l’étymologie, relève davantage de la saveur : il s’agit de goûter. La sagesse n’est pas
uniquement intellectuelle : elle est art de faire, art de vivre, capacité de savourer la vie, de
contempler ce qui est ; elle met du sel dans l’existence. La philosophie est littéralement «
l’amour de la sagesse », le choix de vivre dans l’amour de la vérité.
Autrefois, on mettait un peu de sel sur la langue des enfants que l’on baptisait, pour les initier
à la saveur que l’Esprit met dans nos vies. La sagesse est en effet le tout premier des dons de
l’Esprit, avant l’intelligence et la connaissance (cf. Is 11, 2), que l’évêque appelle sur ceux à
qui il confère la confirmation.
« Les dons supérieurs »
Par ses possibilités naturelles, l’homme peut préciser un certain nombre de vérités et tendre à
une vérité plus ample, plus complète, mais cela n’est fait accessible qu’à un petit nombre,
avec des risques d’erreur. La Révélation nous propose, dans la mesure où nous nous ouvrons à
ce message venu d’en haut, d’accéder à la vérité tout entière (cf. Jn 16, 13). Pour cela, un
certain renoncement à une sagesse purement humaine s’avère nécessaire.
Saint Paul écrit aux Corinthiens : « Pour moi, quand je suis venu chez vous, frères, je ne suis
pas venu vous annoncer le mystère de Dieu avec le prestige de la parole ou de la sagesse.
Non, je n’ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié. Ce dont
nous parlons, c’est d’une sagesse de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée, celle que, dès avant
les siècles, Dieu a par avance destinée pour notre gloire. Car c’est à nous que Dieu l’a révélé
par l’Esprit ; l’Esprit en effet sonde tout jusqu’aux profondeurs de Dieu. Nul ne connaît ce qui
concerne Dieu, sinon l’Esprit de Dieu. » (1 Co 2, 1 2.7.10 11)
La vérité par l’amour et pour l’amour
Le même Apôtre écrit plus loin : « Aspirez aux dons supérieurs » (12, 31), pour introduire son
hymne à la charité : « Quand j’aurais le don de prophétie et que je connaîtrais tous les
mystères et toute la science, quand j’aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter les
montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien. » (13, 2) La connaissance sans l’amour ne
vaut rien : « On ne voit bien qu’avec le cœur ; l’essentiel est invisible pour les yeux », dit le
Renard au Petit Prince. Ce Paul qui a été introduit au troisième ciel (cf. 2 Co 12, 2) où il
entendit des paroles ineffables (12, 4), cet homme plein de faiblesses qui a la connaissance
reçue des mystères (cf. Ep chap. 3) nous met dans la juste perspective : « Nous voyons à
présent, dans un miroir, en énigme, mais alors ce sera face à face (mieux que pour Moïse dans
la tente de la Rencontre – cf. 2 Co 3, 13 ). A présent, je connais d’une manière partielle ; mais
alors je connaîtrai comme je suis connu. » (1 Co 13, 12) Il y faut surtout l’amour : « Si
quelqu’un aime Dieu, celui là est connu de lui. » (8, 3)
A cela fait écho le disciple que Jésus aimait dans sa première lettre : « Bien aimés, aimons
nous les uns les autres, puisque l’amour est de Dieu et que quiconque aime est né de Dieu et
connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est Amour. » (4, 7 8) La
Bonne Nouvelle de l’Evangile se résume en ces quelques mots : « Dieu nous aime ; il nous
donne de répondre à son amour ; il nous donne de nous aimer. »
Jésus le dit clairement à Nicodème : « Celui qui fait la vérité vient à la lumière afin que soit
manifesté que ses œuvres sont faites en Dieu. » (Jn 3, 21) La vérité, la lumière ne sont
pleinement accessibles que dans l’amour, dans la proximité et le rayonnement du Dieu qui est
Amour.