LE XIX°
LEXPANSION INDUSTRIELLE ET URBAINE EN EUROPE – LA COLONISATION
Programme du concours :
La Révolution française et le XIXème siècle
[...]
La France dans une Europe en expansion industrielle et urbaine : le temps du travail en usine, des progrès
techniques, des colonies et de l’émigration.
Pasteur ; Marie Curie
Progressions indicatives pour le cycle 3 de 2012 :
CE2 « La France dans une Europe en expansion industrielle et urbaine : le temps de travail à l’usine, des
progrès techniques
Savoir que les progrès techniques et scientifiques bouleversent les modes de transport et de production (chemin de
fer, usines, électricité, progrès de la médecine…).
Savoir que l’essor industriel transforme la société et que deux nouveaux groupes sociaux s’affirment : ouvriers et
bourgeois.
Identifier, notamment par l’étude d’oeuvres d’art, les transformations de la société.
Repères : Pasteur, Marie Curie.
Vocabulaire : industrie, ouvriers, usine, syndicat, industrialisation (urbanisation, vie quotidienne…), bourgeois, atelier,
vaccin.
CM1 « La France dans une Europe en expansion industrielle et urbaine : les colonies, l’émigration
À partir de cartes, d’images et de différents témoignages ou exemples, savoir que la France, comme d’autres
puissances européennes, conquiert de nouvelles terres et met en place dans les pays conquis des lieux spécialisés
de production en utilisant la main d’oeuvre indigène et importe des produits tropicaux (sucre, café…).
Savoir que la France est un des grands pays colonisateurs et que l’Europe est une terre d’émigration.
Vocabulaire : colonie, métropole, émigration.
I – L’EXPANSION INDUSTRIELLE ET URBAINE EN EUROPE
Le XIX° siècle est celui d’une croissance économique européenne lente et régulière, soutenue par
l’industrialisation et le commerce international, marquée par la croissance démographique et l’urbanisation. Croissance
et industrialisation sont donc liées à des mutations sociales, avec l’apparition d’une classe ouvrière sur laquelle la
classe dirigeante bourgeoise s’appuie pour assurer son propre essor. Ces éléments sont repérables en France, avec des
particularités propres. L’ampleur des mutations a suscité, chez les historiens, l’emploi du terme de révolution pour
qualifier ce mouvement économique et social. L’expression « révolution industrielle », bien qu’absente des
programmes, a été si largement débattue par les historiens qu’elle mérite des éclaircissements.
Selon les termes employés, l’accent est alternativement mis sur la rupture ou la continuité des processus. Ainsi
les historiens anglais parlent-ils plutôt d’accélération, les économistes utilisent le terme de « take off » pour mettre en
valeur l’effet d’entraînement d’un secteur économique (par exemple le chemin de fer) sur l’ensemble de l’économie,
les historiens de l’économie ont révélé la présence en France d’une proto révolution industrielle, pendant laquelle
l’ancien système productif s’est modernisé, avant de céder la place progressivement au nouveau. De manière générale,
le terme de « take off », s’il a été aussi utilisé par des historiens tel que Rostow, est critiqué par les historiens
marxistes : en lisant les phénomènes sous l’angle d’une suite de croissances sectorielles spectaculaires, il fait l’impasse
sur l’articulation de l’économie et du social et nie que les mutations industrielles aient été permises par les évolutions
sociales et en aient suscité en retour. Le « take off » n’est qu’un moment de la période, qui est du reste peu identifiable
en France. Duby relève que le mot de « révolution industrielle » est d’un emploi forcé, tout du moins pour la France, et
préfère parler d’une évolution globale, en se référant à l’expression de l’économiste Markovitch, citant une
« transformation des forces sociales de la production ». J.P.Rioux conserve le terme de « révolution industrielle » pour
son sens politique, c’est ainsi la seule formulation apte, selon lui, à rendre compte de l’évolution brutale des conditions
sociales. La vigueur des débats, encore actuels, y compris sur la géographie du phénomène (quel serait le poids des
Etats-Unis dans la révolution européenne, les poids comparés de la France et de l ‘Angleterre) révèle la complexité de
la période.
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1 - Les particularités françaises : Quatre originalités majeures
-« Une vieille nation de paysans »
C’est la 1ère originali française par rapport à l’Angleterre. La première RI se déroule sur fond de campagnes
« pleines ». Dans les années 1840, le début de l’exode rural en France n’est en rien comparable à l’hémorragie qu’ont
subi les campagnes anglaises. En 1914, la population française est encore rurale à 55%. Mais grâce à l’école et au
chemin de fer, l’uniformisation avec le mode de vie urbain est en marche. Toutes les campagnes entrent dans la sphère
d’attraction des villes dominantes. Néanmoins le modèle rural continue d’imprégner la société française : la masse
démographique que représentent les campagnes alimente un idéal de la « République des Petits », dans lequel se
retrouve la classe moyenne, et qui instrumentalisé par les républicains eux-mêmes à l’occasion des élections (éloge du
retour à la terre). Bourdieu y voit une manipulation de la part de la classe dirigeante qui fait du monde paysan une
classe –objet.
-La consolidation de la proto- industrie
La proto-industrie a commencé au XVI° siècle, c’est un phénomène plutôt rural et familial, dominé par les marchands.
Cette première forme d’industrialisation fut souvent un préalable à l’industrialisation Ce système s’est trouvé consolidé
par la naissance de l’industrie moderne qu’il a fourni dans un premier temps : ainsi cette forme d’industrie artisanale, à
petite échelle, a coexisté avec la grande industrie et le système usinier jusque dans les années 1880, date à laquelle elle
disparaît car elle perd toute efficacité. L’industrialisation française ne se résume pas donc à la grande industrie. Dans la
seconde moitié du XIXe siècle, les salariés de la grande industrie ne représentent que 30% de l’effectif des ouvriers. Et
si la protoindustrie précède souvent la révolution industrielle, la causalité n’est pas systématique : la Basse-Normandie
en France et la Silésie ont conservé au XIX° des structures sociales féodales et des économies rurales.
-La bataille des énergies
Si le « charbon de terre » connaît un essor prodigieux durant tout le XIXème (6% de croissance dans les années 1850),
sa production ne couvre que 70% des besoins (années 1880). Deux sources classiques d’énergie, l’eau et le bois,
concurrencent longtemps le charbon de terre.
Selon l’historien Serge Benoit, l’hydraulique en France est « l’énergie de la première industrialisation. ». A la fin du
Second Empire, la mixité des énergies (eau + vapeur) est fréquente dans les usines. Vers 1880, les 2 énergies
s’équilibrent. La vapeur a souffert d’une image négative : coûteuse, sale, nécessitant un personnel qualifié, elle est
aussi accusée d’être une cause répétée d’accidents. Quant à l’eau, les progrès de l’hydraulique l’ont valorisé entre
1825 et 1875, mais son utilisation incertaine du fait du régime saisonnier des eaux l’a détrôné au profit de la vapeur
dès les années 1880.
Quant au bois, les années 1820 voient la croissance en taille et en nombre des hauts-fourneaux qui l’utilisent. Cela
s’explique par l’abondance des ressources forestières bien aménagées et protégées depuis la période napoléonienne. La
production de fer à la houille l’emporte dès 1837 sur celle de fer au bois, la fonte au coke ne s’imposant qu’en 1853.
-« Le fractionnement des travaux et des entreprises »
La France se caractérise par à la fois une division poussée du travail et le règne de la petite entreprise (- de 10
ouvriers). Contrairement au travail rural de proto-industrie, la petite entreprise se contente de faibles investissements
en machines. C’est le cas de l’horlogerie dans la région de Morez dès le début du XIX°, de la tournerie à Saint-Claude.
L’industrie de la confection, née vers 1830, exploite aussi d’une manière efficace les vieilles recettes du travail
dispersé à domicile, économe d’investissements. Dans tous les cas, même sans machinisme à grande échelle, ces
industries sont des formes modernes de production.
2 - Une nouvelle façon de produire : la grande industrie
Ce qui caractérise la France est bien la coexistence du mode de production proto-industriel et artisanal avec le nouveau
système usinier qui l’emporte progressivement.
-La révolution des transports ou la construction du marché national
Amélioration du réseau routier et fluvial mais les inégalités régionales sont patentes entre la France du Nord bien
équipée et bénéficiant d’un réseau dense de routes pavées alors qu’au Sud le chemin de terre domine. Des canaux sont
achevés (Bourgogne, 1834; Centre, 1838), permettant une intensification du trafic et une baisse des tarifs. La France
du Nord est encore privilégiée. Les transports dans le Midi restent segmentés, la ramification est incomplète.
Cependant, l’espace national est encore loin d’être unifié avant la « révolution ferroviaire ». Dans un premier temps,
les chemins de fer apparaissent comme les affluents des voies navigables. Aussi faut-il éviter de superposer l’histoire
des chemins de fer et celle de l’industrialisation. Jusque dans les années 1870, la route et l’eau assurent l’essentiel du
trafic de marchandises. La loi Guizot de 1842 amène la création d’un réseau à structure radiale autour de Paris. En
1880, le réseau principal est achevé et le plan Freycinet (1878) lance la construction du réseau secondaire.
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L’abaissement des coûts de transport (50% sur la tonne de charbon) et la spécialisation agricole (le vignoble disparaît
du Bassin Parisien au profit d’une ceinture maraîchère) sont deux conséquences parmi d’autres de cette « révolution
ferroviaire ».
-Le temps des machines : « La fabrique, à l’âge de l’industrialisation, est un rassemblement de machines. »
C’est d’abord le cas pour les filatures et le tissage, bien que le tissage à bras et le tissage mécanique s’équilibrent
jusque dans les années 1870. La mécanisation touche d’autres branches industrielles comme la fabrication du papier et
bien sûr la sidérurgie et la métallurgie (Le Creusot). En 1881, la machine à vapeur a cause gagnée en France. A la
veille de la guerre, la grande industrie est devenue le mode de production dominant. Parallèlement de développent les
sciences et techniques. Rioux note que la révolution des techniques n’est qu’un élément parmi d’autres de la révolution
industrielle, il n’est en aucun cas un élément plus déterminant que la source d’énergie
3 - Les classes ouvrières
Par le choc des transformations qu’elle impose, l’industrialisation transforme en profondeur les sociétés européennes.
De nouvelles hiérarchies sociales se mettent en place, de nouvelles tensions apparaissent. Les bourgeoisies triomphent
au sens où leur nombre croît, en particulier les classes moyennes, et leurs valeurs l’emportent (méritocratie fondée sur
le travail, l’éducation, l’épargne). Les bourgeoisies s’imposent comme une élite sociale, possédant le capital et les
moyens de production. Il n’y a pas d’émergence ex nihilo de la grande bourgeoisie : celle-ci jouit alors de fortunes
héritées, souvent foncières ou financières, qu’elle convertit par des investissements risqués en fortune industrielle dans
les nouvelles productions du XIX°. Parallèlement se développe un monde ouvrier pluriel. Si le travail manuel, la
précarité du quotidien, l’enfermement dans l’usine et le mode vie caractérisent le monde ouvrier, il vaut mieux parler
de classes ouvrières car les divisions internes, la coexistence de l’ancien et du nouveau les traversent.
-Un monde multiple
Au sein de la société les ouvriers sont minoritaires puisqu’ils ne représentent que 25% de la population active, et en
1906, le secteur industriel est encore en deuxième position derrière l’agriculture. La coexistence de 2 mondes
industriels accroît les différences de qualification et produit la hiérarchisation des postes de travail. La très grande
mobilité des ouvriers (Lyon recrute jusque dans le Vivarais, le Forez et en Savoie) est une source de division. Une
immigration importante (38 000 immigrés en 1851, 1 million en 1880) ajoute aux divisions, et stimule une violente
xénophobie, dont les Italiens sont les premières victimes.
-Les modes de vie ouvriers
L’étude des budgets révèle la part prédominante de la nourriture (60-70%) puis du logement (12-16%) et des
vêtements (7-8%). La condition ouvrière est en fait sous l’emprise de la nécessi immédiate. Le logement, la vie
familiale, l’espace privé sont sacrifiés. D’où l’importance de la rue ou des lieux publics et le développement de la
sociabilité de quartier et d’association qui comptent certainement dans la construction d’une conscience de classe. La
durée quotidienne du travail dans la première moitié du siècle est de 12 à 15 heures, 10 à 11 ensuite. Mais la réduction
du temps de travail s’accompagne de l’intensification du travail et de sa militarisation (discipline, cloches et sirène
rythmant la vie ouvrière de l’usine).
4 – La seconde industrialisation (vers 1880-1940)
Surtout entre les deux guerres. Quelques éléments :
La seconde industrialisation marque l’apogée des secteurs anciens nés de la première industrialisation : l’extraction du
charbon, la transformation des minerais poursuivent leur développement dans toutes l’Europe. De nouveaux procédés
permettent la production massive de l’acier, plus résistant que le fer et plus souple que la fonte. La construction des
réseaux ferrés se poursuit, surtout en Europe méridionale il était peu présent, et alimente ainsi la croissance
industrielle.
La seconde industrialisation est marquée aussi par l’émergence de nouveaux secteurs. La « fée électricité » (maîtrisée
dans sa grande production et son transport dans les années 1890) s’impose vite. Elle transforme l’espace de l’usine et
permet le travail de nuit, facilite les déplacements et les manipulations. Le rendement ouvrier aurait progressé d’1/4.
En 1913, le réseau français n’atteint pas la moitié du réseau allemand. La seconde poussée d’électrification se situe
dans les années 1920. A l’échelle régionale, l’hydroélectricité induit la métallurgie de l’aluminium et l’électrochimie .
Quant à la révolution automobile, sa naissance, dans la dernière décennie du XIXe siècle, a lieu sous le signe du
bricolage et de la micro-entreprise. Une vieille compagnie métallurgique (Peugeot), un négociant du textile (Renault),
un aristocrate (le marquis de Dion), un artisan (Marius Berliet) font de la France le premier constructeur mondial
jusqu’en 1904.
La Grande Dépression de la fin du siècle (1873-1898) contraint les entreprises européennes à se moderniser ou
disparaître. Le modèle de la grande usine s’impose dans la métallurgie et la sidérurgie, notamment en Allemagne. Dans
les autres secteurs, le modèle des petites structures productives domine.
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La seconde industrialisation induit un reclassement des puissances européennes : l’Angleterre perd son rôle dominant,
du fait de bassins miniers trop onéreux à exploiter et d’une industrie sidérurgique vieillissante dans ses équipements.
La France, la Russie et surtout l’Allemagne la surpassent : automobile puis construction électrique et chimie en France,
sidérurgie et textile de la Ruhr allemande, mais aussi chimie, constructions mécaniques et électriques appuyées sur la
recherche appliquée en Allemagne, puissante industrie lourde en URSS après la guerre.
5 – L’urbanisation de la France
-La croissance urbaine en France
Indéniable mais à un rythme plus lent que les autres pays industriels : en 110 ans, la population urbaine en France est
multipliée par 5, par 10 au Royaume Uni, par 16 dans les pays germaniques, 130 aux Etats-Unis. La croissance urbaine
touche surtout les grandes villes comme Paris qui concentre 3% de la population en 1851, 10% en 1914, les villes
minières telles que Lens ou Liévin et les villes industrielles à l’instar du Creusot. La population urbaine en devient
majoritaire que dans les années 1930 (si l’on retient le seuil de 2000 habitants agglomérés). La France est caractérisée
par une poussière de petites et moyennes villes, aux fonctions commerciales et administratives.
L’urbanisation va de paire avec la croissance des activités de service. Associée au développement du fonctionnariat
d’Etat, à celui des administrations, elle multiplie les emplois salariés et indépendants dans les villes et contribue au
développement d’une classe moyenne nombreuse.
La croissance urbaine s’est nourrie par l’exode rural des populations agricoles et artisanes, et par des dynamiques
démographiques propres.
-La crise urbaine et les solutions françaises
Densification des centres-villes, saturation démographique et par voie de conséquence des problèmes sanitaires (dont
l’exemple le plus meurtrier est l’épidémie de choléra en 1832), une circulation devenue très difficile, des taux de
mortalité qui grimpent dans les quartiers surpeuplés …D’où la décision de Napoléon III de moderniser la ville et d’en
confier la réalisation à Haussmann, préfet de la Seine dès 1853 et ce pendant 17 ans.
Le mode d’intervention est la percée, voie nouvelle qui entame le tissu urbain ancien. C’est ainsi que naissent la
« Grande croisée de Paris » (rue de Rivoli / boulevards St Michel et Sébastopol) et d’autres grandes avenues qui
mettent fin au Paris médiéval. Mais l’Hausmannisation, c’est aussi un réseau souterrain d’égouts qui permettent de
séparer eaux usées et eaux propres et donc de régler le problème du choléra, des espaces verts (bois de Boulogne et de
Vincennes réalisés par le grenoblois Alphand), l’éclairage au gaz et la construction d’immeubles. Toutes les villes
françaises se sont, peu ou prou, inspirées de ces travaux. Ils ont contribué à résoudre la crise urbaine même si la
croissance des banlieues n’est pas maîtrisée. L’insuffisance des transports empêche une véritable décongestion du
centre-ville. Enfin, la ségrégation spatiale et horizontale est renforcée.
Conclusion
En France pas de révolution industrielle sur le modèle anglais. Plutôt une « transition industrielle ». Une
entrée dans la civilisation industrielle et urbaine en suivant un modèle original (coexistence de 2 systèmes de
production, importance des petites entreprises et de l’artisanat soit directement soit par le biais de la sous-traitance,
« ...En combinant les énergies et les formes d’organisation du travail, l’industrialisation à la française a pu tirer partie
des deux systèmes. »,1 même si sur les marchés internationaux, les produits haut de gamme (soieries, lingerie, modes
vestimentaires, bijoux) sont la meilleure chance de l’industrie française).
II- L’IMPÉRIALISME EUROPÉEN ET LA CONQUÊTE DU MONDE
Faut-il voir dans la conquête européenne du monde à la fin du XIX e siècle une simple continuation de l’essor
lié au Grandes Découvertes ?
La colonisation recouvre des réalités bien différentes, selon les pays colonisateurs mais aussi pour une même
puissance selon les époques de conquête et le rôle attribué à tel ou tel territoire. Les puissances européennes se sont
intéressées à la colonisation dans des contextes et à des époques différentes, la révolution industrielle du XIX e siècle
devenant une cause majeure d’impérialisme généralisé. Le portrait des colonies est un miroir des métropoles. Du XIX
e au XX e siècle, la politique coloniale s’est affirmée dans des enjeux nationaux et internationaux très différents,
jusqu’à devenir un problème majeur à la veille de la Première guerre mondiale.
1 - Le nouveau contexte de la révolution industrielle : l’impérialisme.
La révolution industrielle s’est développée en Angleterre dès le XVIII e siècle, comme un phénomène majeur
lié au besoin de cette nation marchande et insulaire de pourvoir son économie en productions décuplées en quantité,
1 J.P. RIOUX, La révolution industrielle 1780-1880, Points-Seuil, 1971, réédition 1989.
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aux prix bas, pour nourrir son commerce. L’industrialisation fondée sur le machinisme, lui-même dépendant de
l’énergie du la vapeur produite à l’aide du charbon, était interne au pays et produisait un bouleversement économique
(exode rural et spécialisation agricole) et social (monde ouvrier prolétarisé, urbanisation, domination de la classe
marchande). Il était évident que ce bouleversement allait atteindre l’espace colonial, déjà développé de l’Amérique du
Nord à l’Inde. Ainsi la colonie devint-elle un débouché proté par la puissance militaire, autant qu’un lieu de
confiscation des richesses locales : la guerre d’Indépendance des Etats-Unis (1776) se présente comme une
revendication des colonies à ne plus subir les interdictions de la métropole, soucieuse de préserver son monopole
commercial. D’autre part, la colonie devenait un déversoir pour les masses prolétarisées des banlieues industrielles,
lorsque l’industrie ne pouvait plus assumer ces flots issus des campagnes ou d’une démographie en plein essor :
Australie, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande, Canada, toutes ces terres de peuplement participent d’une
mondialisation de la patrie britannique, vécue à l’époque comme le point d’orgue de l’affirmation de l’Etat- nation.
Terre de peuplement, d’exploitation, escales pour les flottes de navires à vapeur, les colonies du XIX e siècle prenaient
forme et les autres nations européennes allaient emboîter le pas de l’Angleterre avec quelques décennies de retard mais
dans des termes semblables …
2 - Le colonialisme français au XIX°siècle.
L’empire colonial français appartient à la seconde vague de la colonisation, engendrée par la volonté royale
dès le XVI e siècle, mais développé par la monarchie absolue au siècle suivant dans le contexte de l’enrichissement du
trésor royal et des villes marchandes de la côte atlantique. Le XVII est une période de reflux de la tendance coloniale
en France, tandis que la Révolution et l’Empire se concentrent dans une dimension continentale et nationale.
En 1830 la conquête de l’Algérie signale le retour de la France sur le théâtre de la politique internationale
après une phase de repli succédant aux défaites napoléoniennes.
L’impérialisme entame son essor avec Napoléon III : l’essor national est désormais impossible en Europe,
saturée d’Etats-nations émergeants, revendiquant vigoureusement leur territoire. La puissance française opte donc pour
la politique coloniale : Nouvelle-Calédonie, Sénégal, Indochine sont autant de portes du futur second empire colonial
de la planète, mais sans la rigueur mercantile des choix britanniques. La Troisième république développe cette
politique à partir de 1885 et Jules Ferry, connu davantage pour ses lois scolaires, fut le champion d’un impérialisme
très entreprenant. Le contexte national et économique avait changé: après la défaite face à l’Allemagne en 1870, la
jeune République devait relever le défi de sa capacité à incarner la nation ; d’autre part le développement d’une
révolution industrielle tardive mais réelle supposait des matières premières et des débouchés ; enfin , les croyances
dans la force du progrès, l’instruction et l’autosatisfaction à l’heure du modernisme occasionnait une forme de
racisme : désormais il ne s’agissait plus de sauver les âmes par l’évangélisation mais d’apporter le savoir, le progrès
…C’est « le fardeau de l’homme blanc » décrit par Rudyard Kipling qui porte le poids de sa mission civilisatrice des
peuples « mi-enfant », « mi-démon ». Contrairement aux britanniques, les Français émirent l’idée toute théorique-
détendre la nation à l’empire, en vertu de leurs principes de citoyenneté….
3– L’émigration dans une planète colonisée à la fin du XIX°siècle.
L’impérialisme européen ne fut pas le seul et pas le premier, mais sa force et surtout son expansion
économique et humaine demeurent inégalées.
Le destin de la planète en fut changé : en mois de trois cents ans, toutes les terres inconnues avaient été
explorées, inventoriées et pour la plupart conquises par les expéditions militaires. Ainsi il ne restait que l’Ethiopie
libre en Afrique en 1914. Après le passage des explorateurs et savants vinrent les expéditions militaires,
l’anéantissement des cultures locales et des populations, puis vinrent les colons. L’entreprise d’acculturation entamée
avec la colonisation d’annexion et de pillage était ainsi parachevée par l’implantation de populations européennes,
réclamant leur droit sur des terresle souvenir des populations locales était à peine conservé. Dans la plupart des
cas, aucune mixité ethnique ne fut encouragée, la spoliation des terres demeura le lot commun, jusqu’à l’extrême de la
politique d’apartheid en Afrique du Sud. Les terres furent confisquées sous prétexte que les sociétés indigènes ne
connaissaient pas la propriété.
Seule l’Asie échappa au peuplement européen, ainsi que les zones tropicales répulsives, exploitées seulement
par l’implantation de mines et plantations.
La colonisation de peuplement ne freina pas l’acculturation des peuples par un modèle politique de
domination, une conversion religieuse avec les missionnaires-, et le démantèlement des structures des sociétés
locales.
4 – La colonisation et les tensions internationales au début du XX°siècle.
L’impérialisme de la fin du XIXe siècle est inséparable du nationalisme guerrier et xénophobe qui se
développe en Europe, bien loin des aspirations révolutionnaires de 1789 à une Europe des peuples, libres mais pas
antagonistes. Le nationalisme n’est plus synonyme de démocratie et d’aspiration libérale sur le modèle romantique des
révolutions de 1830 et 1848. Non seulement parce que des nations émergeantes sont aux mains d’institutions
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