avis favorable d'un Comité d'Ethique.
Références

Loi du 19 décembre 2008 : Loi relative à l’obtention et à l’utilisation de matériel corporel
humain destiné à des applications médicales humaines ou à des fins de recherche scientifique

Loi du 19 mars 2013 modifications de la loi du 19 décembre 2008 relative à l’obtention et à
l’utilisation de matériel corporel humain destiné à des applications médicales humaines ou à
des fins de recherche scientifique portant des dispositions diverses en matière de santé

Loi du 7 mai 2004 : Loi relative aux expérimentations sur la personne humaine

Loi du 5 juillet 1994 relative au sang et aux dérivés du sang d’origine humaine

Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient

Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de
données à caractères personnel
Rédigé par :
Le groupe de travail « WG1 – éthique » de la biothèque Wallonie- Bruxelles.
Fadi Abdulsater, Sabine Cornélis, Ligia Craciun, Michel Deberg, Bernard-Jean Demarcin, Ruth
Duttman, Catherine Fourneau, Brigitte Genard, Fabienne George, Stéphanie Gofflot, Carlos Graux,
Ilse Gutierrez-Roelens, Edwige Haeltherman, Nathalie Nagy, Myriam Remmelink, Flavienne Sandras,
Sven Saussez.
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