Escale au Sultanat d’Oman – émission du 12 mars 2010 Reportage sur la ville portuaire de Salalah 1. Repérage Cette émission nous amène à la découverte du sultanat d’Oman. Trois carnets de route nous permettent de découvrir les différentes régions de cet État pétrolier, soulignant ainsi la diversité des réalités économiques et sociales ainsi que des paysages. 2. Synopsis de l’extrait Cet extrait s’inscrit dans un panorama des activités économiques développées dans le sultanat en prévision de la fin de l’exploitation du pétrole. Il présente successivement deux projets d’aménagement touristique à différentes échelles : le premier concerne une île désertique sur laquelle des travaux ont commencé pour accueillir quelques dizaines de touristes extrêmement fortunés ; le second se rapporte à la mise en place d’une vaste station balnéaire intégrée près de la ville portuaire de Salalah en plein développement, sur une côte aux villages épars animés par une économie traditionnelle. 3. Les enjeux scientifiques – En Oman, on prépare l’après-pétrole Au sud-est de la péninsule arabique, occupant une position stratégique à l’entrée du golfe Persique, le sultanat d’Oman reste un pays relativement méconnu. Producteur modeste de pétrole en comparaison de ses voisins du golfe Arabo-persique, son développement économique atteste pourtant d’incontestables réussites sous l’impulsion du sultan Qabus Ibn Said, au pouvoir depuis 1970. Après un coup d’État contre son propre père, le sultan a entrepris une modernisation rapide du pays. Commercialisé depuis 1964, le pétrole est, comme pour ses voisins du CCG (Conseil de coopération du Golfe), le moteur de la croissance d’Oman. L’IDH est passé de 0,487 en 1975 à 0,846 en 2009. La manne pétrolière, bien que les réserves soient limitées et difficilement accessibles, a permis le développement de grandes infrastructures. Si le pétrole représente encore près de 30 % du PIB – et le gaz naturel près de 10 % –, l’épuisement de ses réserves prévu dans quinze à vingt ans est anticipé depuis les années 1980. Oman cherche donc à diversifier ses activités, en particulier vers l’industrie et les services. Pour cela, le pays cherche notamment à renouer avec sa tradition maritime . En effet, depuis la Haute Antiquité, grâce à sa situation géographique, Oman est en contact commercial avec les civilisations de la Mésopotamie, de la Perse et de l’Inde, jusqu’à l’Afrique orientale. C’est ainsi que le port de conteneurs de Salalah inauguré en 1999, au sud du pays, tente de renouer avec sa fonction de pôle de redistribution, en concurrence avec ceux des émirats du Golfe. Ce « hub » portuaire, constitué en zone franche, attire de nombreux investisseurs étrangers et constitue un relais important pour l’après- © SCÉRÉN-CNDP, 2010 1 pétrole, en même temps qu’un pôle d’aménagement du territoire censé décongestionner Mascate, la capitale. – Le tourisme, outil de diversification de l’économie À l’instar de Doubaï, Oman cherche aussi à développer des activités touristiques. Ses potentialités ne sont pas négligeables : 1,5 million de touristes ont profité de son milieu naturel, ses vestiges historiques ou ses hôtels en 2007. La stabilité politique du pays encourage les investisseurs étrangers à miser sur cette nouvelle destination. Si Mascate et sa région restent le principal pôle touristique, construisant de gigantesques îles artificielles comme The Wave ou Blue City (voir sitographie), Salalah, tout au sud du pays, connaît un développement rapide. Ses températures clémentes et ses wadis verdoyants accueillent les vents de mousson. Destination très prisée des touristes saoudiens depuis de nombreuses années, Salalah accueille déjà des touristes très fortunés et tente aujourd’hui d’attirer une clientèle internationale plus diversifiée, comme en témoigne l’ouverture prochaine d’une nouvelle station du Club Med. Le géant mondial, pionnier du tourisme « all inclusive », s’offre en effet pour son 60e anniversaire un village haut de gamme à Salalah Beach, à une vingtaine de kilomètres de l’aéroport. « Le premier du Club dans la péninsule arabique, seule partie du monde où le Club n’était pas encore implanté », selon Henri Giscard d’Estaing son PDG, qui vient de signer un accord avec la société Muriya Tourism Development, détenue à 30 % par le sultan et à 70 % par le groupe égyptien de tourisme et de télécommunications Orascom. Le site proposera des villas et appartements de luxe, deux parcours de golf, deux marinas… – Le Club Med, un tourisme responsable ? Le Club Med s’est doté depuis 2005 d’une Direction du développement durable qui a identifié dix axes prioritaires sur les plans environnemental, social et sociétal. On peut retenir la promotion de la diversité et de la multiculturalité (une charte du touriste responsable incite les clients au respect des hôtes, de la culture, de l’environnement et de l’économie locale), la contribution au développement local (les trois-quarts des personnels sont recrutés sur place), le développement des achats écoresponsables, l’amélioration de la gestion des déchets, les économies d’eau et d’énergie… Pour autant, si les efforts sont manifestes, le bilan peut prêter à contestation. L’extrait du reportage présenté ici met en évidence la difficulté de concilier les intentions et les actions. L’uniformisation des paysages bétonnés, les atteintes à la faune et à la flore marines, la consommation d’énormes quantités d’eau exigée par l’entretien des golfs ou des piscines, par exemple, laissent perplexe. – Un contexte social particulier Comme dans les autres pays du Golfe, le développement économique repose en grande partie sur une main-d’œuvre immigrée (65 % de la population active) dont les conditions de vie et de travail ne sont pas toujours optimales – même s’ils semblent moins discriminés en Oman qu’à Doubaï par exemple, où des phénomènes de ségrégation sévère sont à l’origine de grèves qui tournent parfois à l’émeute. Originaires pour leur grande majorité du sous-continent indien, les travailleurs immigrés profitent de l’extraordinaire croissance économique de ces pays et les transferts de fonds vers leurs pays d’origine constituent une manne financière non négligeable, sans compter qu’ils bénéficient d’une formation utile à leur retour. C’est le cas par exemple dans les installations du port de conteneurs de Salalah, où ils © SCÉRÉN-CNDP, 2010 2 effectuent toutes les tâches manuelles, tandis que les Omanais monopolisent les activités de commandement et de gestion. À Salalah Beach, les ouvriers sont surtout Égyptiens, sans doute à la fois en raison de l’origine du principal investisseur immobilier et de la volonté récente des États du Golfe de diversifier le recrutement de leur main-d’œuvre vers des pays arabes, pour pouvoir mieux l’intégrer. – Le tourisme durable Comme toute activité humaine, le tourisme est un facteur de transformation des territoires, des sociétés et de l’environnement. Dès la Conférence internationale de Rio (1992), une approche globale du tourisme à l’échelle mondiale a permis d’entamer la réflexion autour d’une politique touristique maîtrisée et de la recherche d’un équilibre – un optimum – entre plusieurs paramètres naturels, socioéconomiques et culturels, permettant la sauvegarde du territoire et de la société d’accueil. Selon la Charte du tourisme durable (Organisation mondiale du tourisme, 1995), le développement touristique « doit être supportable à long terme sur le plan écologique, viable sur le plan économique et équitable sur le plan éthique et social pour les populations locales ». Bien que leur mise en œuvre se heurte à de nombreuses difficultés, ces principes orientent de plus en plus les choix du secteur touristique, d’autant que leur prise en compte est un argument de vente de plus en plus porteur auprès de la clientèle du « Nord ». Des initiatives comme les parcs nationaux, les parcs naturels régionaux ou encore le développement de l’écotourisme sont des exemples probants des efforts menés pour concilier les intérêts économiques, sociaux et environnementaux. Bien souvent pourtant, les discours des acteurs du tourisme se limitent à des déclarations d’intention et la recherche d’un équilibre entre politiques commerciales et politiques conservatoires reste un vœu pieux. 4. Des pistes pour le collège – 1re suggestion Notions abordées : littoral touristique, aménagement, mobilité humaine, IDH, développement durable. Capacités abordées : utilisation d’un site de géolocalisation, description d’une image à l’aide de vocabulaire géographique, lecture et analyse de tableaux statistiques et de graphiques à dominante économique. Ce travail s’insère dans les nouveaux programmes de 5e et plus particulièrement dans le thème 1, « Les enjeux du développement durable ». Il permet de présenter les enjeux d’un aménagement à des fins touristiques afin d’introduire la notion de développement durable. Dans un premier temps, les élèves seraient invités à localiser, à l’aide de Google Earth, les deux sites sur lesquels des aménagements touristiques sont prévus. Ils devraient alors décrire les caractéristiques des lieux qu’ils observent en distinguant les particularités du milieu naturel et de l’activité humaine. La question serait alors posée, après visionnage de l’extrait, des transformations engendrées par les aménagements touristiques. La réflexion sera affinée en amenant les élèves à souligner les conséquences paysagères (infrastructures, bétonnage…) et surtout environnementales (déséquilibre des écosystèmes, usage massif de ressources en eau). © SCÉRÉN-CNDP, 2010 3 La problématique pourrait ainsi être posée : « Pourquoi les Omanais acceptent-ils des projets touristiques de ce type malgré les menaces environnementales qu’ils présentent ? » Les élèves seront donc amenés à réfléchir au développement social d’un pays comme le sultanat d’Oman, à mettre en évidence les acteurs et les choix politiques à l’origine des évolutions constatées. Pour répondre à ces questions, on pourra fournir aux élèves des documents présentant l’apport économique du tourisme à Oman et dans d’autres pays du Sud (Égypte, Kenya…). Les tableaux statistiques et les graphiques (voir sitographie et le site de l’Organisation mondiale du tourisme) seront privilégiés. Les réponses peuvent être résumées dans un schéma : Politique Le sultanat d’Oman, riche producteur de pétrole, encourage le développement du tourisme en prévision de l’épuisement de ses ressources . Économie Social Politique Investissements dans de :grands Progrès de l’IDH. Le Sultanat d’Oman, riche producteur de pétrole, encourage projets d’infrastructures. Évolution desle sociétés traditionnelles. Accueil de grandes entreprises du tourisme en prévision de l’épuisement Immigration d’œuvre non qualifiée en développement dedesesmain ressources. multinationales. provenance du sous-continent indien et des pays Développement des secteurs arabes, et de cadres et ingénieurs en immobilier, touristique, industriel. provenance des pays du Nord. Environnement Risque d’épuisement des ressources en eau. Déséquilibre des écosystèmes dans les espaces à faible occupation humaine. En conclusion de ce travail on aura donc introduit la notion de développement durable à partir des enjeux du tourisme durable. On insistera bien auprès des élèves sur la nécessité d’un développement économique bénéficiant aux populations locales, respectueux des équilibres environnementaux. © SCÉRÉN-CNDP, 2010 4 – 2e suggestion Notions abordées : développement durable, ressource naturelle, aménagement, conflit d’usage. Dans la partie III du programme de géographie, « Des hommes et des ressources », l’extrait, notamment sa deuxième partie, peut servir d’amorce à une réflexion sur la gestion des ressources en eau. Après visionnage de la vidéo, et en faisant un arrêt sur le moment où un plan du vaste village de Salalah Beach est présenté par son principal promoteur, les élèves repèrent les besoins en eau liés à l’activité touristique. La remarque concluant l’extrait, « il faudra bien puiser l’eau quelque part », est isolée pour servir de question et d’introduction à une réflexion sur les origines des ressources en eau. 5. Des pistes pour le lycée Notions abordées : développement durable, littoralisation, aménagement touristique, conflit d’usage, ressource naturelle. Capacités mises en œuvre : construction d’un diagramme, synthèse d’informations extraites d’un document vidéo, comparaison de discours provenant de différents acteurs du tourisme. Ce travail s’insère dans le programme de 2de, et particulièrement dans le thème concernant les littoraux. L’extrait permet en effet de travailler sur les modifications paysagères et environnementales des espaces littoraux induites par l’implantation d’activités humaines – ici le tourisme. Il peut être de plus un moyen d’introduire la notion de développement durable. On peut débuter en proposant aux élèves une phrase issue de la Charte du tourisme durable (Organisation mondiale du tourisme, 1995) et qui précise que le tourisme, pour être durable, « doit être supportable à long terme sur le plan écologique, viable sur le plan économique et équitable sur le plan éthique et social pour les populations locales ». Après avoir expliqué cette phrase en classe, il paraît possible de construire avec les élèves le fameux schéma du développement durable, posant le tourisme durable à l’intersection des trois cercles. Après avoir posé les conditions pour que le tourisme soit durable, les élèves sont invités à visionner l’extrait du documentaire en cherchant à répondre à la question suivante : « Les projets d’aménagement touristique du sultanat d’Oman participent-ils à la mise en place d’un tourisme durable ? » Pour répondre à cette question, on pourra conseiller aux élèves de séparer leurs arguments en trois colonnes : économie, société (bien que les arguments sur ce point apparaissent plutôt dans la suite du documentaire) et environnement. Des documents concernant le poids économique du secteur touristique omanais peuvent aussi leur être fournis afin d’étayer leurs réflexions. Lors de la mise en commun des réponses, il paraît intéressant de faire repérer aux élèves la distorsion entre le discours rassurant tenu par les promoteurs touristiques interrogés dans l’extrait étudié et les menaces qui pèsent, notamment sur les écosystèmes et les ressources en eau, esquissées par les commentaires du documentaire. Cet exercice peut permettre aux élèves de constater la pluralité des discours symbolisant la pluralité des acteurs de ces aménagements touristiques. Pour cela, après le visionnage de cet extrait, il peut être intéressant de mettre en parallèle l’étude de sites Internet de différents acteurs du tourisme omanais. On pourra par exemple comparer celui d’un promoteur © SCÉRÉN-CNDP, 2010 5 touristique comme le Club Méditerranée et celui d’organisations de défense de l’environnement ou de promotion du tourisme durable (des liens sont disponibles sur le site www.tourisme-solidaire.org). 6. Bibliographie et sitographie – Sur le tourisme durable ARNOULD P., VEYRET Y. (dir.), Atlas des développements durables, Autrement, 2008. LOZATO-GIOTART J-P., Géographie du tourisme, de l’espace consommé à l’espace maîtrisé, Pearson Education, 2008. Y. VEYRET (dir.), Dictionnaire de l’environnement, A. Colin, 2007. Y. VEYRET, Le Développement durable, Éditions Sedes, 2007. « Le tourisme autrement », Alternatives Économiques – Pratique, hors série n° 33, mars 2008. La Charte du tourisme durable est consultable sur le site http://tourisme-solidaire.org/ qui contient notamment une rubrique « ressources en ligne » avec des articles sur les enjeux du tourisme dans une optique de développement durable. Le site du Club Méditerranée, www.clubmed-corporate.com/, présente notamment une rubrique « développement durable » qui relate les objectifs et les actions du groupe dans ce domaine. – Sur Oman LAVERGNE M., DUMORTIER B. (dir.), L’Oman contemporain, État, territoire, identité, Karthala, 2002. PIOLET V., « Les émirats et royaumes arabes : les travailleurs migrants au pays des free zones », Hérodote, n° 33, 2009. Compte rendu d’un débat avec B. DUMORTIER, Le Sultanat d’Oman, nouveau gardien du Golfe ?, consultable sur le site des cafés géographiques : www.cafe-geo.net/sommaire.php3. – Sur le tourisme en Oman Un article sur le développement touristique en Oman : www.lejournaldelevasion.be (taper « Mascate et ses environs » dans la barre de recherche). « Sultanat d’Oman, sur les traces de Sinbad », Grands Reportages, n° 338, février 2010. Le site du ministère du Tourisme d’Oman : www.omantourisme.com/. Le site de l’île artificielle « The Wave » : www.thewavemuscat.com. Le site de l’île artificielle « Blue City » : www.almadinaazarqa.com/. Auteurs de l’accompagnement pédagogique Célia Parmentier, collège Louis-Pasteur, La Celle-Saint-Cloud. Sevan Ananian, collège Georges-Braque, Neuilly-sur-Marne. Coordination pédagogique : Jean-Max Girault, IA-IPR d’histoire géographie dans l’académie de Créteil. © SCÉRÉN-CNDP, 2010 6