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9. Bien que la structure économique de la région MOAN se prête mal à une généralisation,
certaines caractéristiques se retrouvent dans la plupart des pays. En premier lieu, la région MOAN
est, du point de vue économique, l’une des plus divisées au monde. Les échanges commerciaux
entre les pays arabes sont très faibles ; 10 % seulement des échanges totaux de marchandises
s’effectuent avec d’autres pays de la région MOAN. En dépit de la progression des échanges
commerciaux avec d’autres régions du monde depuis quelques années, le niveau de l’intégration
commerciale régionale stagne au niveau atteint dans les années 60. (Adeel Malik, 2012) Cette
situation représente presque l’antithèse de celle qui prévaut dans les régions émergentes plus
dynamiques de la planète, telles que l’Asie de l’Est, où le niveau d’intégration des échanges
commerciaux n’a fait que se renforcer lorsque la région a décollé. Cet exemple est instructif.
10. Les obstacles aux échanges commerciaux au sein de la région MOAN sont multiples. C’est
ainsi que l’absence de structure intégratrice, la corruption mesquine et la mauvaise administration
des frontières peuvent coûter très cher à ceux qui les franchissent avec des marchandises et que,
de l’avis de certaines entreprises, tous ces efforts n’en valent tout simplement pas la peine. Les
barrières douanières et non douanières minent davantage encore les efforts d’édification d’un
marché régional. Dans six pays de la région MOAN, les tarifs douaniers avoisinent 12 %, soit le
double de ceux des économies émergentes asiatiques, et ces restrictions aux échanges
commerciaux s’avèrent extraordinairement onéreuses. De nombreuses entreprises sont moins
concurrentielles que celles n’appartenant pas à la région MOAN, précisément parce qu’elles sont
handicapées par ces charges et ne disposent pas des économies d’échelle dont bénéficient les
négociants internationaux d’Asie. Les firmes asiatiques sont pour leur part bien intégrées aux
niveaux régional et mondial, ce qui implique une âpre concurrence et un marché d’une taille
considérable, deux conditions essentielles à la réduction des prix et au renforcement de la qualité.
11. Parmi les importateurs nets de pétrole de la région, la Jordanie et la Syrie étaient les deux
plus importants exportateurs de biens vers l’Egypte et la Tunisie, mais ces exportations vers des
pays voisins ne généraient que 5 % de leur PIB. L’Algérie et le Maroc entretiennent des relations
commerciales très peu développées, signe révélateur du faible niveau des échanges
commerciaux entre les pays de la région. La seule exception concerne naturellement les
producteurs locaux de pétrole et de gaz qui vendent leur énergie aux importateurs nets de la
région. La Libye, par exemple, ne vend pratiquement rien d’autre que de l’énergie dans la région.
12. Ce faible niveau d’échanges commerciaux est particulièrement surprenant lorsqu’on sait que
la région MOAN est en réalité géographiquement très bien située pour faire du commerce. Elle se
trouve au carrefour de l’Europe, de l’Afrique et de l’Asie ; la grande majorité de sa population vit
non loin de la mer, dans des zones urbaines où les emplois sont les plus nombreux et le climat
agréable. Ces caractéristiques, auxquelles s’ajoutent des voies de navigation aisément
accessibles et bon marché, confèrent à la région des avantages naturels indéniables d’un point de
vue commercial. Le problème réside dans leur exploitation insuffisante. Même si les tarifs
douaniers officiels sont parfois peu élevés, les barrières non douanières, incluant un véritable
embrouillamini de réglementations, constituent un formidable obstacle aux échanges
commerciaux internationaux. On dit souvent que la région a « de solides frontières et des
économies fragiles ». (Adeel Malik, 2012) Le fait que plusieurs pays dépendent presque
exclusivement des exportations énergétiques ne fait qu’exacerber le problème. Il existe certes une
Grande zone arabe de libre-échange (GZALE - GAFTA), mais sa portée est très limitée.
(Dabrowski, 2011)
13. Les conséquences de ce faible niveau d’intégration sont très préjudiciables. Elles
empêchent les firmes de bénéficier d’un marché couvrant l’ensemble de la région et des
avantages de productivité engendrés par la concurrence. Qui plus est, à la suite des turbulences
de l’année dernière, l’accès au financement du commerce s’est considérablement réduit, les
fournisseurs exigeant le paiement immédiat des expéditions. L’UE demeure un marché essentiel
pour les pays méditerranéens en développement, mais elle ne devrait enregistrer qu’une