
Les relations entre nos mouvements se sont un peu refroidies après la mort de Célestin et, surtout, après le 
«mai 68 italien ». A cette époque-là, se produit une très grave coupure dans le mouvement italien : les 
jeunes, surtout les camarades qui ont étudié à l'Université et refusent n'importe quel pouvoir constitué, ne 
veulent  plus  de  Président  et  de  l’organisation  primitive  du  mouvement,  jugée  trop  bureaucratique  et 
centralisée. Pendant des stages dans la Vallée d'Aoste, les piémontais (un groupe de jeunes instituteurs de 
Turin) demandent la fin de l'époque du Président et une nouvelle gestion, plus démocratique et participative, 
du mouvement (1969/70). 
 
En même temps, les jeunes  instituteurs proposent la constitution de  groupes d'étude sur les  nouvelles 
disciplines et la nouvelle épistémologie qu'ils ont appris à l'université : on travaille sur les mathématiques 
nouvelles, sur la linguistique, sur les sciences humaines, l'anthropologie et surtout sur la perception, la 
communication, l'éducation corporelle, la musique, le théâtre, la nouvelle histoire,...tous les domaines du 
savoir que la réalité italienne, très fermée à cause du blocage que le fascisme et les gouvernements d'après de 
la guerre avaient imposé au renouvellement culturel et scientifique de l'école et de la culture. 
 
On constitue donc, à la suite d'une espèce de « flambée scientifique », des chantiers nationaux de recherche 
dans les différentes disciplines. Ces groupes doivent faire des propositions d'expérimentation aux groupes 
territoriaux, se rencontrer pour recueillir les expériences et vérifier le succès des différentes hypothèses de 
travail dans de stages d'été. 
 
C'est à ce moment là que j'entre, avec d'autres jeunes camarades de Venise (on constitue un nouveau 
groupe), dans le mouvement, après avoir obtenu le concours, en commençant mon activité d'instituteur 
(1971). J'avais lu, en étudiant pour le concours, le livre de Mario Lodi « Il paese sbagliato » , qui est le récit 
de la vie et des activités d'une classe au long de 5 ans de primaire (1965-1970). J'en avais été fortement 
frappé. Je me suis dit : « voilà ce que je cherche ! C'est pour ça que mes efforts de remplaçant, pour quelques 
jours dans des classes, ratent toujours. Il me manque une conception de l'école, des enfants, de la relation, 
des propositions qui concernent vraiment la vie et les besoins profonds de ces êtres qui ne sont là ni pour 
m'écouter ni pour répéter ce que je leur propose ».  
 
J'ai alors la chance de travailler dans une école à plein temps (40 heures par semaine, 2 instituteurs dans 
chaque classe) et d'y rencontrer des instituteurs qui ont participé par la suite avec moi à toutes les batailles, 
les succès et les échecs du mouvement pendant presque 30 ans.  
 
De plus, je participe à l'activité des groupes d'étude du MCE (surtout langue et anthropologie) au long de 
plusieurs années. J'y ai beaucoup appris et j'y ai aussi contribué aux recherches, en expérimentant différents 
rôles et fonctions, comme l'école même devrait permettre d'expérimenter.  
 
Mais dans le mouvement il y a une sorte de malaise : il semble que, plus l'on approfondit les disciplines, plus 
on trahit le vrai esprit Freinet,  qui s'occupe de l'individu dans sa globalité.  On cherche des remèdes à la 
compartimentation des discipline, qui est l'une des pires dérives de notre école. Plus les élèves  grandissent, 
moins ils savent mettre en relation, avoir un regard global, transférer d'un domaine du savoir à un autre. Les 
modèles  « curriculaires », desquels  s'inspirera à  un  moment donné  le  mouvement  (Bruner,  les  Projets 
S.C.I.S.  et  Nuffield,  Ausubel,  Boom,  De  Landsheere…),  ne  satisfont  pas  les  exigences  de  garder  une 
relation étroite entre les émotions et la connaissance, l'affectivité et  les aspects cognitifs. L'intégration des 
enfants porteurs de handicap dans les classes où sont tous les autres enfants donne un sérieux coup à ces 
formes de saucissonnage des disciplines.  
 
Déjà dans les années 70, dans le mouvement, circule une hypothèse « curriculaire » mais qui essaie de 
joindre toutes les variables dont s'occupe l'éducation : organisation de la classe, styles d'apprentissage et 
d'enseignement,  outils  et  techniques,  concepts  à  apprendre,  motivation,  besoins  formatifs,  conception 
socio-politique, évaluation,…